DU MÊME AUTEUR Histoire de l'Afrique des origines à nos jours, Payot, Paris, 1956, 404 p. (épuisé). 1959 ; 2e édition revue et mise à Histoire du Togo, Berger-Levrault, du maréchal Lyautey jour, 1962, 437 p. Prix du centenaire (Académie des Sciences d'Outre-mer). 1960 ; 3e édiHistoire des peuples de l'Afrique noire, Berger-Levrault, Prix tion, 1963, 715 p. Prix Broquette française). (Académie Georges Bruel (Académie des Sciences d'Outre-mer). Histoire de l'Afrique des origines au XVIe siècle, Payot, 1962, 453 p. Les Bassari du Nord Togo, Berger-Levrault, 1962, 156 p. Histoire du Dahomey, Berger-Levrault, 1962, 568 p. Prix Pierre Gentil (Académie française). Nouvelles Éditions Latines, Paris 1963,159 p. Togo Nation-pilote, Histoire du Congo-Léo, 1963,336 p. Berger-Levrault, Le Dahomey, P. U. F. (Que sais-je ?), 1965, 128 p. en colloboration avec Pierre Alexandre et J. C. Froelich, Les populations du Nord-Togo, P. U. F., 1963,199 p. Histoire de l'Afrique des origines à nos jours, Marianne Cornevin, Petite Bibliothèque Payot, Paris, 1964, 423 p. des Kabré depuis Frobenius, Revue du Jacques Delord, Connaissance monde non chrétien n° 59-60, juillet-décembre 1961.
BIBLIOTHÈQUE
HISTORIQUE
ROBERT CORNEVIN Administrateur en chef de la France d'Outre-Mer Docteur ès lettres Chef du Centre d'Études et de Documentation sur l'Afrique et l'Outre-Mer Membre de l'Académie des Sciences d'Outre-Mer
HISTOIRE
DE
L'AFRIQUE TOME L'AFRIQUE
II
PRÉCOLONIALE:
1500-1900
22 CARTES Avec la collaboration
de MARIANNE
PAYOT, 106, boulevard
PARIS Saint-Germain
1966
CORNEVIN
et d'adaptation Tous droits de traduction, de reproduction réservés pour tous pays. © Copyright1966 by Payot,Paris.
INTRODUCTION
Le premier volume de l'Histoire de l'Afrique porte le sous-titre Des origines au XVIe siècle. Nous pensions pouvoir mener le lecteur, jusqu'à nos jours, dans un second et dernier volume. Mais Vampleur de la documentation nous a incité à ne traiter ici qu'une période plus limitée de 1500 à 1900. Le troiavec le sous-titre : L'Afrique précoloniale la décosième volume concernera donc exclusivement la colonisation, Il lonisation et les problèmes de la nouvelle Afrique indépendante. comprendra en outre un index général pour la totalité de l'ouvrage. 1500 s'apLes dates 1500 et 1900 sont évidemment approximatives. plique en réalité au quart de siècle écoulé entre 1492 et 1518 pendant lequel de nombreux changements politiques ont eu lieu à l'intérieur de l'Afrique et sur ses côtes, à l'heure même où débutait la prodigieuse expansion économique et culturelle de l'Europe occidentale. du Le premier Le tournant de ce volume intitulé chapitre XVIe siècle constitue en fait une introduction à l'ensemble de la période 1500-1900. Il envisage les divers éléments qui font du XVIe siècle un tournant historique majeur pour le continent africain tout entier. Parmi eux il faut considérer l'entrée dans l'Histoire de l'Afrique inconnue des Arabes au Moyen Age, c'est-à-dire de la quasi-totalité de l'Afrique noire à l'exception de la bande sahélo-soudanaise et de la Côte orientale. Cette Afrique sans écriture réclame des techniques historiques particulières et présente une spécificité, une singularité que nous tenterons de mettre en valeur. La première partie traite de l'Afrique précoloniale au sud du Sahara considérée du point de vue africain. C'est volontairement que nous lui avons accordé une place peut-être disproportionnée par rapport à l'ensemble de l'ouvrage et c'est volontairement aussi que nous avons traité de façon inégale ses différents chapitres. En règle générale chaque fois qu'il existe un ou plusieurs livres en français ou en anglais sur le sujet, nous y renvoyons le lecteur, tandis que nous insistons sur les régions où nos seules sources ont été des articles de détail publiés dans des revues à tirage généralement limité en anglais, en allemand ou en français. Le nombre de ces études est considérable et la majeure partie est parue depuis 1960. Nous n'avions donc pu les utiliser pour la rédaction de notre Histoire des Peuples de l'Afrique Noire et jusqu'à ce jour aucun autre ouvrage d'ensemble n'a paru en quelque langue que ce soit. Aussi avons-nous pensé que le temps était venu de tenter une nouvelle synthèse en faisant cette fois-ci un choix délibéré parmi les peuples africains et en les envisageant sous un angle proprement hisainsi définies, torique. Dans chacune des sept provinces historiques
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INTRODUCTION
du continent, de l'intérieur nous sommes systématiquement parti essayant dans la mesure du possible de remonter à l'origine des grands et culturels et nous refusant à refaire une fois ensembles linguistiques de plus cette histoire « épidermique » de l'Afrique seule connue jusqu'ici du grand public cultivé. Nous avons été ainsi amené à avancer plusieurs hypothèses nouvelles dont certaines seront peut-être contestées, alors que de nouvelles découvertes viendront sans doute en confirmer d'autres. La deuxième partie envisage les relations de l'Europe avec l'Afrique noire aux XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles, action des Portugais, des HollanDanois, Français, Anglais. Tous ont pratiqué la dais, Brandebourgeois, traite qui est étudiée ici dans son ensemble jusqu'au début du XIXe siècle. du XVIe siècle à l'interLa troisième partie (l'Afrique septentrionale vention européenne) nous conduit jusqu'en 1830 pour l'Algérie, 1881 pour la Tunisie, 1882 pour l'Egypte, 1912 pour le Maroc et la Tripolitaine. La quatrième partie concerne les rapports de l'Europe et de l'Afrique au XIXe siècle et envisage successivement l'évolution de la traite et du commerce légal sur les côtes atlantiques et orientale, les missions chrépolitiennes, les explorations jusqu'à Brazza (1881), l'implantation la Conférence de Berlin (1884-85), enfin tique européenne jusqu'à le Scramble pour le partage et la conquête de l'Afrique. La date de 1900 choisie comme terme chronologique de ce deuxième volume est aussi approximative que celle de 1500. Elle correspond en gros à L'instalcoloniales européennes à l'intérieur lation effective des administrations des cadres territoriaux définis entre 1884 et 1891 par des accords conclus en Europe, sans que les Africains puissent jamais donner leur opinion sur les modalités du partage colonial. Du point de vue de l'histoire des Africains aux destiafricaine en général, cette non-participation nées de leur propre pays constitue, à notre avis, le fait essentiel du « tournant du XXe siècle ». Après l'écrasement des principaux noyaux de résistance entre 1891 et 1900, l'histoire des Africains sera complètement éclipsée par celle des Européens en Afrique; et ceci pendant toute la période coloniale, et dans toute l'Afrique (sauf en Ethiopie) même dans certaines régions comme le Sénégal, la Gold Coast ou la Nigeria de l'ouest où les Français et les Anglais avaient, pour diverses raisons, permis à de jeunes élites africaines ou métisses d'occuper des Entre 1890 et 1910 cette politique libérale postes de responsabilité. sera abandonnée au profit des Européens qui pourront séjourner plus des conditions longtemps et plus nombreux par suite de l'amélioration sanitaires. Les différents points de vue sous lesquels nous avons successivement envisagé la période 1500-1900 nous ont conduit à grouper en fin de volume les tableaux au lecteur de chronologiques qui permettront rattacher entre eux les événements survenus dans chacune des grandes régions historiques du continent africain et dans le reste du monde.
CHAPITRE LE TOURNANT
PREMIER DU XVIe
SIÈCLE
Nous avons souligné dans le premier tome (1) le nombre et l'importance des événements survenus entre 1492 et 1518. Nous les rappellerons brièvement ici et insisterons un peu plus sur leurs conséquences. d'introduction dans ce chapitre Nous développerons également, à la période historique aujour1500-1900, la question très débattue à l'étude d'hui de l'utilisation de « documents historiques » particuliers des peuples sans écriture, en premier lieu la tradition orale, en second éventuelle lieu sa vérification l'anthropologie par l'archéologie, Nous terminerons en essayant et la linguistique. physique, l'ethnologie à de mettre en valeur quelques caractères imprimant spécifiques une irréune originalité, de l'Afrique noire précoloniale l'histoire du public ductible singularité qui a échappé jusqu'ici à l'ensemble européen. I. CONSÉQUENCES DES ÉVÉNEMENTS ENTRE 1492 ET 1518
SURVENUS
Ce ne sont pas les événements survenus dans l'intérieur de l'Afrique et pourtant les changements politiques qui sont les plus importants sont nombreux dans ce quart de siècle n'est et leur groupement En 1493 Citons-les par ordre chronologique. pas sans signification. Mohammed Touré évince du trône de Gao le fils du Sonni Ali Ber et fonde la dynastie des Askia sous laquelle l'empire musulmane son « siècle d'or » (1493-1591). En 1504 l'ancien Sonrhay connaîtra royaume chrétien d'Aloa devient après la conquête du noir Amara Dounqas le royaume musulman du Sennar. 1504 est également l'année de la mort du grand Maï Ali Dounama (1472-1504) qui a rétabli l'ordre dans l'ancien royaume du Kanem-Bornou en proie à l'anarchie depuis un siècle et demi. En 1506 Nzinga Mbemba devient le roi chrétien du Congo sous le nom d'Alfonso Ier. Sur les côtes, dès 1488 le Portugais Dias a dépassé Barthélémy le cap Tormentoso a préféré nommer du nom que son souverain hautement symbolique de Bonne Espérance. Cet espoir de découvrir (1)p. 9 et p. 249-250.
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enfin la route maritime des Indes ne sera cependant réalisé que dix ans plus tard avec Vasco de Gama qui, parti de Lisbonne le 8 juillet 1497, atteindra Calicut le 18 mai 1498 grâce au fameux pilote arabe Ibn Madjib engagé à Malindi (actuel Kenya). En mai 1500 Diego En 1501 et en 1502 la découverte des Diaz découvre Madagascar. d'éviîles Ascension et Sainte-Hélène va permettre aux navigateurs entre les iles du Cap-Vert et le Cap. ter les escales continentales en Afrique, La période des découvertes commencée portugaises — rappelons-le — en 1415 après Ceuta est donc terminée en 1502. Elle est suivie par un essai de conquête et d'implantation durable, du Maroc entre 1505 (Agadir) d'une part sur la frontière atlantique et 1514 (Mazagan), d'autre part sur la côte orientale (Somalie, Kenya, Tanzanie, Mozambique) entre 1505 et 1509, période au cours de laquelle les Portugais se montrent particulièrement agressifs. Entre 1505 et 1512 on assiste également à une prise de possession espagnole de la côte méditerranéenne entre Ceuta et Bougie. En avril 1517 l'Egypte devient une province de l'empire turc astreinte à payer un tribut annuel en argent et en produits agricoles, en 969, ce qu'elle n'avait plus fait depuis l'arrivée des Fatimides En 1518, le corsaire années auparavant. cinq cent quarante-huit arrivé à Alger en 1515, se déclare vassal Barberousse, Kheyreddin du sultan de Constantinople. Tous ces événements survenus sur les côtes africaines entre 1497 et 1518 marquent une attitude agressive de la part de l'Europe par de la période précérapport à l'Afrique, ce qui change complètement dente où les relations entre l'Europe et l'Afrique, rarissimes avant été généralement les voyages portugais, avaient d'un empreintes non sentiment de sympathie tout au moins envers les populations Il est probable cependant musulmanes. aurait qu'une collaboration si certaines coïncidences n'avaient pu s'instaurer chronologiques pas joué un rôle aussi désastreux pour l'Afrique que favorable pour l'Europe occidentale. Nous voulons parler d'une troisième catégorie d'événements survenus loin de l'Afrique pendant ce quart de siècle 1492-1518 et dont les conséquences « africaines » ne sont pas encore Le 12 octobre 1492 Christophe Colomb atterrit épuisées aujourd'hui. dans l'une des îles Bahamas, le 27 octobre à Cuba, quelques jours la petite plus tard dans une grande île qu'il nomme Hispaniola, A son retour Espagne et qui s'appellera plus tard Saint-Domingue. en Espagne le 15 mars 1493 il est salué comme le découvreur des Indes occidentales qui seront baptisées en 1507 seulement du nom d'Amérique (1). Le pape Alexandre VI, d'origine espagnole, accorde à l'Espagne le 4 mai 1493 les « terres fermes et îles découvertes ou à découvrir vers l'Inde, à, cent lieues à l'ouest de la dernière des Açores», tout ce qui est à l'est étant réservé au Portugal. Devant les réclamations du Portugal, le traité de Tordesillas signé le 7 juin 1494 (1) Par Martin Waldseemüller, un typographe de Saint-Dié qui imaginera de donner au nouveau continent le nom d' un des compagnons de Colomb nommé Amerigo Vespucci.
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des terres repousse de 170 lieues vers l'ouest la ligne de démarcation En conséquence la terre découverte par espagnoles et portugaises. hasard en 1500 par le Portugais Pedralvarez Cabral, dérivé vers l'ouest Cette terre où l'on trouve à la suite d'une tempête, sera portugaise. en grande quantité du bois de teinture appelé bois brésil sera nommée le Brésil. une première importation Dès 1501 les rois catholiques autorisent afin d'éviter le travail des mines de nègres africains à Hispaniola de nègres, mais provenant aux Indiens. En 1505 nouveau transport comme en 1501 du Portugal où ils avaient été amenés à la fin du de l'île portugaise de XVe siècle. C'est en 1510 que le gouverneur l'ordre de recruter dans le Sâo Thomé (1) reçoit du roi d'Espagne royaume du Congo deux cents esclaves destinés à être vendus aux Caraïbes. 1510 Parmi toutes les dates que nous avons données jusqu'ici, du point de vue de doit être considérée comme la plus importante est alors instituée l'Afrique. La traite des nègres vers l'Amérique de substanofficiellement avec un système de taxation rapportant tiels revenus au trésor espagnol et au fournisseur Les portugais. au Portugal esclaves noirs employés jusqu'alors en petite quantité ou dans les îles du Cap-Vert et de Sâo Thomé vont devenir l'élément à l'exploitation des richesses américaines : économique indispensable de canne à sucre. extraction des métaux précieux ou plantations La traite s'accompagnera de tels bénéfices à tous les échelons qu'elle de toutes les nations de l'Europe attirera bientôt des aventuriers et sévira sur une très grande partie de l'Afrique atlanatlantique de la ponction ainsi réalisée tique. L'importance démographique est appréciée de façon variable (2), mais ses conséquences négatives sur les plans économique et culturel apparaissent évidentes. Les conséété les collective africaine ont peut-être quences sur la mentalité plus pesantes et les plus durables. Dans un raccourci saisissant et l'historien noir Joseph Ki-Zerbo a su les exprimer bouleversant, mieux que nul autre quand il nous dit : « l'ébranlement psychologique dû à la traite, la peur devenant une des dimensions de l'âme nègre » (3). La conquête des Indes occidentales a donc joué un rôle capital pour la façade atlantique de l'Afrique ; de même la conquête de l'empire portugais de l'océan indien entre 1502 et 1515 (année de la mort du vice-roi d'Albuquerque) va provoquer une véritable révolution des itinéraires commerciaux, mettre fin à la domination économique des navigateurs arabes et détruire ainsi directement les foyers de civilisation arabo-perse de la côte orientale et indirectement la vigueur en l'excluant du commerce des Indes. économique de l'Egypte Si nous essayons de voir la signification de l'ensemble historique des événements survenus en Afrique ou hors d'Afrique entre 1492 et 1518, nous constatons qu'ils ont pour caractère commun d'avoir (1)Infra, p. 47-49. Etude de la traite dans son ensemble,p. 360-369. (2)lnfra, (3)J. KI-ZERBO,Le monde africain noir, 1963, 95 p., p. 26.
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entraîné un déclin culturel et économique très rapide dans des régions très diverses. A côté du rôle négatif joué pour l'Afrique noire par les conquêtes portugaises et espagnoles, il faut souligner que l'installation des Turcs dans l'Afrique méditerranéenne (Egypte 1516, Alger 1518) n'a pas non plus apporté d'élément culturel ou religieux positif et qu'elle entraînera au contraire à partir du XVIIe siècle le dévelopà du Tchad sur la voie transsaharienne de la traite pement Tripoli. avec le début d'une Ce déclin de l'Afrique coïncide exactement Il va en découler de l'Europe occidentale. expansion prodigieuse africaine une évolution divergente ; l'écart entre les civilisations et européenne, minime au Moyen Age, va s'aggraver à un tel point de normal et naturel du XIXe siècle trouveront que les Européens 1492 africain. L'année de la quasi-totalité du continent s'emparer différente de la fin bien la signification symbolise particulièrement du Moyen Age pour l'Europe et pour l'Afrique. En janvier la prise à l'Islam de Grenade par les chrétiens espagnols enlève définitivement vers l'Europe. En octobre, la découafricain tout espoir d'expansion ouvre un champ immense aux appétits euroverte de l'Amérique ouverture pour l'Europe ; déclin péens. Fermeture pour l'Afrique, pour l'Afrique, éveil et « Renaissance » pour l'Europe : telles seront les conséquences des Grandes Découvertes. celle-ci apparaît d'ailleurs excesComme toute vue d'ensemble, sivement tranchée et schématique. Il ne faut pas imputer à l'Europe tous les malheurs de l'Afrique. On note dans le courant du XVIe siècle de nombreux facteurs internes de décadence qui vont s'ajouter aux facteurs extérieurs. Ils sont malheureusement très mal connus. Nous en citerons seulement dont l'étude sera reprise quelques-uns si brillante au suivants. plus en détails aux chapitres L'Ethiopie Moyen Age mettra plus de trois siècles à, se remettre du coup porté par l'invasion des pasteurs nomades Galla entrés sur son territoire des cannibales à, partir de 1522. L'invasion Jaga dans le royaume du Congo en 1569 sera une cause certaine de déclin aggravé d'autre part par les règles de succession au trône de San Salvador. L'invasion des cannibales Zimba venus du Zambèze détruira en 1587 ce qui restait de Kilwa après les attaques du début du siècle. portugaises Enfin, en 1591, l'expédition marocaine détruira la belle civilisation fleurissant dans le royaume Sonrhay de Gao. négro-islamique On peut donc vraiment considérer le XVIe siècle comme un tournant historique majeur dans l'histoire générale de l'Afrique. Cette conception paraît d'autant plus justifiée que nous disposons à, partir du XVIe siècle de documents différents de ceux que nous historiques avions utilisés au Moyen Age. Il n'y aura plus après Léon l'Africain (début XVIe) de grands voyageurs de langue arabe. Après les Tarikh racontant la gloire du royaume de Gao, il n'y aura plus de grandes écrites que dans les deux seuls grands états chroniques nationales demeurés indépendants : l'Ethiopie et le Maroc. Par contre nous documents disposons à, partir du XVIe siècle de nombreux d'origine
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orale qu'on peut rarement faire européenne et aussi de la tradition discuter remonter au-delà du xvie siècle. Nous allons maintenant la valeur de ces nouvelles sources documentaires. II. LES I. Les documents
NOUVELLES
SOURCES
HISTORIQUES
portugais.
extrême des textes portugais Nous verrons par la suite l'importance Sans eux nous ne de l'Afrique noire précoloniale. dans l'histoire ou le royaume du Congo, pour ne saurions rien sur le Monomotapa Nous nous bornerons citer que les deux exemples les plus frappants. ici à exprimer quelques « critiques de crédibilité » élémentaires qui ont échappé cependant à beaucoup de bons auteurs persuadés que valable est le texte écrit. On admire à le seul document historique juste titre que le contour de l'Afrique ait été dessiné de façon très exacte dès le début du XVIe siècle, mais on oublie trop souvent de l'intérieur des régions supposées à des cartes actuelles comparer connues des Portugais au XVIIe et au XVIIIe siècle. La grande idée le Royaume était d'atteindre de base des découvertes portugaises du Prêtre Jean et ses richesses aussi fabuleuses que mythiques. On le crut toujours beaucoup plus rapproché de la côte atlantique qu'il ne l'était en réalité. De même sur certaines cartes, le Monomotapa est presque limitrophe du Congo et de l'Angola. On place toutefois entre les deux une bande plus ou moins large occupée par ces fameux le royaume du Congo en 1569 en venant de Jaga qui envahirent l'Est. Ces Jaga, certains auteurs comme Cavazzi (1) n'hésiteront pas à les assimiler aux Zimba venus du Zambèze en 1587 pour détruire les villes de la côte orientale. Ce sera le point de départ d'un extraordinaire circuit accompli soi-disant par ces Zimba qui seraient devenus des Jaga. Assimilation invraisemblable, reprise pourtant dans les construcétonnés de retrouver par certains archéologues tions en pierre sèche des principautés de l'Angola Ovimboundou (fondées aux XVIIe et XVIIIe par des Jaga), les mêmes décorations en chevrons qu'à Naletale et Dhlo-Dhlo en Rhodésie. C'est oublier un peu vite qu'on retrouve ces mêmes décorations en chevrons sur murs de pierre sèche, dans bien d'autres pays du monde qui n'ont manifestement jamais eu aucun rapport avec l'Angola ou la Rhodésie (2). Comme nous le verrons, la plupart des grands historiens portugais n'ont jamais mis les pieds eux-mêmes en Afrique. Étant données les idées proprement délirantes qui circulaient en Europe au XVe siècle sur les choses et les gens d'Afrique (3) on est étonné de trouver rela(1) CAVAZZI, Istoria descrizionedigli tre regni Congo, Angola, Matemba, 1687. (2)Par exemple sur les murs néolithiques du « camp de Cora » près de Saint-Moré à 15 km au nord d'Avallon (Yonne). cite à la page 39 dans L'image du Sud-Est africain dans la litté(3) W. G. L. RANDLES rature européenneau XVIe siècle, Lisbonne, 1959, un passage tiré d'une lettre du roi
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dans les textes portugais tivement peu de grosses invraisemblances — servi de base à la quasidu XVIe siècle qui ont — rappelons-le au sud de l'équateur aux totalité de ce qui a paru sur l'Afrique XVIIe et XVIIIe siècles. En fait les innombrables plagiaires et copieurs ont rajouté chacun leur grain de sel pour des écrivains portugais satisfaire un public friand d'exotisme mais désireux cependant de retroudétails familiers chez ces peuples africains aux moeurs ver quelques C'est ainsi que leurs lecteurs ont pu admirer les palais singulières. à colonnades antiques et les toges à la romaine du Monomotapa (1) moins éloignées de la réalité — ou encore des vues — certainement de la ville de San Salvador, toute pareille à une capitale européenne du temps. habitués à dissocier dans les peintures Nous sommes parfaitement le premier plan représentant une scène de l'histoire sainte et le second italien ou un intérieur un paysage hollandais, plan représentant alors qu'il en est de même du peintre. Admettons contemporains de la littérature africaniste avant l'époque des pour les illustrations sinon dans un but et évitons de prétendre, grandes explorations la vérité historique. polémique, qu'elles représentent 2. Les autres documents
européens.
Les autres documents européens, hollandais, anglais, français, etc. la côte du golfe de Guinée à partir du concernent essentiellement XVIIe siècle. Les textes les plus anciens sur cette côte sont évidemment mais il ne faut pas perdre de vue que leurs aud'origine portugaise, teurs n'avaient Ainsi pas le droit de divulguer certaines indications. de Situ Orbis rédigé par Duarte Pacheco Pereira vers l'Esmeraldo 1506-1508 apporte une foule de renseignements intéressants sur la côte : il dit en particulier que le rio Formoso, actuelle rivière Bénin, s'éloigne vers le nord jusqu'à plus de cent lieues en amont. Une lieue valant 5920 mètres, l'auteur affirme donc l'existence d'un portugaise très grand fleuve qui se jette dans l'Atlantique par le rio Formoso (2). On se demande alors pourquoi les Européens ont attendu l'année 1830 pour découvrir qu'il s'agissait du Niger. Tout simplement parce que Esmeraldo de Situ Orbis n'a été publié en portugais qu'en 1892, soit près de quatre cents ans après sa rédaction ! La « période hollandaise » sur les côtes africaines se situe entre 1610 et 1680 et coïncide avec le développement d'un intérêt proprement scientifique pour l'Afrique. La Description de l'Afrique de Dapper parue à Amsterdam, en hollandais en 1668, en version française en 1669, est considérée comme la première tentative de desgénéralement cription objective. Cependant Dapper n'a jamais été en Afrique luimême et a travaillé sur les rapports d'un certain Samuel Blomert Manuel do Portugal : « Beaucoup de porteurs d'or à Sofala ont quatre yeux, deux devant et deux derrière. » (1)Voir la gravure reproduite dans « la galerie historique » du Musée des Arts africains et océaniens à Vincennes. (2) Infra, p. 273-276.
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des XVIIe dont on ignore tout. Ce que nous avons dit des illustrations à son oeuvre et il nous et XVIIIe siècles s'applique particulièrement la ville de Bénin paraît difficile de suivre les auteurs qui représentent africaine. au XVIIe siècle comme une Amsterdam Mais Au XVIIIe siècle nous disposons d'une masse de documents. intérêt historique. Ils sont écrits un véritable bien peu présentent des hommes cultivés et se par des négriers, qui sont très rarement accessoirede considérations soucient essentiellement commerciales, se contredisent africaine. Leurs renseignements ment de politique (1), même quand les auteurs ont été sur place. Que penfréquemment des « on dit » ser de la véracité de leurs écrits quand ils transmettent sur les royaumes de l'intérieur ? Ainsi plusieurs textes parlent au début du XVIIIe siècle des amazones du royaume du Dahomey qui auraient eu le sein droit coupé comme celles de la mythologie grecque (2). La est exact : les rois du Dahomey moitié seulement du renseignement employaient des femmes soldats, mais elles ne furent jamais mutilées de cette façon. certaine3. Les sources islamiques après le XVIe siècle apporteront ment beaucoup à la connaissance du passé africain quand elles auront toutes été répertoriées et étudiées scientifiquement. Un gros effort est en cours depuis quelques années au Soudan nilotique (archives de la Mahdiya), au Soudan tchadien en arabe, en peul (manuscrits ou en haoussa sur le Jihad d'Ousman dan Fodio) et au Soudan nigérien (3). Nous en parlerons en étudiant la bande sahélo-soudanaise et nous contenterons de faire une remarque générale sur la valeur toute relative qu'il convient d'accorder aux généalogies en pays islamisé. Beaucoup de traditions d'origine qui font venir d'Arabie (ou de l'Est sans autre précision) l'ancêtre fondateur, sont manifestement arrangées. Un exemple typique est celui des Yorouba que le pasteur Samuel Johnson présenta dans son « Histoire des Yorouba » comme étant venus d'Arabie et d'Egypte, ces origines lui paraissant beaucoup plus « nobles » qu'une origine locale. Il semble bien prouvé aujourd'hui que le fond primitif du peuple Yorouba descend du peuple de Nok, luimême issu des Néolithiques sahariens chassés vers le sud au cours du deuxième millénaire avant J.-C. par l'assèchement du Sahara. 4. La tradition orale. L'utilisation de la tradition orale en tant que document historique valable est toute récente. Elle est d'ailleurs loin d'être acceptée par tous les historiens de formation classique. Ainsi elle n'apparaît pas au sommaire du copieux volume publié en 1961 sur l'Histoire et ses méthodes (4). Le chapitre consacré à « l'Histoire sans textes» par A. Leroi(1)Par exemple l'Anglais Adams et le Français Landolphe estiment respectivement la populationP.de la ville de Benin vers 1790 à 15 000 et 80 000 habitants! MERCIER,Civilisations du Bénin, Paris, 1964, p. 288. (3)V. dans Les manuscrits historiques arabo-africains, BIFAN, n° 3-4, 1965, V. MONTELLE, (4) p. 530-542. (4) Encyclopédiede la Pléiade, 1771 pages, 35 collaborateurs.
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Gourhan n'envisage pas la valeur historique de la tradition orale, mais plutôt l'aide que peuvent et doivent apporter l'ethnologie et la d'une « histoire fondée sur la totalité des préhistoire à l'établissement manifestations de la vie matérielle, sociale et psychologique des collectivités ». Depuis le premier Congrès d'Histoire Africaine tenu à Londres en de tous 1953, la tradition orale se trouve au centre des préoccupations ceux qui se sont intéressés à l'histoire des peuples sans écriture. Elle a été largement utilisée par D. Westermann dans son Histoire de l'Afrique au sud du Sahara parue en 1953. Nous-même l'avons suivi dans cette voie et avons consacré à la tradition orale plusieurs pages dans notre Histoire des Peuples de l'Afrique Noire parue en 1960. D'autre part l'historien de l'Afrique centrale, J. Vansina (1), à récemment publié une étude, la plus complète parue à ce jour, sur la tradition orale. Nous y renvoyons le lecteur pour qu'il s'y retrouve entre les éléments très divers et très nombreux de cette tradition orale : généalogies, listes dynastiques, mythes d'origine, textes rituels, certaines histoires anecdotiques et certains proverbes faisant référence à une situation historique (2), etc. J. Vansina démontre qu'il est possible de leur appliquer une méthode de critique historique rigoureuse. Il reste cependant de nombreux écueils inhérents au mode de collecte de la tradition orale. Le plus important est sans doute celui des relations psychologiques existant entre l'enquêteur et l'enquêté. Suivant la plus ou moins grande faculté qu'aura l'enquêteur de s'intégrer mentalement à la société observée, il obtiendra ou trop ou trop peu d'informations. Dans le premier cas la forme même qu'il aura donnée à ses questions entraînera des réponses «téléguidées», répondant plus aux préoccupations de l'enquêteur qu'à celles de l'enquêté. L'exemple de Marcel Griaule est maintenant bien connu. Dans le second cas l'informateur africain se retranchera derrière le mur du secret religieux réservé strictement à une petite catégorie d'initiés (3). La plupart du temps, en effet, l'Européen et l'Africain ont des conceptions radicalement différentes de l'Histoire et de la Vérité historique. Il existe un malentendu à la base. Nous développerons cette idée dans les pages suivantes concernant la spécificité de l'histoire africaine et nous l'illustrerons par de nombreux exemples dans le chapitre consacré à l'Afrique noire précoloniale. Il est inutile d'insister sur l'importance d'une connaissance parfaite de la langue locale. Les interprètes employés nécessairement par les tout premiers chercheurs du XIXe siècle ont très souvent présenté une De la tradition orale : essai de méthodehistorique, Musée Royal de (1) J. VANSINA, l'Afrique centrale, Tervuren 1961, 147 p. cite p. 122 le proverbe yorouba : «Méditela mort de Gaha et améliore (2) J. VANSINA ta vie ». Gaha fut brûlé vif par la population de la ville qu'il administrait, en raison de ses exactions. (3) Même des enquêteurs africains appartenant à la même ethnie que l'enquêté se sont heurtés à ce mur du silence. Voir à ce sujet le remarquable récit historique de DJIBRILTAMSIR NIANE,Soundiata et l'épopéemandingue, Paris, 1960.
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fausse des traditions de peuples aussi inconnus image complètement Ce qui est grave, c'est que dans cerpour eux que pour l'Européen. obtenus à, cette époque ont été publiés tains cas les renseignements et souvent répandus dans un assez large public par l'intermédiaire des missions qui éditèrent de petites brochures Ainsi au historiques. de l'Akwapim furent recueillies Ghana les traditions par le missionnaire Christaller de la mission de Bâle à Akropong entre 1853 et 1858. Carl Christian Reindorf les publia à Bâle en 1895. Aujourd'hui parmi hautement une population tout au moins au niveau des scolarisée, écoles de brousse tenues en langue vernaculaire, il est impossible à de recueillir d'autres renseignements l'enquêteur que ceux qui ont été comme « parole d'Évanimprimés et sont considérés depuis longtemps gile ». Nous avons longuement étudié du Togo dans notre Histoire l'exemple des traditions Evhé recueillies par le pasteur Spieth et publiées à Berlin en 1906. Nous avons pu démontrer sur place, en utilisant la tradition orale locale et l'archéologie, se rapque certaines assertions portant à la partie du pays Evhé inconnue du pasteur Spieth étaient fausses. Mais c'est la tradition recueillie par Spieth qui a fourni la base des manuels scolaires d'histoire des Evhé publiés en langue evhé et c'est celle-là qui est réabsorbée dans la tradition orale actuelle. On peut multiplier les exemples de cette « contamination scolaire » : au Malawi, au Gabon, au Cameroun nord même où Lebeuf signale un cas significatif observé lors de deux passages succcessifs à Goulfei (l). 5. Les disciplines
complémentaires.
La tradition orale, dans les meilleurs cas, est toujours terriblement Elle s'attache à, justifier la position sufragmentaire. principalement dans une société donnée. périeure du groupe ou des groupes dirigeants Les centres d'intérêt sont donc : les mythes se rapportant principaux à la création, les migrations de d'origine du groupe et les conditions l'installation dans une région donnée ; en outre, certaines innovations culturelles sont rapportées, souvent au nom d'un seul roi alors que manifestement elles se sont étendues sur plusieurs règnes. Dans tout cela il n'est jamais question de dates exactes. Les difficultés de la datation irriapparaissent particulièrement tantes au premier abord pour tout historien de formation classique. On est obligé très souvent de recourir à des longueurs de moyennes générations ou de durée de règne pour pouvoir seulement situer très grossièrement dans le temps les noms et les éléments fournis par la tradition orale. Naturellement ce mode de computation du temps laisse la place à de multiples causes d'erreur qui interfèrent, les règles de succession étant essentiellement auteurs variables. Les différents obtiennent de plusieurs siècles. Nous verrons parfois des variations les difficultés de datation des royaumes situés dans la bande subsou(1) The Historian in Tropical Africa, 1964, p. 251. R. CORNEVIN. — Histoire de l'Afrique, Tome II.
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et au Ghana (1), malgré les danaise, au nord-est de la Côte-d'Ivoire éléments chronologiques de référence fournis par les Tarikh ou la Chronique du Gondja. En Afrique centrale les seules dates précises sont orales d'une rencontre procurées par le souvenir dans les traditions plus ou moins lointaine avec des Portugais, ou encore par quelque providentielle éclipse de soleil. Le caractère fragmentaire de la tradition orale rend particulièrement nécessaire le recours à d'autres « documents historiques » fournis par la linguistique et surtout l'archéologie l'ethnologie, l'anthropologie, qui seule permet de fonder solidement des tentatives chronologiques. de ces disciplines annexes et particulièreNous verrons l'importance ment de l'archéologie en Ouganda et en Afrique du Sud. Paradoxalement, c'est en Rhodésie, dans le pays le plus riche en vestiges archéologiques, que la liaison entre la tradition orale et l'archéologie apparaît la plus difficile à établir. Nous arrivons ici à, un autre peut-être problème posé par l'utilisation de la tradition orale comme fondement de l'histoire politique d'un peuple. L'exemple du Monomotapa est particulièrement typique. Nous savons par des documents portugais s'étendant sur les deux qu'il a existé un royaume du Monomotapa tiers de la Rhodésie et la partie du Mozambique située entre les fleuves Zambèze et Sabi. La linguistique confirme l'existence d'un groupe de assez exactement à ce royaume du Molangues Shona correspondant nomotapa. L'archéologie procure la preuve d'une civilisation évoluée et relativement raffinée aux XVIIe et XVIIIe siècles, dans la portion sudouest (Naletale, Dhlo Dhlo, Khami, Zimbabwe) de ce Monomotapa, appelée royaume Boutwa. Malgré tous ces faits historiques positifs il extrêmement difficile de rétablir une tradition apparaît historique indigène dans la partie du Monomotapa fréquentée par les Portugais (2) jusqu'en 1698, et il est absolument impossible à, l'heure actuelle d'écrire une histoire du royaume Boutwa, qui ne fut pas fréquenté par les Portugais. Les Shona ont un passé historique ancien et passionnant, mais ils l'ont complètement oublié à la suite des invasions Ndebélé et Ngoni du début du XIXe siècle, précédant de cinquante ans l'installation des Européens. Il est très probable que le passé de beaucoup d'autres royaumes africains est, — plus encore que celui des Shona, — perdu à, jamais parce qu'ils ont tout simplement disparu à la suite d'une guerre, d'une de l'ethnie se sont intégrés épidémie et que les éléments subsistants à un autre peuple. III. — SPÉCIFICITÉ
DE L'HISTOIRE
AFRICAINE
Grâce à l'utilisation de techniques historiques l'hisparticulières, toire des peuples sans écriture existe. Dans certains cas privilégiés (1) Infra, p. 276 et 278. (2)Le royaume Karanga, sur lequel nous avons de très nombreux documents portugais. Voir infra, p. 71 à 88.
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elle peut même répondre plus facilement que bien des secteurs de l'histoire ancienne ou de l'histoire du Moyen Age, à cette définition de l'histoire totale réclamée de plus en plus par les historiens modernes, des la connaissance car elle fait intervenir presque obligatoirement et religieux qui réfacteurs économiques, sociaux, psychologiques gissent la vie de la société étudiée, la plupart de ces facteurs dépendes conditions dant eux-mêmes plus ou moins directement géographiques. Les contraintes climatiques régissent les genres de vie et définissent les deux grands types du nomade et du sédentaire. Ce dernier déplace à la resouvent ses terrains de culture et on sait que les migrations un élément essentiel dans la cherche de nouveaux terrains constituent Mais il ne faut pas exagérer les consétradition orale des collectivités. encore Certains auteurs prétendent quences de ces déplacements. aujourd'hui que le Noir d'Afrique est un être en perpétuelle migration incapable par ce fait d'accéder à une véritable civilisation. C'est oublier un peu vite que les éléments primitifs des grands noyaux linguistiques de l'ouest africain : Mandé, Yorouba, Haoussa, sont certainement du arrivés dans l'Afrique au moment du dessèchement tropicale Sahara néolithique, c'est-à-dire 2 000 ans avant J.-C. A côté des migrations de tout un groupe de familles, il faut souligner de jeunes des déplacements l'importance historique temporaires hommes abandonnant à chaque saison sèche, c'est-à-dire souvent pendant six mois de l'année, la terre qui est trop dure pour être travaillée. Contrairement à son homologue des zones tempérées qui reste toute sa vie rivé à ses champs l'été et à sa maison l'hiver, le cultivateur des savanes africaines est disponible chaque année pour s'enrôler au service d'un chef. Ce réservoir de soldats explique en partie le caractère éminemment guerrier et conquérant des royaumes de la bande soudanaise de l'Afrique qui ne présente d'autre part aucune difficulté de communications majeure sur un territoire entre Dakar immense s'étendant et Khartoum. Le climat a certainement une part plus grande dans le déterminisme historique en Afrique que le relief ou les voies de communication naturelle. C'est pourquoi nous avons marqué systématiquement sur toutes nos cartes les limites du désert, celles de la forêt dense ou encore certains isohyètes remarquables déterminant la limite entre cultures sans irrigation et élevage. Il est indispensable d'avoir présents à l'esprit ces éléments géographiques élémentaires avant de porter un jugement sur l'histoire ou l'absence d'histoire de certaines régions de l'Afrique. Il faut n'avoir jamais vécu en Afrique pour se figurer qu'on peut retrouver les mêmes conceptions philosophiques chez les nomades du désert, les habitants de la forêt dense qui ne voient jamais la lumière, ceux des savanes au soleil éblouissant et les habitants des pays tempérés. L'hiver des pays tempérés a joué un rôle essentiel dans les inventions, rôle que les citadins actuels habitués au confort du chauffage central ont tendance à oublier. Par ailleurs, il est indéniable qu'un des motifs des Croisades a été la recherche du soleil, de même
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de l'or a été l'une des causes des Grandes Découque la recherche vertes. de ce qui allait amener le Ce soleil et cet or, mobiles principaux si remarquable de l'Europe occidentale, économique développement les Africains noirs les avaient chez eux. Pourquoi leur reprocher alors, comme l'ont fait de nombreux auteurs, de n'être jamais sortis de leur continent et de n'avoir jamais franchi les mers sinon comme esclaves î On le comprend d'autant mieux quand on réfléchit à la sous-population du continent africain noir par rapport au continent ou même asiatique Il n'existait en Afrieuropéen. pour ainsi dire pas de pays surpeuplé on ne peut que au moment de la conquête coloniale. Même aujourd'hui guère citer que le Rwanda et le pays Ibo dans l'Est de la Nigeria dont la démographie excédentaire au pose des problèmes. Remarquons à la traite toute la responsabilité passage qu'il est excessif d'attribuer de la sous-population de l'Afrique, car le pays Ibo et le pays Yorouba dans l'ouest de la Nigeria ont sans conteste été parmi les plus touchés il a existé et il existe encore des surpopulapar la traite. Évidemment tions localisées qui sont à l'origine de migrations. Mais en règle générale quand un terrain déterminé a nourri un certain nombre d'habitants, il y a toujours de la place à côté ou plus loin, en Afrique et non en dehors du continent, éventuel. pour un surplus de population Les facteurs climatiques, écologiques, démographiques que nous venons d'exposer brièvement sont faciles à porter sur une carte. Les facteurs sont par contre beaucoup psychologiques plus difficiles à et ils tiennent une place percevoir pour un non-Africain cependant considérable dans l'histoire de l'Afrique. Nous dirons seulement quelet du sens communautaire africains. ques mots du conservatisme Le conservatisme afriest un des traits majeurs de la psychologie caine. Nous en citerons plusieurs exemples dans notre étude régionale de l'Afrique noire précoloniale. Il est évidemment à la fois la cause et la conséquence du très petit nombre d'innovations techniques intervenues le grand bouleverdans les sociétés africaines avant sement de la période coloniale. d'un ancêtre apparaît L'expérience et acquiert immédiatement une valeur beaucoup plus respectable si ses descendants vivent exactement dans les mêmes d'exemple conditions matérielles si de nouvelles invenque lui. Au contraire, tions ont transformé le mode et le rythme de la vie, l'aïeul apparaît au petit-fils comme un être qu'il devra dépasser. Il s'ensuit une différence essentielle dans la conception même de l'histoire européenne et africaine ; le jeune Européen de son apprend à l'école l'histoire tradipays. Le jeune Africain sent profondément par son éducation tionnelle qu'il est un simple maillon dans la chaîne des générations. Son intérêt est donc de nature religieuse, alors que pour l'histoire celui de l'Européen est le plus souvent de nature purement intellecne tuelle. L'Africain ne voit aucun inconvénient à ce que l'histoire soit pas datée et cataloguée de façon scientifique, puisque les relations avec les divinités de certains l'intépersonnages historiques ressent au premier chef. A quoi bon alors évoquer dans une trame
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continue les moments de l'histoire où il ne s'est rien passé de nouveau ou de merveilleux ? comme tant d'auteurs l'ont fait, Il faut se garder d'exagérer, africain comparé au dynamisme Nous sur l'immobilisme européen. verrons dans les prochains que le XVIe, le XVIIe et le chapitres comme des « siècles obscurs » où XVIIIe siècles, considérés généralement considérables dans la il ne s'est rien passé, ont vu des changements sociale et politique de nombreuses sociétés africaines. structure de constater, par exemple, la rapidité avec laquelle Il est remarquable » (maïs et manioc), introduites les plantes dites « américaines par les Portugais, ont atteint des régions très éloignées de la côte. D'autre part, des études récentes (1) sur les peuples de l'Afrique centrale qui aucun rapport avec l'extérieur avant la fin du n'ont eu pratiquement XIXe siècle, montrent à l'évidence que leurs conceptions politiques ont évolué et se sont différenciées de celles de certains voisins qui avaient la même origine. De même que le conservatisme africain s'oppose au sens de l'évolution historique inhérent à l'Européen, le sens communautaire africain s'oppose à l'individualisme européen. On a pu dire de ce dernier (2) qu' « il explique la révolution économique, l'expansion commerciale, l'extraordinaire essor du crédit, les premières victoires du capitalisme moderne ». Apparu à l'époque des grandes découvertes comme « la révolte de la conscience humaine contre les contraintes collectives » (2) l'individualisme a donc eu des conséquences historiques considérables. L'une d'entre elles peut apparaître comme secondaire, mais elle est essentielle du point de vue de l'historien de l'Afrique. La conscience de l'Européen du XIXe et du XXe siècles a été modelée par trois ou quatre siècles où l'individu a pu s'affirmer dans ou contre la société et où les questions ont progressivement économiques pris le pas sur la politique et la religion. Cet Européen comprend donc très difficilement le sens communautaire des sociétés africaines, fondé sur d'autres valeurs que l'argent et les biens matériels. D'où un autre malentendu à la base s'ajoutant à ceux mentionnés plus haut sur le sens qui doit être donné au mot Histoire. On sait que partout en Afrique noire précoloniale la terre était d'ailleurs pas à une collecpropriété collective. La terre n'appartient tivité humaine, mais aux esprits locaux. Le « chef de la terre » a pour rôle essentiel d'obtenir de ces derniers qu'ils favorisent une croissance harmonieuse de la collectivité humaine. Le chef de la terre n'est souvent pas le chef politique. Il est inamovible. Quand une nouvelle collectivité veut s'installer sur un terrain, elle doit obligatoirement obtenir l'autorisation du chef de la terre. Nous verrons entre autres l'exemple du Mani Vounda descendant du « chef de la terre» Amboundou établi dans le royaume du Congo lors de sa conquête par les Mouchi-Congo au XIVe. A la fin du XVIIIe siècle il tenait encore une Les anciens royaumes de la Savane, Tervuren 1965. VANSINA, (1) HAUSERet A. RENAUDET, Les débuts de l'Age moderne. p. 2 et 1, Paris, 1929, (2)
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au cours des cérémonies du couronnement des place prédominante chrétiens rois du Congo qui étaient pourtant depuis près de trois les chefs de la terre cents ans. Les traditions locales concernant donc d'utiles recoupements aux traditions concernant apporteront la famille du chef politique qui sont les mieux conservées parce qu'elles servent de justification à la hiérarchie sociale existante. Nous terminerons ce chapitre d'introduction en signalant la place à la psychologie et à la religion qu'il convient d'attribuer primordiale dans l'histoire africaine et le rôle secondaire des facteurs économiques. Cela surprendra sans doute les historiens modernes de formation sur européenne pour lesquels toute étude sérieuse doit s'appuyer des bases économiques, qu'on n'hésite pas dans certains cas à traduire dont l'emploi aurait effrayé, à juste par des équations compliquées titre, les historiens de la génération précédente. L'Histoire de l'Afrique, c'est « autre chose », ce sont d'autres documents historiques, c'est une autre conception de la vérité historique. Il ne servira à rien de rétablir la vérité des événements si l'on n'a pas pris la peine d'étudier la façon dont les contemporains ont réagi et plus encore le mécanisme par lequel certains événements, certaines personnalités —et pas d'autres— ont pénétré dans la conscience historique du groupe humain considéré.
PREMIÈRE NOIRE
L'AFRIQUE
PARTIE PRÉCOLONIALE
INTRODUCTION DÉFINITION
DE
SEPT
« PROVINCES
HISTORIQUES
»
en Afrique noire sont extraorLes progrès de la science historique dinairement depuis 1960, l'année des 17 indérapides, particulièrement cette première Pour rédiger partie nous avons disposé pendances. à la parution de détail postérieures d'un très grand nombre d'études noire (1960) et à celle du de notre Histoire des Peuples de l'Afrique premier volume de notre Histoire de l'Afrique (1962). Dans bien des cas nous pouvons aujourd'hui envisager l'histoire sous un éclairage complèentement nouveau. Cet éclairage est d'ailleurs appelé à se transformer core lorsque des historiens noirs auront pris la relève des Européens. de certaines C'est dire le caractère parties de cet exposé. provisoire Nous nous en rendons d'autant mieux compte que le laps de temps de des deux premiers volumes de quatre années écoulé entre la parution comme le passé loincet ouvrage a suffi pour que certaines questions tain du plateau rhodésien Bantou nous aient paru ou les migrations mériter d'être traitées entièrement ici, bien qu'elles n'appartiennent pas à la période considérée. Un sujet aussi vaste nécessite évidemment d'être divisé en chapitres. » apparaît très diffiMais l'établissement de « provinces historiques cile en raison du compartimentage des études déclenché par le partage colonial. On sait que l'invraisemblable territorial réalisé à découpage la fin du siècle dernier a scindé en deux ou même parfois en trois de nombreuses ethnies frontalières. On réalise moins bien qu'il a empêché •de voir les liaisons historiques à distance existant entre des pays placés sous l'autorité de puissances Par exemple si les coloniales différentes. de l'AFrançais ont eu conscience de l'unité de la bande soudanaise A. O. F., ils n'ont pas vu le rôle de frique contenue dans l'ancienne charnière tenu par la Nigeria du nord entre le Soudan nigérien (A. O. F.) et le Soudan tchadien (A. E. F.). Ainsi les Anglais ont perçu certaines ressemblances existant entre l'Egypte ancienne, la Nigeria et la Gold Coast (Ghana) mais ils n'ont en général pas compris l'influence du Sahara (français) sur la Nigeria (anglaise). De même dans l'Afrique au il était pratiquement impossible jusqu'à la parution sud de l'Equateur
Les provinces historiques de l'Afrique sud-saharienne I — Afrique centre-équatoriale centre-africaine Sud-Cameroun, (sauf le pays zandé), République Tchad (quart sud), Guinée espagnole, Gabon, Congo-Brazzaville (deux tiers nord), Congo-Léopold ville (moitié nord). II — Afrique centre-australe Congo-Brazza ville (tiers sud), Cabinda, Congo-Léopold ville (moitié sud), Angola, Zambie, Malawi, Rhodésie, Mozambique. — III Afrique australe Sud-Ouest africain, Betchouanaland, Mozambique (extrémité sud), Swaziland, Lesotho (ex Basutoland), République sud-africaine. IV — Madagascar et les Comores V — Afrique de l'est Soudan (cinquième sud-est), Ethiopie, Côte française des Somalis, Somalie, Kenya, Ouganda, Rwanda, Bouroundi, Tanzanie. VI — Bande sahélo-soudanaise Mauritanie (cinquième sud), Sénégal, Gambie, Guinée portugaise, République de Guinée (sauf extrémité sud-est), Sierra Leone (moitié nord, Côte d'Ivoire (moitié nord), Ghana (tiers nord), Haute-Volta, Mali (deux tiers sud), Niger (moitié sud), Tchad (un tiers), Togo (moitié nord), Dahomey (deux tiers nord), Nigeria (deux tiers nord), Cameroun (un tiers nord), Soudan (un tiers sud-ouest), vu — Bande guinéenne Sierra Leone, Libéria, Côte d'Ivoire (moitié sud), Ghana (deux tiers sud), tiers sud du Togo, Dahomey et Nigeria.
CARTE 1 : Limites des Provinces
Historiques.
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DÉFINITION DE SEPT PROVINCES HISTORIQUES
très récentes de trouver un centre d'intérêt commun entre d'études les Rhodésie-Nyassaland (an(portugais), l'Angola et le Mozambique et que l'existence glais) et le Congo (belge). Nous verrons pourtant du Congo a influencé de fades royaumes Louba-Lounda l'expansion de toute cette çon plus ou moins proche le développement historique région. » et prions le lecteur Nous avons défini sept « provinces historiques leurs limites géographiques de se reporter à la carte précisant et les Pour la plupart d'entre états actuels auxquels chacune correspond. de voies de communication elles, l'existence plus ou moins faciles est Aussi avons-nous essentielle à considérer du point de vue historique. marqué sur la carte les limites de la forêt dense parce que très généralement elle s'est opposée par sa masse impénétrable à la formation d'États ayant une existence historique. I. — Ainsi nous est apparue une première province que nous apet qui pourrait être appelée la région pelons Afrique centre-équatoriale de l'Afrique noire car aucun État important ne s'y est anhistorique les causes et examinerons en même développé. Nous en rechercherons Bantou primitives. temps le problème des migrations s'étend une région de savanes II. — Au sud de la forêt équatoriale relativement favorable aux communications à grande distance. Nous cette région des savanes sud-congoappelons Afrique centre-australe laises et zambéziennes au nord du Limpopo. Son unité historique vient de l'existence d'une voie commerciale transcontinentale établie par des Noirs dès le XVIIIe siècle et utilisée après eux par les deux pombeiros du XIXe siècle. portugais (1811) et les explorateurs III. — L'Afrique australe au sud du Limpopo constitue une unité du fait de l'arrivée relativement tardive des Bantou dans historique ce cul-de-sac de l'Afrique et du fait que c'est la seule région du continent où des familles européennes et non des hommes seulement sont venues s'installer dès le milieu du XVIIe siècle. IV. — Madagascar et les îles Mascareignes une place à occupent à l'Afrique et au monde de part en raison de leur double appartenance l'Océan indien. V. — L'Afrique de l'Est, à l'est du Nil et de la ligne des Grands Lacs jusqu'au nord du lac Nyassa et de la vallée de la Rovouma (frontière Tanzanie-Mozambique), est remarquable par le violent contraste existant entre les royaumes de sédentaires développés dans les régions d'altitude et les propices à une vie agricole et pastorale équilibrée immensités plus ou moins arides où des migrations à grande et à petite échelle se sont poursuivies début du XXe siècle. Nous exajusqu'au minerons en détail l'hypothèse hamitique qui obscurcit considérablement toute la littérature consacrée à l'Afrique de l'Est. VI. — La bande sahélo-soudanaise est la région historique par excellence de l'Afrique noire. C'est la seule à qui nous ayons pu consacrer plus de quelques lignes dans le premier volume de cet ouvrage a vu se développer les grands du Ghana, Mali, puisqu'elle empires Kanem au débouché des trois grandes voies transsahariennes. Elle
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continue dans la période envisagée ici à être la plus riche historiquement parlant. L'islam doit y être envisagé comme le facteur évolutif principal. VII — La bande guinéenne a une nette individualité et historique à la présence des Européens sur les côtes. Elle a culturelle antérieure de plus été très marquée par les activités européennes : traite du XVIe au XIXe siècle, missions, écoles au XIXe siècle.
CHAPITRE L'AFRIQUE
II
CENTRE-ÉQUATORIALE
Le fait de commencer une étude historique par la région que nous avons définie comme « sans histoire » surprendra peut-être certains. un problème valable pour la quasi-totaMais ce vide pose justement lité de l'Afrique noire, où — faute de documents écrits — la tradition orale constitue la source majeure de l'histoire. Or il existe un parallélisme certain entre la structure étatique des sociétés africaines et la orales. Comme le souligne L. V. Thovaleur historique des traditions mas (1) : « Le sens de l'histoire est plus développé, dans les sociétés à espouvoir central ou féodal fort, possédant des griots généalogistes, indiset douées d'un pouvoir d'expansion sentiellement inégalitaires de griots les groupes segmentaires, cutable. Inversement, dépourvus résolument à structure égalitaire... peu préoccupés par généalogistes, le goût du passé lointain et ignola conquête, n'ont que médiocrement » rent les récits qui s'y rapportent. ou artistique, il est Si l'on se place au point de vue philosophique certain qu'il est impossible de donner un jugement de valeur relative entre ces différents types de société. L'étude de la cosmogonie Dogon Mais ou celle des masques des peuples forestiers le prouve amplement. aux sociétés du pred'abord obligatoirement l'historien s'intéressera et inégalitaires, sont les seules à mier type, centralisées puisqu'elles sur leur passé lointain. La question qui se fournir des renseignements pose est donc de découvrir pourquoi tant de peuples noirs sont restés ou de nation, et pourquoi et comment étrangers à la notion d'État d'autres y ont accédé. La réponse est très souvent dictée par les conet c'est là que notre première « province histoditions géographiques net parce que les deux tiers rique » fournit un exemple particulièrement de sa surface sont occupés par la grande forêt équatoriale. Pour celui qui n'y a pas vécu, une photo ou même un film ne permettent pas de réaliser l'hostilité extrême que ce milieu naturel oppose à de l'espèce humaine. C'est peut-être la présence et à la multiplication son voyage le long de L'Arrouwimi (actuelle proStanley racontant vince de Stanleyville du Congo-Léo) à la recherche d'Emin Pacha en Il faut lire 1887-88 qui en a donné la description la plus évocatrice. d'étouffement ces pages sur la sensation hallucinante qu'il éprouva De quelques attitudes africaines en matière d'histoire locale, Commu(1) L. V. THOMAS, nication au Séminaire de Dakar 1961, in The Historian in Tropical Africa, p. 359.
L'AFRIQUE CENTRE-EQUATORIALE
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journées de marche où il ne voyait jamais la pendant d'interminables de résurrection ressentie en atteilumière du ciel, puis l'impression les prairies ensoleillées et accueilgnant, après des efforts surhumains lantes qui bordent à l'Ouest le lac Albert (1). A juste titre on admira son courage mais on ne pensa pas qu'un milieu naturel aussi inhospitalier une philosophie et des moeurs totalement devait fatalement engendrer les lecteurs des différentes de celles des pays tempérés. Aujourd'hui à juger sévèrement l'anarchie congojournaux européens si prompts ne se rendent laise qui a suivi l'indépendance pas compte que 48 % de la surface de l'ancien Congo belge sont occupés par la grande forêt, dites « tribales » des opposants des réactions ce qui explique beaucoup à un régime centralisé. au Avant les possibilités techniques apportées par les Européens XXe siècle, la seule voie de communication possible à travers la grande sur de très longues distances, les forêt était la route d'eau. Navigables affluents du Congo permettaient dans la très nombreux de pénétrer forêt, mais les relations entre les différents groupes humains établis sur leurs bords restaient limitées en raison de l'impossibilité d'accéder à une rivière voisine par voie terrestre. Trop occupés à survivre dans un milieu aussi inhospitalier ils ne songeaient d'ailleurs pas à aller conl'absence quérir le voisin. Tous ces facteurs expliquent parfaitement de tout État centralisé et les très faibles densités humaines dans les états africains actuels occupés en partie par l'immense bloc de la forêt : Sud-Cameroun, Guinée espagnole, Gabon, Congo-Brazzaéquatoriale ville et Congo-Léopold ville. Mais comment le vide historique du tiers septentrional expliquer de notre « province centre-équatoriale ». C'est un pays de savanes, corà l'actuelle à la partie mérirespondant centre-africaine, République dionale du Tchad et à l'extrême sud-ouest du Soudan. Un seul peuple, celui des Zandé, peut justifier de traditions ne remontant historiques d'ailleurs qu'au milieu du XIXe siècle. Tous les autres — et ils sont — ont une structure extrêmement nombreux et leurs segmentaire traditions ne remontent guère au-delà de la période de pénétration européenne (2). Il semble bien que la traite des esclaves au XIXe siècle soit la grande responsable, et des densités humaines si faibles de la très récente République Centre-Africaine (2 au km2), et de l'arrivée dans leur habitat actuel de groupes de fugitifs fuyant les négriers venus de la côte atlantique, ceux venus de Khartoum et ceux venus du lac Tchad. Cette région peu intéressante semble cependant pour l'historien avoir été d'une grande importance à l'époque des migrations Bantou primitives. Nous avons exposé dans notre « histoire du Congo-Léo » (3) et dans notre « Histoire de l'Afrique » de la petite bibliotèque Payot (4) une hypothèse basée d'une part sur la communication de M. Guthrie, STANLEY.Dans les ténèbres de l'Afrique, trad. Paris, 1890. (1)H.M. P. (2) KALCK,Réalités oubanguiennes, 1960. (3)1963, p. 25-28, carte p. 26. (4)1964, p. 104-107, carte p. 93.
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des langues bantou, au Congrès d'Histoire le spécialiste incontesté d'autre part sur les déAfricaine de Londres (1961) (1) et s'appuyant de J. Nenquin et J. Hiernaux dans le nord couvertes archéologiques d'un du Katanga (2) (3). Il semble qu'on puisse affirmer l'existence noyau Bantou primitif, localisé dans le nord de l'actuel Katanga, d'où les Bantou auraient diffusé à l'est, au sud et à l'ouest. Si ce point padéfinitivement raît maintenant acquis, la région d'origine et les mode dalités du voyage des Bantou primitifs n'ont pas été démontrées de travail. Les On doit se contenter d'hypothèses façon scientifique. des langues africaines travaux de Greenberg (4) (5) sur la classification ont mis en valeur la parenté existant entre les langues bantou et une Le nom Bantou partie des langues « soudanaises » de l'Ouest-Africain. inventé par est — il ne faut pas l'oublier — un terme linguistique, Bleek en 1860, et ne préjuge d'aucune unité sur le plan anthropologique. Il est donc certain que toute hypothèse bantou doit s'appuyer des linguistes. Encore faudrait-il que en premier lieu sur les travaux ceux-ci tiennent ; il nous parait compte des réalités géographiques impossible de suivre les auteurs qui voient se former un noyau d'orien pleine zone sylvestre ou ceux qui voient ces gine des Proto-Bantou et dans l'immensité s'enfoncer fameux Proto-Bantou gaillardement leur sans que les flèches indiquant de la forêt équatoriale, l'hostilité direction suivent les affluents du Congo, seule trouée possible. Pour tenir compte des différentes données linguistiques, préhistonous avons conclu à une région d'origine des riques et géographiques, située en gros dans le nord de l'actuelle Proto-Bantou Nigeria. Il aurait existé là, dans les siècles précédant le début de l'ère chrétienne, due à l'arrivée massive des Néoune zone de pression démographique, du désert entre — 2500 lithiques sahariens chassés par l'assèchement du auraient pu apprendre la métallurgie et — 500. Ces Proto-Bantou fer des hommes de la Nok Culture dont on a trouvé des traces dans une vers sur la vallée de la Bénoué. Descendant région centrée justement le sud, ils se seraient heurtés à 200 km au sud de la Benoué au rebord de la forêt dense. Nous pensons qu'ils n'ont pu y pénéseptentrional trer mais ont alors infléchi leur route vers l'est, à travers le plateau Il est vraisemblable oubanguien. qu'une partie d'entre eux a pu s'enen pirogue la Sangha ou l'Oubanfoncer dans la forêt en descendant gui. Ce groupe se serait fixé dans la zone de savanes qui commence à 300 km au nord de l'actuelle Léopoldville et aurait formé ce que nous (1) M. GUTHRIE,Bantu origins : a tentative new hypothesis. J. of. African Languages, vol. 1, n° 1, 1962, p. 9-21. Note sur une campagne de fouilles à Katolo 1959 ,in Zaïre, vol. XVI, (2) J. HIERNAUX, 1960. La deuxième saison de fouilles à Sanga (Katanga) in Les Naturalistes belges, t. 40, 1959. (3) J. NENQUIN,Note on some early poltery culture in Northern Katanga, JAH. IV, 1, 1963, p. 19-32. (4) J. H. GREENBERG,Studies in African Linguistic Classification 1949-50, South Western Journal of Anthropology, trad. fse par TARDITS,in BIFAN, t, XVI et XVII, 1954-55. The languages of Africa, La Haye, 1963. (5) J. H. GREENBERG,
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plus avons appelé le noyau bantou occidental. Un groupe probablement la forêt congolaise et aurait atteint le aurait contourné important en profitant de l'étroite bande noyau bantou oriental du Nord-Katanga de prairies séparant la limite orientale de la forêt de la chaîne des lacs Albert, Edouard, Kivou ou bien en passant à l'est de ces lacs puis en rejoignant le Maniema et le Katanga par le nord du lac Tanganyika. au le plus important Ce noyau bantou oriental est certainement point de vue de la diffusion des langues bantou, d'où l'intérêt considéfaites aux bords du lac Kisalé rable des découvertes archéologiques D'immenses cimetières et près de Bukama par Nenquin et Hiernaux. ont été datés du VIIIe-IXe siècle par le Carbone 14. On y a trouvé des objets perles de verre importées de la côte orientale et de nombreux en cuivre parmi lesquels des lingots en forme de « croisette » attestent du minerai local, fait d'autant une exportation pour plus intéressant orales concernant l'histoire de l'Afrique en général que les traditions l'origine des actuels Balouba et Songé se réfèrent toujours à la région du lac Kisalé. Or les liaisons sont patentes entre ces premiers états ( ?) dans l'Afrique Louba et les états historiques qui se sont développés centrale entre le xvie et le xixe siècle : le fondateur de l'empire Lounda à la famille régnante Louba. Et des Lounda sont à l'oriappartenait Lwena, et Lounda méridionaux gine des états Bangala, Tchokwé, fondés au début du XVIIe, et de l'état du Kazembe fondé vers 1740, tous ces états étant distribués en une chaîne continue qui s'étend sur le nord de l'Angola, le sud du Congo-Léo et le nord-ouest de la Zambie. Plusieurs tribus du nord-est de la Zambie comme les Bisa, Bemba, d'une origine Louba. Le pays Louba est égaleKaondé se réclament ment invoqué dans les traditions Cewa comme étant la région d'où partit la classe dirigeante du groupe Malawi qui a fourni son nouveau nom au Nyassaland. En outre ce même pays Louba est donné par certains auteurs comme le lieu d'origine des conquérants Rozwi qui devaient fonder l'empire Monomatapa ( Rhodésie du Sud et Mozambique). On voit donc l'intérêt des découvertes archéoloque présenteraient giques sur la route présumée suivie par les Proto-Bantou depuis leur région d'origine jusqu'au (1). noyau bantou oriental du Katanga
le(1) Pour l'histoire des migrations des peuples de cette région qui couvre le Gabon, et le Tchad méridional, la République Centre-Africaine (sauf les le Sud-Cameroun Zandé), le nord du Congo (Brazzaville) et la zone forestière du Congo (Léopoldville), nous renvoyons le lecteur à notre Histoire des Peuples de l'Afrique Noire (p. 582-590) et à la bibliographie do ce chapitre, on fin du présent ouvrage.
CHAPITRE L'AFRIQUE
III
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I. — PRÉSENTATION Cette deuxième province historique pourrait également s'appeler : Du Congo au Monomotapa : les savanes sud-congolaises et zambé— un peu long — fera ziennes au nord du Limpopo. Ce sous-titre les raisons qui nous ont poussé à traiter en premier comprendre lieu l'histoire de l'ancien royaume du Congo et celle du Monomotapa, seuls états noirs (avec l'Abyssinie ou Ethiopie) à avoir été connus des Européens entre le XVIe et le XVIIIe siècle, avant les grandes du XIXe siècle qui permirent l'existence de découvrir explorations des royaumes noirs de la bande sahélo-soudanaise. D'autre part les commencements de l'histoire Louba-Lounda des royaumes qui direcse rattachent occupent le centre de cette province historique tement à ce que nous venons de dire au sujet des migrations Bantou. : Cette province les états actuels suivants historique comprend Angola, partie maritime du Congo-Brazzaville, plus une mince bande côtière au Gabon, Congo-Léopoldville au sud de la grande forêt, et le MozamZambie, Rhodésie, Malawi et Mozambique. L'Angola bique portugais posent un problème de terminologie que nous retrouverons en Afrique du Sud, d'ailleurs sous une forme différente. Que faut-il entendre où les dans des territoires par histoire précoloniale sont arrivés dès la fin du XVe siècle (Angola) ou le début Portugais du XVIe (Mozambique) le moment ? Nous préciserons, venu, les » de l'Angola et de Benguela dimensions des « royaumes portugais et celles des territoires réellement dans occupés par les Portugais l'Est africain avant la seconde moitié du XIXe siècle. Disons dès l'abord qu'elles sont dérisoires par rapport à celles des colonies actuelles de l'Angola et du Mozambique. En fait, les colonies portugaises africaines doivent être appelées colonies, au sens où ce mot est généralement employé, seulement à partir de la fin du XIXe siècle. L'occupation militaire effective de certaines régions de l'Angola date même du début du XXe siècle. Cependant 1' « histoire coloniale » portugaise entre le XVe et le XIXe siècle a fourni des documents incomparablement riches pour l'histoire documents écrits beaucoup africaine, orale souvent seule utilisable plus détaillés et précis que la tradition dans tant de régions de l'Afrique noire.
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de cette A première vue on peut penser que l'unité historique ses forment portugais province est due à ce que deux territoires Mais ceci est loin d'être vérifié car l'Angola frontières maritimes. se sont développés en se tournant le dos, l'un et le Mozambique axé sur le Brésil, l'autre sur l'Inde. Si les Portugais, après de nombreux essais avortés, ont réussi à joindre leurs deux « colonies » par l'intérieur, les deux pombeiros qui firent entre 1802 et 1811 cette première et utilisèrent entre liaison transcontinentale Cassange (Angola) une route commerciale tracée par les tributaires Tété (Mozambique) » des Lounda, le Mwata Yamvo. Nous avons vu de « l'empereur établi à l'orique le noyau primitif Louba-Lounda précédemment de gine dans la région des lacs Kisalé a fourni les élites dirigeantes entre le lac Nyassa et la Kouanza, quantité de peuples habitant culturelles. Mais eutre eux de grandes ressemblances qui présentent la puissance politique du royaume Lounda est basée sans aucun des Portugais doute sur le fait qu'il recevait des armes importées de l'ouest : Imbangala de Cassange, ou de l'est : par ses tributaires Kazembe du Louapoula. On voit donc se dessiner l'unité historique de notre province centre-australe. d'abord : et culturelle Ethnique son point de départ étant situé dans l'actuel Sud-Katanga. Commerciale ensuite : son point de départ étant situé sur les deux côtes. La partie médiane de l'Afrique centre-australe étant beaucoup moins bien connue que la périphérie, nous étudierons d'abord la partie occidentale (Congo, Angola), puis la partie orientale (Monomotapa, Côte du Mozambique, Malawi) et finirons par les hégémonies Louba-Lounda. II. — LE ROYAUME DU CONGO ET SES VOISINS SEPTENTRIONAUX DE LA SAVANE L'ancien royaume du Congo représente un « cas » exceptionnellement intéressant dans le cadre général des relations de l'Afrique avec l'Europe. Nulle part ailleurs nous ne disposons d'une documentation écrite aussi considérable. En 1552, le grand historien Joâo de Barros utilise avec brio dans sa première « Décade » les travaux antérieurs de plusieurs chroniqueurs en détail la portugais qui avaient rapporté découverte de l'estuaire du Congo par Diego Cao en 1482, puis les premiers rapports avec le royaume noir. Nous avons ensuite de nombreuses lettres ou actes émanant du roi du Portugal ou du Pape, en regard d'une importante du roi congolais Alfonso Ier correspondance d'arriver à l'oeuvre maîtresse du XVIe siècle (1506-1543) avant concernant l'histoire du Congo, Relatione del Reame di Congo e delle circonvicine contrade, publiée à Rome en 1591 par l'humaniste italien fournis par le commerFilippo Pigafetta, d'après les renseignements çant portugais Duarte Lopez qui avait séjourné entre 1578 et 1583 à la cour du roi Alvaro Ier à San Salvador. Traduite en moins de R. CORNEVIN. — Histoire de l'Afrique, Tome II. 3
avant 1830. 2:L'aventure-australe CARTE
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vingt ans en flamand, allemand, anglais, latin, la Relatione de Pigaétonnant qui apparaît fetta devait être à l'origine de l'engouement dans la littérature européenne des XVIIe et XVIIIe siècles pour les moeurs et coutumes des royaumes de l'Afrique noire. Avec l'arrivée en 1645 d'une première caravane de missionnaires capucins va apparaître une nouvelle catégorie de documents, inaugurée de Rome sur la mispar la « Breve relatione » du Père Jean-François du Congo, parue en 1648 à Rome. sion des Capucins au royaume Parmi les quatre cent vingt missionnaires capucins, presque tous le Congo et l'Angola de 1645 à italiens, qui viendront évangéliser des 1845, une bonne vingtaine suivra cet exemple, nous fournissant détails précieux tant sur les événements politiques survenus au cours de leur mission que sur la vie quotidienne des Congolais. Monseigneur Cuvelier et le chanoine Jadin ont utilisé avec maestria ces différentes sortes de documents dans leurs ouvrages de base Lovasur le Congo (1) (2). D'autre part, les historiens de l'Université ont entrepris récemment la publication nium de Léopoldville systéintrouvables en français de textes devenus pratiquement matique encore inédits. Ce chapitre est basé principalement sur ou d'autres les travaux du professeur Willy Bal (3 et 4), du R. P. Bontinck (5) et du chanoine Jadin (6 et 7) qui sont parus depuis 1961. On nous annonce en outre la prochaine traduction de la correspondance d'Alfonso Ier (8). Voici donc une première différence avec le reste de l'Afrique Noire. Les historiens ne sont pas obligés ici de retourner en tous sens le moindre indice susceptible de servir de base à une chronologie qui restera toujours douteuse ; ils n'ont pas à appeler à la rescousse une rencontre tardive avec un Européen ou une éclipse de soleil provirelatée dans la tradition avec dentiellement orale. Ils connaissent certitude les noms et les dates de tous les rois du Congo entre 1486 et 1718 et sont bien renseignés sur leur politique intérieure et leur Mieux encore ils peuvent reconstituer avec une certaine diplomatie. des Congolais devant une religion étrangère précision les réactions à leur mentalité, prêchée par des hommes blancs venus de très loin. Et ceci grâce aux nombreux textes consacrés aux « particularités, coutumes et façons de vivre des habitants du royaume du Congo », destinés à instruire les futurs missionnaires des choses étranges qu'ils allaient rencontrer en Afrique. Tous constatent la persistance des L'Ancien Royaume du Congo, Bruxelles 1941. CUVELIER, (1) J. (2) J. CUVELIERet L. JADIN, L'Ancien Congo d'après les archives romaines (1618 1640), Bruxelles 1954. BAL,Traduction française de la Relatione de Pigafetta, — Léopoldville, 1962. (4)W. BAL,Le royaume du Congo aux XVe et XVIe siècles Documentsd'histoire, (3)Léopoldville, 1963. La fondation de la mission des Capucins au royaume du Congo par (5) F. BONTINCK, le P. J. F. de Rome 1648, Louvain, 1964. (6)L. JADIN,Le Congoet la sectedesAntoniens. Restauration du royaume sous Pedro IV et la « saint Antoine » congolaise (1694-1718), in Bull. Inst. Hist. belge de Rome, Fasc. XXXIII 1961. (7) L. JADIN,Aperçu de la situation du Congo et rite d'élection des rois en 1756 d'après le P. Cherubino da Savona (1759-1774), id. Fasc. XXXV 1963. avec le texte portugais original en regard. (8) W. BALet F. BONTINCK,
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indéavec une foi chrétienne coutumes païennes et leur coexistence niable. du royaume du Et ceci nous amène à la deuxième particularité il est seul en Afrique noire à Congo. Si l'on met à part l'Ethiopie, sur une grande échelle pendant avoir été christianisé près de deux cents ans à partir de 1491. Puisque nous avons la chance d'avoir des sur l'ancienne société congolaise, n'est-il documents ethnographiques ses réactions avec celles des Noirs du de comparer pas intéressant n'ont pas XXe siècle, dans les régions où les missions chrétiennes avant le milieu et bien souvent la fin fait de travail en profondeur du XIXe siècle ? Certains parallélismes frappants apparaissent d'emblée, » tel celui souligné par le chanoine Jadin entre la secte « antonienne des premières années du XVIIIe siècle et le Kibamgisme prêché à partir et repris dans de 1921 parmi les Bakongo par Simon Kimbangou les deux mouvements d'André Matswa plus récents de l'Amicalisme (1924) et du Kakisme de Simon Mpadi (1941). Ces nouvelles églises des syncrétismes africaines apparaissent parmi les plus importantes dans l'Afrique bantou. Comme chrétiens si fréquents aujourd'hui ces derniers, elles ont joué un rôle politique non négligeable dans l'évolution des esprits africains vers l'idée d'indépendance. Leurs relations indéniables avec le substrat historique congolais présentent donc un intérêt qui déborde singulièrement le cadre de la région où s'est développé l'ancien royaume du Congo. géographique On peut dire la même chose de l'histoire de l'ancien politique hisde conscience nationale Congo. Il est certain qu'un sentiment des Bakongo) dont torique a été à la base de l'Abako (Association le manifeste de fondation en 1950 se référait expressément à l'unité des peuples parlant au la langue kikongo et à leur appartenance à l'unité de peuples ressortissant de Kongo dia Ntotila, c'est-à-dire trois états voisins ayant connu chacun une administration coloniale différente : portugaise, belge ou française. Il est remarquable d'autre de mars 1961 soit restée limitée part que l'insurrection angolaise à la partie de l'actuelle pendant longtemps Angola correspondant à l'ancien Congo. En réalité c'est dans toute l'Afrique noire que le nom seul du royaume du Congo éveille des résonances passionnelles depuis que Frobenius a écrit dans son Histoire de la Civilisation : africaine « Dans le Royaume du Congo les premiers navigateurs portugais découvrirent une foule grouillante habillée de « soie » et de « velours », de grands États bien ordonnés et cela dans les moindres détails, des souverains puissants, des industries la Civilisés jusqu'à opulentes. moelle des os! » (1). Phrases d'autant plus exaltantes qu'elles ne sont d'aucune référence ni même d'aucun détail permetaccompagnées tant de définir ces « civilisations harmonieuses et bien formées qui régnaient au XVe siècle dans l'Afrique nègre ». Maintenant qu'ils sont indépendants, les Africains se doivent de réclamer des préci(1) Traduction française, Paris, 1952, p. 14,
auxXVIe australe etXVIIe siècles centre del'Afrique 3: L'Ouest CARTE
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sions sur ce que fut réellement cette gloire du Congo des XVe et XVIe siècles et ne plus se contenter des phrases grandiloquentes écrites par Frobenius en 1933, à une époque antérieure aux travaux historiques de valeur dont nous disposons aujourd'hui. Il importe d'abord de situer exactement ce royaume du Congo par rapport aux états actuels, car certains journalistes lui ont attribué des dimensions extrêmement fantaisistes à l'époque où les événements du Congo-Léopoldville étaient au premier plan de l'actualité. La confusion est bien compréhensible puisque le nom de Congo s'applique d'une part au fleuve, d'autre part à deux états indépendants, enfin à un groupe de tribus parlant la langue kikongo. Ces Kongo (1) divisés en de nombreuses sous-tribus s'étendent entre le 3e et le 8e parallèle sud ; ils occupent une très mince bande côtière dans le Gabon méridional, la partie maritime de la République du CongoBrazzaville, l'enclave portugaise de Cabinda, la partie de la province de Léopoldville située à l'ouest de Léopoldville (province du Kongo central depuis le 16 octobre 1962), enfin le nord-ouest de l'Angola jusqu'à la hauteur de la rivière Dande à 80 km au nord de Loanda. Le royaume du Congo correspondait à la partie méridionale de cette aire d'expansion des tribus Kongo mais n'avait plus autorité au XVIe siècle sur le Dembo situé entre les rivières Loje et Dande. Moins d'un quart de son territoire était dans l'actuel Congo-Léopoldville et trois quarts dans l'actuelle Angola. Ses dimensions étaient fort modestes en regard de l'immensité des états actuels : à peu près un quart de la surface de la France, c'est-à-dire que la portion congolaise représente moins de un pour cent du Congo-Léopoldville et la partie angolaise moins de six pour cent de l'Angola. Les royaumes de Angoy (= Ngoyo), Kakongo, Loango qui se libérèrent dès la fin du XVe siècle de leurs liens d'allégeance vis-à-vis du Manikongo étaient situés respectivement dans la partie du Congo-Léopoldville située au nord du fleuve Congo, l'enclave de Cabinda et la République du Congo-Brazzaville. Ces régions reçurent à partir du XVIIe siècle une forte émigration de gens venant du sud du fleuve, et leurs habitants se considèrent aujourd'hui à juste titre comme les co-héritiers du royaume du Congo. I. Origine de la famille royale et premières tentatives 1506) (2).
portugaises
(1491-
Bien que nous ayons évoqué dans le premier tome de cet ouvrage la première prise de contact des Portugais avec le royaume du Congo, nous reprendrons ici la question de l'origine de la famille royale et celle de sa conversion au christianisme entre 1491 et 1506. En 1963, J. Vansina a réfuté brillamment et de Van la thèse de Ravenstein arrivant au Wing suivant laquelle les conquérants Mouchikongo, (1) Environ deux millions et demi. (2) L'étude la plus récente et la plus complète sur le royaume du Congoest parue Les anciens royaumes plusieurs mois après la rédaction de ce chapitre : J. VANSINA. de la Savane, Léopoldville, 1965 p. 31-53 et p. 101-113, importante bibliographie.
CARTE4 : Le plateau rhodésien avant les Portugais.
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XVIe siècle dans le nord de l'actuelle Angola seraient venus de l'est, sur des rapports plus précisément d'au-delà du Kwango. S'appuyant de Jésuites ou de Capucins du début du XVIIe siècle, Vansina a démontré (1) que le noyau primitif de la famille royale aurait été établi au nord du Stanley Pool puis aurait émigré le long du fleuve Congo vers le Mayombé pour traverser le fleuve dans la région d'Ishangila. de cette origine septentrionale des Nous avons trouvé confirmation rois de San Salvador dans un rapport du missionnaire capucin Bernardo da Gallo daté de 1710 (2) et pensons qu'elle est définitivement démontrée. Bien mieux qu'une origine orientale, elle permet d'explià la base quer les facteurs économiques qu'on trouve nécessairement du développement de structures étatiques. La puissance des grands états noirs du Moyen Age (Ghana, Mali, Sonrhay) était basée sur l'échange des produits de la forêt (or, kola) contre ceux du désert diverses apportées par les marchands arabes). (sel et marchandises Rhodésie du sud explique le Monomotapa. L'or de l'actuelle Mais pour le Congo on ne voit pas de prime abord quel produit aurait pu donner lieu à un trafic à longue distance avant l'arrivée des Portudu fer gais. Il semble bien que ce soit la maîtrise de la métallurgie qui ait permis aux conquérants Kongo d'asseoir progressivement leur autorité sur les habitants de souche Amboundou. primitifs Ils tiraient probablement ce fer du massif du Bangou dans la province appelée Nsoundi, contenue tout entière dans l'actuel Congo-Léo« le domaine poldville, qui était, d'après Pigafetta, patrimonial de tout le royaume du Congo, gouverné par le fils premier né du roi » (3). Cette prééminence de la « province du Nsoundi grande productrice d'instruments en fer », nous dit encore Pigafetta, paraît confirmer l'arrivée de la famille royale par le nord. A côté du fer, le sel a certainement contribué à établir la puissance des rois du Congo sur de grandes distances. Son commerce faisait des Portugais l'objet d'un monopole royal à l'époque de l'arrivée et jusqu'au XVIIe siècle ; il provenait des salines de Pinda (Saintà l'estuaire du Congo et de celles d'Ambriz à l'emAntoine-du-Zaïre) bouchure de la rivière Loje, situées respectivement aux extrémités nord et sud de la frontière maritime du royaume. De la côte provenaient aussi les coquillages nzimbou (Olivancillaria nana) qui étaient également propriété royale et servaient de monnaie et d'objets de parure. Il ne faut pas les confondre avec de l'espèce très différente des cauris (Cypraea moneta) originaires l'océan indien (4). Les nzimbou les plus recherchés étaient ceux de l'île de Loanda qui resta de ce fait propriété du roi du Congo, même de Loanda en 1575. C'est après la fondation de la ville portugaise seulement en 1649 que le roi du Congo céda définitivement ses droits Notessur l'origine du royaume du Kongo, JAH, IV (1), 1963, p. 33-38. VANSINA, (1) J. La sectedes Antoniens, op. cit., p. 468. (2) L. JADIN,livre I, chap. X, trad. W. BAL. (3)Relatione, Les Nzimbou monnaie du royaume du Congo, Bruxelles 1953, (4) E. DARTEVELLE,
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de l'Angola qui le punissait ainsi de s'être sur l'île au gouverneur allié aux Hollandais pendant huit années. Le manikongo Nzinga a Nkouwou (ou Nzinga Ntinou) fut baptisé le 3 mai 1491 et reçut le nom de Joâo, comme le roi du Portugal. Mgr Cuvelier le considère comme le cinquième roi du Congo. L'ancêtre fondateur nommé généralement Moutinou a Loukeni aurait donc vécu et proau début du XVe siècle et conquis, semble-t-il, pacifiquement par le fleuve Congo au gressivement la région limitée grossièrement nord, l'océan à l'ouest, la rivière Loje au sud, la rivière Kwango à l'est. En effet au début du XVIIIe siècle les chefs de la terre ou chittoni, étaient encore honorés de la population représentants conquise, de province qui leur offraient les prémices de par les gouverneurs chaque récolte (1). D'autre part le Mani Vounda ou chef de la terre de la colline de San Salvador jouait un rôle essentiel dans les cérémonies d'intronisation royale. A l'arrivée des Portugais l'autorité royale était théoriquement absolue dans les cinq provinces de Soyo, Mbamba, Nsoundi, Mpango et Mpemba dont il nommait et révoquait à sa guise les gouverneurs. La sixième province appelée Mbata (région de Maquela do Zombo en Angola) avait un statut spécial, dû au fait qu'elle s'était unie spontanément au royaume du Congo. Son gouverneur appartenait obligatoirement à la famille Nsakou-Laou ; il était d'abord élu localement avant d'être investi par le roi. La même procédure intervenait d'ailleurs pour ce dernier qui appartenait toujours à la famille du roi précédent, mais devait souvent son trône à une succession d'intrigues et de combats contre d'autres candidats. Une fois intronisé, et bien que son pouvoir absolu soit tempéré par un conseil de gouvernement de douze membres, le roi était considéré comme un dieu. C'est ce qui explique les conséquences énormes de sa conversion au christianisme. Au risque de commettre un crime de lèse-majesté et donc un crime contre la religion traditionnelle, ses sujets devaient obligatoirement adopter le dieu de leur roi. Ils se précipitaient donc en foule pour réclamer le baptême avec ardeur, pensant que ce dieu des blancs pouvait facilement s'ajouter à leurs propres dieux mais non les missionnaires pas les remplacer, comme l'espéraient naïvement ravis de rencontrer un tel succès. Le royaume découvert était riche ; on y culpar les Portugais tivait le mil, l'éleusine, la banane, l'igname, le palmier à huile ; on y élevait des vaches, chèvres, moutons, poules, porcs, mais pas de chevaux. Tous les transports se faisaient à dos d'homme. La faune dans ce pays montagneux de la zone sauvage était très abondante tropicale et jouait un rôle important dans l'alimentation. Les Congolais fabriquaient avec des feuilles de palme des étoffes très solides et fines, dont certaines furent comparées à du velours, comme le dit DAGALLO,1710, in : La Sectedes Antoniens, op. cit., p. 468, (1) BERNARDO
Lapénétration dans leSud-Est africain avant 1832. portugaise etlesPortugais CARTE 5:Leroyaume Karanga
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Frobenius. Par contre, il ne semble pas que le terme d' « opulentes » dont il qualifie les « industries » congolaises convienne exactement. Les forgerons savaient fabriquer à la main des bijoux de cuivre, des couteaux, des lances ou des flèches de fer, mais ils ne connaissaient pas les procédés de trempe européens et préférèrent bien vite les armes d'importation portugaise. Joâo de Barros a donné en 1552 la description de la réception des Portugais par le manikongo Nzinga a Nkouwou le 30 avril 1491 dans sa capitale de Mbanza Congo, la future San Salvador ; elle donne une idée du faste de la cour à cette époque (1) : « le souverain était assis sur une estrade en bois si haute que de partout on pouvait le voir. Son siège était fait d'ivoire et de quelques pièces de bois très bien ouvragées, à la façon du pays. Comme vêtements, pour le haut du corps il avait sa peau, très noire et luisante. Il s'était couvert le bas du corps, depuis la ceinture, d'une pièce de damas que lui avait donnée Diogo Câo (en 1486). Au bras gauche, il portait un bracelet de cuivre jaune et, à la même épaule, une queue de cheval (de zèbre en réalité) ornée, chose qui est tenue parmi ces gens pour un insigne royal. Sur la tête il avait un bonnet haut comme une mitre fait d'un tissu de palmes très fin et mince, travaillé en relief à la façon dont on tisse chez nous le satin velouté. » Le 4 juin 1491, un mois après le baptême du manikongo Joâo, eut lieu celui de sa femme et de l'un de ses fils, nommés respectivement Léonor et Alfonso comme la reine et l'infant de Portugal. Contrairement à son père qui revint rapidement aux pratiques païennes, Alfonso nommé gouverneur de la province de Nsoudi devait demeurer un chrétien fervent et convaincu. Il accueillit en 1504 un nouveau groupe de missionnaires, maîtres d'école et maîtres de chant ; mais, à la mort de son père en 1506, il se heurta aux ambitions de son frère cadet resté païen nommé Mpangou. Le parti chrétien d'Alfonso, bien que très inférieur en nombre, l'emporta grâce à deux visions miraculeuses. Cinq épées tracées dans le ciel apparurent d'abord au futur roi et raffermirent le courage défaillant de ses guerriers ; le lendemain, l'armée de Mpangou fut mise en fuite par l'apparition de la Vierge et de Saint Jacques. Ces deux visions apportaient aux Congolais la preuve que la religion des Blancs donnait la victoire et la puissance. Aussi furent-elles commémorées pendant toute la durée du Royaume, la première par les armoiries et le sceau royal, la seconde par la célébration annuelle de la fête de Saint Jacques le 25 juillet. 2. Alfonso Ier le Grand (1506-1543). Alfonso Ier est le personnage principal du Royaume du Congo. On vivace dans la comprend que son souvenir soit resté extrêmement tradition orale des Kongo, car il a vraiment consacré son règne à l'élévation matérielle et spirituelle de son peuple qui a connu à cette époque sa période d'apogée. (1) PremièreDécadede Asia, trad. W. Bal, 1963, p. 51.
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S'il avait vécu au Moyen Age et en Europe, Alfonso Ier aurait concordent sur son sans doute été canonisé. Tous les témoignages dévotion et la science théologique qu'il avait acquise. extraordinaire Nous citerons celui du Vicaire Ruy de Aguiar qui écrivait au roi Manuel de Portugal dans une lettre datée du 25 mai 1516 (1) : « Il me semble que ce n'est pas un homme mais un ange que le Seigneur a il connaît les Proenvoyé ici dans ce royaume, pour le convertir,... et toutes les Jésus-Christ, phètes, et l'évangile de Notre-Seigneur vies des saints, et toutes les choses de notre sainte mère l'Église, et maintes mieux que nous autres... il ne fait rien d'autre qu'étudier, fois il s'endort sur ses livres et maintes fois il en oublie de manger et il est telleet de boire pour parler des choses de Notre-Seigneur ment absorbé par les choses de l'Écriture qu'il s'oublie lui-même... Lorsque le prêtre finit de dire la Messe, il se met à prêcher au peuple avec beaucoup d'amour et beaucoup de charité... il est très justicier et il punit grandement ceux qui adorent les idoles et il les fait brûler avec les idoles (chose que le prêtre portugais trouve tout à fait noril a, par tous ses royaumes, des male en ce siècle de l'Inquisition!), officiers de justice pour prendre tous ceux dont on apprend qu'ils il a installé plusieurs possèdent des idoles ou font des sortilèges... écoles dans les provinces et même des écoles pour jeunes filles où enseigne une de ses soeurs qui sait très bien lire et qui a appris dans sa vieillesse... » Mais il fallait d'abord que ces enseignants bénévoles fussent euxmêmes instruits de la langue et de la religion portugaise. On pouvait envisager deux moyens de formation : envoyer des jeunes gens congolais au Portugal pour y faire leurs études, ou recevoir des missionnaires en nombre suffisant. Dans les deux cas, il était indispensable de trouver une contre-partie à la générosité portugaise et c'est de là, que provinrent les malheurs congolais. Car le Congo n'avait vraiment pas grand-chose à offrir qui puisse tenter les Portugais : l'ivoire, mais on en trouvait aussi sur la côte de l'Or où le comptoir d'Elmina avait été fondé en 1482, les manilles de cuivre, mais elles avaient peu de valeur ; seuls les présents d'esclaves envoyés par le roi Alfonso paraissaient présenter de l'intérêt ; ils étaient même trop appréciés par le donatorio (= seigneur propriétaire) de l'île de Sâo Thomé. Ce Fernâo de Melo avait reçu en 1500 le monopole du trafic le long du fleuve Zaïre, qui ne s'appelait pas encore le Congo. Il gouvernait un mélange assez extraordinaire de gens dont le sens moral était parfois discutable. On avait en effet peuplé systématiquement à partir de 1493 cette île, située exactement sous l'équateur mais culminant à plus de 2 000 mètres, avec des condamnés à mort, de jeunes Juifs expulsés de Grenade en 1492 et quelques aventuriers ; on avait marié ces hommes de recrutement pour le moins hétéroclite a des esclaves noires amenées de la Côte-de-1'Or, pensant sans doute métisse qu'une population serait plus résistante au climat et pourrait par la suite répandre la ci(1) Trad. W. Bal, 1963.
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vilisation portugaise dans le royaume du Congo, dont la mauvaise bien établie : les Européens y réputation sanitaire était maintenant mouraient en masse, certains même avant d'avoir pu commencer tout en travail, tels ces deux imprimeurs allemands venus volontaires 1492 et de nombreux missionnaires atteints par le paludisme ou la dysenterie. En réalité, Fernâo de Melo et ses trafiquants furent les pires ennemis du roi Alfonso ; avant 1510 il recherchait des esclaves pour l'exde canne à sucre installées dans l'île ; en ploitation des plantations 1510 il reçut l'ordre du roi d'Espagne de recruter deux cents esclaves noirs destinés aux Caraïbes et y vit avec raison la perspective de bénéfices extraordinaires. Dorénavant, les habitants de Sâo Thomé allaient se lancer avec frénésie dans la traite, n'hésitant pas à faire de véritables razzias à l'intérieur du royaume du Congo ou à s'emparer de cadeaux destinés au roi du Portugal ou encore à intercepter les lettres du roi Alfonso. Cependant, les relations entre Lisbonne et la capitale du Congo demeuraient excellentes ; en 1512 le roi Manuel (1495-1521) envoyait cinq navires avec des maçons, des charpentiers et de magnifiques ornements pour les églises qu'ils devaient construire. L'ambassadeur Simâo da Silva était chargé de présenter au roi du Congo le regimento (= règlement) accordant des armoiries royales qui rappelaient la vision miraculeuse des cinq épées et des armoiries pour les gouverneurs de provinces ou de comtés qui devinrent princes, ducs, marquis et comtes. Alfonso était libre d'adopter à sa guise les lois et les coutumes portugaises. On lui demandait seulement de ne pas laisser s'en retourner les cales vides des navires venus de si loin apporter tant de bienfaits (!). Ce règlement était d'une extrême libéralité pour l'époque ; le Congo n'était pas du tout considéré comme une colonie ni même comme un protectorat au sens du XIXe siècle ; il restait un état indépendant auquel on demandait d'entretenir avec le Portugal des relations missionnaires et commerciales Il faut souligner le fait préférentielles. cette indépendance que Lisbonne respecta constamment politique. C'est seulement en 1883 que le Congo fut annexé à, la colonie de l'Angola. Malheureusement le regimento ne fut jamais appliqué complètement. Simâo da Silva mourut des fièvres avant même d'avoir atteint la capitale de Mbanza Congo. Dès son arrivée au port de Pinda il s'était heurté à une atmosphère de nette hostilité due aux intrigues des négriers de Sâo Thomé qui craignaient de se voir retirer leur monopole du commerce de la traite. Le roi Alfonso ne comprenait plus. Comment accepter que des Portugais trahissent chaque jour les principes religieux et moraux que d'autres Portugais lui avaient enseignés ? Dans une lettre du 5 octobre 1514 il dénonçait les moeurs déplorables de quatorze prêtres portugais arrivés en 1508 qui avaient pris femme et se livraient au trafic des esclaves pour leur propre compte. Il demandait à nouveau des prêtres et des enseignants, proposait d'annexer au
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Congo l'île de Sâo Thomé et d'y fonder un collège destiné à la formation de prêtres indigènes. Mais il ne reçut jamais de réponse, pas plus qu'à sa suggestion de créer une flotte congolaise. Cependant Alfonso plaçait beaucoup d'espoir sur l'un de ses fils, dénommé Henrique, qu'il avait envoyé encore tout enfant à, Lisbonne en 1506. Henrique avait fait de brillantes études. En 1513 il avait dixhuit ans et prononçait un discours en latin devant les cardinaux réunis à Rome. En 1518 il fut promu évêque titulaire d'Utique « in partibus infidelium » et vicaire apostolique du Congo, malgré son jeune âge qui nécessita une dispense papale. Il revint au Congo en 1521. Malheureusement, handicapé par une santé délicate, tenu en suspicion par le aucun rôle dans l'évangélisaclergé européen, il ne joua pratiquement tion de son pays. Il mourut vers 1530. Sâo Thomé, cependant, faisait des affaires de plus en plus florissantes. L'île était devenue une escale indispensable des navires en route vers l'Inde, l'entrepôt principal des esclaves recrutés pour l'Amérique ; ses plantations de sucre étaient prospères. En 1534 un évêché était créé dans la ville de Sâo Thomé. Alfonso y vit une insulte personnelle, mais ses réclamations furent aussi vaines que les précédentes ; l'espoir d'un haut clergé congolais était définitivement évanoui. Alfonso allait régner encore neuf années. Mais la page était tournée... La machine infernale de la traite atlantique qui devait écraser l'Afrique noire pendant plus de trois siècles avait été mise en marche en 1510 avec la première demande de main-d'oeuvre pour les plantations américaines. En 1518 le système de la traite avait été officialisé ; en 1536, cinq mille noirs étaient embarqués dans le port de Mpinda (Saint-Antoine du Zaïre), centre de rassemblement du trafic. Alfonso voyait bien que les razzias d'esclaves aboutissaient à, bafouer l'autorité royale ; mais en 1540, en interdisant toute exportation d'esclaves hors de son de royaume, il s'attira la haine des négriers portugais qui tentèrent le faire assassiner le jour de Pâques, pendant la messe. Il échappa par miracle à cet attentat dont les auteurs ne furent même pas punis. Alfonso mourut en 1543 âgé de plus de quatre-vingts ans. Durant son règne de trente-sept ans le royaume du Congo avait connu une transformation radicale ; la capitale Mbanza Congo s'appelait maintanant Sâo Salvador, d'après la dédicace au Saint Sauveur de la cathédrale construite entre 1517 et 1526. Elle contenait au moins six églises dont l'église Notre-Dame des Victoires où le roi fut inhumé ; il y avait des églises et des écoles dans toutes les provinces. Plusieurs jeunes Congolais avaient été envoyés au Portugal pour y faire des études. L'administration du royaume était calquée sur le modèle portugais. Malheureusement, la traite avait fait des progrès aussi rapides que l'évangélisation et ses effets négatifs et destructeurs devaient réduire à néant le bénéfice du réel effort d'assimilation consenti par les Portugais dans les premières années de leur présence. R. CORNEVIN. — Histoire do l'Afrique, Tome 11.
50 3. Les successeurs
L'AFRIQUE CENTRE-AUSTRALE d'Alfonso
de 1543 à 1665.
Nous avons dit au début de ce chapitre qu'on connaissait tous leurs noms et les dates de leurs règnes. Bien peu cependant ont mérité de passer à la postérité. Il est frappant de constater qu'en vingt-cinq ans d'Alvaro Ier, six (1543-1568), de la mort d'Alfonso Ier à l'avènement rois ont été intronisés, dont un seul, Diogo Ier, a régné seize années de 1545 à 1566. Sur les cinq autres, deux sont morts au cours de combats les belliqueux contre les Anzique (= Batéké du Congo-Brazzaville), du Congo et deux autres ont été renversés par voisins septentrionaux un concurrent plus heureux après quelques mois ou quelques semaines de règne. L'absence d'une règle de succession royale bien définie et des voisins du royaume semblent avoir joué un rôle dél'agressivité dans la décadence de l'autorité royale qui constitue le fait terminant dominant de l'histoire du Congo après Alfonso Ier. Il est certainement les Portugais dont certrès exagéré d'en accuser systématiquement tains auteurs ont tendance à faire les boucs émissaires de tous les malheurs survenus au royaume. Au contraire la politique portugaise à un moment où le royaume paraît d'un libéralisme très remarquable noir sembla bien près de sa perte. En 1569, en effet, les redoutables guerriers cannibales Jaga franchissent le Kwango à l'est du royaume et se dirigent vers San Salvador. Le roi Alvaro Ier abandonne alors sa capitale et se réfugie dans une île du fleuve Congo, d'où il demande secours au roi Sébastien de Porsix cents soltugal. Ce dernier expédie avec une célérité remarquable dats sous les ordres de Francisco de Gouvea qui parvient à chasser les Jaga en dix-huit mois de campagne. En reconnaissance, Alvaro Ier fait acte d'allégeance au roi du Portugal en 1574 et promet un tribut anun cinquième de la récolte annuelle de nzimbou ou nuel représentant son équivalent en esclaves ; mais Sébastien refuse, répondant que son seul désir est de voir les rois du Congo persévérer dans la religion chrén'est d'ailleurs pas aussi désintéressée tienne. Cette attitude qu'il ont découvert depuis 1550 que le Ngola paraît, car les Portugais plus (= roi) du Dongo, au sud de la rivière Dande, serait probablement facile à manoeuvrer que les Mani du Congo. Plusieurs missionnaires jésuites, expulsés par Diogo Ier, ont commencé à travailler au Dongo et, en 1571, Paulo Dias de Novais a reçu la donatoria du pays entre Dande et Couanza et de trente-cinq lieues de côte au sud de la Couanza. C'est en 1576, un an après l'hommage d'Alvaro Ier à Sébastien de Portugal, que Dias de Novais construit sur la terre ferme en face de l'île congolaise de Loanda un fort, une église et un hôpital, amorce de Saint-Paul de Loanda, capitale de la future Angola. le abandonneront les Portugais Désormais, progressivement du Congo en faveur de la «conquête »de l'Angola, royaume indépendant où ils exerceront une souveraineté politique. Durant cinquante ans, resteront excellentes malcependant, les relations lusitano-congolaises de la couronne en 1578 et l'attribution gré le désastre d'Alcazarquivir portugaise au roi d'Espagne entre 1580 et 1640. Au Congo tout ce qui
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est portugais est à la mode ; il est de bon ton d'arborer dans toutes solennelles les lourds vêtements les circonstances européens si mal de Rome Jean-François adaptés au climat tropical. Le missionnaire racontera en 1648 que tous les nobles depuis le roi jusqu'aux barons en passant par les princes, ducs, marquis et comtes de Nigeria.
LA BANDE GUINÉENNE
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sont devenus un élément essentiel dans en raison de la surpopulation, la Nigeria indépendante. Au xixe siècle, seule la région du delta (jusqu'à la rivière de Calabar à l'est), c'est-à-dire les peuples Ijoh, Ibibio et Efik ont une existence historique. Nous n'y insisterons pas car la question de la pénéa été amplement commerciale tration britannique puis politique traitée (1). Par le titre même de son livre et par son contenu l'historien mis en valeur les liens nigérien K. 0. Dike (2) a remarquablement et étroits existant au xixe siècle entre le commerce, l'évangélisation la politique. On peut distinguer trois zones d'activité principale des les seconds étant au début très peu difnégriers, puis des traitants, férents des premiers : Akassa — Brass, Bonny — New Calabar — Opobo, enfin Old Calabar et la rivière Cross. C'est dans cette troisième zone, habitée par les Efik, que le pasteur Hope Waddell vint de l'Église d'Ecosse en 1847. Hope établir une station missionnaire Waddell amenait avec lui un groupe d'anciens esclaves jamaïcains originaires du Calabar. Il fonda plusieurs postes à l'est de la rivière Cross. Dès 1858 le Nouveau Testament était traduit en Efik et en 1868 la Bible tout entière. Mais la mission de Calabar ne s'étendit du Protecvéritablement qu'après 1885, année de la proclamation torat des OU Rivers. C'est à Bonny, nous l'avons vu, que l'évêque Crowther établit son de 1867 à 1891. En 1853 le roi Pepple de Bonny avait quartier-général été exilé en Angleterre. Il fut renvoyé dans son pays en 1861 avec une indemnité de 4520 Livres et mourut en 1865. Un ancien esclave Ibo, nommé Jaja, parvint alors à s'imposer et fonda à Opobo en 1870 un état indépendant concurrent de Bonny. En 1873 le consul anglais de « Bénin et Biafra » quitta sa résidence de Fernando-Po pour Calabar mais l'Angleterre ne cherchait pas à imposer une autorité politique et se faisait volontiers représenter comme le par des vice-consuls chef Nana sur la rivière Bénin en 1885 ou bien la missionnaire Mary Slessor sur la rivière Calabar en 1892. En 1893 le Protectorat des Oil Rivers fut réuni à celui de Lagos et au domaine de la Royal Niger Company (le long du Niger jusqu'à Djebba et le long de la Benoué jusqu'à Ibi) sous le nom de Niger Coast Protectorats. C'est alors seulement que se multiplièrent les « expéditions des forces de l'ordre » dans le delta. En 1887 Jaja d'Opobo avait été déporté aux Antilles. En 1894 ce fut le tour de Nana, le chef Itsekiri ; l'année suivante les Brassmen qui avaient attaqué le port d'Akassa furent mis à la raison. Mais la pénétration dans l'intérieur du pays Ibo ne fut entreprise, nous l'avons dit, qu'en 1902. Elle devait être terminée seulement en 1914 dans la province d'Ogoja, la dernière à être pacifiée. ALANBURNS,History of the Nigeria; M. CROWDER. The story of Nigeria, 1962. K. 0. DIKE,Trade and Politics in the Niger Delta 1830-1885.Oxford 1956. RSIR
DEUXIÈME CHAPITRE LES EUROPÉENS
PARTIE IX
EN AFRIQUE NOIRE XVIe-XIXe SIÈCLES
ET A MADAGASCAR
Après avoir consacré une grande partie de cet ouvrage à l'histoire de l'Afrique noire précoloniale considérée dans une optique africaine, la politique suivie nous croyons souhaitable d'étudier séparément par les diverses nations européennes engagées en Afrique entre le xvie et le xixe siècles. Le xixe siècle fera l'objet d'un chapitre spécial en raison de l'importance des nouveaux courants idéologiques, au Scramble et au partage économiques et politiques qui aboutiront colonial du continent africain. La période 1500-1815 qui sera envisagée ici est malheureusement dominée par la traite des esclaves devenue au xviiie siècle l'activité quasi-exclusive des Européens. Mais, d'autre part, elle est marquée par les installations portugaises en Guinée, dans l'Angola et le Modes hollandaise au Gap, l'établissement zambique, l'implantation Anglais sur la côte de l'actuel Ghana, en Sierra Leone et en Gambie, celui des Français au Sénégal et à Ouidah (Dahomey). Au xviiie siècle le delta du Niger (Nigeria) sera fréquenté plus particulièrement par des négriers britanniques, la côte entre le Gap Lopez et l'embouchure du Congo (Gabon et Congo-Brazza) par des négriers français. En somme dès la fin du xviiie siècle la base de départ de presque toutes les futures colonies de la côte atlantique est déjà marquée sur la carte, à l'exception des secteurs Libéria-Côte d'Ivoire, Togo, Cameroun et Sud-Ouest africain. En raison de l'importance de la « période coloniale » dans l'histoire générale de l'Afrique, il n'est donc pas inutile d'étudier de façon détaillée l'action politique et économique des futures puissances coloniales entre 1500 et 1815 et de rappeler en même temps les tenta— des Danois, Suédois et Brantives — bien oubliées aujourd'hui debourgeois sur la côte du golfe de Guinée, En réalité, il n'est pas possible pendant toute cette période de parler d'une politique des nations d'Europe qui vont se contenter pendant trois siècles d'exploiter les côtes d'Afrique. commercialement Si « l'expérience congolaise » commencée en 1486 a été lancée avec un réel souci d'évangélisation la recherche de bénéfices primant
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LES EUROPÉENS EN AFRIQUE NOIRE
elle a dégénéré à partir de 1510, année de mise en commerciaux, C'est à partir marche de la machine infernale de la traite atlantique. de là que s'est joué le destin de la façade atlantique de l'Afrique, deveaméricaines et nue un réservoir de main-d'oeuvre pour les plantations un fournisseur de gomme (Sénégal), de poivre (maniaccessoirement guette), d'ivoire ou d'or, comme le montrent clairement les noms attribués aux différents secteurs de la côte du golfe de Guinée (Côtes du Poivre, des Dents, de l'Or, des Esclaves). Durant le xvie siècle les Portugais ont le monopole absolu du commerce africain. Mais en 1580 le Portugal devient espagnol et les marins en épices des Pays-Bas révoltés ne pouvant plus s'y approvisionner décident d'aller les chercher eux-mêmes aux Indes et en Afrique. Dès 1594 les Hollandais fondent une première « Compagnie pour le commerce des Indes Orientales » et une deuxième en 1602 qui enlèvera au Portugal toutes les places de l'Océan indien entre 1605 et 1663, sauf Goa. En 1621 est établie la « Compagnie hollandaise des Indes ». Entre 1620 et 1680 la marine hollandaise est toute occidentales en Afrique. C'est ce qui puissante et la Hollande est prédominante flamande de Pigafetta juste explique la précocité de la traduction des oeuvres écriaprès son édition italienne de 1591 et l'importance tes sur l'Afrique en néerlandais, parmi lesquelles la fameuse « Description de l'Afrique » de O. Dapper parue à Amsterdam en 1668, traduite et copiée pendant tout le xviiie siècle dans les divers pays occidentale. d'Europe En 1664 Colbert fonde la « Compagnie française des Indes occidentales » qui ne sera pas un concurrent dangereux pour les Hollandais par suite de sa mauvaise gestion. Par contre, la « Royal African Company » fondée à Londres en 1672, soutenue par la prépondérance va donner à l'Angleterre la toute première place maritime britannique, dans le commerce africain. Elle s'intéresse au début à l'or, comme en témoigne la frappe d'un demi-million de « guinées » à base d'or afriabolit le cain entre 1672 et 1712. Mais, en 1713, le traité d'Utrecht traité de l'Asiento conclu en 1701 entre la France et l'Espagne, par lequel la « Compagnie française de Guinée » s'engageait à fournir aux 48 000 esclaves en dix ans. La possessions espagnoles d'Amérique « Compagnie anglaise de Guinée » reçoit le privilège de l'Asiento et devra transporter en trente ans 144 000 esclaves pour les Espagnols, chiffre très inférieur à celui des esclaves transportés vers les colonies anglaises ou françaises d'Amérique. La traite des esclaves, longtemps considérée comme un trafic honofranrable, sera combattue dès le xviiie siècle par les encyclopédistes çais et par de nombreux Anglais menés par Granville Sharp. Après l'arrêt du juge Mansfield (1772) refusant à l'esclavage droit de cité en Angleterre, la nécessité de trouver un asile pour les 15 000 esclaves libérés qui restent sans ressource sur le pavé de Londres, amène l'installation en Sierra Leone de plusieurs centaines de ces Noirs (1). Ce (1) Supra, p. 298.
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mouvement entraîne un intérêt nouveau pour l'Afrique. Il est en partie cause de la création de l'African Society de Londres (1788). Mais la traite des esclaves ne sera finalement abolie qu'au moment où la de canne à sucre des Antilles la rendra moins crise des plantations nécessaire. La fin du siècle dominée par la Révolution française entraine un fondamental des possessions européennes en Afrique. réaménagement Ainsi, l'Angleterre remplace la Hollande au Cap, s'installe solidement sur les côtes ouest africaines et conserve quelques-unes des bases enlevées aux Français (île Maurice, Seychelles) pour assurer son emprise sur la route des Indes. I. LES
PORTUGAIS
EN AFRIQUE
NOIRE
Nous ne reviendrons pas ici sur l'activité déployée en Afrique par les marins, soldats, missionnaires ou commerçants portugais. Nous en avons largement tenu compte en étudiant la côte guinéenne aux xve et xvie siècles, la côte orientale au nord du cap Delgado aux xvie et » entre le xve et xviie siècles et surtout l'« Afrique centre-australe le xixe siècles. Que saurions-nous du Monomotapa, du Congo, des Certainement royaumes de l'Angola, sans les documents portugais? On peut même aller plus loin et affirmer que ces pas grand-chose. royaumes n'auraient pas eu d'existence historique sans les Portugais. Même les royaumes centraux directs qui n'ont pas eu de rapports avec les Portugais, comme le royaume Lounda, doivent l'essentiel de leur puissance aux armes importées par les Portugais, puisque les deux principaux tributaires Lounda, le royaume Imbangala de Cassange et le royaume Kazembé du Louapoula, entretenaient des rapports commerciaux avec Loanda (Angola) et Tété (Mozambique). Dans l'histoire « africaine » de l'Afrique noire précoloniale, les PorMais leur tugais occupent donc une place unique et prépondérante. rôle dans l'histoire de l'expansion européenne est également capital et nous l'examinerons ici du point de vue de Lisbonne dans le cadre des préoccupations économiques et politiques de l'époque en suivant l'impulsion donnée par les divers souverains. i. Les grandes lignes de la politique
portugaise.
En 1495 le roi Manuel succède à Jean II Durant son règne (14951521) le petit Portugal va vivre un véritable conte de fées symbolisé par le surnom de Fortuné donné à Manuel, de même qu'un siècle plus tard le sultan du Maroc El Mansour sera appelé El Dehebi (= le doré) après la conquête en 1591 du royaume Sonrhay de Gao. Du point de vue africain les découvertes faites sous le règne de Manuel auront des conséquences désastreuses. Au xve siècle l'Afrique tenait la première place dans la politique ultra-marine du Portugal. Cola explique d'ailleurs un partie l'indéniable « pureté morale » de « l'expérience congo-
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laise » à son début. On avait trouvé des esclaves à Arguin, de l'or à de penElmina, du poivre à Gwato (Bénin), on pouvait se permettre ser d'abord à l'évangélisation dans ce royaume du Congo qui, à première vue, ne possédait aucun produit intéressant à ramener en Europe, en dehors des esclaves. Avec l'arrivée de Vasco de Gama aux Indes (1498) tout change. D'emblée les bénéfices « indiens » apparaissent fabuleux par rapport aux bénéfices « africains ». Avec un seul chargement de poivre Vasco de Gama gagne soixante fois les dépenses engagées pour son voyage! Dorénavant l'Afrique ne tiendra plus qu'une place secondaire. Sa côte orientale sera conquise entre 1502 et 1509 parce qu'elle est la contracosta, lieu de relâche obligatoire pour les navires poussés sera par la mousson de l' Inde (Indes Orientales). Sa côte atlantique considérée en fonction des Indes occidentales à partir de l'année 1510 qui verra le début de la traite vers les possessions espagnoles Vers le milieu du xvie siècle les plantations de canne d'Amérique. à sucre établies au Brésil (découvert en 1500 par le portugais Alvarez à leur tour de la main-d'oeuvre et ce sera la Cabrai) demanderont raison principale de la conquête de l'Angola en 1575 et de son utilisation comme réservoir d'esclaves. Sous le règne de Manuel les flottes égyptiennes et vénitiennes sont vaincues à Diu (1509), Goa est conquise en 1510, Malacca en 1511, les îles d'Amboine et Timor, principales productrices d'épices, en 1514, Ormuz en 1515, Colombo en 1519. A la fin du règne, les sont donc en mesure de contrôler tout le commerce de Portugais l'océan indien depuis la côte africaine l'Indonésie. jusqu'à En vingt-cinq ans le Portugal est devenu le pays le plus riche mais paradoxalement il va devenir rapidement un pays d'Europe, sa nourriture au dehors, parce que les Porpauvre obligé d'acheter ne tugais attirés par les énormes profits du commerce outre-mer veulent plus cultiver la terre chez eux. On décrit d'habitude le règne de Jean III (1521-1557) comme celui de la dégradation mercantile : la nation perd de sa vitalité, les moeurs se dépravent. Tout le monde veut gagner beaucoup d'argent et très vite, aux Indes ou au Brésil. L'Afrique est beaucoup moins appréciée et déjà se confirme en ce milieu du xvie siècle ce caractère qui a fait tant de mal à la colonisation portugaise en Afrique. Non seulement on n'y envoie pas beaucoup de monde car la population du Portugal est manifestement insuffisante de son empire, mais encore par rapport à l'immensité on y envoie volontiers les rebuts de la société portugaise, laissant les éléments de valeur tenter leur chance dans l'Inde ou au Brésil. Sébastien
l'Africain.
Le règne de Sébastien (1557-1578), petit-fils de Jean III, marque un tournant dans la politique africaine du Portugal. C'est la première fois en effet que les forces portugaises en de vastes opés'engagent rations entraînant occupation de vastes territoires, Angola et Mono-
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motapa. Au Maroc après une brève expédition contre Tanger (1574), il lance une véritable croisade et trouve la mort à la bataille d'Alcazarquivir (1578) ou bataille des Trois Rois. Le handicap espagnol. Ce désastre aboutit après le bref passage du cardinal Henri (1578de Philippe II sur le trône du Portugal 1580) à la nomination (15 avril 1581) qui s'engage devant les Cortès de Thomar à maintenir avec son nouveau royaume dans une union purement personnelle et l'Esle Portugal Mais en solidarisant la Couronne d'Espagne. coloniales les provinces pagne, cette union rend très vulnérable Ni l'Angleterre, ni les Provinces Unies, ni la France portugaises. ne sont capables en 1580 d'aligner des flottes suffisantes pour porter le combat aussi loin. Cependant dès 1605, trois ans après la fondation de à « l'emla Compagnie des Indes Orientales, les Hollandais s'attaquent Ils s'empire des épices », base essentielle de la richesse portugaise. 1770 (1) où ils maintiendront jusqu'en parent d'abord d'Amboine, le monopole absolu du clou de girofle, puis en 1607 des deux autres « îles à épices » de Ternate et Timor. Par contre, leurs trois attasont contre la forteresse de Moçambique ques (1604-1607-1608) repoussées. Pour compenser la perte des épices indonésiennes, les Portugais du de sucre ; jusqu'à Brésil sont alors invités à intensifier la production la fin du xviie siècle le Brésil sera le plus gros fournisseur mondial de sucre et la principale source de richesse portugaise. Mais il demandera de plus en plus d'esclaves à l'Angola et on commencera vite à répéter le dicton : « Sans sucre il n'y a pas de Brésil et sans Angola il du Portugal, du Brésil n'y a pas de sucre ». Cette interdépendance et de la côte africaine aux Hollandais clairement qui, apparaît deux ans après avoir fondé la Compagnie des Indes Occidentales, d'abord la côte africaine : Benguela (1623), six navires attaquent brûlés dans le port de Loanda (1624), avant de s'emparer de Pernambouc au Brésil en 1630. En 1637 les Hollandais prennent le comptoir d'Elmina (qui avait été fondé en 1482) ; à partir de 1639 ils tiennent l'estuaire du Congo. En 1640 l'empire portugais apparaît menacé. donc terriblement C'est le moment que choisit le duc d'Olivarès ministre de Philippe IV du Portugal en province espagnole. pour proposer la transformation On conçoit que la réaction des Portugais à cette annonce ait été immédiate et brutale. Ils se soulèvent et mettent sur le trône Jean IV de se rallient d'outre-mer Bragance. Toutes les possessions portugaises au nouveau roi, sauf Ceuta qui reste espagnole. Jean IV de Bragance et le prix colonial des alliances. L'enthousiasme reconquise ne peut populaire de cette indépendance masquer, après les multiples contributions exigées par le souverain (1) Infra, p. 356, Pierre Poivre et l'introduction du girofle à l'Ile Bourbon. — Histoire de l'Afrique, Tome II. R. CORNEVIN. 21
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d'un pays qui ne possède plus d'armée, ni de espagnol, l'épuisemènt ne peut marine. La France, qui est en guerre avec les Habsbourg, guère faire plus que retenir une armée espagnole aux frontières des Pyrénées, l'Angleterre est en pleine guerre civile. Seules les Provinces Unies à l'apogée de leur puissance peuvent aider le Portugal. du 12 juin 1641 promet à Jean IV une Le traité luso-hollandais escadre de vingt vaisseaux, des officiers, des armes, des munitions. aux le Portugal accorde de nombreux En contrepartie, avantages les colonies prises hollandais et renonce à revendiquer commerçants un par la Hollande avant la conclusion du traité ou, plus exactement, an après la conclusion du traité. C'est en somme un peu l'alliance du loup et de l'agneau, si bien que ce soutien hollandais se traduit en réalité par une relance des opérations militaires pour annexer le maximum de terres portugaises, d'où la prise de Sâo Thomé, de Saint-Paul des guerres à Geylan. de Loanda (août 1641) et la recrudescence Le soulèvement des colons portugais du Brésil donne prétexte à la Hollande pour suspendre son aide maritime et refuser d'appliquer le traité aux Indes, ce qui lui permet de gagner de nouveaux territoires, les Holmais les Portugais du Brésil chassent bientôt définitivement landais et envoient en 1648 une flotte de quinze vaisseaux reconquérir Sâo Thomé et l'Angola. A nouveau en guerre ouverte dès 1651, les Pays-Bas et le Portugal signent le 31 juillet 1669 un traité mettant fin aux hostilités. Les Hollandais conservent ce qu'ils ont conquis aux Indes depuis 1641 : Ceylan, la côte de Malabar, celle de Coromandel. Ils renoncent au Brésil, moyennant une indemnité de 3 millions de florins et la livraison gratuite pendant vingt ans du sel de Setubal ; pour 25 000 cruzados, ils obtiennent une situation commerciale privilégiée à Lisbonne et le droit de trafiquer avec la côte de Guinée, Sâo Thomé et le Brésil. L'alliance de l'Angleterre contre l'Espagne obtenue par le traité du 23 juin 1661 donne à Charles II, Bombay, Galle dans l'île de Ceylan, Tanger et une somme de 20 millions de francs. Ainsi les alliances du Portugal l'ont finalement dépossédé de son domaine indien mais laissent intactes, sauf San Jorge del Mina, ses possessions africaines et le Brésil qui va consommer une quantité accrue d'esclaves africains après 1684 où l'on découvre de l'or (1). Après 1648, année où le Brésilien Salvador de Sa est venu reprendre se Loanda et Benguela aux Hollandais, les rapports Brésil-Angola sont encore resserrés. Entre 1650 et 1688 les gouverneurs de l'Angola viennent du Brésil et le Portugal perd peu à peu dans l'esprit des Blancs de l'Angola son rang de métropole au profit du Brésil. De l'autre côté de l'Afrique, le Portugal n'est guère plus respecté. Les prazeros de Moçambique ont tous beaucoup plus de sang indien ou bantou que de sang portugais. Et ils ne se sentent aucunement liés à Lisbonne. (1) En 1663, alors que le Portugal était en conflit avec l'Espagne, le gouverneura de l'Angola avait reçu l'ordre de découvrir des mines d'or et de cuivre nécessaires la poursuite de la guerre.
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Au xviiie siècle le Portugal ne représente plus grand-chose en Afridéfinitivement classé comme puisque. En Europe il est maintenant sance de seconde zone. En 1703 le traité Methuen accorde des tarifs en Angleterre contre la préférentiels aux vins portugais entrant ce qui va accentuer le caractère libre entrée des tissus britanniques, Cependant on peut encore agricole du Portugal et son conservatisme. faire des affaires au Brésil ; en 1718 on y découvre de nouveaux gisements d'or, en 1728 des diamants. Les esclaves angolais seront désormais employés aux mines aussi bien qu'aux plantations qui représentent un revenu moins intéressant, la production des Antilles britancelle du Brésil à la fin du niques et françaises ayant rattrappé xviie siècle. Entre 1750 et 1777, le fameux ministre Pombal essaie de mettre de Mais ses réformes ne réussiront pas à l'ordre dans l'administration. réveiller la profonde apathie dont souffrent les colonies africaines. 2. L'administration
coloniale portugaise
avant 1800.
décentralisée. La durée des voyages nécessite une administration entraîne une des profits commerciaux Cependant que l'importance ingérence étatique de plus en plus grande. Il faut distinguer l'administration centrale de Lisbonne et celle des colonies. L'administration centrale de Lisbonne mise en place pour les Indes et le Brésil s'adapte à l'Afrique en quelque sorte par continuité. Elle suit la politique administrative générale du Portugal. Ainsi la suppression de l'indépendance judiciaire des grands seigneurs portugais est étendue aux colonies dès le règne de Manuel le Fortuné. En 1516 est réorganisé l'office des Vedores da Fazenda (inspecteurs des Finances) dont l'autorité s'exerce sur la « factorerie des îles » (recettes des îles d'Afrique) et sur la maison de Guinée (Casa da Mina ou Casa de Guiné). Cette maison prépare les cargaisons, répartit entre les intéressés ou vend au profit du Roi les cargaisons qui en viennent et immatricule les soldats des armées coloniales. Du fait de l'importance économique des colonies, les inspecteurs des Finances s'en occupent beaucoup mais sans qu'une structure bien nette apparaisse. Par ailleurs les attributions de certains tribunaux ou conseils empiètent sur leur domaine. Ainsi la Mesa da consciencia e ordeus (tribunal de la conscience et des ordres) possède l'administration religieuse des Colonies. La période espagnole voit une double réforme. Philippe II supprime eu 1591 les inspecteurs des Finances et les remplace par le Conselho da Fazenda (Conseil dos Finances) dont les pouvoirs sont, beaucoup plus étendus. L'une do ses quatre sections s'occupe de la métropole, la deuxième des Indes, d'ICI Mina, de la Guinée, du Brésil, de Sào Thomé et du Cap Vert, la troisième des îles Madère et les Açores, la quatrième du Maroc. Mais cette réforme ne donne pas satisfaction et le due do Lerme, Ministre de Philippe III, confie l'administration supé-
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LES EUROPÉENS EN AFRIQUE NOIRE
rieure des colonies au Conseil des Indes. Les deux sections de ce Conseil s'occupent l'une du Brésil et de l'Afrique, l'autre de l'Océan Indien. Cette réforme, bonne en soi, est gênée par le fait que toute décision est prise à Madrid. importante Jean IV de Bragance (1640-1657) améliore les réformes espagnoles. A partir de son règne, la nomination des vice-rois et des gouverneurs au Conseil d'État. Le Conseil des Indes devenu des colonies appartient Conseil d'Outre Mer administre l'outremer portugais sauf Madère, les Açores et les places du Maroc qui relèvent du Conseil d'État. Sa cométendue aux affaires civiles, religieuses et pétence théoriquement militaires se réduit souvent à liquider les dépenses et à surveiller l'apdes magasins et des arsenaux. provisionnement en Afrique. Nous avons vu (1) comment les colonies, L'administration durant le xve siècle, ont été données comme terres de la couronne à des ou viager, les propriétaires nobles qui en sont, à titre héréditaire (donatorios) et les gouverneurs (capitaes). Dès le xvie siècle le pouvoir est restreint des capitaines donataires par la présence de fonctiondes ouvidors naires royaux. Sous le règne de Manuel le Fortuné (auditeurs) sont adjoints aux donataires pour rendre la justice, de la même manière que les juges royaux du Portugal. Par ailleurs, dans certaines colonies, des corregedors royaux (avant 1544 aux îles du Cap Vert) surveillent l'action des donataires. Le remplacement des donataires par des fonctionnaires royaux est entrepris dès le règne de Jean III. Ainsi en 1522, Sâo Thomé passe sous contrôle royal. Il se poursuit sous les princes de la maison de Habsbourg et ceux de la Maison de Bragance. A partir du Ministère de Pombal (1750-1777) il n'y aura plus à la tête des colonies que des se livrent volontiers pour fonctionnaires royaux. Ces fonctionnaires l'administraarrondir leurs revenus au trafic, ce qui déconsidère Lisbonne à interdire cette pratique tion et contraint (1666-1673). L'inconvénient des séjours trop brefs (trois ans) des gouverneurs était apparu à Pombal qui augmenta la durée de leur séjour. En réalité il est assez vain de tracer un tableau général de l'admilocales et la nistration portugaise en Afrique, car les circonstances valeur morale plus ou moins grande des Portugais engagés sur place Il faut donc étudier séparément ont eu une importance déterminante. la présence portuoù s'est manifestée chaque région géographique gaise. — Arguin enArguin — Les îles du Cap Vert — La Guinée portugaise. voie au Portugal environ un millier d'esclaves par an dans la deuxième moitié du xve siècle. L'île de Santiago du Cap Vert (au large de Dakar) est peuplée à partir de 1460 environ d'aventuriers génois, portugais et et faire la traite des castillans qui vont monter quelques plantations esclaves dans le secteur côtier situé entre le Sénégal et les îles Sherbro (1) Supra, p. 46-48.
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(Sierra Leone). A partir du milieu du xvie siècle des négriers anglais à travailler dans la région de la Gambie et et français commenceront Toute cette côte, les îles du Gap Vert perdront de leur importance. sera fréquentée Guinée portugaise, par des y compris l'actuelle négriers individuels et non par des Compagnies officielles comme la deux brèves côte à l'est du Cap des Trois .Pointes, sauf pendant une Compagnie de périodes 1676-1680 et 1690-1702 où fonctionnera des Portugais Gacheu et Gabo Verde. Au xviie siècle cependant et s'étade l'actuelle Guinée portugaise s'avancent dans l'intérieur blissent à Farim en 1640 à cent kilomètres de Gacheo. Entre 1703 et 1736 les Français occuperont Bissao. Elmina et la côte entre le Cap des Trois Pointes le Vent, côte de Mina).
et le Niger (Côte Sous
Installés à Elmina en 1482, les Portugais en seront chassés par les Hollandais en 1637. Durant un siècle et demi ils auront pratiqué très peu la traite mais beaucoup le commerce de l'or (1). Au début ils importaient même des esclaves sur la côte de l'Or, à partir de Bénin, Sâo Thomé et Arguin. Leurs autres comptoirs de la côte de l'Or, Axim et Accra, seront également enlevés par les Hollandais en 1642 et serviront alors essentiellement à la traite. aux actuels Togo et Négligeant le secteur côtier correspondant Dahomey les Portugais installent un comptoir à Gwato au Bénin en 1486 et l'abandonnent en 1526. Nous en avons parlé précédemment au ainsi que des relations diplomatiques et commerciales entretenues xvie siècle avec le royaume de Warri. En 1642 les Portugais ont donc perdu toutes leurs positions officielles sur la Côte de Mina, mais ils vont conserver une grande activité commerciale grâce au tabac en rouleaux (2) produit en grande quantité au Brésil et devenu dans le courant du xviie siècle un article indispensable à la traite, réclamé de façon impérative par les fournisseurs d'esclaves de la côte. Fort astucieusement les Hollandais vont « autoriser » les vaisseaux brésiliens à commercer dans les quatre ports de Popo, Ouidah, Jacquin et Apa à la condition expresse de faire escale à Elmina et d'y abandonner dix pour cent de leur cargaison de tabac. L'affaire est d'ailleurs excellente pour les deux parties car on n'importe sur la côte de Mina que du tabac de troisième qualité invendable en Europe ! Mais le marché conclu n'empêche pas les navires hollandais d'attaquer chaque fois qu'ils le peuvent les vaisseaux portugais ou brésiliens. Aussi les Portugais font-ils construire en 1721 un fort à Ouidah, juste à côté des forts français et anglais élevés en 1671. (1) H. HAUSER,op. cit. 1929, p. 420, citant Ad. SOETBEER(Gotha, 1879), indique les livraisons d'or en Europe. De 1521 à 1544 il y eut 2 400 kg d'or africain contre 1500 kg d'or européen et 3 260 d'or américain ; de 1545 à 1560,2 000 kg d'or africain contre 1 000 d'or européen et 5 400 d'or américain. (2) P. VERGER,Râle joué par le tabac de Bahia dans la traite des esclaves au golfedu Bénin, Cahiers d'Études Africaines n° 15, 1963, p. 24.
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LES EUROPÉENS EN AFRIQUE NOIRE
Le nombre d'esclaves exportés à partir de Ouidah varie considérablement suivant les années. Entre mai 1722 et juillet 1724 on recense à Bahia 12 843 entrées de nègres provenant de la côte de Mina (1). A partir de 1728 les chiffres diminuent à cause des guerres entreprises ou subies par Agadja (1708-1732), le roi du Danhomé et son successeur OuiTegbessou (1732-1774), contre les royaumes d'Allada etdeSavi. dah est prise en 1747. La traite y devient si peu active à la fin du leur fort en 1797, les Anglais xviiie siècle que les Français abandonnent en 1807. Mais les Portugais continuent d'acheter à Ouidah des esclaves qu'on fait travailler surtout dans les mines d'or et de diamant du Brésil où ils sont plus appréciés que la main-d'oeuvre angolane. A la fin du xviiie siècle la présence portugaise est limitée à l'actuelle Guinée portugaise et à Ouidah mais la langue portugaise ou plutôt un baragouin portugais reste pratiqué par les chefs indigènes tout le long de la côte. Tout le vocabulaire négrier est parsemé de mots portugais. Quant aux missionnaires établis quelque temps en Sierra Leone, en Gold Coast et au Bénin, ils ont laissé bien peu de traces, malgré l'activité de certains comme le P. Barreira au Sierra Leone entre 1604 et 1624 suivi par les capucins Séraphin de Léon (+ 1657) et Antonio de Trujillo (f 1685) (2). Les îles du golfe de Guinée : Fernando Sâo Thomé.
Po, île du Prince,
Annobon,
Fernando Po, Sâo Thomé et Annobon sont découvertes en 1483, Principe (= île du Prince) en 1485. Fernando Po et Annobon seront vendues en 1778 à l'Espagne. Fernando Po, célèbre repaire de négriers de toutes nationalités au xviiie siècle, servira au xixe siècle de base navale pour la lutte antiesclavagiste. A l'époque envisagée ici seule Sâo Thomé, île volcanique située juste sous l'équateur, joue un rôle Nous avons longuement historique. parlé dans le chapitre consacré au royaume du Congo du rôle néfaste d'intermédiaire et d'écran entre Lisbonne et San Salvador joué par Fernâo de Mello et les négriers de Sâo Thomé. Au xvie l'île est remarquablement prospère ; elle est le principal producteur de sucre et le principal et consommateur distributeur d'esclaves. C'est l'exemple de l'économie sucrière et esclavagiste de Sâo Thomé qui sera imité au Brésil. A la fin du xvie siècle Sâo Thomé perd sa prépondérance dans la traite par atlantique suite de l'essor du trafic négrier à Loanda. Elle sera conquise par les Hollandais entre 1641 et 1643 et restera portugaise — et sans histoire — jusqu'à nos jours. Le royaume du Congo (ou de San Salvador). Du fait que la plus grande partie de l'ancien royaume du Congo est aujourd'hui incluse dans l'Angola, beaucoup de gens sont persuadés (1) P. VERGER,Le fort portugais de Ouidah, Études dahoméennes, mai 1965, p. 5-50. (2) L. JADIN,L'Afrique et Rome depuis l'époque des découvertesjusqu'au xviie siècle, in Rapports du Congrès International des Sciences historiques, 1965, vol II, 33-69.
ET A MADAGASCAR
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que la « frontière historique » de l'Angola portugais au xvie siècle était le fleuve Congo. Aussi croyons-nous nécessaire de répéter ici que le royaume du Congo ou plutôt de San Salvador resta jusqu'en 1665 un Etat associé, accordant un traitement préférentiel au Portugal, mais conservant son autonomie sans toutefois être considéré comme état souverain. Après la bataille d'Ambuila (1665) les Portugais de Loanda rendent des honneurs royaux au malheureux roi Antonio 1er tué au cours du ils ne s'intéresseront combat. Dorénavant plus au Congo qui, après de 1710, s'émiettera en une série de petites cheferies la restauration La côte au nord du Loje (limite méridionale du roindépendantes. yaume du Congo) était fréquentée depuis 1620 environ par des Hollandais, puis des Français et des Anglais. A Ambriz les Hollandais avaient établi un poste commercial pendant la période d'occupation de Loanda (1641-48) et continué le commerce dans la deuxième moitié du xviie siècle. Au xviiie siècle le port d'Ambriz prend de plus en de proet l'Angola doit lutter contre l'importation plus d'importance duits français et britanniques introduits dans le territoire portugais situé sur le territoire par ce port « congolais » (ou plus exactement de l'ancien Congo). En 1855 les Portugais occupent Ambriz et vont jusqu'à Bembe où existaient les mines de cuivre qu'ils n'avaient jamais pu exploiter défiparce qu'elles étaient en territoire congolais. Mais l'exploitation, citaire, sera abandonnée vers 1860. En 1860 des troupes portugaises à San Salvador et à entreront Mpinda, mais vers 1866 les postes de Mpinda, San Salvador et Bembe seront évacués. C'est en 1883 seulement que sera annexée officiellement la région comprise entre Loje et Congo correspondant à l'ancien royaume du Congo. L'Angola. Il n'y avait pas jusqu'à la fin du xviiie siècle une colonie de l'Angola d'un seul tenant. Il y avait le royaume portugais de l'Angola, dont nous avons précisé les dimensions fort restreintes (1), limité au nord au Dande, au sud à la Couanza, à l'est aux environs de Malange. Séparé de Loanda par 400 km (à vol d'oiseau) il y avait le royaume portugais de Benguela. Benguela avait été fondée en 1617 par Manuel Cerveira Pereira. C'était une petite agglomération de pêcheurs et de fermiers, sans importance. Ovimboundou n'était absolument L'arrière-pays pas soumis mais à partir de 1630 certains Portugais de Benguela vinrent s'y établir et s'y marier. Ces sertanejos ou broussards étaient complètement autonomes jusqu'au célèbre gouverneur de Souza Coutinho qui créa pour eux des « juridictions de brousse ». Ils devaient largement contribuer par leur activité commerciale au développement des principautés Ovimboundou. En 1685 était fondé le presidio de Caconda, où allaient se grouper de nombreux sertanejos. (1) Supra, p. 60-64.
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LES EUROPÉENS EN AFRIQUE NOIRE
Il faut en effet distinguer dans la colonisation portugaise l'action et celle des individus le plus souvent métisofficielle gouvernementale sés qu'on appelait pombeiros ou sertanejos. Au milieu du xixe siècle on trouvera des marchands portugais jusqu'au centre de l'Afrique, mais les territoires réellement contrôlés par les Portugais sont dérisoires par rapport aux dimensions des colonies actuelles portugaises. Considérer le « royaume de Benguela » comme s'étendant de la Couanza au Counene ainsi que le représentent certaines cartes du xviiie siècle est une véritable escroquerie historique. Le « royaume portugais d'Angola » est établi dans ses limites en 1671 après la prise de Pungo a Ndongo, capitale de l'ancien Dongo. Il est divisé en présidios ou « capitaineries » commandées par des militaires qui disposent de très larges pouvoirs sur le plan local. Sa capitale Loanda connaît une remarquable prospérité entre 1670 et 1750. Les énormes bénéfices procurés par la traite des esclaves permettent de construire une « Lisbonne africaine » remplie d'églises et de palais somptueux. Depuis le gouverneur jusqu'au simple citoyen en passant par les militaires et les ecclésiastiques, tout le monde est engagé dans le trafic des esclaves. Aussi les cultures et l'industrie locale sont-elles négligées. Loanda est ravitaillée en grande partie par le Brésil (1) qui dispose ainsi d'un fret de retour pour les navires négriers. Lisbonne a beau interdire la pratique du commerce à ses fonctionnaires en 1666 et 1673, la traite continue de plus belle. Mais à partir de 1750 les Portugais de l'Angola commencent à sentir la concurrence des négriers anglais et français établis au nord du Dande et jusqu'au Cap Lopez. Vers 1760 ils pensent à occuper Ambriz, Cabinda, Malemba et Loango, mais ne réalisent pas ce projet. En 1760 les Jésuites qui avaient été si actifs dans l'Angola depuis deux siècles sont expulsés à la suite des mesures prises au Portugal par le ministre Pombal (1750-1777). En 1765 arrive un nouveau gouverneur, ami de Pombal. Francesco Souza Coutinho est considéré comme « moderne » de l'Angola. le premier gouverneur Constatant l'état de délabrement où est tombée la colonie par suite de son économie basée exclusivement sur la traite, il met en train une série de mesures Il encourage l'agriculture constructives. et l'industrie locale, crée une du soufre et de l'asphalte, fonderie, étudie les possibilités d'exploitation envisage de faire venir des colons sur les hauts plateaux à l'est de Benguela et dans ce but installe un nouveau presidio à Novo-Redondo. Mais ses mesures de coercition contre la corruption et la fraude sont peu appréciées des habitants blancs de la colonie. Moçamédès succède à, Coutinho et fait explorer systématiquement « terra incola région côtière au sud de Benguela restée jusqu'alors gnita ». A la fin du xviiie siècle, malgré le passage de ces deux gouverneurs plus dynamiques que les précédents, l'Angola n'a guère changé. 88 % (1) La Compagnie générale du Brésil eut de 1649 à 1680 le monopole du vin, huile, farine, morue salée, et de 1680 à 1720le monopole de tout le commerce d'Afrique.
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de la traite, 4,8 % de la vente du revenu de la colonie proviennent de son écod'ivoire, 0,9 % du sel, 4 % de taxes (1). La transformation nomie va se faire lentement et progressivement jusque vers 1850 où la traite officielle a partir de l'Angola. Nous disparaîtra pratiquement du xixe siècle au chapitre XV. examinerons cette transformation Mozambique. — Nous avons déjà traité dans l' « Afrique centre-australe » la côte de l'actuel Mozambique et la pénétration portugaise vers l'intérieur jusqu'au xixe siècle. Les premiers prazeros remontant à certainement plus à l'histoire 1575, leurs descendants appartiennent « africaine » qu'à l'histoire européenne de l'Afrique : la signification du Mozambique dans la politique ultra-marine portugaise est en effet très différente de celle de l'Angola. L'Angola s'est développée en fonction du Brésil et le Brésil a été portugais jusqu'en 1822. Le Mozambique s'est développé en fonction de l'empire indien du Portugal, mais en 1663 il ne subsistait de cet empire que les villes de Goa, Cochin et Macao... et les Portugais n'avaient même plus assez de navires pour alimenter des lignes commerciales régulières entre Lisbonne, Moçambique et Goa. Il en résulta dès la fin du xviie siècle un isolement complet des différents secteurs Nous avons vu qu'il n'y qui composaient l'Est africain portugais. avait plus aucun trafic à Sofala dès le milieu du xviie siècle, que les arrêtés en 1698, furent définitivement rapports avec le Monomotapa que cette même année 1698 les Arabes d'Oman mettaient un terme à leur conquête de la côte au nord du cap Delgado en s'emparant de Mombasa et de Sokotora, et qu'à la fin du xviie siècle également l'immigration indienne avait atteint des proportions inquiétantes. En 1752 les Portugais signent avec l'imam de Mascate un accord par lequel ils renoncent à toutes leurs possessions situées au nord du Cap Delgado. Cet accord ne fait que confirmer une situation de fait datant de 1698. La même année 1752, l'administration du Mozambique est définitivement séparée de celle de Goa et Lisbonne nomme Francisco de Melo e Castro premier gouverneur du Mozambique. En réalité les prazeros du Zambèze ont bien peu de sang portugais dans les veines et sont généralement métis d'indiens et de Bantou. Ils mènent une vie totalement officielle porde l'autorité indépendante tugaise. A la fin du siècle ils commencent à s'intéresser au trafic d'esclaves vers la côte, mais la demande est encore minime, dix mille par année entre 1780 et 1800 d'après Correia Lopès (2). C'est au xixe siècle seulement que se produira une augmentation sensible de la traite au Mozambique. à la flotte Madagascar. — Nous avons vu que Diogo Dias appartenant d'Alvares Cabrai à la suite d'une tempête a longé la côte orientale de Madagascar. En 1506 Tristan da Cunha pille un comptoir arabe installé (MCité par J. VANSINA, Les royaumes de la Savane, p. 142 d'après DA SILVACORREA, Hisioria de Angola, Lisbonne 1937, 2 vol. (2) Cité par DUFFY,p. 146.
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LES EUROPÉENS EN AFRIQUE NOIRE
En 1507, sur une île de la côte nord-ouest et massacre les habitants. Ruis Pereira commerce avec les Malgaches de Matitana et baptise l'île du nom de Saint-Laurent. L'année suivante, le roi de Portugal charge Lopez de Sequeira d'explorer l'île. Le sud-est est alors reconnu de la baie de Ranofotzy à la Matitana où Luis Figueira, en 1515, installe un fortin, cependant que les baies d'Antongil et de Vohémar. Des ses hommes reconnaissent s'établissent surtout dans la baie de Maharelations commerciales jamba. D'autre part, Diego Suarès, négrier portugais qui conduisait des esclaves en Inde, a laissé son nom à l'une des meilleures baies du monde et à une ville. Le R. P. jésuite Luis Mariano parcourt la côte de Madagascar entre 1613 et 1619. Au cours d'un premier voyage, les baies de la côte ouest visitées et des traités d'amitiés passés avec sont systématiquement les souverains locaux. Ensuite, les navires portugais vont mouiller dans la baie des galions chez les Antanosi. Le fils du roi est emmené à Goa où il est baptisé sous le nom de Don André. Luis Mariano s'installe à Sadia (embouchure du Manambolo) et devant son échec fait encore une tentative à Ampasindava, mais, là, le commerce arabe est le plus fort et le R. P. Mariano se replie sur la côte africaine. C'est la fin des activités portugaises à Madagascar.
II. LES
HOLLANDAIS
EN AFRIQUE
L'activité coloniale des Provinces Unies s'explique par la vocation commerciale des plus importantes provinces, Hollande et Zélande, intermédiaires habituels entre la péninsule ibérique et le nord de l'Europe pour les produits exotiques. Les difficultés provoquées par Philippe II puis par Philippe III devaient lancer les Hollandais à la recherche directe des épices sur la route de l'Inde et de l'Indonésie. Les marins néerlandais entreprennent ces expéditions d'autant plus volonristiers qu'étant calvinistes ils ne craignent pas l'excommunication quée par ceux qui enfreignent la bulle de partage du monde. Quelques tentatives sans succès sur les îles côtières portugaises les découragent de Saint-Paul de Loanda (1641-1648) et surtout jusqu'à l'occupation l'installation d'une colonie de peuplement au Cap (1652) pour assurer une escale sur la route des Indes en de meilleures conditions que SainteHélène occupée en 1651 par les Anglais. La Hollande conservera jusqu'à la fin du xviie siècle sinon une préAu du moins une force navale respectable. maritime, pondérance quelxviiie siècle la Compagnie des Indes occidentales maintiendra ques comptoirs sur les côtes ouest africaines, cependant que le Cap, escale obligatoire de la Compagnie des Indes orientales, se développera Les possessions africaines de la Hollande seront progressivement. au bénéfice de l'Angleemportées dans la tourmente révolutionnaire terre.
ET A MADAGASCAR i. Linéaments caines.
d'une politique
coloniale
néerlandaise
331 sur les côtes afri-
La déchéance du roi d'Espagne proclamée en 1581 ouvre un conflit dont vont bénéficier les provinces de Hollande et de Zélande. En effet, les Provinces unies disposent d'un potentiel maritime et commercial considérable. Anvers, occupé par les forces espagnoles, a replié sa flotte sur Amsterdam qui se trouve profiter du renfort des pilotes anverlointaines. L'état major commercial, sois habitués aux navigations d'Anvers, reçoit également déjà renforcé par des Flamands protestants dans les dernières années du xvie siècle les juifs expulsés de cette ville par les Espagnols. Par ailleurs, comme le souligne Charles de Lannoy (1), « la haute influence du patriciat urbain, recruté parmi les classes commerçantes, du pays une protection vigilante garantit aux intérêts commerciaux et avertie. C'est un élément de succès pour les entreprises coloniales ». de Kampen Cependant, si le comptoir ouvert par les commerçants continuent à Lisbonne est fermé dès 1581, les navires néerlandais à dans les ports espagnols où des saisies sont effectuées s'approvisionner en 1584, 1590 et 1595 sur ordre du roi d'Espagne. Aussi les armateurs envisagent-ils d'aller chercher les produits à la source. En 1592, Cornelis van Houtman est envoyé à Lisbonne où il recueille de nombreux renseignements sur les itinéraires maritimes d'alors. En 1594 est constituée la première compagnie pour le commerce des Indes orientales par la voie du Cap (compagnie Van Verre). La même année, à la suite de renseignements fournis par Barend Erikzoon d'Enkhinzen, se constitue la première association pour le commerce de Guinée. Mais jusqu'en 1600 les compagnies se multiplient et se font concurà un pays en guerre. Aussi rence, ce qui est infiniment préjudiciable Oldenbarneveldt, pour des buts plus militaires que commerciaux, estil soucieux d'une concentration de nécessaire : les États décident fondre les compagnies en une seule. La charte de la Compagnie générale des Indes orientales est signée le 20 mars 1602. 2. Entreprises
hollandaises
sur la côte d'Afrique.
ces Jusqu'à la fondation de la Compagnie des Indes occidentales en direction des entreprises font partie de la politique néerlandaise Indes orientales. La dynamique personnalité de Balthazar de Moucheron entraîne plusieurs tentatives contre les possessions portugaises de la côte occidentale Par la suite, des encouragements d'Afrique. des Etats Généraux permettent avant que la plusieurs installations ne reçoive la côte ouest africaine Compagnie des Indes occidentales dans son secteur. Balthazar de Moucheron, armateur efficace, particulièrement (1) CHARLES DE LANNOY,Expansion coloniale de la Nèerlande (XVIIe et XVIIIe siècles),Paris, Bruxelles, 1911, p. 20.
332
LES EUROPÉENS EN AFRIQUE NOIRE
de cette côte. Il attaque le principal comptoir comprend l'importance San Jorge del Mina et se fait repousser ; par contre, le portugais, 25 mars 1597, il parvient à prendre l'île du Prince qui sera bientôt reprise par les Portugais venus de Sâo Thomé. Il forme alors avec les États, le prince d'Orange et quelques particuliers une société destinée à faire des conquêtes au-delà de l'océan. De Moucheron devait recevoir la propriété de l'île de Sao Thomé. Une flotte considérable est rassemblée, commandée par Van den Kerkhove et renforcée d'éléments conduits par l'amiral Van der Does. Sâo Thomé est pris malgré l'énermais une épidémie fauche bientôt des Portugais, gique résistance 1 200 hommes et Van der Does lui-même, si bien que l'escadre doit se contenter d'aller piller quelques comptoirs le long des côtes brésiliennes. Le. contrat donnant encore un délai de deux ans à de Moucheron, ses officiers essaient de conquérir Annobon et Sâo Thomé, mais ne réussissent qu'à occuper quelques îles dans l'estuaire du Gabon (1600Ruiné par ces revers, il quitte les 1601). C'est la dernière tentative. Pays Bas. Ses échecs marquent, pour quarante ans, les destinées africaines de la Hollande. Il faudra en effet la vaste entreprise de relève de plusieurs du Portugal hollandaise l'occupation pour entraîner points de la côte de Guinée et de Saint-Paul de Loanda. 3. La Compagnie
des Indes Occidentales.
En 1611, le fort de Nassau est construit près de Mourée dans le royaume de Sabou (actuel Ghana). Au Sénégal, l'îlot de Barzaguiche, en face du Cap Vert est occupé (1617). Il est baptisé Gorée, ce qui signifie « bonne rade » (1) et qui est d'ailleurs le nom d'une île de la Zélande. Deux forts y sont construits cependant qu'une factorerie est édifiée au Porto Gaspar sur le rio Fresco (Rufisque). Par un édit du 27 mars 1614, les États généraux des Provinces Unies de nouveaux pays le droit avaient accordé à ceux qui exploreraient d'y faire à leur profit exclusif quatre voyages. A — Création de la Compagnie. Depuis la conclusion de la trêve (1609), Usselincx travaillait à créer L'arrestation d'Oldenbarneune compagnie des Indes Occidentales. velt (1618) et le triomphe du parti orangiste permet à Usselincx de faire aboutir son projet. L'octroi du 3 juin 1621 donne pour vingtquatre ans à la compagnie le monopole du commerce et de la navigation sur la côte occidentale d'Afrique depuis le tropique du Cancer jusqu'au Cap de Bonne Espérance. La compétence de la compagnie s'étend à l'ensemble des Amériques et sur les terres australes depuis le méridien du cap de Bonne Espérance à l'est jusqu'au méridien passant à l'est de la nouvelle Guinée à l'ouest. La compagnie comprend un conseil de dix neuf membres ; elle gère (1) ABBÉBOILAT,Esquisses sénégalaises, Paris 1853, p. 4.
ET A MADAGASCAR
333
sous réserve de n'engager la guerre ses intérêts en toute indépendance des États généraux. Cette compagnie des Indes qu'avec l'assentiment occidentales est une création officielle à laquelle le haut commerce n'a participé que dans un but politique. Elle remplit pendant 25 anau nées un rôle guerrier, mais surtout en Amérique et notamment Brésil. ne pouvait être uniforme pour des colonies Le régime administratif New comme la nouvelle Amsterdam de peuplement (actuellement antillaises et les comptoirs de GuiYork), des colonies de plantations née. Ces colonies au début connaissent le même système. Le chef porte le titre de directeur ou directeur général, il représente la compagnie en toutes matières administratives, judiciaires, militaires ou commerciales. Il est le plus souvent aidé d'un fiscal responsable de la police, commerciale de commis pour l'entreprise (comptables, magasiniers, marchands) et des officiers de la garnison. et aux Ce système, qui convenait mal à l'Amérique septentrionale où il demeura en Antilles, était parfaitement adapté à l'Afrique vigueur jusqu'au xviiie siècle. A cette époque les pouvoirs du conseil commis furent étendus pour mettre un terme aux détournements par le chef de la colonie. B — Les conquêtes. des Hollandais leur permet de L'écrasante maritime supériorité mener plusieurs actions sur les possessions portugaises à l'occasion des En 1623 ils capturent guerres franco-espagnoles. sept vaisseaux de commerce portugais et occupent un moment Benguela. L'année suivante ils brûlent six navires dans le port de Loanda puis se retirent à Mpinda. En 1625 une action tentée par le vice amiral Veron contre San Jorge del Mina échoue et coûte aux Hollandais 450 hommes. Douze ans plus tard la forteresse portugaise tombera (1637). En 1638, la prise d'Arguin permet de commercer en toute sécurité le long des côtes mauritaniennes et sénégalaises. En 1639 ils tiennent l'estuaire du Congo. Cependant entièrement soumis le Brésil est presque d'autre par les Hollandais 1630) qui s'établissent (Pernambouc part aux Antilles (Curaçao, Saint Eustache, Tobago) entre 1630 et 1640. En 1641, comme nous l'avons vu, l'amiral Jol enlève SaintPaul de Loanda, Sâo Thomé et Benguela. de Mais la démission Maurice de Nassau, son départ du Brésil (22 mai 1644), accélère le mouvement de repli des Hollandais l'Angola et qui abandonnent Sào Thomé (1648). La paix de Bréda (1667) marque l'apogée de la puissance néerlanannées encore parmi les états daise, qui comptera durant quarante de ses contingents dirigeants de l'Europe. Cependant l'insuffisance terrestres ne lui permet pas de jouer un grand rôle dans les conquêtes territoriales. Dans le domaine maritime les flottes de la France et de l'Angleterre acquièrent une supériorité massive.
LES EUROPÉENS EN AFRIQUE NOIRE
334
C — Remaniement
de la Compagnie
des Indes occidentales.
Depuis 1654, le rôle militaire de la compagnie est de plus en plus réduit. Sa situation financière atteint un point critique, aussi est-elle dissoute (20 septembre 1676) et remplacée par une autre dont la comva depuis le tropique du Cancer jusqu'au 30° de pétence territoriale latitude sud avec les îles de Sâo Thomé, Annobon, île du Prince, Fernando Po ainsi que les Antilles. C'est en gros le domaine de la traite. Par ailleurs, le monopole des entreprises coloniales est retiré à la comle droit de créer des colonies pagnie, les états généraux s'accordant dans tous les endroits où la compagnie n'aurait pas d'établissement. Durant cette période c'est par la marine hollandaise qu'il faut passer lorsque l'on veut visiter la côte d'Afrique, aussi bien est-ce sur un navire hollandais que s'embarquera Villault de Bellefonds en 1664, pour étudier les possibilités d'expansion du commerce de la compagnie des Indes Occidentales que vient de créer Colbert. D'Elbée qui, en 1669, s'embarque pour la côte d'Afrique, a des timoniers hollandais. Offra, au Dahomey, a déjà un comptoir hollandais et un anglais. Les Hollandais sont très jaloux de leurs prérogatives et ceux du les Français de la Compagnie de attaquent comptoir de Takoradi Guinée installée à Commendo. C'est à la suite de cette action que le lieutenant de vaisseau Ducasse est envoyé par Seignelay en mission d'inspection. La compagnie doit céder lors de la paix de Nimègue (1687) les îles d'Arguin et de Gorée conquises par les forces françaises en 1677. La même année une querelle éclate entre les agents de la compagnie de l'électeur de Brandebourg hollandaise et les représentants qui ont construit en 1682 un fort au cap des Trois Pointes. et Les Hollandais occupent un comptoir à Jaquin au Dahomey assurent une part notable du trafic des esclaves. Le plus célèbre des chefs de comptoirs est le Hollandais Hartog qui, en 1732, tente de soulever les populations contre le roi Agadja. Mais après la prise de Jaquin par Agadja le 22 mars 1732, Hartog doit s'enfuir à Épée d'où il est chassé à nouveau. Si la seconde Compagnie des Indes occidentales s'occupe peu de l'administration de ses terres d'Amérique laissées aux chambres de Hollande et Zélande ou à des compagnies concessionnaires, elle contrôle avec un soin jaloux l'administration des comptoirs de Guinée. Acculée à la faillite cette compagnie se voit refuser en 1791 le renouvellement de son octroi. Ses établissements sont alors soumis à un conseil des colonies qui sera supprimé en 1795. 4. La compagnie Premières
des Indes Orientales
escales à Madagascar
et l'installation
au Cap.
et à Maurice.
Dès la fin du xvie siècle, des navires hollandais sur la route des Indes relâchent à Madagascar notamment à Saint Augustin (embou-
ET A MADAGASCAR
335
chure de l'Onilahy) et surtout la côte Est. L'amiral Cornelis Van HoutEn 1663 man séjourne à l'île Sainte-Marie et à la baie d'Antongil. paraît le premier dictionnaire malgache avec les mots malais correspondants qui a été établi par Frédéric de Houtman, compagnon de voyage et frère de Cornelis. La baie de Sainte-Luce (Manafiafi) dans l'Anosi est aussi régulièrement fréquentée par les Hollandais. Une station est fondée en 1638 à l'île Maurice. Des contacts se mulLes tiplient pour nourrir l'île et se procurer des esclaves malgaches. alors Saint-Augustin, Hollandais fréquentent Moromba, Itaperina, Manantenina, la Mananivo, Sainte-Marie, Antongil. En 1642, le roi d'Antongil se déclare avec ses vassaux « loyaux, légitimes et vrais sujets de leurs hautes puissances Messieurs les États généraux des libres Pays Bas Unis » (1). Le Cap, escale de la Compagnie
des Indes Orientales.
Des navires hollandais avaient relâché au Cap au retour des Indes, notamment en 1618 et 1632 (2), mais c'est en 1648 que le naufrage du « Haarlem » provoque le séjour forcé de deux officiers au Cap. Les observations communiquées à la Chambre d'Amsterdam (1649) insistent sur le fait qu'un poste permanent entraînerait une sécurité accrue des relations avec l'Inde et affirment qu'il serait facile de vivre en bons termes avec les indigènes, « si on leur paie ce qu'ils fournissent et si on remplit leur ventre de pois et de haricots dont ils sont très friands ». Les directeurs de la compagnie approuvent l'année suivante le projet de créer au Cap de Bonne Espérance dans la baie de la Table, une « station de rafraîchissement » appuyée par un fort. Sur ces entrefaites la prise de l'île de Sainte-Hélène par les Anglais (1651) rend plus nécessaire l'aménagement du Cap où le chirurgien Jan Van Riebeck arrive le 6 avril 1652 avec une centaine d'employés de la Compagnie. A partir de 1660, l'escale du Cap de Bonne Espérance devient obligatoire tant à l'aller qu'au retour. Ainsi, les flottes dispersées par le mauvais temps s'y retrouvent. L'implantation
humaine.
Les débuts sont difficiles. La ville d'Amsterdam envoie quelques renforts en marins et soldats libérés du service. Quelques condamnés y sont également transportés, si bien qu'il y a en 1680 aux alentours du Cap environ six cents colons d'origine hollandaise. La Compagnie qui ne perd pas de vue les objectifs commerciaux édicté des règlements très stricts. Les colons doivent être mariés, de bonne conduite, appartenir à la religion protestante, enfin s'engager W Cité par DESCHAMPS, Histoire de Madagascar, p. 65. ) Inscription de matelots hollandais trouvée sur des roches lors des travaux du che(2 min de fer suburbain do Cape Town, Cape Times du 14mars 1906, cité par CH,DELANNOY,op. cit, p. 129.
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LES EUROPÉENS EN AFRIQUE NOIRE
à une résidence de dix années pour eux-mêmes et de vingt années pour leurs enfants. La Compagnie achète ce que les colons produisent, leur vend ce dont ils ont besoin, leur amène des esclaves de Madagascar et du Mozambique, fixe les prix, interdit le trafic avec les non-Hollandais et surtout toute relation avec les indigènes. La révocation de l'édit de Nantes (22 octobre 1685) et les persécutions contre les Vaudois des Alpes amènent en Hollande un grand nombre de huguenots français ; la Compagnie des Indes orientales leur offre le voyage gratuit et des facilités d'emprunt pour du matériel Français seront agricole. De 1687 à 1700, environ deux cent-cinquante ainsi transportés. Exploration
de l'arrière-pays.
Dès 1658, l'exploration de l'arrière-pays est entreprise. Le voyage de Then Ryne en 1673 est suivi en 1685 d'une reconnaissance dirigée par le gouverneur Simon Van der Stel qui parcourt le petit Namaqualand et y trouve des mines de cuivre. Ce gouverneur en vingt ans (16791699) donne à la colonie du Cap un décisif essor, encourageant l'installation de colons libres. Cependant, à la fin du XVIIe siècle, les conflits entre les colons et la Compagnie deviennent de plus en plus nombreux, si bien qu'en 1706 une pétition est envoyée à Batavia pour protester contre les agissements du gouverneur Villem Adrian Van der Stel qui, depuis 1699, avait remplacé son père. L'administration de la Compagnie protégeait les Hottentots contre les brutalités des Burghers d'où un soulèvement armé de ces derniers, lorsqu'à Paarl on voulut en livrer quelques-uns à la justice. Cette insurrection fut réprimée avec les dernière énergie et le meneur, un certain Barbier, exécuté. Mais les nouvelles du reste du monde, la propagation des idées démocratiques en Europe entraînent la naissance d'un mouvement similaire au Cap, où quatre délégués élus secrètement par les Burghers en 1779 sont envoyés à Amsterdam chez les « Dix-sept ». Les Burghers souhaitaient avoir une constitution écrite, des sièges au Conseil politique et à la Cour suprême, libre commerce avec les Indes et la Hollande, et aussi obtenir la libre traite des esclaves avec aux Chinois et Javanais Madagascar, le droit de fouet et l'interdiction de commercer. Devant ces revendications la compagnie ordonne une enquête, mais la guerre de l'indépendance américaine dans laquelle la France et les Pays Bas entrent ensemble contre l'Angleterre retarde toute décision. Après la victoire du Bailli de Suffren à Porto Praya dans les îles du Cap Vert, des troupes françaises sont débarquées au Cap pour prévenir une attaque anglaise et y restent de 1781 à 1783. les Le gouverneur Van der Graaf (1785-1791) essaie d'instaurer nouvelles réformes, puis est rappelé. En février 1795, le Landrost Maynier est chassé par une révolte de quarante burghers du district
ET A MADAGASCAR
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de Graaf Reinet. Une action analogue est menée à Swellendam. Cette : d'intervenir insurrection des colons donne l'occasion à l'Angleterre un corps de débarquement anglais arrive à False Bay le 11 juin 1795. de l'Afrique du sud, peut-être en raison de l'excessif L'exploration contrôle de la compagnie, progresse lentement. Le Natal est reconnu en 1705 et la baie de Delagoa en 1720, mais il s'agit plutôt d'exercices de cabotage. Hubner est tué au cours d'une rencontre avec les Bantou en 1736. Beutler, en 1752, franchit la rivière Kei le long de la côte puis revient par l'intérieur. Le fleuve Orange est franchi pour la première fois vers 1760. En 1761, le grand Namaqualand est reconnu jusqu'à la baie d'Angra Pequeiia. En 1776, Gordon, en 1778 Patterson, font des voyages au-delà de l'Orange. Puis les naturalistes Sparrman et Le Vaillant font d'intéressantes reconnaissances botaniques dans une grande partie de l'Afrique du sud. Deux importantes terminent le siècle au Namaexplorations qualand (1791) et à Walfish Bay (1792). La colonisation hollandaise est fondamentalement en différente Afrique du sud et en Afrique de l'ouest. En Afrique du sud il s'agit d'une colonisation d'éleveurs et d'agriculteurs destinée européens, à faciliter les entreprises de la compagnie des Indes orientales. Au contraire, en Afrique de l'ouest, il s'agit du trafic négrier classique où le potentiel naval et l'expérience commerciale des Néerlandais permettent de substantiels bénéfices. III. LES TENTATIVES DU GRAND ÉLECTEUR
OUEST-AFRICAINES DE BRANDEBOURG
On sait l'importance du règne de Frédéric Guillaume (1640-1688) clans la genèse de l'état prussien, notamment d'une par l'institution armée permanente et par l'accueil réservé aux Huguenots français chassés par la Révocation de l'édit de Nantes. Impressionné par l'essor économique des Pays-Bas où il a passé une partie de sa jeunesse, il prend à son service l'amiral Gysels van Lier, ancien commandant de la flotte hollandaise des Indes orientales. Dès 1647 est créée une compagnie brandebourgeoise des Indes orientales, mais c'est seulement en 1680 que l'armateur hollandais Benjamin Raule, sous la protection personnelle de Frédéric Guillaume, part sur la Côte de Guinée. Les Etats généraux de Hollande sentent le danger et rendent le 8 octobre 1680 une ordonnance « interdisant à tout sujet hollandais d'entrer au service étranger et obligeant à un prompt retour tous les Hollandais laisant partie d'expéditions étrangères ». Armé de ce texte le commandant de la compagnie hollandaise de la Guinée occidentale saisit l'un des vaisseaux do Raule. le capitaine Blonk aborde avec Cependant deux navires au Cap des Trois Pointes et conclut le 16 mai 1681 à Accada un traité avec les chefs africains Pregatte, Sophonge et Apany, H. COBNEVIN. — Histoire do l'Afrique, Tome II. 22
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LES EUROPÉENS EN AFRIQUE NOIRE
par lequel ces derniers s'engagent à ne commercer qu'avec les Brandele protectorat de Frédéric Guillaume et reconnaissent bourgeois, d'un fort entre Axim et le Cap des Trois autorisent la construction notables africains sont amenés à Hambourg et BerPointes.Plusieurs lin où ils paradent à la Cour. Le 17 mars 1682, est créée la Compagnie Commerciale de la Côte de Guinée à laquelle le privilège du trafic sur la Côte est concédé pour trente ans. Ayant réuni 50 000 thalers, le de Von grand électeur envoie deux vaisseaux sous le commandement der Grôben qui ramène les notables et, le 1er janvier 1683, hisse les sur le nouvel établissement couleurs brandebourgeoises baptisé Gross Friedrichburg. Après entente avec les États de la Frise orientale, Frédéric-Guillaume peut transférer le siège de la Compagnie dans l'excellent port Par ailleurs, pour favoriser le commerce des esclaves, le d'Emden. roi du Danemark, par le traité du 24 novembre 1685, permet à la d'établir un comptoir sur l'île de Saintcompagnie brandebourgeoise Thomas aux Antilles. étendait De son côté, le chef du comptoir de Gross Friedrichburg le domaine de la compagnie construisant un comptoir (Fort-Dorothée) à Accada (1684), Taccarary (Takoradi) (1685). En 1687 un autre établissement est installé dans l'île d'Arguin où l'ancien fort portugais se heurtent à l'hostilité des Néerest réparé. Mais les Brandebourgeois landais et, à la fin de 1687, le général hollandais de Sweers s'empare d'Accada et Takoradi, puis met le siège devant Gross Friedrichburg. intervient alors pour protéger ses sujets, L'électeur de Brandebourg et aurait peut-être même déclaré la guerre aux Etats généraux si la mort n'était venue le surprendre (29 avril 1688). Frédéric III qui deviendra roi de Prusse (1700) sous le nom de Frédéric Ier ne peut, en raison de la guerre de la succession d'Espagne, poursuivre une politique coloniale. En 1708, le bruit courut que le roi au roi de Portugal avait offert 50 000 livres de Gross Friedrichburg de Prusse (1). En fait, les entreprises allemandes se heurtent à l'hoset des Anglais en Afrique. Après la tilité des Danois à Saint-Thomas mort de Frédéric Ier (1713), Frédéric-Guillaume Ier, son fils, se résigne à liquider des possessions qu'il est hors d'état de protéger. Par le traité du 18 décembre 1717, le nouveau roi de Prusse cède l'ensemble des établissements africains à la Compagnie hollandaise des Indes occidentales pour 7 200 ducats et douze esclaves noirs dont six attachés avec des chaînes d'or. Les deux parties font une bonne affaire. La tradition militaire allemande veut que Gross Friedrichburg ait été évacué seulement en 1724. Le dernier représentant prussien, un certain Dubois, a laissé dès 1716 le soin de la défense à l'Africain Cuny pour venir demander les renforts qu'il n'obtiendra pas. Certains auteurs ont reproché à Frédéric-Guillaume Ier d'avoir vendu ces comptoirs pour 7 200 ducats destinés à payer des soldats. Il parait évident, lorsqu'on évalue la puissance maritimo relative des nations (1) DAVIES,The Royal African Company,p. 276.
ET A MADAGASCAR
339
d'alors, qu'on ne peut que constater au contraire le commerçantes réalisme du souverain qui réussit à vendre ce qu'on lui aurait pris (1). Certes, l'idée de Frédéric-Guilplus tard sans dédommagement laume ne manquait pas de hardiesse, mais, pauvre en hommes et en argent, le grand électeur en était réduit à prêter son pavillon à quelques soldats et assurer une protection toute morale à des armateurs et des marins pour la plupart hollandais. Il manquait alors à la Prusse d'avoir réalisé son unité nationale et d'être riche. De fait, c'est après la réalisation de son unité et en plein essor industriel que l'Allemagne, 166 ans plus tard, s'engagera dans l'expansion coloniale. IV. LES
DANOIS
Parlant de la colonisation écrivait (2) :
EN AFRIQUE suédoise
OCCIDENTALE
et danoise,
Leroy-Beaulieu
« Ces petites contrées... se tournèrent aussi vers les entreprises lointaines, attirées par la force irrésistible de l'exemple et de l'émulation. On les vit essayer de prendre timidement part à cette curée des richesses de l'orient que les grandes nations de l'Europe se disputaient au prix de tant de sang ; on les vit consacrer leurs capitaux au défrichement de quelques îlots des Antilles, avoir aussi leurs esclaves, leurs plantations et leur pacte colonial... » En fait, c'était le haut rendement des capitaux et leur force maritime qui poussa les Scandinaves vers le fameux trafic triangulaire Eu(3). rope-Antilles-Afrique Christian IV (1588-1648) favorise la création d'une Compagnie de Guinée (1616). En 1622 il se met en rapport avec les marchands hollandais et c'est le port de Gliickstadt qui devient le centre des relations avec l'outre-mer. Mais la compagnie fait do mauvaises affaires et, en 1634, à sa dissolution, les dettes absorbent son actif. Une deuxième compagnie est lancée la même année. Bientôt (1652) les marchands danois établissent des comptoirs à Cabo Corso (Cape Coast Castle) qui appartenait à la Comauparavant Anamabo et Christianborg pagnie suédoise de Guinée, Takoradi, (Accra). Mais c'est l'époque de la suprématie hollandaise. Les marins de la Compagnie néerlandaise des des Indes occidentales s'emparent établissements du centre de la côte (1658-1660). Malgré un traité d'arbitrage conclu en 1666 entre la Compagnie hollandaise et la Compagnie de Gliickstadt, celle-ci ne peut obtenir gain de cause, mais continue le commerce de Guinée. Les Compagnies de Guinée et des Indes occidentales semblent avoir été dans une dépendance très stricte de l'autorité royale, elles ANDRÉ LUColonisationet les Coloniesallemandes, [>.lui. CHÉRADAME, (1) Colonisation chezles peuples modernes, tome I, p. 182. ( ) Les Danois s'établissent à Saint-Thomas on 1671.
340
LES EUROPÉENS EN AFRIQUE NOIRE
auraient même été de véritables appendices des conseils de la couronne. Une troisième compagnie avait été mise sur pied en 1686. Une quatrième créée en 1732 bénéficie de privilèges exceptionnels. L'acquisition de l'île antillaise de Sainte Croix, achetée à la France en 1733 pour 750 000 francs, donne lieu à un accroissement du commerce des esclaves pour la mise en valeur de l'île ; en 1734, la Compagnie des Indes occidentales a obtenu, en même temps que le monopole de du sucre à Copenhague, une sorte do souveraineté sur l'importation en les trois Antilles danoises et la possession du fort de Christianborg ses possibilités de ravitaillement en Guinée. Elle veut augmenter esclaves et fait construire le port de Fredensborg (région de Ningo). d'actions territoriales de grande enverNe pouvant entreprendre un commerciaux et connaissent gure, les objectifs sont purement lié à la conjonture internationale et à la neutrasuccès directement durant les guerres maritimes. Ainsi les actions lité du Danemark 1 800 à 1 900 en 1782 pour émises au taux de 50 thalers atteignent redescendre à 700 en 1788 et 420 en 1790. Sur la côte, l'action danoise est violemment contrecarrée par les Hollandais et les Directeurs de la Compagnie des Indes occidentales se plaignent auprès de Christian VI de ce que leurs rivaux hollandais le fort de Crèvecoeur (1731). ont élevé près de Christianborg H. F. Bargum constitue une compagnie En 1765, un négociant spéciale destinée au commerce de la Guinée, mais, dix ans après sa cette compagnie fait faillite et le monopolo tombe. Les fondation, de Guinée déjà placés sous le strict contrôle du roi pasétablissements sent sous sa direction effective en 1777 et y restent en fait malgré la création de la compagnie de la Baltique et de Guinée (1781-1787) et lorsque le commerce de Guinée est attribué on 1787 à une firme directe des commerciale jusqu'en 1792, date à laquelle l'importation danois est interdite. nègres d'Afrique dans les établissements Le contrôle royal sur la gestion des compagnies demeure étroit. En 1785, lors de la dissolution de la Compagnie des Indes occidentales, tous ses biens reviennent à la Couronne. A la différence de la plupart des autres nations coloniales, l'Administration danoise outre-mer, stricte de la beaucoup plus centralisée, demeure sous la dépendance métropole. Sur la côte de l'actuel Ghana, la pression hollandaise contraint les Danois à déplacer leurs centres d'opérations vers l'est, d'où l'installation de comptoirs à Kongonsteen (Keta) (Ada) et Prindsensteen en 1784. Les lettres du chirurgien Paul Erdman Isert (1) montrent l'importance des opérations militaires entreprises par les chefs de comptoirs danois ainsi que leurs interventions dans la politique indigène. La lettre n° 5 fait état de la visite à Keta du prince Ofoli Bossum, fils d'Assiambo, roi des Popo, qui vient à Keta le 25 mai 1784 prêter ser(1) ISERT,Voyageen Guinée et dans les îles Caraïbes en Amérique, traduit de l'allemand, Paris, Maradau 1793, 336 p.
341
ET A MADAGASCAR
ment de fidélité aux Danois. Leur action parait s'étendre assez loin dans l'intérieur puisque, dans le livre de Georg Nôrregard (1) consadanois en Gold Coast, une carte de cré à l'Histoire des établissements Peter Thonning publiée en 1802 comporte le nom d'Agou, localité située à 130 km de la côte togolaise. Si l'effort suédois fut de courte durée et n'alla pas au-delà de la dissolution avec déficit de la Compagnie suédoise des Indes orientales, et de la danoise bénéficia de la position de neutralité l'entreprise puissante marine du Danemark. V. LES FRANÇAIS
EN AFRIQUE
NOIRE
ET A MADAGASCAR
les premières sur Si les navigations dieppoises furent probablement la côte d'Afrique (2), les guerres de religion dans la deuxième moitié ralentir toute entreprise considérablement du xvie siècle devaient extérieure. Il faudra attendre Richelieu et Colbert, pour que la France s'engage dans une politique maritime et coloniale digne du poids déd'alors. qu'elle occupait dans l'Europe mographique et économique avec les compagnies à leur développement Ces entreprises prendront des événements charte et subiront le contrecoup d'Europe. En fait, la politique française est pensée en fonction des Antilles, des Indes et du Canada. L'Afrique ne sera qu'un élément du trafic en fonction de l'Afrique On peut distinguer cinq pétriangulaire. et des premières escales, riodes : celle des premières reconnaissances la politique de Richelieu, celle de Colbert, celle des successeurs de du xviiie siècle Colbert marquée par l'Asiento, enfin la politique terminée dans la marquée par les aléas de la rivalité franco-anglaise des possessions période napoléonienne par la prise de la quasi-totalité du reste la plus grande mauvaise françaises. Les Anglais mettront volonté à rétrocéder ce qui, par les traités de 1815, était restitué à la France. i. Escales et premières
reconnaissances
africaines
et malgaches.
commerciale L'expansion qui accompagne le règne de François Ier pousse de nombreux bâtiments au-delà des mers. Dès 1527, les navires du dieppois Jean Ango font escale à Madagascar sur la route des Indes orientales. En 1529, le saintongeois Jean Alphonse explore la côte du Golfe de Guinée « fertile en poyvre gris et maniguette et où se font force draps de coton ». Les frères Jean et Raoul Parmentier visitent la côte depuis le Cap Vert jusqu'au Cap Lopez. Ils constatent que les Français sont bien reçus et réussissent mieux que les Portugais auprès des indigènes. De danske etablissementerpaa Guineakysten, p. 431-616. L GEORGNONRECARD, Le problème des navigations dieppoises au XVIe siècle, in France(2)R. CORNEVIN, Eurafrique n° 160 (mars 1965), 35-39 ; n° 161 (avril 1965), p. 2-4.
342
LES EUROPÉENS EN AFRIQUE NOIRE
L'un des centres est Berkou sur la côte de l'or. Les frères Parmentier, sur la route de Sumatra, s'arrêtent sur la côte ouest de Madagascar et échangent des tissus contre des fruits. de Jean III de Portugal, François Ier Toutefois, sur l'intervention de commercer au-delà des iles du interdit en 1531 à ses navigateurs sont appliquées avec sévérité par l'amiral Cap Vert. Ces prescriptions de Jean Ango. de Normandie, Chabot de Brion, contre les entreprises sont les vaisseaux qui vont comnombreux Malgré ces interdictions, mercer sur la côte ouest africaine et même sur la côte congolaise où le capitaine Dennebaut dit dans un mémoire qu'il se rend usuellement. Un manuscrit de la Bibliothèque Nationale daté de 1544 donne nécessaires sur la côte par ailleurs les indications pour commercer 1 d'Afrique avec en annexe une vocabulaire franco-guinéen. En 1555 une carte de Guillaume Le Testu donne une bonne idée de la forme générale de Madagascar. En 1560, des navigateurs le Sénégal, mais sont français remontent bientôt gênés par la concurrence anglaise. En effet, en 1588, la reine Elisabeth concède pour dix ans à des marchands anglais le privilège de commercer sur le fleuve ainsi qu'aux escales de Rufisque, Portudal, Joal et à l'embouchure de la Gambie. A la fin du siècle, les dix années leur activité. français reprennent expirées, les navigateurs En 1602, Madagascar est fréquentée par Martin de Vitré et Pyrard de Laval qui font du commerce dans la baie de Saint-Augustin. En 1612, un Rouennais, le sieur Augustin de Beaulieu, et le chevalier de essaient d'installer un comptoir de la à l'embouchure Briqueville tourne court. Gambie, mais l'entreprise de François Ier à l'ambasCertes, on cite volontiers la déclaration sadeur d'Espagne : « Le soleil luit pour moi comme pour les autres, et d'Adam qui m'exclut du je voudrais bien voir l'article du testament et Franpartage », mais en fait ces propos concernaient l'Amérique çois Ier, bien au contraire, ne résista pas aux injonctions portugaises de ne pas laisser ses navigateurs dépasser les îles du Cap Vert. Il n'est donc pas possible de parler d'une politique coloniale suivie et Francoloniale à la politique métropolitaine. çois Ier sacrifia l'entreprise Il est certain que les guerres de religion ont partiellement gêné on ne peut qu'admirer la française outre-mer. Cependant, l'expansion ténacité et l'esprit d'entreprise des marins français face à une absence à peu près complète de politique royale. 2. L'évolution léon.
de la politique
coloniale
française
de Richelieu
Il n'est pas facile de montrer les lignes directrices française dont la continuité ne fut pas la caractéristique qui fut constamment handicapée par une politique absorbait toutes ses forces. Les efforts sur la côte africaine seront poursuivis la grande demande américaine en main-d'oeuvre, ceux
à Napo-
d'une politique dominante et qui européenne en fonction de de Madagascar
343
ET A MADAGASCAR et des Mascareignes des Indes.
le seront
La politique de Richelieu
essentiellement
et les premières
en fonction
compagnies
de la route
à charte.
demeure depuis plus d'un Si la lutte contre la Maison d'Autriche siècle le fondement de la politique française, Richelieu ne limite pas cette lutte aux frontières européennes et veut conquérir à la France un la puissance espagnole. domaine colonial qui puisse concurrencer Richelieu se fait donner la charge de « grand maître et surintendant de la navigation et commerce de France ». Il développe la marine et outre-mer. pousse à l'expansion L'expérience des Hollandais et des Anglais lui évite d'inutiles tâtonnements et il met en oeuvre des compagnies à charte analogues à en quelques années celles qui ont permis aux Hollandais d'accaparer le commerce du cuir, de l'ivoire, de la gomme et de l'or. Comme dans les autres pays il s'agit d'associations d'armateurs qui est déterdeviennent des compagnies à monopole dont l'organisation minée par une charte précisant leurs obligations. Ces compagnies nées de l'impulsion disposent en plus des monogouvernementale poles commerciaux de nombreux privilèges, tenure féodale, délégation l'autode droits régaliens et de facilités financières ; en contrepartie rité royale contrôle la gestion financière. Comme le souligne Georges Hardy (1), les compagnies françaises diffèrent des compagnies hollandaises parce qu'elles se préoccupent en même temps que de d'installation territoriale et d'exploration commerce ; leurs agents rêvent d'étendre au-delà des mers le patrimoine de la France par des traités avec les princes indigènes ou par la conquête militaire et de véritables colonies s'amorcent autour des comptoirs. Mais l'histoire des compagnies françaises — il est vrai gênées par — est, particulièrement les guerres européennes une en Afrique, longue suite d'échecs dus autant à la mauvaise gestion des instances des agents ou la malhonnêteté métropolitaines qu'à l'incompétence des comptoirs : Une compagnie de marchands Rouennais et Dieppois est créée en 1626 « sans lettres patentes et sans concession du Roi » du Sénégal et de la Gambie. Le capitaine Thomas pour l'exploitation Lambert reconnaît l'embouchure des fleuves et l'un de ses navires 180 esclaves et une cargaison capture un vaisseau anglais portant de 130 000 livres tournois. Cette compagnie non privilégiée ne dure pas et, en 1633, une compagnie reçoit le privilège exclusif du trafic avec la Gambie et les îles du Cap Vert. L'année suivante, c'est à Saint-Malo que se constitue une société au capital de 100 000 livres dont la zone d'action va de la Sierra Leone au Cap Lopez. En 1635, une troisième compagnie est créée à Paris avec un privilège royal de trente ans pour exploiter la (1) Histoire de la colonisation française, p. 40.
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côte comprise entre le Cap Blanc et le Sénégal d'une part, entre la Gambie et la Sierra Leone d'autre part. En 1638, Thomas Lambert installe sur la pointe de Bieurt le premier établissement du Sénégal. Cinq ans plus tard, un permanent de Rochefort remonte le fleuve agent de la compagnie Jannequin jusqu'à Podor passant les premiers traités avec le damel du Cayor et le brak du Oualo. En 1658, la compagnie normande devient la compagnie du Cap Vert et du Sénégal. En un siècle la pénétration française en Afrique occidentale de sept compagnies successivement : celle du dépendra des Indes occiCap Vert et du Sénégal (1658-1664), la compagnie dentales (1664-1672), la compagnie du Sénégal (1673-1681), la compagnie du Sénégal, de la Côte de Guinée et d'Afrique (1681-1696), la compagnie royale du Sénégal, Cap nord et Côte d'Afrique dite compade Rouen (1709-1719), la gnie de Paris (1696-1709), la compagnie des Indes (1719-1758). Le nombre de ces compagnies compagnie montre les difficultés de leur gestion. Certes elles connaîtront des éclairs de prospérité, mais ces brèves périodes, correspondant à une saine gestion, sont le fait soit de certaines personnalités particulièrement actives, soit d'initiatives gouvernementales. La politique de Colbert marque une phase de consolidation du domaine colonial et d'expansion des compagnies. Sur son ordre l'académicien Charpentier rédige en 1664 le Discours d'un fidèle sujet du roi touchant l'établissement d'une compagnie française pour le commerce des Indes orientales. Basé sur la documentation de Flacourt, ce discours était destiné à susciter l'enthousiasme des Grands pour les enet de faire souscrire la haute noblesse. treprises d'outre-mer La même année 1664 est créée la compagnie des Indes occidentales à laquelle Colbert accorde des exceptions de droit pour les Nègres et de traite. La compagnie des Indes occidentales pour les marchandises est le premier essai de concentration réalisé par Colbert. Comme le souligne Charles de la Roncière (1 ), en « groupant dans un nos petites sociétés coloniales et organisme gigantesque d'Afrique du Sénégal, de la Guyanne et des îles Antilles (2), la comd'Amérique, avait rendu solidaires l'un de l'autre, pagnie des Indes occidentales l'ancien et le nouveau monde, et assuré au second la main-d'oeuvre du premier, une main-d'oeuvre abondante habituée aux chaleurs des Tropiques ». Sous Colbert apparaît la notion de pacte colonial suivant laquelle la métropole crée et entretient des colonies qui doivent en contrepartie l'enrichir, d'où commerce exclusif avec la métropole à laquelle les sont réservés tous les produits qui ne doivent pas concurrencer siens. Malgré l'action énergique de Colbert et de ses collaborateurs, les compagnies mal gérées sont en déficit permanent, aussi en 1670 Colbert se rallie-t-il au système d'administration directe analogue à et négriers, 1933, p. 20. (1) Nègres (2) Les Français s'étaient établis à la Guadeloupe en 1626, à la Martinique en 1635.
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Mais cette réforme est surtout sensible celui pratiqué par l'Espagne. aux Antilles et au Canada. des Antilles Cependant, les besoins en esclaves sur les plantations et Louis XVI, à son tour, encourage la traite : deviennent considérables à la requête de Colbert, le Conseil d'État, par un arrêt du 26 août 1670, exonérait de l'impôt de 5 % la traite des nègres de Guinée. Mais cela du 13 janvier 1672, il accorde une ne suffit pas et, par une ordonnance de 10 livres payable aux armateurs pour chaque nègre gratification de et une gratification d'Amérique, débarqué aux îles françaises 3 livres payable par la compagnie aux capitaines (1). C'est à la compagnie du Sénégal que Colbert donne en 1679 le monopole de la traite. Celte compagnie s'engage à importer pendant huit ans 2 000 nègres par an aux Antilles françaises et, de plus, à fournir à Marseille, à Sa Majesté, tel nombre qu'il lui plaira pour le service de ses galères, aux prix et âge dont on conviendra avec Sa Majesté (2). Les successeurs de Colbert et l'Asiento. A la mort de Colbert (1683) son fils, le marquis de Seignelay, lui succède comme secrétaire d'état de la marine et de la maison du Roi. A sa mort (1690) Phélipeaux de Pontchartrain (1690-1699), neveu de la même politique. poursuivent Colbert, puis Jérôme de Pontchartrain L'édit de mars 1685 ou Code noir fixait les droits et devoirs des maîtres et esclaves : au terme de cet édit les esclaves étaient réputés meubles et comme tels entraient dans la communauté... En mars 1696 est constituée la compagnie royale du Sénégal, Cap Vert et côte d'Afrique avec un privilège de trente ans pour la traite. Mais c'est en 1701 qu'un événement décisif se produit : le 27 août 1701 la compagnie de Guinée et de l'Assiente est constituée. Un traité est conclu entre les rois de France et d'Espagne et le sieur Du Casse pour la fourniture d'esclaves aux Indes. L'article 1er stimule que la comaux Indes en dix ans, du 1er mai 1702 au pagnie devra introduire 1er mai 1712, 48 000 pièces d'Inde « qui ne seront point tirées du pays de Guinée qu'on appelle minas et Cap Vert, attendu que les nègres de ces pays ne sont pas propres pour les Indes occidentales. » La compagnie est tenue de payer pour chaque nègre, pièce d'Inde de la mesure ordinaire 33 écus 1/3. Les rois de France et d'Espagne seront intéressés chacun pour un quart dans ces affaires. Ce traité consacre la mainmise de la France sur le commerce d'Amérique. L'affaire, bonne en soi, donne en réalité l'assurance aux bateaux de faire tous leurs voyages à plein chargement, d'où une rentabilité accrue et une prospérité du de la marine bénéficiaire considérable contrat. On comprend dès lors la violence des réactions anglaises. Ce traité est la raison principale de la guerre dite de succession d'un d'Espagne, le prétexte en étant l'accession au trône d'Espagne DESAINTMÉRY,Lois et constitutions des colonies françaises de l'Amérique (1) MOREAU vent, de 1550 à 1785, Paris 1784, t . I , p. 259. le sous (2) PEYRAUD, L'esclavage aux Antilles françaises, Paris 1897, p. 42.
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de l'Asiento fait-il Bourbon de France. Aussi l'octroi à l'Angletrre précise des préliminaires du traité d'Utrecht l'objet d'une stipulation (1713) en même temps que de l'article 46. La compagnie anglaise de Guinée s'engage à transporter en trente ans 144 000 « pièces d'Inde ». au XVIIIe siècle. franco-anglaise sucrière des Antilles, la politique la prospérité L'essor canadien, française aux Indes, maintiennent l'Afrique à son rang de pourvoyeuse d'esclaves. Le système de Law aboutit en mai 1719 à la création de la Compagnie des Indes qui reçoit les privilèges précédemment dévolus aux compaCette compagnie des gnies d'Afrique, de Guinée, de Saint-Domingue. Indes réussit à survivre au krach de Law (1720) et le xviiie siècle voit un essor général du commerce colonial. Si le Sénégal somnole quelque peu, le comptoir de Ouidah au Dahomey connaît une grande prospérité, ainsi que sur la route des Indes les Mascareignes. Les guerres où s'affirmera la supériorité navale anglaise seront durement ressenties dans les colonies. Mais le beau monde de Versailles qui voit partir d'un coeur léger l'Inde et le Canada ne prête guère plus d'attention aux comptoirs africains où les Anglais d'ailleurs se servent de préférence sur les alliés momentanés de la France. La guerre de américaine verra l'essor du commerce français, de l'indépendance belles victoires navales et au traité de 1783 des clauses favorables à la France sur les côtes africaines. Mais, après l'équipée égyptienne, Napooù léon n'aura pas les moyens de défendre les comptoirs d'outre-mer s'installeront les Anglais de façon provisoire ou définitive. Blanchot à Saint-Louis du Sénégal et Decaen aux Mascareignes feront l'impossible mais, pour défendre ces possessions françaises... abandonnées les garnisons épuisées par le climat par la métropole, devront finalement céder sous le nombre. La rivalité
3. Les établissements français en Afrique occidentale. Cette action menée de Paris aura des effets en Afrique, compte tenu des conflits européens et de l'impitoyable rigueur du climat. Si, à la fin du siècle, il ne reste guère que Saint Louis du Sénégal et les à Madagascar au xviie siècle, Mascareignes, on doit noter l'installation ainsi que le comptoir de Ouidah. Mais l'événement le plus important de ce milieu de siècle pour les la construction sur l'île de N'Dar entreprises françaises est assurément à l'embouchure du fleuve d'un bâtiment bastionné et facile à défendre. Ce poste est appelé Fort Saint-Louis en l'honneur du roi de France. Dès lors les Français vont posséder une incomparable base de départ vers l'intérieur. Dix-huit ans plus tard, ils enlèveront à la Hollande l'île de Gorée, dont la rade est la meilleure de la Côte occidentale d'Afrique avec celle du Cap et servira d'entrepôt négrier. Saint-Louis sera base de commerce vers l'intérieur et foyer français. Là se constituera en effet une société métisse résistante au climat et qui
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de la société afriformera un élément particulièrement dynamique caine. A la fin du xviie et au début du xviiie siècle, le Sénégal est marqué d'André Brue et de La Courbe, tandis par les puissantes personnalités que la côte do Guinée connaît avec Germain Ducasse l'un des plus de cette époque. grands marins-gouverneurs Germain Ducasse et les tentatives
françaises
sur les côtes ouest-africaines.
le fort Germain Ducasse, le 29 août 1666, prend aux Hollandais de l'amiral d'Arguin. Onze ans plus tard il revient avec l'escadre d'Estrées qui prend Gorée (novembre 1677), ainsi que les comptoirs La paix de Nimègue (10 août 1678) de Rufisque, Joal et Portudal. le à la compagnie confirme ces acquisitions qui possède également Ducasse passe avec les Sérères et le Germain comptoir d'Albréda. de la zone l'étendue Damel du Cayor différents traités définissant d'influence française sur six lieues de profondeur depuis le Cap Vert jusqu'à la Gambie. a souen main-d'oeuvre Cependant la grande demande américaine ligné les immenses ressources humaines des côtes du golfe de Guinée. sur la Côte de commercial On décide alors de créer un établissement l'Or à Commendo et Tacorary. Mais nous avons vu la réaction brutale de ces fâcheuses nouvelles, le Roi envoie des Hollandais. A l'annonce sur les lieux Ducasse (1687) qui est chargé par Seignelay « d'examiner les avantages de chaque lieu pour le commerce, le génie et les dispositions des habitants et recevoir les propositions qui peuvent être faites par le roi ou les princes de ces pays ». voir deux Ducasse doit particulièrement L'établissement d'Issiny. d'un où le Roi offre la construction points de la côte : « Commendo, fort, et Assinie (Côte d'Ivoire) dont les peuples ont une grande abondance d'or et sont bien disposés pour les Français. » Ducasse remplit modèle de fidèlement le programme qui lui est tracé. Son rapport, sur concision, est un remarquable plan de campagne pour s'installer cette portion de côtes. Il dépose à Issiny (= Assinie) six Français avec des marchands et emmène en France deux jeunes Africains, l'un fils du roi, l'autre filleul de fils d'un des chefs. Baptisé par Bossuet, Louis XIV, Aniaba devait se distinguer comme élève, capitaine de chevaux légers, etc. En 1700 ces deux jeunes gens sont ramenés à Issiny par le chevalier d'Amon sur le Poly avec un certain nombre d'éléments qui doivent assurer les débuts matériels et spirituels de la colonie. Parmi eux, le R. P. Godefroy Loyer et Jacques Villard. Arrivé en juillet 1701, le Poly repart le 23 septembre après que son équipage ait bâti le fort SaintLouis où restent trente hommes y compris officiers et missionnaires. En novembre commandée 1702 une escadre hollandaise, par le de prendre le fort, les Afrigouverneur de la Mine tente vainement cains conduits par Amaquay, frère du roi d'Issiny, ayant combattu aux côtés des Français.
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En mars 1703, cependant, trois vaisseaux marchands français et un de guerre sous les ordres de M. De Grosbois évacuent bon gré mal gré la colonie française. Le développement
du Sénégal : La Courbe et Briie.
de Germain Ducasse entraine une expansion Cependant l'activité économique certaine. La compagnie obtient le monopole du ravitaillement des colonies en esclaves à raison de 2 000 par an, ce qui paraît manifestement excessif pour ses possibilités réelles. Une nouvelle compagnie formée en 1681 a l'ambitieux projet de drainer le trafic du Cap Blanc au Cap de Bonne Espérance ; trois ans aux côtes du Sénéplus tard le domaine est ramené plus modestement gal et de la Gambie. Bambouk (1684). Jajolet de La Dancourt essaie d'aller jusqu'au Courbe remet de l'ordre dans cette bourgade pourrie qu'est Saint du lac de Louis. Puis, il visite le lac Cayar et fait une reconnaissance Guiers (1689). Chambonneau clair qui lui succède voit parfaitement dans la situation d'un pays dont le rendement commercial souffre par trop des « coutumes » versées aux princes indigènes. La guerre de la ligue d'Augsbourg trouble un peu les habitudes du négoce des côtes sénégalaises : au début de 1697, Saint-Louis et Gorée sont occupés par des Anglais venus de Gambie, mais en juillet c'est l'escadre du comte de Gennes qui pénètre en Gambie et anéantit le Fort James. A cette époque André Brùe, nommé au Sénégal en 1687, donne une impulsion nouvelle à l'essor de la colonie. Il fait alliance avec Siré Sawa Lamou, roi des Fouis, atteint Dramané en Galam à trente kilomètres du confluent Sénégal Falémé, où le fort Saint-Joseph est construit. Il de la sera terminé par le frère Apollinaire qui fera la reconnaissance Falémé jusqu'à Kaïnoura, approchant à quatre lieues de Gouina. Des postes fortifiés jalonnent le fleuve assurant la sécurité du commerce. Cette exploration, pour l'époque, est remarquable. Avec quelques ballots de pacotille, un commerçant avisé et un moine ont reconnu l'un des points les plus importants de toute l'Afrique de l'ouest et françaises vers le Soudan. marqué le jalon des prétentions Lors de la guerre de la succession d'Espagne, les compagnies anglaises et françaises concluent une sorte de pacte de neutralité. André Brüe se préoccupe alors du Cayor. Arrêté par les gens du Damel le 6 juin 1701 aux abords de Rufisque, il est relâché contre une forte rançon. Rappelé en France pour prendre la direction do la compagnie en 1702, André Brue n'a pas en Lemaltre, un successeur digne de lui. La Courbe défend ce qui peut l'être et poursuit son effort vers l'intérieur, mais, à la veille de Noël 1702, le fort Saint Joseph succombe après une valeureuse résistance sous les assauts des Sarakollé et des Mandingues. En 1710, La Courbe remontera au Galam, puis au Félou. Le marchand rouennais Guillaume Mustelier a acheté le privilège de la compa-
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gnie. Il meurt à Touabo, le futur Bakel, le 15 août 1711 sans avoir pu relever les postes de cette région. En 1712, Richebourg reconstruit Makana, mais se noie dans le fleuve. d'une nouvelle comAndré Briic, sur les instances des actionnaires pagnie, revient au Sénégal. En 1714 il remonte encore une fois dans le et complète son dispositif haut fleuve, reconstruit le fort Saint-Joseph construit près de Senoudans la Haute région par le fort Saint-Pierre débou sur la Falémé. Un artisan maçon nommé Compagnon parcourt les placers indigènes des échantillons. et rapporte du tout proche Bambouk Malgré son humble origine, les résultats obtenus par Compagnon sont importants. du milieu Alliant un solide bon sens à une connaissance pratique indigène, il parvient à connaître et à parcourir cet Eldorado africain, bien déchu do son ancienne splendeur du temps du Ghana. André Brùe demande au personnel des forts de recueillir tous les renseignements qu'ils pourront obtenir sur le Soudan. Compte tenu du il y a dans la manque de moyens, les résultats sont remarquables, gestion d'André Brùe des notions classiques de politique coloniale {mise en valeur, politique indigène, protection). En 1720, André Brue, à 67 ans, rentre définitivement en France. Ces trente ans de gestion d'André avec le recul de l'histoire comme Brûe et de La Courbe apparaissent exceptionnels. Ils sont les premiers à avoir entrevu la route du Soudan et à avoir établi un bilan provisoire des possibilités africaines d'alors. Les successeurs d'André Brùe ne seront pas à sa mesure. Pourtant, le Bambouk est visité par de Bellay qui dirige la colonie en 1723 et 1724 ; le 21 décembre, le minéralogiste Pelays est assassiné avec quatre commis, alors qu'il visite les placers aurifères. Pierre David (17381748), Marseillais dynamique, visite à son tour les mines de la Falémé. Cette période voit les pérégrinations sur la côte africaine du chercheur du Sénégal français Michel Adanson qui herborise sur l'ensemble côtier de 1749 à 1753. Le régime royal. La paix de Paris (1763) ne rend à la France que Gorée et ses dépensont dances côtières : Joal, Portudal et Albréda. Les gouverneurs à partir de cette date nommés par le roi. En 1778, durant la guerre de l'indépendance américaine, l'escadre de Vaudreuil quitte Lorient et le duc de Lauzun prend Saint-Louis le 30 janvier 1779. Lauzun réunit alors administrativement les établissements de Corée, du Cap Vert et de la Gambie à ceux de Saint-Louis et devient le premier gouverneur de la Colonie du Sénégal et dépendances. C'est lui qui institue la charge de Maire de la ville. Ce notable, qui fut toujours un mulâtre, est désigné parmi les habitants non fonctionnaires de Saint-Louis; doit être ratifiée par le misa nomination nistre de la marine et il touche un traitement payé sur le budget de la colonie. en Gambie Cependant les hostilités continuent. Le fort Saint-James
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démantelé. Gorée abanest pris le 11 février 1779 et immédiatement donnée de sa garnison est occupée le 6 mai 1779. Le traité de Versailles (1783), s'il néglige les droits français en Amérique, rend à la France Saint-Louis, Gorée et Albréda. En 1785, le Gardeur de Repentigny, qui a fait ses preuves en politique indigène avec les Sioux du Canada, signe avec le Bour Saloum un traité qui servira de base aux relations avec les pays Sérères. Venu au Sénégal, le chevalier de Bouffaire son temps de commandement offre à Madame de Sabran, sa flers, premier académicien gouverneur, coloniale présentée échantillon de littérature fiancée, un remarquable par un homme du monde qui donne du Sénégal d'alors une image aussi désastreuse que pittoresque. En dehors du Sénégal, seul le comptoir de Ouidah aura quelque du et surtout quelque durée. Ajoutons les entreprises importance de longues années dans la corsaire Landolphe qui commerça région d'Owarri (actuelle Nigeria) à la fin du xviiie siècle. Le Sénégal durant
la Révolution
et l'Empire.
En 1789, des commis surexcités et quelques notables sous la présienvoient dence du mulâtre Charles Crosnier, maire de Saint-Louis, aux États généraux un cahier de doléances réclamant l'abolition de l'esclavage et la liberté du commerce. Ces cahiers sont confiés au sieur Lamiral qui rajoute 360 pages de son cru pour en faire un vosur lume au style pompeux, mais donnant de précieux renseignements le commerce et la colonisation du Sénégal au moment de la Révolution. Les doléances sont appuyées par le gouverneur Blanchot de Verly rentré en France à la fin de 1790. La Constituante, par un décret du 23 janvier 1791, abolit le privilège de la Compagnie nouvelle du Sénégal et déclare le commerce libre pour tous les Français, mais on supprimait une compagnie moribonde et on libérait un commerce que les guerres vont rendre impossible : plus d'approvisionnements, plus de des esclaves, possibilités Enfin, lors de la libération d'exportation. aucune possibilité d'embauché pour les esclaves noirs. Par chance le Sénégal, durant la période révolutionnaire, a pour l'ancien adjoint de Boufflers, Blanchot de Verly, vieux gouverneur soldat intègre et brave, qui a la confiance des habitants et réussit sans aucun secours de la métropole à permettre au Sénégal de survivre, les Anglais, repoussés une première fois en 1797 devant Gorée, réussissent à prendre le 5 avril 1800 l'île que le passage de Victor (17 janvier Hugues venu de la Guadeloupe permet de reprendre 1804) ; mais moins de deux mois plus tard le 8 mars 1804, le commandant Montmayeur, abandonné par ses sodats antillais, capitule. Depuis que les Toucouleurs sont maîtres du Fouta Toro (1776), le gouverneur verse à Valmami les « coutumes » naguère payées au SiriaI1) LAMIRAL, L'Afrique elle peuple africain, Paris Desenne, 1789.
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1799 le monest des Finances mais l'état (en catastrophique peul, tique tant des coutumes en retard s'élève à 144 150 francs!...). Conscients massacrent de la faiblesse française, les Toucouleurs quelques traide représailles tants. Blanchot expédie un détachement qui — son en retraite. Blanchot, en 1806, chef tué — doit battre précipitamment conclut un nouveau traité avec l'almami, prévoyant le rétablissement des coutumes, mais Blanchot a 72 ans et 22 ans de Sénégal ; il meurt Deux ans plus tard Levasseur, le le 12 septembre 1807 à Saint-Louis. devant l'attaque de Blanchot, anglaise et le capitule remplaçant Les Anglais, si actifs en Gambie général Maxwell occupe Saint-Louis. et ailleurs, ne feront rien de leur prise qui aurait pu leur permettre Le gouverneur Maxwell fait construire à d'intéressantes explorations. invaincu. Blanchot une belle tombe, sportif hommage à l'adversaire Si l'on dresse, lors de l'occupation anglaise, le bilan d'un siècle et demi de présence française, on doit constater qu'il n'est pas entièrement négatif. Histoire du Sénégal, en marque André Villard, dans sa magistrale les éléments : « Matériellement, des milliers de mètres de guinée donnèrent aux Maures et à tous les autres noirs le goût du drapé et des vêtements somptueux. L'emploi du fusil se généralisa. La poudre n'était pas chère. On en saura quelque chose au siècle suivant. Bimbeloterie et parures étaient ardemment désirées de toutes les femmes du Sénégal ; le fer, le cuivre en barres perdes objets métalliques de travail indigène. mettaient la multiplication Surtout, l'alcool de traite débarqué à pleins tonneaux en pays noir musulman vouera à un alcolisme trop consciencieux des populations qui n'avaient que trop de tendance à apprécier le vin de palme, le dolo et autres mixtures... » A la fin du xviiie siècle, Saint-Louis compte (1786) 7 000 habitants parmi lesquels 2 400 libres, noirs ou mulâtres, 660 européens, et un peu plus de 3 000 captifs de case. A Gorée sur 2 500 habitants on ne compte plus guère que 522 libres, mulâtres ou noirs. Depuis 1778 un maire, choisi parmi les hommes de couleur, est chargé de obligatoirement et la population. régler les rapports entre le Gouverneur Cette population métisse est un élément unique en Afrique tropicale. Elle joue un rôle considérable dans le caractère français de Saint-Louis et Gorée. Certes, il n'existe pas encore d'école et les mulâtres apprennent à lire avec les prêtres, les commis ou les quelques militaires lettrés. De 1778 à 1782, deux missionnaires du Saint Esprit entreprennent une première évangélisation du pays sérère. Les Signares, belles métisses de Saint-Louis ou de Gorée, jouent un rôle non négligeable dans la société et le commerce sénégalais. (1) Dakar, 1943, p. 68.
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les autres Si le commerce des esclaves est de fait prépondérant, : au début du xviiie (1703), produits occupent une place importante la gomme donne 250 000 livres-poids par an à 10 livres monnaie le cent ; l'ivoire atteint 150 000 livres-poids, la cire compte pour 100 000 livres-poids. Vingt ans plus tard (1723) l'or figure pour 50 marcs (environ 12 kilos), la gomme est passée à 800 000 livres-poids, l'ivoire est descendu à 40 000 livres-poids. En 1786 la gomme passe à 1 500 000 livres-poids et on traite 35 kilos d'or, cependant que le fleuve a fourni 2 200 captifs (évalués à 1 000 livres monnaie). ne se font presque jamais en numéraire d'Europe Les transactions encore que la gourde (piastre espagnole) soit appréciée, mais suivant une formule de troc avec des marchandises de forme et qualité déterminées : barres de fer, anneaux de cuivre, pièces de guinée. Le commerce est pratiqué sur le fleuve aux escales, points non fortifiés où les vendeurs à date fixe viennent camper devant les bateaux des acheteurs. La compagnie, pour pratiquer ce commerce, verse des coutumes aux souverains africains. On distingue la grande traite ou traite des gommes effectuée en cinq escales entre Saint-Louis et File de Morfil et la petite traite ou traite du (ialam pratiquée sur le Sénégal et la Falémé. Sur un siècle et demi de Sénégal français, on ne peut mieux faire que de reprendre la conclusion d'André Villard (1) : « Les bénéfices du ces cent cinquante ans de commerce (quand il y en eut) servirent à construire des maisons à Nantes ou à Bordeaux... Si la France de Napoléon vit disparaître sans émotion cette colonie, c'est quei pendant un siècle et demi, elle n'avait été que le champ d'affaires de quelques marchands de la métropole et le réservoir de main-d'oeuvre de quelques planteurs des Antilles. » 4. Les Français
dans l'Océan Indien.
Durant trente années, les Français vont faire une tentative qui ne ni de moyens. L'échec final entraînera la manquera ni d'ambitions colonisation dans bases d'une action ultérieure des Mascareignes, l'océan indien. L'essai de colonisation à, Madagascar (1642-1674) est du xviie siècle. pour la zone tropicale la tentative la plus importante Les débuts — Pronis
(1642-1648).
Deux marins dieppois, les capitaines Régimont et Goubert, font à Débarpartir de 1630 plusieurs voyages à la baie de Saint-Augustin. qué à Sainte-Luce en 1638, le matelot rouennais François Cauche parcourt l'Anosi de 1638 à 1644. Il prétend avoir longé la côte Est et la côte Sud. En 1642 est fondée une compagnie des Indes orientales qui compte (1) Histoire du Sénégal, p. 76.
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dans son Conseil le surintendant Fouquet et plusieurs membres du Conseil du roi. Le navire « Saint-Louis » reconnaît d'abord les îles En septembre 1642 Pronis débarque Mascareignes et Sainte-Marie. et 12 compagnons. à Sainte-Luce avec le commis Foucquembourg 70 hommes le rejoignent l'année suivante. a Matitana et dans la région de Pronis envoie des détachements Mananjary pour y traiter de l'ébène, mais les pertes sont élevées. Sur Pronis emmène alors la petite colonie à la pointe de Taolankara. cette pointe bien ventilée, dominant une bonne rade, proche de forêts riches en bois de charpente pour navires, Pronis élève une palissade qu'il appelle Fort Dauphin (fin 1643). La colonie entre alors dans une phase active. Pronis établit des relations d'amitié avec les Zafiraminia de l'Anosy chez lesquels il prend reconnaît le sud du pays. femme. Foucquembourg rentré en France exposer les besoins de En 1646, Foucquembourg, a colonie, est assassiné avant d'arriver à, Paris. Pronis, un Rochelais protestant et autoritaire, abuse de la situation. Une mutinerie aboutit à son arrestation. Libéré par un navire de passage, douze des mutins sont déportés dans l'une des Mascareignes (future île Bourbon). Cependant qu'un groupe mené par un certain Le Roy fait sécession et se rend à, la baie de Saint-Augustin, Pronis envoie le commis Angeleaume avec 45 hommes pour aider les Arindrano (Betsileo du sud) contre les Vohitsa-angomby (Betsileo du Nord). Etienne de Flacourt (1648-1658), qui est désigné par les associés de la compagnie, est noble, instruit, énergique et curieux. Il débarque en décembre 48 avec des colons, deux pères lazaristes, et réussit à rétablir la situation. Les Français dissidents reviennent de Saint-Augustin. Flacourt va faire visite au roi des Antanosy, Dian Ramaka, celui qui avait été instruit par les Portugais à Goa sous le nom de Don André. Il envoie aux Mahafaly pour lutter contre leurs ennemis quinze hommes sous les ordres de Le Roy. Mais les ébènes amassés depuis trois ans sont brûlés, si bien que le navire qui ramène Pronis ne porte qu'un faible chargement de cuirs et de cire. Dans le délabrement politique de la Fronde, ce faible chargement n'encourageait pas les directeurs. Flacourt, réduit à ses seules ressources, dispose encore d'une centaine de Français à Fort Dauphin et douze à, Sainte-Marie. Voyant leur petit nombre, les chefs Antanosy attaquent les colons isolés et les petits détachements. Ainsi Le Roy est tué avec ses compagnons. Dian Ramaka lance sur Fort Dauphin un assaut général repoussé au canon. En juillet 1651, Flacourt prend Fanjaline et Dian Ramaka est tué durant sa fuite. La plupart des chefs viennent alors faire leur soumission. Au début de 1653 Flacourt croit avoir gagné. Les deux principaux chefs, Dian Panolahé (fils de Dian Ramaka) et Dian Masikoro, se soumettent. En décembre 1653 Flacourt fait construire une barque et essaie de gagner la France. Avant de partir il dresse un padrao trouvé dans l'île des Portugais, et y fait graver cette mise en garde : 0 advena, lege monita nostra, tibi tuis vitaeque H. CORNEVIN. — Histoire de l'Afrique, Tome II. 23
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LES EUROPÉENS EN AFRIQUE NOIRE
tuae profitura :cave ab incolis. Vale (0 toi qui arrives, lis notre conseil ; il sera utile pour toi, pour les tiens et pour ta vie : méfie-toi des habiramènent Flacourt à Fort tants. Salut), mais les vents contraires Dauphin. Le 2 août 1654 enfin, un navire apparaît portant Pronis et deux prêtres. Une compagnie nouvelle venait d'être créée sous les ordres du maréchal de la Meilleraye, commis de Richelieu. a Flacourt s'embarque en février 1658, laissant le commandement Pronis. En France il doit se défendre devant les associés. Il publie une Histoire de la Grande Ile de Madagascar (1658), une relation des évéde la langue de Madagascar. Dans sa nements, enfin un dictionnaire Relation il établissait tout un programme de colonisation par mariade petites colonies à Fort Dauphin, Mages mixtes et l'établissement (île Ghalemboule, Antongil, Mascareigne nanjary, Sainte-Marie, et le pays Masikoro. En 1660 il Bourbon), île Rodrigue, Tamatave mais son navire, attaqué par les Barbaresques, sautait. repartait Les successeurs
de Flacourt
et la fin de Ventreprise.
vivotent médiocrement sur un Des Perriers puis Champmargou territoire qu'un pittoresque coureur de brousse, Le Vacher, dit Lacase, illustre d'étonnante façon. Marié à, une princesse Antanosy, il connaît admirablement les dialectes de l'île, son prestige est immense et les son passage, cependant écrits Antemoro racontent que la tradition orale Antesaka célèbre encore ses exploits. Cependant une nouvelle Compagnie des Indes Orientales est formée (1664). 400 colons parviennent dans l'île le 10 mars 1667, le marquis avec deux directeurs Caron et de de Montdevergue commerciaux, 10 chefs de colonies, Faye, dix vaisseaux, 4 compagnies d'infanteries, en tout 2 000 personnes. Un tel nombre posait des problèmes en aussi François Martin avec 19 Français et 4 000 auxiravitaillement, liaires de la côte remonte-t-il les rives du Maningory et parvient fin décembre 1667 au bord du lac Alaotra. Mais l'entreprise ne rapportait de la Haye, rien, aussi Blanquet nommé gouverneur avec pouvoirs absolus, nomme gouverneur Champmargou et Lacase major. A son retour des Indes (1671), il décide Fort Dauphin au profit de l'île Bourbon, de Sainted'abandonner Marie et d'Antongil. Finalement, en 1674, les 63 Français survivants s'embarquent pour l'île Bourbon. La forte personnalité de Flacourt domine ces trente deux années de présence française. Mais les raisons de l'échec final sont à rechercher en France où les Directeurs de la Compagnie souhaitaient surtout des bénéfices. Or, les envois d'ébène étaient rares, il n'y avait pas de produits fut quasi nulle. Pour une colonie de peuriches, aussi la rentabilité plement, les rigueurs du climat n'en permettaient pas la réussite; d'ailleurs les connaissances sur les possibilités agricoles de l'île étaient des plus médiocres. Aussi ce petit noyau français devait se résigner à
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sa petite force militaire aux vivre de razzias, prêtant épisodiquement souverains locaux pour leurs guerres tribales. des conséLe séjour de ces mercenaires parasites eut cependant de Flacourt, le des publications quences notables. Indépendamment droits de la France sur la Grande Ile avaient été affirmés solennellement des lors du débarquement le 14 juillet 1665 par De Beausse En 1670, De 2 000 colons et l'île avait reçu le nom d'/te Dauphine. La Haye devait en reprendre possession au nom du roi. Par ailleurs, si l'installation française à, l'île Bourbon est la conséde l'île quence directe de la colonie de Fort Dauphin, la proximité Bourbon permettra aux Français d'être h, pied d'oeuvre pour maintenir leurs droits sur la grande île. Les Mascareignes. La mutinerie dont Pronis a été victime a montré aux douze mutins l'excellence du climat (1646-1649). Le rapport enthousiaste fait à Flacourt décide ce dernier à, tenter une installation dans l'île. Mais les colons qui se croient abandonnés d'une occasion pour profitent partir aux Indes (1658). Louis Payen, accompagné de dix Malgaches, revient en 1662 ; puis trois nouveaux contingents de colons débarquent (1671-1674). De ce contingent est issue une part importante de l'île. du peuplement A cette époque il n'y a pas encore de métissage, car une ordonnance du vice-roi des Indes, Jacob de la Haye, fait « défense aux Français d'épouser des négresses et défense aux Noirs d'épouser des Blanches, c'est une confusion à éviter ». En 1686 la population s'élève à 269 individus qui travaillent tous pour la Compagnie des Indes orientales. En 1689 arrive le premier gouverneur, M. de Vauboulon, accompagné d'un missionnaire, le Père Hyacinte. Mais cet homme autoritaire est bientôt emprisonné par la population. Un conseil de six colons de Saint-Paul gère les affaires de la compagnie. La population s'accroît et, en 1717, on compte 900 Blancs et 1100 esclaves, dont la situation est réglée par l'édit de 1723. En 1715, les autorités de l'île prennent possession de l'île de France, ancienne île Maurice abandonnée en 1712; le par les Hollandais café est introduit en 1717 et tout colon doit posséder au moins 200 plants par tête d'esclave. L'île Bourbon joue un rôle considérable durant les guerres francoanglaises et Mahé de Labourdonnais qui remplace Dumas en 1753 va donner un prodigieux essor à l'économie de l'île (riz, manioc, coton, etc). Il fait construire de petits navires dont un de 500 tonneaux et, lors de la déclaration de guerre en 1744, il constitue une escadre de 9 vaisseaux montés par 3 342 hommes et prend Madras. Ses difficultés avec Dupleix entraînent son rappel. Un corps de volontaires formé à Bourbon participe à la campagne de l'Inde aux côté de Lally Tollendal. Mais, à la fin de la guerre de sept ans, le bilan de la Compagnie des
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En quarante ans d'emprunts Indes orientales est catastrophique. successifs elle a coûté à l'État 376 millions, aussi le privilège est-il retiré par une ordonnance d'aût 1764. Les îles de France et Bourbon sont rétrocédées au Roi moyennant la somme de 7 625 348 livres. La rétrocession est effective le 14 juillet 1767. il y avait de la mauvaise gestion économique, Indépendamment aussi pour Choiseul, contraint de signer le traité, le souci de faire des les expéîles laissées à, la France les bases navales d'où partiraient ditions futures vers l'Inde ou l'Afrique ; aussi l'autorité directe du roi était-elle indispensable. d'administrer Un gouverneur et un intendant sont alors chargés les îles. Ils sont représentés à Bourbon par un commandant particulier et un ordonnateur (1767). Ce dernier est Pierre Poivre qui introduit en 1770 muscadiers, girofliers et muscades. En 1776 et en 1778 on les premiers clous do girofle et les premières cueille solennellement noix de muscade de l'île de France (1). L'Histoire de la conquête des épices constitue un passionnant chapitre de l'Histoire de la diffusion des épices dans le monde (2). Depuis l'île de France, la girofle et la muscade seront propagées à l'île Bourbon, aux Seychelles, à Zanzibar, à Madagascar et aux Antilles françaises. En 1770, les Français entreprennent la colonisation des Seychelles. Mais le passage au régime royal a pour conséquence de changer l'orientation économique des Mascareignes. Le café n'étant plus protégé par le privilège de la Compagnie des Indes orientales, est pénalisé par rapport à celui des Antilles deux fois plus proche des consommateurs une non des épices constituant métropolitains. Indépendamment c'est vers l'extension massive des négligeable exportation d'appoint, cultures vivrières que l'on pousse l'île Bourbon placée en position nettement subalterne vis-à-vis de l'île de France dont elle doit en partie ravitailler la population et les escadres de passage. Le manioc est presque complèprécédemment développé par la Bourdonnais tement abandonné au profit du blé, du riz, du maïs, des légumes secs. Certes, durant cette période, l'économie de Bourbon est relativement équilibrée, mais les colons de l'Ile se plaignent de l'incohérence des administrateurs royaux qui, suivant les besoins de l'île-soeur, acceptent ou refusent d'acheter les récoltes (3). Par ailleurs, l'augmentation de la population blanche pose un problème en raison de l'application de la coutume de Paris partageant les héritages entre tous les enfants, ce qui entraîne une miniaturisation des propriétés foncières d'autant plus fâcheuse que les partages sont faits dans le sens de la largeur depuis le bord de mer. De nombreux Blancs se trouvent alors sans ressource, ne pouvant se reclassor dans un artisanat qui est tenu sans possibilité de concurrence aux familles aisées. Aussi, durant les par des esclaves appartenant Histoire del'Océan Indien, p. 183. TOUSSAINT, (1) AUGUSITE Mauritius and the spice traae : the odyssey of Pierre Poivre, (2) Mlle LY-TIO-FANE, Port Louis, Maurice, 1958. Histoire de la Réunion, p. 38. (3) ANDRÉSCHERER,
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guerres, nombreux sont les « petits Blancs » chômeurs qui s'engagent chez les volontaires de Bourbon. Mais, durant les périodes de paix, ces petits Blancs végètent sur leurs terres ou se réfugient dans les Hauts à, la limite des terres cultivables. A la Révolution, les colons des Mascareignes appliquent sans conviction excessive les nouvelles mesures et les discussions de l'Assemblée coloniale forment une part importante de l'histoire de cette période. Le décret du 16 pluviôse an II (4 février 1794) sur l'abolition de l'esclavage n'est pas appliqué par des colons qui ont une politique tolérante envers leurs esclaves. Le Directoire pour faire appliquer le décret envoie avec 4 000 hommes de troupes deux commissaires qui, cernés se laissent réembarquer dans l'hôtel du gouvernement, (21 juillet colons envisagent de proclamer 1796). Par la suite de nombreux la sécession d'avec la France. Mais, en 1803, arrive le général Decaen avec mission de porter la guerre aux Indes. De 1803 à 1810 il organise les possessions françaises de l'océan Indien en maître absolu puisque la loi du 3 Germinal an XI (24 mars 1803) prive les îles de leurs assemblées coloniales. Après dix ans d'anarchies, les populations semblent heureuses de retrouver un peu d'ordre. Decaen, sept années durant, mène la guerre de course dans l'océan Indien, si bien qu'en 1806 les Anglais décident de prendre les Mascareignes. En 1809, l'île Rodrigues est prise, en 1810 c'est le tour de l'île Bourbon (alors nommée île Bonaparte) puis, en 1811, l'île de France, qui devient l'île Maurice. Les Seychelles sont également occupées en 1811, ainsi que les installations prospères que Sylvain Roux avait réussi à, créer à. Tamatave. du général Decaen, des cyclones Cependant, sous le gouvernement d'une extraordinaire violence viennent ruiner en 1806 les plantations de café de l'île Bourbon et provoquent une véritable famine. L'occupation anglaise se heurte à une certaine résistance. Si les hauts fonctionnaires acceptent de prêter serment d'allégeance à George III, beaucoup de colons s'y refusent et préfèrent quitter l'île. Plusieurs Blancs sont tués le 5 novembre 1811 lors d'une révolte d'esclaves k Saint-Leu. Une énergique répression de l'autorité anglaise entraîne la condamnation à mort de trente esclaves. Les traités de 1814 laissent un empire colonial français épuisé. Si les Anglais rendent le Sénégal c'est qu'ils n'en font rien et, s'ils rendent Bourbon, c'est que l'île Maurice dont le port est meilleur leur suffit largement sur la route des Indes.
VI. LES ANGLAIS
EN AFRIQUE
A la fin du règne d'Edouard VI et durant celui de Marie la Catholique, des navires anglais se sont avancés le long des côtes occidentales d'Afrique en Gambie et en Gold Coast. Ils en ont rapporté de l'or, de l'ivoire, du poivre, des épices. D'autre part, le conflit avec l'Espagne
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LES EUROPÉENS EN AFRIQUE NOIRE
entraîne les pirates anglais dans toutes les mers du monde, y compris dans celles naguère contrôlées par le Portugal puisque Philippe II en est devenu souverain (1580). i. Les bases économiques
et l'organisation
administrative.
Dès 1580 Francis Drake, de retour de son légendaire exploit sur les côtes de l'Amérique espagnole, traverse l'océan Indien et revient par le Cap. Son arrivée triomphale en rade de Plymouth permet à ses commanditaires de recevoir 4 700 % des capitaux... et lui vaut d'être anobli par la reine Elisabeth. Le commerce anglais prend à cette époque un essor considérable. La laïcisation des immenses biens du clergé les met à la disposition Par ailleurs, la réforme monétaire d'Henri VIII augdes particuliers. mente le volume des moyens de paiement d'où l'essor du capitalisme. L'influence de Thomas Gresham, ancien facteur royal du souverain à, Anvers, se fait sentir. Dès 1558 il assainit les Finances d'Angleterre et revalorise la livre anglaise par rapport à la monnaie des Pays-Bas. Dès 1564, il construit au coeur de la cité de Londres une grande bourse de marchandises calquée sur la bourse d'Anvers à laquelle, en décembre 1568, la reine Elisabeth donne le titre officiel de Royal Exchange. En 1571 le transport des grains d'un Comté à un autre est autorisé un droit d'un shilling le quarter. Les douanes intérieures moyennant et octrois sont abolis. Sur ce dispositif économique favorable, les malheurs des alliés de l'Angleterre viennent renforcer celle-ci. Ainsi la Farnèse (1584) provoque l'émigration prise d'Anvers par Alexandre d'un grand nombre de Belges. Si pour la plupart, ces derniers rejoiartisans se réfugient en gnent les Provinces Unies, de nombreux Grande Bretagne où ils trouvent un marchéfà la mesure de leur talent, notamment en matière de verrerie, coutellerie, tissage. métallurgie, En quelques années, une Angleterre agricole et pastorale se transforme en une nation industrielle et commerçante. à charte existent déjà (Moscovie : 1554, Baltique : Des compagnies 1579 ; Levant : 1581). En 1585, une compagnie de Londres reçoit une du charte pour le commerce avec le Maroc et les états barbaresques nord de l'Afrique. Trois ans plus tard, des marchands d'Exeter (Devon) à leur tour une charte pour le commerce de Sénégambie. reçoivent En 1592 c'est le tour d'une autre association qui reçoit une charte pour aller commercer entre Gambie et Sierra Leone. Le 31 décembre 1600 est fondée la compagnie des marchands de Londres commerçant vers les Indes orientales qui a dans son domaine toutes les terres situées à l'est du Cap. Administration. A partir de 1660 un Comité du Conseil privé s'occupe des plantations et en 1696 est créé le Board of Trade and Plantations. Ce bureau n'aura aucune activité africaine particulière. Il s'agit surtout de contrôler le commerce des Indes et de veiller à l'essor des plantations antil-
ET A MADAGASCAR laises. En 1768 avec l'institution secrétariat d'état aux colonies. 2. Les expéditions
des ministres
359 permanents
est créé un
sur les côtes africaines.
Thomas Windham est le premier qui, en 1551, fait le voyage du Maroc. Deux ans plus tard, conduit par le Portugais Pinteado, Windham parvient au Bénin où il reste un mois, reçu en audience par le roi qui La rigueur du climat fait une hécatombe parle portugais. parmi les : en 1554, équipages de Windham. Cependant le trafic est intéressant trois vaisseaux et deux pinasses rapportent de Guinée quatre cent livres d'or, trente six barils de maniguette et 250 dents d'éléphant. Mais il ne s'agit que de voyages individuels et seules les compagnies à charte permettront des voyages réguliers. Les malheureuses tentatives sur Madagascar. C'est à Sainte-Marie, à la haie d'Antongil et à Saint-Augustin, à la que des navires appartenant Compagnie anglaise des Indes orientales relâchent pour se ravitailler. En 1636, le roi Charles 1er décide une expédition sur Madagascar qu'un nommé Thomas Herbert décrit comme « riche en toutes sortes de métaux ». Mais l'expédition confiée au prince Rupert de Bavière ne part pas. En 1640, Walter Hamond, en 1644 Richard Boothby font l'éloge de la Grande Ile, si bien que la même année 1644 une colonie de 140 un fort à la personnes dirigée par un certain John Smart construit baie de Saint-Augustin. Mais ils refusent d'aider les Malgaches dans leurs guerres tribales et sont laissés sans ressources. Au bout d'un an douze survivants seulement sont rapatriés. Une autre tentative faite dans l'île d'Assada (Nossi-Bé) par le Colonel Robert Hunk aboutit à un massacre quasi général. Les Anglais attendront de longues années avant de s'intéresser à nouveau à la Grande Ile. C'est par l'Inde et grâce à leur supériorité maritime dans l'océan Indien qu'ils prendront l'île Maurice et délogeront Sylvain Roux de Tamatave. La Gambie. Thompson, en 1620, remonte le cours de la Gambie et se rend assez vite compte de son médiocre rôle comme voie de pénétration. Sur ses sur le commerce de traces, Jobson obtient quelques renseignements le Tombouctou. C'est seulement en 1664 que les Anglais construiront fort James, leur premier établissement sur la côte d'Afrique, qui servira de base principale pour les opérations dans cette commerciales région. Cependant, les nécessités de la mise en valeur des Antilles (1) et de l'Amérique entraînent la création en 1672 de la Compagnie royale africaine qui reçoit de Charles II le monopole du commerce entre le Maroc et la colonie hollandaise du Cap. (1) Les Anglais s'étaient établis en 1609 aux Bermudes, en 1623 à Saint-Christophe, en 1625à la Barbade et aux Iles sous le Vent.
LES EUROPÉENS EN AFRIQUE NOIRE
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Les Gambia adventurers et la compagnie qui leur était liée abandonnèrent après un litige de douze ans (1672-1684) leur monopole commercial à la Royal African Compagny qui dura jusqu'en 1750 (1). Certes, la Gambie reste un centre de trafic important mais très vite l'action de la compagnie anglaise s'étend sur la côte de Guinée, cependant que combattre les voisins les comptoirs de Gambie .doivent fréquemment français du Sénégal. Des comptoirs sont aménagés à Dixcove, Secondi, Commendah, Anamabou, Winnebah sur la côte de l'actuel Ghana ainsi qu'à Ouidah au Dahomey. Ces divers comptoirs vont servir au trafic des esclaves. Durant les quarante premières années de son existence (2) jusqu'en 1712, la Compagnie envoie plus de cinq cent navires en Afrique. Les na100 000 esclaves sont transportés aux Antilles britanniques. et l'or vires transportent pour 1,5 million de Livres de marchandises africain sert à frapper un demi million de guinées. Mais le trafic est en plein essor en ce xviiie siècle qui voit la fortune de Liverpool promu « grand port africain ». En 1771 le seul port de en Liverpool avait en mer 105 bâtiments négriers qui transportaient 38 500 esclaves. Rien qu'en Angleterre, on comptait Amérique 15 000 esclaves. Nous verrons dans quelles conditions fut engagée la lutte antiesclavagiste dans le pays où le trafic négrier connaissait le plus vif succès. En 1703 le fameux traité d'alliance avec le Portugal passé à l'initiative de John Methuen, ambassadeur à Lisbonne, met le Portugal dans la mouvance de l'Angleterre et donne à la flotte britannique de précieux relais sur la route des Indes. En 1783, en effet, l'Angleterre a perdu avec ses colonies américaines l'essentiel de son empire d'outre-mer. C'est vers les Indes que les Britanniques dirigent leur action en même temps que la campagne se développe. Pour assurer la route des Indes, les antiesclavagiste Anglais s'installent au Cap et à Maurice ; dans le cadre de la campagne a été créée la colonie de Sierra Leone, base des futures antiesclavagiste possessions anglaises d'Afrique occidentale. La lutte contre l'esclavage et le trafic négrier va dominer le xixe siècle, mais c'est au xviiie que le tournant de la politique anglaise est pris pour des raisons à la fois économiques et humanitaires. VII.
L'ESCLAVAGE
ET LA TRAITE
L'esclavage et la traite sont des sujets qui ont été passionnément étudiés dans la lancée des mouvements si bien que les abolitionnistes, incidences de la traite sur les sociétés africaines n'ont jamais été envir sagée du point de vue africain, mais en fonction de pratiques européennes aussi racistes qu'inhumaines. A. GAILEY,A History of the Gambia, Londres 1964, p. 27. (1) HARRY (2) K. G. DAVIES,The Royal African Company, Londres i960, 390 p.
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i. Historique. La traite fut d'abord dans la mouvance des appartenances politiques et jusqu'à l'aube du xviie siècle un monopole portugais qui alimentait les îles du Cap Vert et de Sâo Thomé, le Brésil, mais aussi les possessions Au (futur Saint-Domingue). espagnoles de Cuba et Hispanola ils xvne siècle les Hollandais vont prendre la relève dans l'Atlantique, seront rapidement concurrencés par l'Angleterre et la France. Nous avons vu à propos des Canaries (1) comment plusieurs dizaines de Guanches avaient été emmenés en Espagne à la suite de l'installation des Normands de Jehan de Béthencourt. Les premiers nègres importés en Europe le furent par Antoine Gonzalès. Ce dernier revenait d'un voyage au Cap Blanc où il ramenait des Maures capturés au cours d'un précédent voyage ; dix nègres lui furent données en échange, avec de la poudre d'or. Dans la deuxième moitié du xve siècle, Arguin envoyait au Portugal environ un millier d'esclaves par an (2). A mesure de la progression des navigateurs portugais le long des côtes africaines, les Noirs furent de plus en plus nombreux dans les ports du Portugal. Les îles du Cap Vert jouèrent un rôle particulier. Santiago servait de refuge à des Portugais, Castillans et Génois, aventuriers et fugitifs. Son importance diminuera au milieu du xvie (3) avec l'extension de la traite dans les régions du Congo et de l'Angola. A partir de 1469, Fernao Gomès (4), notable commerçant de Lisbonne, reçoit du Roi de Portugal le monopole de la traite des nègres qui devient très vite un fructueux trafic, comme le note (5) le Tournaisien Eustache de la Fosse en 1480. On trouve à l'époque une justification chrétienne et civilisatrice, comme le souligne l'historien des Indes, le P. Mafîei (6) : « Les esclaves transportés des sablonnières de l'Ethiopie aux terres grasses de Portugal, et de leurs petites cassives et logettes à Lisbonne, par la seule fréquentation de la ville étaient peu à peu instruits à l'humanité et, ce qui était beaucoup plus excellent, ils étaient par là imbus des mystères de la religion chrétienne. » La découverte de l'Amérique et les difficultés d'emploi de la maind'oeuvre indienne (7) aboutissent très vite à l'importation de nègres esclaves. Celle-ci est officiellement prescrite le 12 janvier 1510 et dans le courant de la même année, les premiers contingents d'esclaves noirs arrivent à Hispaniola (Haïti). de l'Afrique des origines au XVIe siècle,p. 416. (1) Histoire (2) JAMESDUPPY,PortugueseAfrica, 1959, p. 132. (3)Ibid, p. 134. I, p. 420-421. (4) Tome Cité par CHARLES DELARONCIÈRE, Nègres et négriers, p. 13. (6) Ibid, p. 14. Pour I'évolution de l'emploi de la main-d'oeuvre indienne dans les colonies espa(7) gnoles d'Amérique, se reporter au livre de LEWISHANKE,Colonisationet conscience chrétienneau XVIe siècle,Paris, Plon 1957.
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LES EUROPÉENS EN AFRIQUE NOIRE
En 1514, Las Cases, premier évêque de Mexico, préconise la traite des nègres par égard pour les Indiens vraiment trop malmenés dans son diocèse. En 1521, les premiers éléments africains parviennent à Cuba. Nous avons vu dans quelles conditions la traite s'est développée sur une vaste échelle au Congo et en Angola. D'abord monopole portugais, la traite est bientôt pratiquée par les Hollandais et les Anglais. John Hawkins en 1562 dans une expédition au Sierra Leone va brûler il en capture 250 qu'il va vendre un village de huit mille habitants, Et Mondani constate (1) : « Loin d'être déshodans l'île d'Hispaniola. noré, son nom devenait populaire dans le Royaume Uni ». 2. Positions
françaises.
Par contre, les Français entrent tard dans la compétition négrière. Un capitaine normand ayant exposé des nègres pour la vente à Bordeaux, un arrêt du parlement proclame (1571) que « La France, mère de liberté, ne permet aucun esclave », ce que reprend dans ses institutes coutumières le jurisconsulte Antoine Loisel (1536-1617) disant que « Toutes personnes : si tost qu'un sont franches en ce royaume esclave a atteint les marches d'icelui se faisant il est baptiser affranchi ». Mais à partir du moment où la France possède des colonies américaines (2) elle doit recourir, pour mettre en oeuvre ses plantations, à la traite des nègres et, s'il n'y a pas d'esclaves en France, du moins existent des serviteurs noirs. Le 26 août 1670, le Conseil d'état, à la de Colbert, favorise l'esclavage en exonérant de l'impôt de requête 5 pour cent la traite des nègres de Guinée. L'édit de mars 1685 connu sous le nom de Code noir met un peu d'ordre dans le traitement des esclaves qui sont réputés biens meubles ; le mari, la femme et les enfants ne peuvent être vendus séparément. Les obligations des maîtres sont bien définies quant à l'habillement (deux habits de toile par an) et l'alimentation (deux pots et demi de manioc ou trois cassaves avec deux livres de boeuf salé ou trois livres de poisson) (3). Le code prévoit des amendes pour les hommes libres qui auront des enfants d'un concubinage avec leurs esclaves. Quant aux maîtres tué leurs esclaves, ils seront poursuivis criminellement qui auraient et « punis suivant l'atrocité des circonstances ». Les peines pour les délits commis par les esclaves sont extrêmement lourdes : la mort s'il le frappe le maître ou sa famille, la mort s'il vole des chevaux, fouet et la marque d'une fleur de lys sur l'épaule s'il vole autre chose. Mais le code noir intéresse beaucoup plus les Antilles que les quelde Saint-Louis, du Sénégal et de Gorée. ques familles de commerçants (1) La colonisation anglaise, tome I, p. 81. (2) Installation française à la Guadeloupe : 1626, à la Martinique : 1635. (3) LA RONCIÈRE,p. 22.
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3. Positions anglaises. de la brutaDans les possessions anglaises (1) certains s'émeuvent des Quakers, lité des planteurs : En 1671 George Fox, fondateur les désagréments de demande aux « amis de Barbade d'atténuer l'esclavage en les libérant après quelques années de servitude ». Richard Baxter, dans son Christian Directory publié en 1673, accepte l'esclaréglementé, mais dénonce les vage à condition qu'il soit strictement chasseurs d'esclaves comme les ennemis communs du genre humain. En 1680, un tract de Morgan Godwyn, pasteur anglican, dénonce les brutalités des planteurs. Et en 1689, Locke dans son traité du gouverde plaider pour l'esclanement civil déclare qu'il est « inconcevable vage ». 4. Importance
du trafic.
Il s'agit là d'un mouvement d'idées généreux certes, mais qui n'emIl fallait davantage pêche pas le fructueux trafic de se poursuivre. de main-d'oeuvre des Indes occidentales et le pour les plantations trafic triangulaire était des plus fructueux. Les navires partaient en effet d'Europe avec des cargaisons de pacotille (fer, fusils, poudre, d'achepagnes, fer en barres, cuivre en anneaux), qui leur permettaient ter des esclaves aux chefs locaux, puis les revendaient dans les îles où le café et le sucre de canne servaient de fret de retour vers l'Europe. 5. Les installations
à terre.
Le phénomène a été trop souvent décrit (2) pour qu'il soit nécessaire d'y revenir. En étudiant successivement la politique coloniale des nations d'Europe, nous avons vu dans quelles conditions étaient installés les comptoirs au début du xviiie siècle. Vingt-trois forts existaient sur le lit(Hollandais, Anglais, Danois, Brandebourgeois) toral de l'actuel Ghana entre le Cap des Trois Pointes et la Volta. Entre Volta et Niger sur « la côte des esclaves », aux Anglais et Hollandais se joignaient Français et Portugais. On distinguait à terre : les châteaux (3) trois types d'installations à la période portugaise correspondant (le meilleur exemple est Elsuivant les mina) jusqu'à la fin du xvie siècle, les forts construits principes des xviie et xviiie siècles, enfin les loges qui étaient des comptoirs non fortifiés. La maison centrale du poste était construite sur pilotis et comprenait une galerie supérieure en balcon. D'autres bâtiments abritaient (1) En 1619le capitaine anglais John Smith achète à Jamestown (Virginie)le premier lot d'esclaves noirs vendus sur le territoire des futurs États-Unis. ( ) CHARLES DELARONCIÈRE,Nègres et Négriers ; G. MARTIN,Histoire de l'esclavage «ans les colonies françaises, 1948 ; BASILDAVIDSON, Black Mother, Boston, 1961 ; rtad. Mère Afrique, Paris 1965. (3);Cf.à ce sujet l'important ouvrage de A. W. LAWRENCE, Trade castlesand forts of WestAfrica, Londres 1963, 390 p., 47 figures, 96 planches.
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LES EUROPÉENS EN AFRIQUE NOIRE
les officiers, l'infirmerie et le chirurgien, les magasins (marchandises une cuisine, une priet eau de vie), des ateliers (forge et charpente), son, enfin un jardin potager. Les stationnaires attachés aux comptoirs du Sénégal disposaient de matelots africains ou laptots, de gourmets (= timoniers), de râpasses en français le maître de langue (= mousses), auxquels commandait A Ouidah le comptoir français disposait, outre (maître d'équipage). un garde-magasin et deux courtiers, de six tagonniers rouleurs d'eau, une blanchisseuse, un Tronqué (correspondant au gardien des esclaves qui étaient en transit), enfin un gongonnier pour annoncer l'ouverture et la fermeture de la traite. Les employés étaient payés en ancres (12 pots de 25 bouteilles) d'eau de vie, en galines de bouges (ou cauris). Les marchandises de troc variaient suivant les portions de côtes, c'est ainsi qu'à Loanda c'étaient les étoffes de Harlem, toiles de Silésie, tapis de Turquie, à Cabinda des toiles peintes, du corail, des les pièces de dentelles, au Dahomey des chapeaux à la mousquetaire, toile de Guingamp, les mouchoirs de Cholet, les fusils boucaniers et les pierres à fusil, les briquets, les couteaux flamands... Le tarif des esclaves très variable était, à la fin du xviiie siècle, de l'ordre de cent cinquante barres de fer, soit environ quinze livres sterling. Fage signale (1) d'autre part que le paiement des esclaves se faisait en barres de fer à la Côte des Graines, en tissu à la Côte d'Ivoire, poudre d'or en Gold Coast, mais en cauris entre Accra et Keta, en fer et cuivre sur la Côte des Esclaves, en laiton dans les Oil Rivers, en tissu au Cameroun. Notons qu'à l'époque une barre de fer valait quatre barres de cuivre. 6. Guerres, interlopes et pactes de neutralité. Ce commerce était souvent perturbé par les conflits internationaux et l'action des interlopes. Mais cela ne faisait l'affaire ni des chefs africains bénéficiant de la traite, ni des compagnies à charte, aussi va-t-on voir des pactes de neutralité ou imposés signés entre les compagnies africains. par les souverains Ainsi pendant la guerre de la succession d'Espagne qui voit le 18 avril 1701 l'attaque de Gorée par un vaisseau de guerre anglais, puis, quelques mois plus tard, la prise de l'île James par les Français qui pillent le comptoir, André Brùe n'hésite pas à proposer au gouverneur aux termes duquel la compagnie anglais Corker un pacte de neutralité et la compagnie française s'engagent à ne point prendre britannique et même à se prêter au besoin main-forte part aux hostilités pour assurer la liberté du commerce et de la navigation dans leurs domaines respectifs (2). Ce pacte devient un traité officiel de neutralité signé à Londres le 8 juin 1705 entre la compagnie du Sénégal et la compagnie anglaise 1) J. D. FAOB,West Africa, p. 80. ((2) MAURICE DELAFOSSE, Afrique occidentale française, p. 24.
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pas un corsaire français de piller Fort d'Afrique. Mais il n'empêchera de la garnison. James en 1708 (1) à la suite d'une mutinerie le souverain du Sur la côte des Esclaves (dans l'actuel Dahomey), royaume d'Ardres (Allada) rassemble les chefs de comptoir européens à en septembre 1714 et les invite à ne pas se quereller non seulement ainsi (2) cette terre, mais encore en rade. Le Père Labat commente décision : « Cette proposition déplut infiniment aux Portugais, aux Anglais et aux Hollandais ; comme ils étaient tous trois ligués contre la France, ils se croyaient assez forts pour ruiner absolument le commerce qu'elle faisait dans le pais... Le Roi leur donna le choix de quitter le pais ou d'accepter la neutralité qu'il proposait et, voyant qu'ils ne se rendaient pas, il leur dit d'un ton fort haut que, s'ils n'acceptaient pas sa proposition dans une heure, il ne leur serait plus libre d'y revenir et qu'il se saisissait de tous leurs effets et peut-être de leurs personnes jusqu'à ce qu'ils satisfissent aux autres rois nègres ses alliés. « Les chefs anglais, hollandais et portugais essaient bien d'invoquer la nécessité de demander des instructions à leurs gouvernements, mais le roi est inflexible et le traité de neutralité est conclu... on en dressa les articles qui furent signés et qui ont été depuis ratifiés par tous les nouveaux directeurs et autres principaux officiers qui viennent dans le païs. » Il est vraisemblable par le roi que les bonnes relations entretenues nantais en Houffon avec les Français en général et les commerçants particulier aient influencé sa décision. Mais celle-ci n'était en réalité conclu en Sénédu pacte de neutralité que le prolongement gambie. D'un ordre un peu différent est l'accord réalisé par le Marseillais Pierre David, gouverneur du Sénégal de 1736 à 1746, qui reprend avec les négociations du fort anglais de Saint-James, Orfuse, gouverneur entamées en 1701 avec Corker. Mais il s'agit là beaucoup plus de la lutte contre les interlopes. Le terme interlope (qui vient de l'anglais et signifie fraudeur) désignait alors sur la Côte d'Afrique les bateaux corsaires qui venaient sur le territoire concédé aux compagnies charger des produits et faisaient une concurrence d'autant que, plus redoutable ils pouvaient n'ayant pas les énormes frais généraux des compagnies, acheter plus cher en Afrique et vendre meilleur marché en Europe. C'était le cas notamment vendues pour la gomme dont les quantités en Angleterre celles expéet en Hollande de beaucoup dépassaient diées en Europe par la Compagnie des Indes. Aux termes de l'accord conclu entre Pierre David et Orfuse, le gouverneur français s'engageait à livrer annuellement de en échange 360 000 livres de gomme livrerait 300 esclaves à la compagnie quoi la compagnie anglaise française. HARRYA. GAILEY,A History ofthe Gambia, p. 27. (j)) Le voyage du chevalier des Marchais en Guinée, Isles voisines et à Cayenne fait en (2 1726, 26 et 27, cité par DUNGLAS, Études Dahoméennes XV, p. 96.
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LES EUROPÉENS EN AFRIQUE NOIRE
7. La traite des esclaves
et les sociétés
africaines.
africain un lourd facteur d'appauLa traite fut pour le continent vrissement humain. On évalue à 3 millions environ le chiffre d'esclaves en de la région au sud du fleuve Congo correspondant transportés gros à l'actuel Angola, entre 1580 et 1880. Ailleurs les chiffres sont plus difficiles à évaluer, mais il ne semble pas que des zones aient été massivement dépeuplées comme ce fut le cas en Angola. Au contraire, les régions corrrespondant aux zones côtières de la Gold Coast, du Togo, du Dahomey et de Nigeria, sont parmi les plus peuplées Comme les ponctions humaines de la traite négrière ont d'Afrique. été importantes, il faut bien admettre nouvelles, que les plantes le maïs et le manioc, introduites au notamment par les Portugais contribuer à un meilleur équilibre xvie siècle, ont pu heureusement des peuples de la côte. démographique Au point de vue économique et culturel, l'action de la traite a été entièrement négative. Elle a stérilisé dans l'oeuf un processus de déve-. économique qui aurait pu s'instaurer par la transformaloppement tion de certains produits susceptibles d'être vendus à des commerçants étrangers. Par ailleurs, les outils et les tissus étant livrés par le commerce européen, les populations africaines n'avaient pas à faire d'efforts pour fabriquer les biens de consommation. Les chefs des ethnies côtières portent une écrasante responsabilité dans la mise en oeuvre de la traite. Le recrutement des esclaves s'opérait en effet de deux façons : l'une en quelque sorte coutumière débarrassait les villages des fortes têtes, de ceux qui avaient enfreint les lois de la tribu (vol, adultère, etc.) ou encore parfois des enfants que le père de famille pouvait difficilement nourrir. Mais il est bien évident que ces modes de recrutement ne suffisaient pas à apaiser la fringale des négriers et c'est surtout par des campagnes militaires que les milliers d'esclaves objets de la traite étaient des obtenus. Ainsi les chefs des ethnies côtières se débarrassaient éléments jeunes et dynamiques des peuples de l'arrière-pays avecleslesquels ils étaient en conflit. Pour les achats européens on peut distinguer trois modalités très Dans la première, la plus généralement pratiquées. inégalement eux-mêmes les esclaves aux employée, les chefs africains amenaient postes européens ; une deuxième formule dans les colonies portugaises consistait à payer leurs taxes en esclaves. pour les chefs coutumiers Enfin le système dos intermédiaires métis, les Pombeiros, était assez en Angola. largement pratiqué La participation active à la traite mettait en place le cycle infernal. Pour se procurer des esclaves, il fallait faire des expéditions guerrières bénéficier d'un armement qui devaient pour l'emporter supérieur, donc de fusils. Pour obtenir ces fusils des commerçants européens, il fallait leur fournir des esclaves et donc faire la guerre aux peuples voisins. Arrivés sur la côte, les esclaves étaient parqués dans des hangars
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plus pour les em(nommés bombes, troncs ou barracons) construits de pêcher de fuir que pour leur confort. Des anneaux permettaient les enchaîner. André Ducasse a bien décrit (1) les conditions du trafic, la malhonnêteté des chefs de comptoirs et le rôle des acquérais (commis subalternes noirs). Ce délabrement moral s'explique en partie par un climat l'envoi des moins recommandables meurtrier justifiant agents des compagnies. Les nègres achetés étaient marqués au fer rouge du sceau, des armes, des initiales de la Compagnie et du négrier. D'après le P. Labat (2) on utilisait une lame d'argent mince. « On la fait chauffer, on frotte avec du suif l'endroit où on la veut appliquer, on met dessous un papier graissé ou huilé et on applique légèrement l'estampe, la chair gonfle, les lettres paraissent en relief et ne s'effacent jamais. » Les pertes en mer étaient d'importance inégale et on a peut-être choisis pour la exagéré leur ampleur moyenne à l'aide d'exemples D'après Ducasse (3) la mortalité oscillait campagne antiesclavagiste. entre 7 et 26 %. Par ailleurs James Duffy donne (4) pour la traversée de Loanda au Brésil qui durait en moyenne de 5 à 8 semaines une proportion de 20 à 30 % de pertes. Les épidémies et les révoltes d'esclaves modifiaient parfois ces rapports et il est très difficile d'aboutir à des chiffres précis en matière d'esclaves transportés. 8. Le chiffre des esclaves transportés. Il est certain que la saignée fut considérable mais les effectifs d'esclaves presque avec passion ne tiennent toujours présentés dont nous dispas un compte suffisant des chiffres comptabilisés posons. En 1770 l'abbé Raynal écrivait : « Quatorze cent mille malheureux, dans les colonies européennes du nouveauqu'on voit aujourd'hui monde, sont les restes infortunés de neuf millions d'esclaves qu'elles ont reçus. » Charles de la Roncière, pour son évaluation, prend pour base la statistique établie par l'Anglais Norris pour l'année 1788, soit 74000 esclaves et fait une règle de trois qui aboutit en deux siècles à 15 millions, cependant qu'au xixe siècle elle serait de 5 autres millions. Mais l'année 1788 est une année sans guerre, alors que bien entendu les périodes de conflits internationaux ont perturbé le trafic, notamment durant la guerre de l'indépendance américaine et pendant les divers conflits franco-anglais. En ce qui concerne l'Angola terriblement marquée par la traite, le chanoine Jadin qui est l'un des meilleurs connaisseurs des archives (l) Les négriers, p, 100. Les négriers, p. 107. par DUCASSE, (1)Cité (3) ibid, p. 116. (4) PortugueseAfrica, p. 141.
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LES EUROPÉENS EN AFRIQUE NOIRE
de Loanda conteste portugaises avions donné par ailleurs (2).
(1) le chiffre de 5 millions
que nous
« Au xvia siècle la traite d'Angola n'a existé que peu d'années. Au xviie siècle on était souvent à 4 ou 5 000 par an avec des pauses et des crises (de 1641 à 1648) pour remonter à des pointes de 10 à 12 000. Au XVIIIe siècle on en reste souvent à 4 000 avec une pointe de 17 000 au xixe siècle en 1827. Le maximum de la traite officielle a été de 27 500. Nous savons que l'exportation illégale a été importante après 1836. J'ai dirigé une thèse sur ce problème basée sur des archives anglaises, portugaises et angolaises. Dans l'ensemble on est loin des cinq millions. » A-t-on le droit, par ailleurs, de doubler le chiffre des esclaves transportés pour aboutir au chiffre de la ponction dont a été victime la société africaine ? En ce domaine, les récits de Livingstone et des premiers explorateurs du siècle dernier qui ont assisté à la traite négrière arabe sont accablants. Sur la côte ouest-africaine, les esclaves étaient suffisamment une marchandise appréciée pour que l'on évite de la détériorer en cours de route. Mais, si l'on compte les pertes dues aux guerres faites pour se procurer des esclaves, alors on aboutit effectivement à des chiffres effrayants, car bien entendu les esclaves razziés étaient jeunes et représentaient un fort potentiel démographique. D'autre part il est certain que, chez les peuples du Danhomé et de de certaines campagnes était supérieur aux l'Achanti, le rendement besoins de la traite, ce qui autorisait par exemple les souverains d'Abolors des fameuses mey à faire des sacrifices humains plus importants a coutumes ». Que conclure sinon qu'il manque à l'heure actuelle une étude solidement documentée sur le problème d'ensemble de la traite. Si chaque auteur affirme des chiffres différents, c'est parce qu'il extrapole librement à partir des quelques statistiques certaines dont nous disposons. Mais la rareté de ces statistiques, évidentes les variations suivant de guerre ou de paix, tout cela qu'il s'est agi d'années fait qu'il est impossible d'affirmer un chiffre avec aujourd'hui certitude. Ces réserves faites, il semble que l'on puisse avancer globalement de 1800 et indépendamment pour la seule traite atlantique jusqu'en la traite arabe, une évaluation minima de quinze millions, ce qui avec le doublement une saignée de l'ordre de trente millions donnerait environ d'êtres enlevés à l'Afrique où l'on dénombre aujourd'hui 200 millions de Noirs. Nous avons étudié le problème de la traite dans son ensemble dans ce chapitre parce qu'elle représente au xviiie siècle le mode de relation exclusif institué entre l'Europe et l'Afrique. Dès le milieu du (1) Dans une lettre du 6 février 1964. (2) R et M. CORNEVIN,Histoire de l'Afrique des origines à nos jours, Paris 1964, p. 215.
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le Noir xviiie siècle on envisagera dans certains milieux européens que marchandoit être considéré comme un homme et non comme une mitrès subsistera jusqu'au importante la traite Mais dise. atlantique côte orien de la arabe la traite à xixe du laquelle siècle, lieu époque cette Nous étudierons taie prendra des dimensions catastrophiques. chapitre. évolution dans un prochain
— Histoire de l'Afrique, Tome II. R. CORNEVIN.
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TROISIÈME
PARTIE
SEPTENTRIONALE L'AFRIQUE européenne) (du XVIe siècle à l'intervention
de se libeller plus précisément Le titre de cette partie pourrait Mais l'affaire est en réalité européenne. l'Afrique turque à l'Afrique de cinq entités politiques dont plus complexe qui envisage l'évolution et indépendance, alors le Maroc, déjà formé, conserve individualité que l'Egypte, Tripoli, Tunis et Alger seront plus ou moins nominaleleur ment et durablement des provinces avant d'affirmer turques identité nationale et d'être finalement annexées (Algérie, Tripolitaine) ou « protégées » (Tunisie, Egypte, Maroc) par une puissance européenne. L'évolution de l'Afrique septentrionale est d'abord fonction des positions méditerranéennes des puissances riveraines. La croisade de Pedro Navarro lancée par le cardinal Ximenes de Cisneros sur les côtes nordafricaines entre 1505 et 1510 entraîne des réactions de guerre sainte et l'arrivée des Turcs qui viennent de prendre l'Egypte (1517) dans les ports principaux de la côte algérienne et tunisienne. Dans le gigantesque de duel qui oppose la formidable puissance Charles Quint s'étendant les Pays-Bas, les sur l'Espagne, l'Italie, états allemands, à l'empire turc, l'alliance de François 1er et de Soliman apparaît comme un légitime réflexe de défense aussi bien pour le sultan de Constantinople, heureux de pouvoir compter sur la nation la plus nombreuse et la plus brillante d'Europe, que pour un roi de France soucieux de rompre l'encerclement. C'est pourquoi le traité de commerce franco-turc connu sous le nom de Capitulations (1535) fonctionnera souvent comme une véritable alliance. Une carte de l'Europe méridionale au xvie siècle montre bien, pour la puissance hispano-allemande qui se défend parfois dans la plaine hongroise (Mohacs : 1526) et jusqu'aux portes de Vienne (1529), quelle est l'importance du front africain, alors que, basée sur le littoral alla marine turque et ses corsaires peuvent porter leurs géro-tunisien, occidende îucdilerranée coups sur les îles et le littoral italo-espagnol tale. La résistance de Malte en 1565 sera pour la chrétienté l'équivalent de Verdun ou de Stalingrad pour le monde libre au cours des deux guerres mondiales. Cinq ans plus tard, le 7 octobre 1570, la défaite dans le rapport de turque à Lépante marque un décisif tournant lorces des marines ou Méditerranée. A la même époque sur terre les Espagnols sont expulsés de tous les
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L'AFRIQUE SEPTENTRIONALE
points qu'ils tiennent sur la côte du Maghreb sauf Oran qu'ils garderont jusqu'en 1708 puis de 1732 à 1791. En reprenant Tunis aux Espabient que la page est tournée. En 1581 gnols, les Turcs marquent miliPhilippe II signe une trêve avec le sultan. Mais, si l'organisation en Afrique du Nord, les liens se relâchent entre taire turque s'implante et Constantinople du fait des conditions ces nouvelles possessions locales de la puissance des corsaires au pouvoir et du déclin de la flotte après Lépante qui rend ces liaisons lointaines difficiles sous la menace Ce relâchement des liens avec Istamboul n'imdes flottes chrétiennes. pas forcément un enracinement plus profond dans plique cependant le pays. La régence de Tunis, beaucoup plus arabisée, assimile les corps turcs et, dès le début du xviiie siècle, la dynastie hoçaîd'occupation comme sont devenus tuninide est devenue une dynastie tunisienne siens les beys et leurs officiers. Dans la régence d'Alger, au contraire, les Turcs vivent en marge du de la course mais particulière pays sans doute à cause de l'importance chez les Berbères, ni affinités, ni symaussi parce qu'ils ne trouvent maritimes de ces compte tenu des préoccupations pathie. Toutefois, il est remarquable condottieri, que certains se soient préoccupés de l'intérieur. Ce fait s'explique en réalité par les tendances au pillage de ces tribus attirées par les richesses amassées dans les ports et qu'il fallait donc battre avant qu'elles n'aient déclenché leurs offensives ou neutraliser par un réseau d'alliance, ce qui impliquait une véritable « politique indigène ». Salah Raïs, le troisième beylerbey d'Alger, s'en et Ouargla (1552) cependant ira guerroyer que jusqu'à Touggourt Dragut, depuis Tripoli, s'en ira combattre les cheiks du djebel Nefousa. en les tournées de police vers l'intérieur Normalement s'expliquent, dehors des réflexes personnels, par la nécessité d'envoyer en campagne des troupes qu'il est dangereux de laisser trop longtemps en garnison et des officiers trop ambitieux pour une capitale ou un pouvoir vulnérable. Le xvie siècle est le début de l'ère atlantique. Sous le règne de Soliman le Magnifique (1520-1566), la prise de Rhodes (1522) fait de la Méditerranée orientale une mer turque. La position française s'affirmera aux xviie et xviiie siècles en Méditerranée occidentale vis-à-vis des états barbaresques à propos des captifs chrétiens et à cause de positions commerciales importantes et consuls français. que défendent négociants Sur le plan économique, le changement des routes commerciales de l'Inde vers l'Europe qui, jusqu'au de l'isthme de Suez, percement passent désormais par le Cap, entraîne le déclin rapide des interméde ce commerce : l'Egypte et Venise. diaires jusqu'alors obligatoires La raréfaction de l'or du Soudan, l'attirance pour les caravanes de du pèlerinage de la Mecque l'Egypte également placée sur l'itinéraire dans l'enont pour corollaire une diminution des recettes douanières semble du Maghreb et une crise économique d'une particulière ampleur. Dans ce difficile contexte, les tensions sont aggravées par l'expul-
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sion en plusieurs vagues et l'exode des Moros ou Moriscos chassés d'Espagne après la conquête de Grenade (1492) par une série de décrets dont le premier est du 12 février 1502. Bien que l'édit d'expulsion assigne expressément la Turquie à ces Morisques, plusieurs centaines de milliers réussissent à s'établir entre le Maroc et Tripoli. Cependant de nombreux Moriscos demeurent plus ou moins convertis dans la province de Grenade. En 1566 Philippe II, lors du siège de Malte prend de nouvelles mesures de coercition à leur encontre. Par la pragmatique de 1566 il leur interdit de parler une autre langue que l'espagnol, de à clé, de porter un costume les différenciant fermer leurs habitations des chrétiens ou de garder un nom arabe. Une révolte éclate alors entraînant la répression du marquis de Mondejar, puis l'expulsion par Don Juan d'Autriche des « habitants de Grenade de race africaine ». sur des hommes installés depuis plusieurs Ce mouvement portant siècles en Espagne est comparable toutes proportions gardées à celui des pieds noirs rapatriés en 1962 d'Algérie en France. Cette immigration des Morisques eut une influence considérable sur l'économie maghrébine. Les paysans, qui ont fait merveille dans les huertas d'Andacertaines zones de la campagne tunisienne mais lousie, transforment la plupart (artisans ou commerçants) s'installent dans les ports en une du marché et n'ont de ressource que dans période de rétrécissement la mise en oeuvre d'entreprises de course qui satisfont en même temps leur désir de tirer vengeance des chrétiens d'Espagne. Avec l'arrivée des Maures d'Espagnelapiraterie change de caractère: des navires plus grands et plus rapides remplacent les anciennes galères. L'utilisation de la voile accroît le rayon d'action des navires corsaires. Toutefois ces Morisques, de même que les Arabes ou les Berbères de la côte, n'ont que rarement le commandemant de navires. Comme l'a fort bien souligné le commandant Coindreau (1), la piraterie barbaresque fut le plus souvent pratiquée par des Européens chrétiens de naissance. Les uns étaient des aventuriers anciens renégats, d'autres, esclaves, avaient été convertis de force à l'islam. Comme le disait le R. P. Dan (2), sous la dénomination de nomde Turcs se dissimulaient breux « Grecs, Russiens, Portugais, Espagnols, Flamands, Allemands, qui avaient abandonné le culte du vrai Dieu pour sacrifier au Diable ». Parmi les plus célèbres les deux frères Barberousse, fils d'un potier grec de Mytilène, Hasan renégat de Sardaigne qui défendit Alger en 1541 contre les Espagnols, Eujd Ali renégat originaire de Calabre que nous trouverons comme gouverneur d'Alger... les Sakizli, originaires de Chio, sont pacha de Tripoli au xvnc siècle et Méhémet Ali est né en Macédoine. En 1588, sur 35 galiotes armées à Alger, 24 étaient commandées par des renégats, les 11 autres par des Turcs. Tout se passe comme Bil'élément dynamique de la politique, de la guerre ou de l'économie devait venir de l'extérieur. (1) Les Corsairesde Salé, p. 20. (2) Histoire de la Barbarie et de ses corsaires, Paris 1649.
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des corsaires et de la bourDu fait de cette origine internationale dans les ports de véritables princigeoisie urbaine, vont se constituer pautés ayant une existence en marge du pays qui continue à vivre en économie de subsistance. aurait été organisée à Bougie vers La course, d'après Ibn Khaldoun, des cités côtières dans le cadre autonome 1360. Elle s'est développée si fréquentes entre restant à l'écart des longues périodes d'anarchie des Moriscos apporte un élément le xiie et le xive siècles. L'arrivée de ces véritables corsaires républiques capital dans la constitution locales de laisser les administraqui se créent à partir des traditions de notables cette bourgeoisie tions collégiales aux mains de notables; enrichis est composée pour la plus grande part des armateurs par la course. Les images d'Épinal, Cervantes, Regnard et « Monsieur Vincent » ont contribué à donner au lecteur européen une image des Barbaresde yatagans brandis et de captifs ques faite de pirates enturbannés, sous un soleil chrétiens enchaînés assurant des corvées inhumaines meurtrier. Une partie de cette fâcheuse opinion vient du terme même de Barbarie qui ne désigne pas autre chose que le pays des Berbères (ce terme venant de l'arabe berber, lui-même tiré du latin barbants, nettement mais qui possède en français une résonnance péjorative). En fait, les états barbaresques vivaient de la course et leur autorité ne s'exerçait pas très loin dans l'intérieur. Comme le souligne Monlaii (1) : « L'histoire intérieure de l'Afrique du Nord-Ouest... demeure pratique». ment distincte de celle des états barbaresques Aussi le mot percutant Braudel sur « La course qui tend dejFernand ne semble pas exacà rétablir un équilibre naturel faussé par l'Histoire» tement correspondre à la réalité nord-africaine où cette richesse récuen effet, pérée sur la mer ne profitait qu'aux ports côtiers. A l'intérieur, les forces particularistes d'autant que le prennent plus d'importance pouvoir central est moins fort et plus préoccupé de la course. Les trois siècles de domination pas les turque ne sont assurément de l'histoire de cette région. Cependant c'est durant plus brillants cette période que vont se former les entités algériennes et tunisiennes. de Bardes hommes de souche européenne L'importance particulière berousse à Dragut et Méhémet Ali doit être soulignée. Ce recrutement international sous bannière turque des chefs venus dont de l'étranger et l'homogénéité relative de l'Afrique septentrionale rend moins berbère est en voie d'arabisation l'important peuplement nettes les limites des royaumes. Ces limites au demeurant comptent de pensée islamique, comme pour les peu pour les grands courants confréries dont la Tijaniya et la Senoussiya au xixesiè cle prennent une importance telle que les réflexes nationalistes contre l'implantation européenne dans les milieux religieux et prendront s'affirmeront les couleurs de la guerre sainte. de Bonaparte, Après avoir étudié l'Egypte l'expédition jusqu'à (1) Les Etats barbaresques, p. 36.
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de 1882, nous envisagerons l'installation britannique puis jusqu'à la perte l'intervention jusqu'à turque du depuis Maghreb l'évolution : la Régence d'Alger jusqu'à la conquête française des indépendances français de 1881, Tripoli protectorat de 1830, la Tunisie jusqu'au la le Maroc jusqu'à enfin de italienne 1912, la conquête jusqu'à français (1912). convention de Fès qui établit le protectorat
CHAPITRE L'EGYPTE
DU XVIe
X SIÈCLE
A 1882
I — L'EGYPTE DU XVIe SIÈCLE DE BONAPARTE A L'EXPÉDITION (1798-1801) Nous avons vu (1) comment Touman Bey, dernier Sultan Mamlouk, fut pendu à un crochet de fer à la porte d'El Zouileh le 23 avril 1517. son indépendance : après Ainsi, une fois de plus l'Egypte perdait les Perses, les Grecs, les Romains, les Byzantins, les Omayyades de maîtres de Damas et les Abassides de Badgad, les Turcs devenaient l'Egypte. avec une brutale déchéance éconoCe déclin politique coïncidait réalisée par mique provoquée par la liaison directe Lisbonne-Calicut Vasco de Gama (1497-1499). Cette liaison faisait perdre à l'Egypte sa entre l'orient et l'occident ainsi position d'intermédiaire obligatoire que les copieux droits de douane qui en découlaient. Nous avons vu (2) comment la flotte égyptienne fut une première fois bombardée en rade de Calicut (1505) puis anéantie à Diu (1509). Pour Sélim 1er, le dynamique sultan ottoman qui succède en 1512 au faible Mohammed II, l'Egypte, proie facile, devient une simple province de l'empire turc astreinte à payer un tribut annuel en argent et en produits agricoles, ce qui ne lui était plus arrivé depuis l'invasion des Fatimides en 969, cinq cent quarante-huit années auparavant. Elle durant trois siècles, n'a plus d'Histoire nationale. L'Egypte, ne reprendra une nouvelle existence que lors de l'expédition de Bonade parte (1798-1801) et du grand réveil de Méhémet Ali. L'autorité ne sera bientôt plus que nominale du fait qu'un bey Constantinople ou un kiaya (= lieutenant des janissaires) aura la réalité du pouvoir. Si les Mamlouks ne sont plus sultans, ils gardent une place prépondérante après la conquête turque puisque c'est dans leurs rangs que se les plus recrutent les vingt-quatre bey s (= seigneurs) qui tiennent hautes charges dans l'État et les cachefs (administrateurs provinciaux). Ces Mamlouks souvent originaires du Caucase sont en général d'origine servile et appartiennent comme des serviteurs guerà leurs maîtres riers dont l'entraînement militaire est extrêmement poussé. I1) Tome I, p. 319. (2) Supra, p. 320.
L'ÉGYPTE DU xvie i. Gouvernement
SIÈCLE A 1882
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de l'Egypte.
de l'Egypte administrative Ébauchée par Sélim Ier, l'organisation est mise au point par Soliman le Magnifique (1520-1566) à la suite confiée au grand vizir Ibrahim d'une mission d'inspection Pacha, Grec de l'Épire enlevé par des corsaires et qui doit sa faveur à ses de trois mois qu'il mène en Egypte à talents de violoniste. L'enquête du domaine administratif : partir du 25 mars 1525 s'étend àl'ensemble divan, milices, officiers, beys, cachefs, mamlouks, finances, revenus des fondations pieuses (vakoufs) et temporels. Un règlement général confirmé par un firman pour l'Egypte (1), approuvé par les Imanset impérial, sort de cette enquête qui fixe pour trois siècles l'organisation de l'Egypte. Celle-ci n'est plus qu'un vilayet, un administrative communs à toutes les propachalik pourvu des agents administratifs officiers de milice et beys. vinces de l'empire turc : gouverneurs, Les gouverneurs (Pacha) exercent leurs pouvoirs en vertu d'un catéchérif (firman) émanant du sultan qui décrit leurs principales obligations. Le Pachalik du Caire est l'un des plus importants de l'empire turc et les fonctionnaires d'autres nommés à ce poste ont déjà l'expérience Nommés généralepachaliks et de très hauts postes administratifs. ment pour un an, certains pacha sont maintenus deux ou trois ans. Soliman (1525-1538) et David (1538-1549) resExceptionnellement tent très longtemps sans doute pour bien asseoir l'autorité du sultan et mettre en oeuvre le nouveau règlement. Certains pacha sont révoon les dit Mansoul (= déchu) ; qués par le sultan de Constantinople; d'autres sont contraints par les officiers des milices et des beys à se démettre de leurs charges. Les pacha ainsi destitués le sont bien souvent à cause de leur trop grande discipline vis-à-vis de Constantinople. Le pacha doit accomplir un certain nombre d'actes rituels, les uns les autres en relation avec propres au régime agricole de l'Egypte, l'Islam : au moment où la crue est suffisamment haute, il fait ouvrir la digue du canal, le Kalig ; le jour de la fête du Baïram, en compail s'en va entendre la gnie des Aga, Kiaya, bachaon, et janissaires, prière au nom de Sa Hauteur. Il préside chaque année également au départ de la caravane des pèlerins de la Mecque, le hajj, qui transporte un sanctuaire modèle le Mahmal, représentant l'autorité du sultan et un tapis le kisouah, portant des versets du coran. Cette tenture qui a été confectionnée sous les yeux du pacha remplace à La Mecque, sur les murs de la Kaaba, la tenture de l'année précédente dont les morceaux servent d'amulettes aux pèlerins. Le pacha préside les divan (2). Le petit divan, conseil de gouvernement de l'Egypte, dont la composition est variable comprend en (1) La traduction de co règlement fut reproduite en partie par l'interprète Digeon dans ses nouveaux contes turcs et arabes (1779) sous le nom de Canoun Namé ou iditt au sultan Soliman concernant la police do l'Egypte. 2 ) L,emot d'origine persane proviendrait de ce que les membres des premiers divans auraient été comparés à des génies (en persan div, pluriel divan).
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principe les premiers officiers des milices, les beys et les principaux personnages religieux. Le grand divan, assemblée plus vaste, a compétence pour les questions intérieures. L'impôt (et la façon la plus habile d'en attirer dans leur poche) est la préoccupation dominante des gouverneurs. Le revenu des terres mais par l'intermédiaire n'est pas perçu directement des Moultezim (officier de milice, bey, mamlouk ou simples particuliers) qui collectent eux-mêmes l'impôt d'un cheikh régissant le village (cheikh el beled). L'impôt perçu après les récoltes est divisé en deux parties, le miri constitue le revenu du sultan et par conséquent du gouverneur, le des sommes faïz ( = le surplus) revient au moultezim. La comptabilité nommé à vie par le perçues est confiée au rousnamgy, fonctionnaire sultan. Ces comptes, soumis au pacha et au bey Defterdar (trésorier), sont envoyés à Constantinople. Le Miri en nature (blé et orge) est au Caire. Outre le Miri, le pacha tire le bénéfice de son emmagasiné droit éminent sur le sol ; il récupère les villages dont le moultezim meurt intestat et, en d'autres cas, bénéficie de la taxe que ses héritiers doivent payer. Les droits de douanes constituent, nous l'avons vu, une source de revenus considérable que le trafic direct de l'Europe aux Indes parle Cap doit beaucoup réduire. Le kharadj, impôt versé par les chrétiens et les juifs, sujets ottomans, constitue une autre source de revenus. est de 600000piasLe tribut annuel (Kazneh) versé à Constantinople à pied. tres ; le convoi comprend 300 cavaliers et 200 janissaires C'est seulement à la fin du xviiie siècle que le versement du kazneh Un tribut en nature existe, portant par s'espaça de façon considérable. caravane de mer les produits exotiques (café, sucre, dattes, safran, poivre, gingembre, noix muscade, séné, gomme, encens, parfums d'Arabie, etc.). de l'emterritoriale est, comme dans l'ensemble L'Administration pire turc, entre les mains des bey (= seigneurs) qui résident au Caire et des Cache) (administrateurs provinciaux). Les Bey. Selim 1er institue 24 bey en Egypte dont les premiers sont des émirs mamlouks ralliés après sa victoire de 1517. Ensuite et jusqu'au xviiie siècle c'est le pacha qui désigne les bey et ensuite le pacha se borne à entériner la désignation faite par les maîtres réels de : les Kiaya des milices et les bey déjà en place. Les bey sont l'Egypte choisis dans les corps de milices notamment les Moutegénéralement ferraka. du sultan, le bey est nommé par le pacha. La lecture Fonctionnaire du firman lui conférant sa dignité est faite dans une salle du château devant le Divan rassemblé. Parmi les vingt quatre beylicats d'Egypte, l'usage veut que l'un soit dévolu à un cheikh arabe et un autre au sont le du pacha. Les trois bey les plus importants kiaya (lieutenant) Defterdar, sorte de trésorier général auquel incombe la charge de garder les registres de la propriété foncière, l'émir haji, chef de la caravane annuelle du pèlerinage à la Mecque, enfin le cheikh el beled qui, en,
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puisqu'il dispose de la plus grande partie des fait, gouverne l'Egypte revenus de l'impôt foncier. La plupart des bey résident au Caire sauf celui de Girgeh en Haute Egypte qui, du fait de son éloignement, de leur solde, les Indépendamment jouit d'une certaine autonomie. bey se font concéder des villages et le travail des fellah constitue l'essentiel de leurs revenus, soit par les terres oussiah (dont les prosoit par le Miri dont les bey duits leur reviennent intégralement), conservent une partie. La rapacité des bey est dénoncée dans tous les européens du xviiie siècle. On signale même rapports des voyageurs à leurs profits les revenus qu'en 1777 les bey envisagent de détourner des biens Vakouf (legs faits aux mosquées ou aux communautés reliviolente menée par les étudiants d'El gieuses), mais l'opposition Azhar tourne à l'émeute et ils doivent y renoncer. Les cachef sont les administrateurs territoriaux, délégués par les dont ils sont titulaires. est bey dans les circonscriptions L'Egypte divisée en un nombre variable (14 à 34) de cachefliks. Les tâches des cachef sont précisées dans le Canoun Namé de Soliman. Ils veillent au bon entretien des digues, à l'ensemencement des champs après le retrait des eaux, à la collecte des impôts ; ils sont en outre responsables de l'ordre. Soliman avait prévu les possibles abus des cachef, aussi les honoraires sont-ils fixes : deux médines de chaque village visité. Les cachef, ayant un traitement annuel fixe, sont donc, comme le dit aux terres domaniales situées Sylvestre de Sacy (1), « par rapport dans leur ressort, plus des receveurs généraux responsables du montant du rôle dont le recouvrement leur est confié, que des fermiers dits ». proprement Les cachef sont nommés par le pacha du Caire. Depuis la fin du xvne siècle les pacha agréent les candidats présentés par les chefs de milice. Cependant les bey auraient eu le privilège de nommer euxmêmes les cachef d'Assouan, d'Elouan et de Terraneh. d'Ebrioun, Les cachef viennent au Caire d'août à janvier attendant que les eaux du Nil s'écoulent et que le bersin ou le sainfoin ait suffisamment poussé du fourrage à leur retour. pour que les chevaux trouvent L'armée. Province ottomane, l'Egypte est occupée par une partie de l'armée les troupes turque. Sept corps militaires (ou Odjaq) constituent cantonnées en Egypte. L'odjaq à sa tête a un agha (— colonel), un kiaya (— lieutenant colonel), un bach ekhlyar (= doyen), un defterdar (= chancelier), un khaznadar (= trésorier) et un rouznamgy (= archiviste). Parmi ces sept odjaq, les Mouteferraka, corps de cavalerie de valeur médiocre, sont chargés de la garde des forteresses défendant les villes maritimes : Alexandrie, Suez. Les Tchaouch, Damiette, Rosette, (1)Cité par Henri DEHÉRAIN,L'Egypte turque, in Histoire de la Nation égyptienne,
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autre corps de cavalerie, assistent les collecteurs du miri dans les campagnes. Trois autres odjaq de cavalerie, les Gamoulyan, et Tafekdjiyan Charaka, sont connus sous le terme générique de Spahis. Tenant garnison en province, ils servent d'escorte aux cachef, étant armés de lances et d'arcs. les Azab jouent parfois un rôle poliDes deux Odjaq d'infanterie, mais leur influence est dans l'ensemble tique important beaucoup moins grande que celle des Janissaires. Ces derniers recrutés parmi chrétiennes les enfants des populations conquises, séparés de leurs une instruction familles, convertis à l'islam, reçoivent purement affiliés à un ordre religieux fondé par le dermilitaire. Les Janissaires, viche hadj Bektach, sont armés du mousquet, du pistolet et du sabre. Ils sont répartis en orta ( — compagnie). Les officiers généraux résident à Constantinople, cependant que le corps des janissaires d'Egypte est commandé par un kiaya nommé par les janissaires pour 3 ou un directoire. Les officiers des ja4 ans, les anciens kiaya constituent nissaires assistent au grand divan et l'un d'eux fait partie du petit Divan. L°s janissaires bénéficient donc en Egypte d'une situation prépondérante qui, en cas de difficultés ou de troubles, en fait les arbitres obligés. Des contingents de l'armée d'Egypte participent de temps à autre aux guerres du sultan. Les plus braves reviennent décorés du cheling, aigrette de plumes qui est l'insigne de la bravoure. 2. Les événements
d'Egypte
entre le XVIe et le XVIIIe.
Cette administration turque à personnel étranger fonctionne sans difficultés durant près de deux siècles en raison de l'extrême docilité du fellah égyptien, de la souplesse des cadres administratifs subalternes coptes et surtout de la richesse relative de l'Egypte dont la rente annuelle remonte les finances de la Sublime Porte. Mais les maîtres turcs représentent une collectivité étrangère. Comme l'écrit en 1583 le prince Radziwill : « Les Turcs occupent les fonctions publicultivent la terre ou ques ou sont soldats ; les indigènes égyptiens l'économie pratiquent ; les Arabes vivent du brigandomestique dage» (1). Le gouvernement des Pacha (1519-1697) est celui qui utilise le administratif sytème que nous venons de décrire. Ce xvie siècle essor de l'empire turc avec Soliman le qui voit l'extraordinaire Magnifique est pour l'Egypte le début de la nuit. bien. Le système administratif relativement simple fonctionne Certes des séditions se produisent : en 1604 contre Ibrahim Pacha qui est massacré, en 1609 contre Méhemed Pacha qui anéantit les rebelles, en 1644 contre Maxoud Pacha qui est déposé. Mais la fonction de (1) Cité par GASTON WIET, Histoire universelle, tome II, p. 1158
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pacha conserve son prestige, les rebelles nomment un caimakan destiné de Constantinople un nouveau pacha. à faire l'intérim et attendent toutefois l'autorité des pacha se détériore. Le pacha Graduellement extérieurs de la souveraineté et la réalité n'a plus que les attributs du pouvoir passe entre les mains d'un officier de milice ou d'un bey. Le siècle des « puissances » (1697-1798). Ces personnages — officiers de milice ou bey — sont appelés par les consuls français de l'époque les « puissances » puisqu'ils possèdent le de pouvoir. Déjà en 1691 le consul Marlot constate l'affaiblissement l'autorité du pacha, mais en 1697 Ismaël Pacha voulant s'opposer aux janissaires est déposé par eux et c'est l'un de leurs chefs Achmet Agha qui devient maître du pays. En 1703, un autre Agha de janissaires, remarquable par sa cruauté, est au pouvoir. Le principal
d'Ibrahim
bey.
En 1711, Frank Achmet, chef des janissaires, est attaqué par les Azabs qui l'emportent. Il s'ensuit un effroyable massacre de janissaires. Ibrahim bey, vainqueur, devient le maître de l'Egypte et, malgré de graves désordres en 1715, gouverne avec autorité (1711-1719). Cherkes Mahomet bey (1719-1730) chef des 3 000 est l'ancien dans l'armée ottomane janissaires d'Egypte incorporés qui ont été battus devant Belgrade le 17 août 1717. Après une tentative malheureuse (juin 1719), il prend le pouvoir (1720). En 1726, il doit s'enfuir mais revient en 1729 et tient la campagne, que cependant Zulficar Bey occupe le Caire; Zulficar assassiné, ses troupes, une thêgéride (armée mixte composée de soldats de milices et de mainlouks), remportent la victoire sur Cherkes Bey qui est décapité. Le pouvoir passe alors successivement entre les mains de deux groupes d'hommes : un quatorvirat dirigé par Osman Kiaya dont les membres sont massacrés en 1736, puis un triumvirat dirigé par Osman Bey qui reste au pouvoir jusqu'en 1743. Principat
d'Ibrahim
Kiaya
(1744-1754).
Le Kiaya des janissaires Ibrahim, principal instigateur du complot, en est le bénéficiaire d'abord avec d'autres puissances puis, à partir de 1747, seul. Son gouvernement fait cesser les troubles autoritaire et rétablit une certaine prospérité. D'abord contraint de se retirer par Hussein bey Kich Kich, Emir Haji autoritaire et courageux, Ali Bey (1755-1772), après dix mois de ses retraite, prend ù nouveau sa place. Celui-ci élimine successivement rivaux et instaure un régime de fer faisant rentrer l'argent par tous les moyens. L'ordre est rétabli sur toute l'étendue de l'Egypte et la sécurité, bien suprême en ces périodes troublées, rend son règne particulèrement glorieux.
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Ali Bey accroît ses forces militaires et parvient à vaincre Houmam ibn Youssouf el Hawardi qui exerce une sorte de royauté depuis Assouan jusqu'à Siout. Cheikh de la tribu des Hawara qui a émigré d'Ali Bey, de Tunisie en Haute Egypte, il reconnaît la souveraineté mais sur une demande de ce dernier visant à faire expulser les cachef et Mamlouks de ses ennemis Saleh Bey et Hussein bey Kich Kich, Houmam s'insurge et se fait battre devant Siout. Maître de la Haute Egypte, Ali Bey fait occuper le Hedjaz et contrôle la Mecque et Djedda (1770) puis il porte ses conquêtes vers la Syrie. Son officier des MamAbou Dahab, conduit de victoires en victoires les louks, Mohammed armées égyptiennes qui occupent Damas le 6 juin 1771. Mais bientôt Abou Dahab et Ali Bey, qui un conflit intervient entre Mohammed est vaincu le 24 avril 1772 à quelques lieues du Caire. Blessé il est recueilli et soigné par son adversaire et ancien mamlouk avec toutes les marques de respect, mais succombe au Caire réglementaires quelques jours plus tard. Il semble que ce soit seulement en 1769 que tout lien avec la Porte ait été rompu. Ali Bey a osé s'allier à Catherine II contre Mustapha III, sultan de Constantinople. C'est donc en réalité seulement à la fin de sa vie qu'Ali Bey fait vraiment figure de souverain indépendant. fait Tagréable Mohamed Abou Dahab (1772-1775), à son avènement, au sultan de Constantinople d'adresser le tribut annuel surprise demeure totalement de l'Egypte. Mais son gouvernement indépendant sauf qu'il conduit à la demande du sultan une campagne contre la le 10 juin 1775 que Syrie et le cheik Dahar. C'est à Saint-Jean-d'Acre meurt Mohamed Abou Dahab. Le duumvirat d'Ibrahim bey et de Mourad Bey : ses vicissitudes (1775-1798). Mourad Bey prend aussitôt le commandement de l'armée. Il évacue Saint-Jean-d'Acre et se hâte vers l'Egypte. Le Divan qui se tient le 26 juin 1775 dans la citadelle nomme Mourad Bey defterdar, Yousscf bey émir haji et Ibrahim bey cheikh el beled. Mourad bey, très vite, obtient la prééminence. Mais, après une tentative de coup de force qui échoue, un parti composé de Youssef bey, Ismaël bey le grand et Ismaël bey le petit, prend le pouvoir, cependant que Mourad Bey et Ibrahim bey s'enfuient en Haute Egypte. La discorde éclate alors entre les deux Ismaël bey : le petit est tue (janvier 1778), le grand dirige une expédition dans le Saïd mais, abandonné par ses troupes, il s'enfuit en Syrie d'où il passe en Tripolitaine puis en Haute Egypte. Mourad Bey et Ibrahim Bey regagnent le Caire où ils se disputent. Les années qui vont de 1780 à 1786 sont une période de continuelles guerres civiles jusqu'à ce que le sultan Abdoul Hamid Ier envoie une expédition pour rétablir l'autorité Haçan Pacha turque sur l'Egypte. le 6 juillet à Alexandrie. Les deux bey gagnent alors la débarque Haute Egypte où ils se battent jusqu'en 1787. Finalement l'accord se fait. Mourad et Ibrahim demeurent en Haute Egypte cependant qu'Ismaël Bey est cheikh el Beled. Ismaël Bey qui, malgré diverses
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tentatives de ses rivaux, reste en place jusqu'à sa mort (1791), semble avoir senti la nécessité d'une assistance technique des Européens et a demandé au consul de France Magallon des officiers et des ingénieurs. Ibrahim Bey et Mourad Bey viennent depuis la Haute Egypte et gouvernent d'un commun accord sans chercher à se renverser l'un l'autre. Ibrahim est calme et Mourad emporté. Leurs caractères nous sont bien connus par le portrait qu'en traceront les officiers de l'armée d'Egypte. Mourad Bey est secondé par un Kiaya originaire de Dongola, Ibrahim el Sennari qui, prédisant l'avenir, entre dans les bonnes grâces de Mourad et devient son favori. Mourad dispose d'une flotte le plus souvent mouillée devant le château de Gizeh et qui est commandée par un Grec, Nicolas Papas Oglou, lequel a réussi à faire évader de Constantinople un certain nombre de bey prisonniers du Sultan. Le gouvernement des puissances se signale en Egypte par son instabilité. Nous pouvons reprendre les termes d'Henri Déhérain (1) : « Un Kiaya ou un bey s'élève à la charge suprême de cheikh el Beled ; le voici au pouvoir. Mais bientôt dans l'ombre et le silence un complot se forme contre lui, et, après quelques années de gouvernement, il est renversé par un rival, lequel à son tour subit ensuite même sort. » L'intrigue est de règle puisque tout mamlouk peut aspirer aux honneurs. C'est l'intrigue des mamlouks auprès du bey pour devenir cachef, des cachef pour arriver au beylicat et des bey entre eux pour devenir defterdar, émir haji ou cheikh el beled. Ce siècle de « puissances » est un siècle d'intrigues aux fils multiples de complots, de séditions. L'empoisonnement, le qui s'entrecroisent, guet-apens, la trahison y tiennent leur rang. Aussi les personnages que nos consuls appellent « puissances » sont-ils des guerriers énergiques, Dès de richesses considérables. qui disposent pour leurs entreprises qu'ils sont arrivés au pouvoir leur goût du faste aboutit à de somptueuses dépenses : construction d'un palais, riches équipements pour leurs mamlouks. Mais ces Kiaya et ces bey ne sont pas vraiment attachés à l'Egypte. Ils n'ont fait qu'y passer sans laisser leur empreinte. L'expédition de Bonaparte va provoquer dans l'histoire de l'Egypte le choc décisif ouvrant une nouvelle phase. II.
L'EXPÉDITION
D'EGYPTE
(1798-1801)
La proclamation de Napoléon : « Soldats du haut de ces pyramides quarante siècles vous contemplent » est à peu près tout ce que le Français moyen connaît de la campagne d'Egypte avec quelques noms lus sur l'arc do triomphe de l'Étoile de parmi une liste impressionnante victoires dont celle terrestre d'Aboukir compense le désastre naval du (1) Op. cit., p. 151.
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1er août 1798 qui rend le corps expéditionnaire prisonnier de sa confut l'expédition d'Egypte quête. Pour les membres du Directoire d'abord la liquidation élégante d'un général encombrant qui réussira d'ailleurs (22 août 1799) à passer à travers les mailles de la croisière au contraire, le bref passage de Bonaanglaise. Pour les Égyptiens, parte a ouvert le chapitre de l'Egypte moderne et, comme le dit Nasser dans sa Philosophie de la Révolution, « brisé les chaînes du passé ». Le prodigieux retentissement de cette brève équipée militaire s'explique par trois ordres de mesures concernant l'inventaire scientifique, les réformes administratives et l'égyptianisation de l'adsystématique enfin la mise en oeuvre du développement ministration, économique la création de jardins de l'agriculture, par la rénovation l'irrigation, d'essai... qui préfigurent l'oeuvre des experts engagés par Méhemet Ali. i. La décadence
de la Sublime Forte et les projets orientaux
(1).
Les souvenirs de Saint Louis, l'importance de cette région sur la route des Indes avaient entraîné au xviie et xviiie siècles l'élaboration de plusieurs projets. Celui de Leibniz est l'un des plus curieux. Inspiré par les vues générales de la lutte de la chrétienté contre l'infidèle, il du Rhin la menace des armées françaises. visait aussi à détourner Arrivé à Paris en 1672, Leibniz y demeure jusqu'en 1676. L'accueil chaleureux des savants fait une heureuse compensation à la fraîcheur de l'accueil officiel. Loui3 XIV ne le reçut jamais et le Ministre Arnault de Pomponne répondit froidement que « les projets de guerre sainte avaient cessé d'être à la mode depuis Saint-Louis ». En 1686, le père Jean Coppin, dans le bouclier de l'Europe ou la guerre sainte, envisage la dissolution de l'empire ottoman et l'octroi de l'Egypte à la France. Des vues similaires sont développées dans un manuscrit anonyme de la Bibliothèque Nationale où l'auteur insiste sur le rôle joué par l'Egypte au carrefour de trois continents. L'effondrement 1769) des armées turques à Khotin (septembre devant les forces de Catherine II constitue la véritable ouverture de la question d'Egypte. Le duc de Choiseul retiré à Chanteloup faisait de la conquête de l'Egypte l'un de ses sujets de méditations et l'on peut dire que c'est auprès de Choiseul que Talleyrand apprit ce qui devait déterminer la genèse de son projet égyptien (2). un mémoire du duc de Saint-Priest ambassadeur en Cependant Turquie rédigé en 1777 insiste sur la fertilité du pays et la facilité de la conquête. A la même époque le baron de Tott, passant deux mois en Egypte, fait des comparaisons identiques. Mais Vergennes était partisan du statu quo. La période révolutionnaire entraine chez les commerçants français 9 d'Egypte un vent de fièvre patriotique qui leur fait supporter de plu en plus mal les « exactions des tyrans », c'est-à-dire les achats non suiLes origines de l'expédition d'Egypte, Pion 1910. CHARLES-ROUX, (1) FRANÇOIS Histoire de la Nation égyptienne, p. 203. (2) HENRIDEIIÉRAIN,
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vis de paiements effectués par les bey dans leurs magasins. La présence d'un consul d'une remarquable intelligence aboutit à un certain nombre de rapports dont celui du 1er octobre 1795 décrit les divers avantages qui seraient retirés par la France de la conquête de l'Egypte. En prescrivant une enquête au reçu de ce rapport, le Ministre des relations extérieures Charles Delacroix accomplissait le premier acte officiel qui allait conduire à l'expédition d'Egypte. Le 3 juillet 1797, Talleyrand fait à la fin de la séance des cinq académies lecture d'un « Essai sur les avantages à retirer de colonies nouvelles dans les circonstances présentes » et l'un des points d'application de son exposé est l'Egypte. Treize jours après, Talleyrand, nommé Ministre des affaires extérieures, inclut tout naturellement l'expédition d'Egypte dans ses projets d'autant que durant les six mois qui séparent les préliminaires de Léoben (18 avril 1797) de la paix de Campo Formio (17 octobre) Bonaparte commence à parler de l'Egypte. En décembre 1798, lorsqu'il arrive à Paris, ses vues sur l'Egypte coïncident parfaitement avec celles de Talleyrand pour qui la Turquie n'ayant qu'une modeste espérance de survie, son empire européen Dans cette optique la risque de grossir la puissance autrichienne. conquête de l'Egypte par la France serait une juste compensation. Le rapport au Directoire exécutif sur la conquête de l'Egypte (14 février 1798) conclut que cette opération n'est qu'une juste représaille aux torts et affronts de l'administration envers les turque Français, qu'elle sera facile, peu coûteuse et entraînera d'innombrables sont étudiés Les projets d'expédition avantages pour la République. par le Directoire au cours des séances des 1er et 2 mars 1798. 2. Bonaparte
en Egypte.
décidée le 5 mars, l'escadre française part de Toulon L'expédition le 19 mai cependant que Talleyrand multiplie les démarches pour que le sultan ne considère pas cette expédition comme inamicale puisque aussi bien l'armée française ne cherche qu'à châtier des bey rebelles à la Sublime Porte. Une sorte de traité de protectorat est proposé suivant lequel les actes officiels seraient promulgués en Egypte au nom du Sultan qui serait représenté Le sultan recevrait par un pacha. annuellement une somme de 1500 bourses. La religion musulmane serait protégée et honorée. Premières opérations
militaires.
évite la flotte anglaise et, après Embarqué le 19 mai, Bonaparte avoir enlevé Malte, débarque le 2 juillet en Egypte, enlève Alexandrie, écrase les Mamlouks à la bataille des Pyramides puis occupe le Caire. La défaite de Mourad considébey et Ibrahim Bey a une importance rable ; même si Mourad poursuit un la guerre en Haute Egypte temps et si Ibrahim se réfugie en Syrie, le pouvoir de ces deux « commandants » est brisé. Le régime tricéphale qui existait depuis 1517 est définitiR. COMEVIN.— Histoiro de 25 l'Afrique, Tome II.
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vement détruit. (Paoha turc, ohefs de milice, bey sandjaks). Il ne sera jamais restauré. de l'islam, mariant a le souci de se faire le protecteur Bonaparte avec bonheur < le croissant et le bonnet rouge, les Droits de l'Homme et le Coran ». Déclaration
de guerre de la Turquie (2 septembre).
de la flotte française à Aboukir (1er août 1798) va La destruction infléchir la politique turque. En effet l'ennemi héréditaire était la Russie et le grand vizir Izzet Mohammed Pacha, appuyé parle grand Mufti Durissadé Mohammed Arif Effendi, refusait de rompre avec la déclarer France une alliance de trois siècles. Le Sultan ne pouvant de la guerre sans un ferwa (sentence) du grand Mufti, la destitution ces deux hauts fonctionnaires précède de quelques heures la promulgation d'un catêchérif appelant à la guerre contre les Français tous les notification est faite de la diplomatique croyants. Le 2 septembre, rupture avec la France, le 23 décembre 1798 et le 5 janvier 1799 des traités d'alliance sont conclus avec la Russie puis avec l'Angleterre. Si l'Angleterre garantit la totalité des possessions ottomanes, les Turcs à mettre sur pied une armée de cent mille hommes. Le s'engagent Turc devient le soldat de l'Angleterre. Campagne
de Desaix en Haute Egypte (1).
Mourad Bey ayant refusé les propositions d'alliance de Bonaparte, Desaix part du Caire le 25 août ; le 7 octobre il est vainqueur à Sédiman dans le Fayoum puis revient à Béni Souef où sa colonne, renforcée par les mille cavaliers de Davout, repart vers le sud. Le 22 janvier, les 14 000 hommes de Mourad sont battus à Samhoud. Mourad se réfugie alors en Nubie, mais le pays étant trop pauvre pour nourrir ses mamlouks, il revient par le désert. De février à mai 1799, Mourad livrera quatorze combats qui seront autant de victoire pour Desaix. En dehors des combats, Desaix mène une politique très sûre, il garantit la sécurité du territoire par une chaîne de forts qui sont autant de points d'appui. Il rend la justice, respecte la religion musulmane et établit des relations fraternelles avec les fellah. Koçeir sur la Mer Rouge est enlevé par le général Donzelot qui repousse une attaque anglaise et en assure la défense jusqu'à l'évacuation. L'expédition
de Syrie.
La Turquie ayant déclaré la guerre, Bonaparte veut contraindre les autorités de la Porte à déclarer à quelles conditions elles autoriseraient la France à demeurer en Egypte. C'est aussi l'attirance chronique des maîtres de l'Egypte, la voie normale des invasions. Bonaparte le dit Desaix le sultan juste, Hachette 1954, p. 212-246. (1) Cf. ARMAND SAUZET,
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quelques jours avant son départ : a J'ai résolu de marcher en Syrie ; la Syrie et l'Egypte doivent appartedans le système de colonisation, ». nir au même gouvernement en prélève Des 24 000 hommes de l'armée d'Egypte, Bonaparte d'El Arich (20 fé13 000 pour cette expédition. Après la reddition vrier 1799), il prend Gaza, puis Jaffa (7 mars). Le 28 mars l'armée où elle échoue. Cependant Bonaparte arrive devant Saint-Jean-D'Acre de Cana et du Mont remporte sur les Turcs les batailles de Nazareth, Thabor. de l'Egypte. militaire et administrative Réorganisation au Caire, Bonaparte se L'armée regagne l'Egypte et, dès l'arrivée préoccupe de combler les vides de son armée. Déjà ont été constitués une légion grecque et une légion copte. Bonaparte prescrit à Desaix d'acheter des esclaves noirs du Sennar et il écrit au Sultan du Darfour le 20 juin 1799 : « Je vous prie de renvoyer par la première caravane 2 000 esclaves noirs ayant plus de seize ans, forts et vigoureux, je les achèterai tous pour mon compte ». Le trésor étant vide, Bonaparte Poussielgue prescrit à l'intendant 30 000 francs à chacun des négociants de Damas habid'emprunter tant le Caire. Par ailleurs Desaix qui a fait rentrer l'impôt de Haute de Egypte lui envoie des fonds. Cela n'empêchera pas Bonaparte constater en s'embarquant pour la France que la solde de l'armée a sept mois de retard. Les ponts étant désormais ne coupés avec la Turquie, Bonaparte la fiction d'une paix ; aussi prescrit-il l'égyptianipeut plus maintenir sation de l'administration. Les Cadi devront être natifs d'Egypte. Depuis trois siècles le Cadilesker (chef de la justice) était un ottoman ; en faisant nommer par le divan un égyptien Ahmed el Arichi, Bonaparte accomplit le premier geste d'une révolution qui sera poursuivie sous Méhémet Ali. La défaite turque d'Aboukir. Si la campagne de Syrie est parfois considérée comme un échec, la défaite de l'armée turque de Syrie permet cependant de à Bonaparte se lancer avec toutes ses forces contre la deuxième armée turque que la flotte anglaise débarque en Egypte. L'éclatante victoire (26 juillet 2 août) qu'il remporte à Aboukir efface le désastre naval de l'année précédente et empêche un soulèvement général qui était prêt de se produire sous l'action du Mahdi Ahmed de Derna. Cette victoire donnait un long répit aux troupes françaises. Aussi les nouvelles de France étant médiocres, Bonaparte décide de rentrer et confie le commandement de l'armée d'Orient à Kléber. 3- Le proconsulat de Kléber. Certains historiens ont été sévères pour Kléber laisse aller à dire : « militaire et militaire seulement
dont Bainville se »... Or ce général
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un remarquable chef de guerre comalsacien, s'il est incontestablement me il l'a montré à Mayence et en Vendée, est aussi un consciencieux dans sa gestion de la ville d'Aleadministrateur qui fait merveille xandrie. Les premières semaines de sa prise de commandement sont marquées de la moyenne et de la basse Egypte territoriale par la réorganisation la réparation des fortifications, et par des ordres concernant des hôpitaux etc. Mais Kléber, comme un grand nombre de généraux, avait la nostalgie de l'Europe où l'on gagnait gloire et profit ; aussi malgré le succès de Desaix sur Mourad et du général Morand sur un corps de Kléber veut à tout prix turc près du lac Menzaleh, débarquement C'est dans cet état d'esprit qu'est signée la convenquitter l'Egypte. tion d'El Arich (24 janvier 1800) qui organise l'évacuation de l'armée d'Egypte. Mais Sydney Smith qui avait assisté aux négociations n'avait en réalité aucun pouvoir. Or le gouvernement souhaitait britannique mettre hors d'état de nuire une armée qui avait montré sa valeur; par ailleurs on craignait à Londres que la Turquie ne se retire de l'alliance une fois le dernier soldat français hors d'Egypte. Aussi l'Amiral soldat de l'armée d'Egypte Keith écrit depuis Minorque « qu'aucun s'il ne déposait les armes ». Kléber fait affine serait rapatrié cher la lettre de l'amiral anglais et inscrit au bas : « Soldats, on ne à que par la victoire, préparez-vous répond à de telles insolences ». combattre La campagne est fulgurante. Kléber, géant inspiré, remporte quatre victoires en trois semaines : Héliopolis (20 mars), Belbeis (22), Koraîn (23), Boulaq (15 avril). Il doit prendre le Caire, où les Turcs se sont rue par rue et maison par maison. Kléber proclame une retranchés, amnistie générale, se contente d'amendes dans les villes où les exactions ont été les plus fortes. Il entreprend toute une série de mesures : création d'une direction des revenus publics, comité administratives administratif chargé de percevoir les revenus en nature, enfin, Mourad Bey, après 18 mois de guerre signe (5 avril 1800) un traité avec Kléber français comme gouverneur qui le reconnaît au nom du gouvernement prince de la Haute Egypte. rétablissement de la situation n'empêche Mais l'éclatant pas Kléber de vouloir à nouveau négocier avec Constantinople, séparer les Turcs Son assassinat des Anglais et regagner l'Europe. (14 juin 1800) amène au pouvoir le général Menou, un fervent partisan d'une installation française en Egypte, un « coloniste » comme on disait alors. 4. Menou
Pacha
et la fin de l'expédition
d'Egypte.
Le destin veut que le général Menou qui s'était fait battre par les Kléber. Passionné Vendéens remplace leur vainqueur pour les questions coloniales il s'est marié en Egypte et s'est converti à l'Islam. Il activité met les finances administrative, déploie une extraordinaire en équilibre, crée un jardin des plantes, fait surveiller les canaux d'ir-
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rigation, redonne vie au Divan où Fourier reprend son rôle de commissaire français. Donzelot administre la moyenne Il s'entend Egypte. Cependant avec Mourad bey qui gouverne la Haute Egypte. Mouparfaitement à la rad devait mourir de la peste (avril 1801) alors qu'il se mettait les anglo-turcs aux côtés des Frantête de ses troupes pour combattre çais. Le 8 mars 1801 un corps anglais aux ordres du général Abercromby lourd de conséquences. Le 20 mars débarque en Egypte. Événement la bataille de Canope ne permet pas à Menou de rejeter les Anglais le delta à la mer. Renforcés par 6 000 Turcs, les Anglais envahissent et isolent Menou dans Alexandrie cependant que Belliard commande l'armée du Caire. Dans la seconde quinzaine de mai, dix mille soldats anglais et des Indes, renforcés par 1200 soldats du Cap ; ils cipayes viennent le désert jusqu'à Keneh puis descenà Koçeir traversent débarquent dent le cours du Nil. Le rapport des forces étant maintenant en faveur des Anglo-Turcs, le général Belliard signe le 27 juin une convention des troupes vers les ports français. qui prévoit l'évacuation Menou attendait et restait les renforts assiégé dans d'Europe Alexandrie où le scorbut faisait des ravages, aussi finit-il par accepter de signer un traité (31 août 1801) prévoyant les honneurs de la guerre et le rapatriement des troupes françaises. sur l'Europe 5. Les conséquences
de l'expédition
d'Egypte.
Trois années d'occupation française (1) ont une immense importance pour les Turcs qui sortiront diminués de cette guerre, pour la de l'Egypte dont les Anglais, contraints position internationale d'y enfin dont la débarquer, apprécieront pour l'Egypte l'importance, l'administration et surtout période française a rénové l'agriculture, ont montré de ses savants qui les premiers par l'oeuvre scientifique la splendeur de son passé. Le nombre des savants français (il n'y en eut pas moins de 143) enrôlés dans l'expédition C'est un cas d'Egypte peut surprendre. coloniale d'un corps de recherche unique dans l'histoire scientifique aussi étoffé. Recrutés par Berthollet, ces éléments appartiennent souvent à l'école polytechnique (Fourier, Berthollet, Monge). L'Institut notamment le 22 août 1798, comprend d'Egypte créé par Bonaparte dans la section mathématiques Fourier et Monge, dans la section physique Berthollet, Dolomie, Conté, Geoffroy Saint Hilaire, Desgenettes, en économie politique Caffarelli du Falga, en littérature et arts Auguste Parseval Grandmaison, Le secrétaire Vivant-Denon. perpétuel est Fourier dont les connaissances sont véritablement encyclopédiassistait ques et qui est l'âme de l'Institut. fréquemment Bonaparte aux séances. Il eut même l'intention mais de faire une communication Monge eut le rare courage de l'en dissuader. I1) Y. FRANÇOISCHARLBS-ROUX, Bonaparte gouverneur d'Egypte, Pion 1935.
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Durant l'été 1799 trois commissions de savants explorent la Haute Leur moisson est extraordinaire. L'ensemble des travaux Egypte. réalisés durant la campagne d'Egypte fut groupé dans scientifiques un recueil intitulé Description de l'Egypte ou Recueil des observations et des recherches qui ont été faites en Egypte pendant l'expédition de l'armée française. Ce travail fut confié à la Commission d'Egypte présidée par Berthollet et dont les membres furent Conté, Lancret, Monge, furent succes; les secrétaires Costaz, Fourier, Girard, Desgenettes sivement Conté (f 1805), Lancret (f 1807) et le géographe François Les cinq parties furent Jomard qui achèvera cette oeuvre gigantesque. réalisées en 1808,1813,1817,1821 et 1825. Cette description comprend trois de l'Egypte neuf tomes dont quatre traitent de l'antiquité, moderne et deux de l'Histoire naturelle, enfin un atlas ne comprenait pas moins de 900 planches et 4 000 dessins. bilan de recherche Cet extraordinaire devait contriscientifique buer à faire de l'Egypte le pays pilote de l'Afrique du xixe siècle alors d'un pouvoir politique fort, épris de moderque ce pays bénéficiait nisme et que l'ouverture du canal de Suez en faisait un capital carrefour du monde. est peut-être avec le Japon le seul pays qu'une intervenL'Egypte ait ainsi précipité dans la vie moderne. tion étrangère III. MÉHEMET ALI (1801-1849) DE L'EGYPTE FONDATEUR MODERNE i. La tension conciliation.
entre
Turcs
et Mamlouks
: les tentatives
anglaises
de
Les Anglais, par l'accord de Constantinople (1799) et le traité d'Amiens aux Turcs. (1802), s'étaient engagés à rendre l'Egypte Mais en réalité deux forces sont en présence : les représentants légitimes de l'autorité turque le grand Vizir et le Capitan pacha et lés Mamlouks. Or le général Hutchinson et les Anglais en général tiennent en piètre estime l'armée ottomane alors que les Mamlouks au contraire ont été pour eux de précieux auxiliaires, si bien que dans le différend turco-mamlouk, Hutchinson et étaa dû servir d'arbitre blir une sorte d'accord modestement baptisé Magna Carta par l'étatmajor britannique. Mais la querelle demeure latente et, dès octobre 1801, le Capitan pacha et le grand vizir attirent les bey dans un double guet apens et en massacrent un grand nombre. Le commandement anglais réaffirme alors sa volonté de protéger les bey. Le 8 février 1802 le grand vizir quitte le Caire après y avoir installé Khrosrew Pacha. Cependant Mohammed que le général Stuart qui en exécution des clauses de la paix d'Amiens doit faire évacuer entre les bey mamlouks et le vice roi Alexandrie, essaie de s'entremettre Turc, mais lors de leur départ (11 mars 1803), les Anglais n'ont pa>
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réussi à concilier les deux partis. Au cours d'un voyage de deux mois, aide de camp de Bonaparte venu pour le colonel Horace Sebastiani, a renoué de multiples contacts. constater l'évacuation britannique, Son rapport fera état des bons souvenirs laissés par les Français. 2. Mené met Ali paoha d'Egypte. Lors de l'évacuation anglaise, le corps albanais, corps d'élite de bientôt comme devant jouer un rôle partil'armée turque, apparaît culier. En effet, trois mois après le départ des Anglais, les Albanais de Khosrew Pacha et le gardent à vue dans s'insurgent, s'emparent la citadelle. Taher Pacha, chef des Albanais, prend le titre de Caïmakan, cependant que les Mamlouks chassent les Turcs qui ne conservent en Basse Egypte que la ville d'Alexandrie. Taher, assassiné le 27 mai 1803, est remplacé par Méhémet Ali né en 1769 comme il aimait à le rappeler, la même année que Napoléon et dans le pays natal d'Alexandre. Méhémet Ali a participé à la bataille d'Aboulrir et à différents engagements contre les troupes de Kléber et de Menou. Il a compris la valeur de la civilisation occidentale et il a l'étoffe d'un chef et d'un homme d'état. Sa montée au pouvoir est un chef d'oeuvre de stratégie à des alliances orientale où coups de forces et assassinats succèdent rarement définitives. Méhémet Ali va jouer avec astuce des trois forces qui domineront l'Egypte : les Mamlouks, la force la plus importante qu'il n'éliminera définitivement qu'en 1811, la Turquie souveraine dans nominale, enfin les notables locaux qu'il mettra très habilement son camp. Ainsi lors de l'arrivée d'Ali Pacha Tarabouli (juillet 1803) envoyé par le sultan, les Mamlouks d'Osman Bardissi, chef de l'ancienne maison de Mourad et les troupes de Méhémet Ali s'unissent pour s'opposer à son passage, le font prisonnier avant qu'il ne soit assassiné. L'alliance d'Osman Bardissi et de Méhémet Ali joue encore contre le bey Mohamed Elfy qui avait également appartenu à la maison de Mou« symet dispose encore de nombreuses rad, qui revient d'Angleterre sont dispersés et lui-même pathies » en Egypte. Mais ses partisans obligé de s'enfuir en haute Egypte. du Cependant les Mamlouks se sont rendus odieux aux habitants Caire si bien que Méhémet Ali n'aura aucune peine à dresser la population contre eux. Osman Bardissi doit s'enfuir cependant que les Albanais sont maîtres de la capitale où Méhémet Ali installe Kourchid pacha puis va combattre les troupes de Mohamed Elfi, Osman Bardissi et Ibrahim. Au cours de sa campagne, a fait venir Kourchid d'Asie 4 500 hommes de troupe qui se sont très vite aliéné la population du Caire si bien que le 12 mai 1805 Kourchid est déposé par le cadi, les cheikhs et les Ouléma. Méhémet Ali est proclamé pacha d'Egypte. Cette nomination d'un étranger a quelque chose d'exceptionnel
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à Stamboul d'autant que les chefs et notables du Caire interviennent pour que Méhémet Ali soit nommé ; mais le Sultan répond d'autant la campagne avec moins que les Mamlouks tiennent victorieusement Osman Bardissi et Elfi bey. La Porte décide sur le conseil anglais de nommer Mohamed Elfi au Caire en qualité de cheikh el beled et d'offrir à Méhémet Ali les pachaliks de Salonique ou de Candie. Mais le Capitan pacha qui est chargé de cette mission débarque à Alexandrie le 27 juin 1806, il est habilement circonvenu par Méhémet Ali comme par la population et repart sans avoir rien changé. Osman Bardissi La mort de ses deux principaux adversaires, (novembre 1806) et Elfi bey (janvier 1807), lui permet d'entreprendre une action plus ample contre les Mamlouks. L'échec anglais de 1807. liée L'attaque anglaise qui se développe en 1807 est étroitement En effet, Napoléon maître du continent, à la politique européenne. sur mer, une alliance est dominant franco-turque l'Angleterre un retour français en nouée qui fait craindre aux Britanniques Egypte d'autant plus fâcheux que les agents anglais soutiennent les bey rebelles cependant que Méhémet Ali est influencé par les de la France. représentants Le corps de débarquement placé sous les ordres du général Mackenzie Frazer prend Alexandrie le 19 mars 1807. Le 31 une colonne anglaise est battue devant Rosette, une deuxième tentative aboutit le 21 avril à El Hamed à un véritable désastre, le corps anglais perdant 36 officiers et 780 hommes dont 400 prisonniers. Frazer s'enferme alors dans Alexandrie qu'il évacuera le 19 septembre au bénéfice de Méhémet Ali. Ainsi cette campagne anglaise aura confirmé l'autorité de Méhémet Ali et lui aura donné cette incomparable porte sur la Méditerranée La paix anglo-turque des Dardanelles (5 janvier qu'est Alexandrie. 1809) exclut l'Egypte de ses stipulations. Affermissement
du pouvoir
et massacre
des Mamlouks
(1807-1811).
fournisMéhémet Ali dès lors fait figure de puissance indépendante, sant à l'occasion, malgré les ordres de la Porte, du blé aux Anglais et de la France. gardant d'excellentes relations avec les représentants Mais il doit faire face aux difficultés internes dues aux beys qui sont une menace permanente de véritables féodaux et constituent pour son autorité. Aussi le 1er mars 1811 il les invite au Caire à l'occasion de la nomination de son fils Toussoun à la tête de l'armée égyptienne et les fait massacrer. Il s'ensuit dans les provinces une chasse au Mamlouk qui éliminera désormais du pouvoir cette caste de féodaux indisciplinés.
L'ÉGYPTE DU xvie SIÈCLE A 1882 L'oeuvre intérieure
de Méhémet Ali et le développement
393 de l'Egypte.
Ceux qui s'étonnent de voir les jeunes républiques africaines se toursouvent proche de ner vers le parti unique et un régime présidentiel la dictature pourraient méditer à un siècle et demi de distance sur le destin de Méhémet Ali dont l' absolutisme du pouvoir personnel fut un gage de succès. Il comprend l'importance de la hiérarchie et des circonscriptions administratives. Des 15 provinces qu'il trouve à son arrivée en Egypte, il fait sept gouvernements (quatre en basse Egypte, un pour la moyenne et deux pour la haute) commandés par des Moudir. Ces gouvernedont les préfets (Mamour) ments coiffent soixante départements contrôlent les Nazir (chefs de canton) devant lesquels les chefs de village sont responsables. et la formule centrale elle-même se transformera L'administration avec des ministres spécialisés turque deviendra plus européenne (réforme de 1837), mais dans les premières années de son règne Méhémet Ali exerce un pouvoir absolu. Il confisque à son profit les terres égyptiennes si bien qu'il a le triple monopole de l'agriculture, du commerce et de l'industrie. Ces mesures permettront une véritable révolution économique. Mais cet accaparement sera finalement nuisible, carie fellah ne tirant aucun bénéfice de l'opération, ralentira son effort. Des conseillers techniques européens le plus souvent français vont l'aider dans sa tâche. Ainsi l'agronome Jumel introduit le coton qui sera la richesse du pays, les ingénieurs français Mongel et Linant de Bellefonds l'aideront dans les aménagements du Nil. L'importance des conseillers hydrauliques incite Méhémet Ali à développer l'enseignetechniques européens ment dont plusieurs branches sont entre les mains des Français : le Dr Clôt fondateur de l'école de médecine, Hamont fondateur de Par l'école vétérinaire, Lambert fondateur de l'école polytechnique. ailleurs en organisant une « mission égyptienne en France », organisme accueillant les étudiants venus poursuivre leurs études, Méhémet Ali et les centres pour étupréfigure ce que seront les cités universitaires diants d'outre-mer. La tolérance religieuse de Méhémet Ali permet l'admission en Egypte de congrégations catholiques, les soeurs de Saint Vincent de Paul sont les premières d'une série d'ordres qui vont rendre les plus éminents services dans le domaine de la santé et de l'enseignement. L'effort militaire. Le problème des Mamlouks, celui des mercenaires se pose en permanence pour Méhémet Ali qui ne trouvera pas de meilleure solution que les campagnes militaires pour diminuer leur nombre et lui rapporter gloire et profit. Une partie de la politique extérieure de Méhémet Ali s'explique par la nécessité dans laquelle il se trouvait d'utiliser son armée hors d'Egypte.
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cette armée, Méhémet Ali recrute des soldats Pour moderniser est turc et mamlouk, les instrucégyptiens et nubiens, l'encadrement teurs sont européens, généralement français. Dès 1824 une mission d'instructeurs français commandée par le général Boyer assure la formation de nouveaux régiments. A partir de 1833, le colonel Sève (converti à l'islam), devenu chef d'état-major général, attire autour de lui de nombreux officiers. Cette armée qui compte en permanence près de cent mille hommes constitue une charge très lourde pour un pays qui ne devait guère compter plus de 4 millions d'âmes. C'est à l'activité du Français Lefébure de Cerisy qu'est due la constitution de la marine égyptienne partie de rien et qui est devenue l'une des de Méditerranée. plus puissantes En 1833 près de 70 Français étaient au service de Méhémet Ali. Comme le constatait en 1840 l'anglais Bowring (1) : « Auoune nation n'a autant contribué à la civilisation et au progrès de l'Egypte que » les Français. L'agrandissement
du domaine
africain.
Cette armée assure bien entendu l'ordre intérieur, mais elle est en faciles. Aussi permanence trop nombreuse pour ces tâches relativement il s'avança vers lorsque les campagnes extérieures le lui permirent, le Soudan au cours de deux séries de campagnes, l'une en 1821-1823 (remontée du Nil), les autres en direction de la Mer Rouge (campagnes de 1834 et 1840). Campagne au Soudan. Ayant largement reconnu la rive orientale de la Mer Rouge, Méhémet Ali a vu déboucher les caravanes du Soudan intérieur qui ne passaient plus par Le Caire et le souci de s'assurer le contrôle commercial de cette région l'amena à entreprendre cette l'or, l'ivoire et les esclaves campagne. L'objectif était essentiellement nègres. Par ailleurs les Albanais ne pouvaient rester en garnison. Il fallait que les frais considérables engagés pour entretenir l'armée aient une contrepartie de conquête et de profit. D'autre part Méhémet Ali obéissait à la double tendance séculaire de l'Egypte à s'étendre vers l'Asie et vers le sud. Un autre motif était la présence depuis 1812 à Dongola d'une principauté de Mamlouks fondée par Ibrahim bey auquel avait succédé en 1813 Abdah Rochman les Fellah bey. Les Mamlouks éblouissent chevaux. Ils par leur richesse, leurs belles armes, leurs magnifiques les protègent contre les razzia des nomades Schaikiya mais sont assez éprouvés par les fièvres et un climat des plus malsains. Méhémet Ali avait adressé des émissaires au roi du Sennar en 1813 et au négus de Gondar en 1814 pour que cet état mamlouk soit entouré d'ennemis. La conquête du Soudan est entreprise par deux armées, l'une conv mandée par Ismaîl Pacha, l'autre par un gendre de Méhémet Ali (1) Cité par F. CHARLES-ROUX, p. 91.
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auquel il avait concédé le titre purement honorifique de Defterdar. Devant Ismaïl Pacha, les Mamlouks se replient à travers le désert de Bayouda jusqu'à Chendi d'où une partie gagnera le mer Rouge cependant que d'autres gagneront le Darfour et le Ouadal où Clapperles derniers survivants. Cette ton, Denham et Oudney rencontreront principauté mamlouk avait duré sept ans. Le problème mamlouk résolu sans coup férir, Ismaïl Pacha doit vaincre les Schaikiya dont les chefs Ziber et Omar font leur soumission. Ces Schaikiya seront désormais les plus fidèles auxiliaires des Égyptiens. Le 27 mai 1821, l'armée de 5 500 hommes campe à Ondurman, puis traverse le Nil blanc. Le roi du Sennar, Badi, vient faire sa soumission et le 12 juin fait son entrée avec Ismaïl dans la ville de Sennar où il restera six mois. Puis l'armée pénètre dans le Dar Bertrat, s'engage dans la vallée du Tournât et s'arrête au village de Singé, lequel marque le point extrême atteint par l'expédition vers le sud. l'autre colonne commandée bey Cependant, par Mohammed Defterdar s'empare du Kordofan après un dur combat mené à Bara contre les guerriers vêtus de cottes de mailles commandés par Maïdoum Mouslem, qui était chargé de la défense par le sultan du Darfour. Mohammed bey Defterdar va ensuite effectuer une razzia d'esclaves vers le sud. Cependant les troupes égyptiennes avaient semé la terreur partout sur leur passage, aussi Naïr Nimr Mek, de Chendi, menacé du pal par Ismaïl Pacha, le fait périr dans un incendie et massacre sa suite. Un soulèvement s'ensuit général des populations que Mohamed Le Chendi fut effroyablement bey Defterdar réprime sauvagement. ravagé par l'armée égyptienne. Le bilan de cette campagne soudanaise est remarquable du fait surtout de la présence des Français Caillaud et Letorzec, et des et Hambury. C'est à Caillaud que l'on doit Anglais Waddington la première description de Meroë (1). Grâce à Jomard scientifique de son travail, le Voyage de qui aide Caillaud dans la publication Meroë peut être considéré comme une suite de la Description de l'Egypte. En 1824 est fondée Khartoum, au confluent du Nil bleu et du Nil blanc. C'est là que s'installera en 1830 le premier gouverneur égyptien du Soudan. Conquête du Taka. Après la première incursion de Mohammed il faut bey Defterdar qui s'avance jusqu'au village de Sabderat, attendre 1834 pour que Kourshid Agha, gouverneur du Soudan, contre le Taka, expédition entreprenne une expédition qui échoue devant la vigoureuse défense de Mohamed Din, cheikh des Hadendoa. Six ans plus tard le nouveau gouverneur, Ahmed Pacha, entraîne une armée de dix mille hommes. Nous sommes bien renseignés sur (1) Voyage à Meroé, au fleuve blanc, au delà de Fazoql dans le midi du royaume de à Siouah et dans cinq autres oasis fait dans les années 1819, 1820, 1821, et Sonnar
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cette campagne grâce à la relation qu'en a laissé l'allemand Werne (1), un ingénieur en établisqui devait aider les troupes égyptiennes sant une digue destinée à assoiffer les Hadendoa. Mais c'est des Hadendoa Din est fait grâce aux dissensions que Mohamed Le camp égyptien installé sur la rive droite du Khor prisonnier. Gash au pied de la montagne de Kassala devait donner naissance à la ville de Kassala. Méhémet Ali complète son de Souakim et Massaouah. Occupation domaine soudanais par la ferme des douanes de ces deux ports qui lui sont concédés moyennant une redevance annuelle de 500 bourses Méhémet Ali avait à Stamboul. à verser (625 000 francs-or) croissante de la Mer Rouge, l'occupation compris l'importance mihtaire de ces deux ports complétait sa maîtrise totale de cette mer et prolongeait son domaine africain loin vers le sud. Méhémet Ali et le Soudan. Agé de près de soixante-dix ans, Méhémet Ali entreprend en 1838-39 un voyage au Soudan. Durant son séjour à Khartoum il décide d'interdire la chasse aux esclaves, mais surtout il veut reconnaître les ressources en or du Soudan et Les sables pour ce faire il remonte le Nil bleu jusqu'à Fazangourou. rentre aurifères sont examinés. Enfin, le 11 février 1839, l'expédition à Khartoum et le 15 mars au Caire. Le problème des sources du Nil, qui passionnait alors l'opinion Méhémet Ali qui envoie mondiale, intéresse également scientifique successivement trois expéditions. La première commandée par le bimbachi Selim et le kachif Soliman, atteint 6° 10' de latitude nord. Elle réalise l'exploration du Sobat. Thibaut, négociant français de Khartoum, en fait partie. La deuxième 1840-18 avril 1841) s'avança (23 novembre jusqu'au 4° 42', dépassant de 150 kilomètres le point ultime atteint par la première. Quatre en faisaient partie : Thibaut, d'Arnaud européens qui en avait la direction enfin l'allemand Werne. La troiscientifique, Sabatier, sième (27 septembre 1841-7 mars 1842) ne comprenait que d'Arnaud et Thibaut. Moins bien préparée, elle dut prématurément rebrousser chemin en raison d'une épidémie de dysenterie. Les journaux d'Arnaud et de Thibaut contiennent un remarquable bilan de ces explorations qui vont axer le commerce égypto-soudanais sur les esclaves et l'ivoire. En effet ces relations font état pour la première fois des paisibles populations nilotiques et du très grand nombre d'éléphants. à l'exploiExplorations parties à la recherche de l'or, elles aboutiront tation classique des produits du monde noir : les esclaves et l'ivoire. En fait la conquête du Soudan par Méhémet Ali revêt une importance considérable. Si le vice-roi a pu dire qu'il avait ainsi compensé les pertes territoriales éprouvées par la Sublime Porte en Europe, la réalité est un peu différente et c'est plutôt son domaine propre qu'il étend d'autant plus volontiers que sa rupture avec la Turquie est consommée. (1) FERDINAND WERNE,Feldzug von Sennar nach Taka, Base und Beni Amer (1851).
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3. La politique extérieure de Méhémet Ali sera d'abord au service militaires menées en Arabie de la Porte au cours des campagnes (1811-1818), puis en Morée (1822-1828), puis contre le sultan au cours de deux campagnes où Méhémet Ali affirme son indépendance. Méhémet Ali au service de la Sublime
Porte.
Pendant vingt ans, Méhémet Ali fera campagne au service du sultan et on peut dire qu'il quittera le service du sultan quand il consentis durant la guerre de aura conscience que les sacrifices n'auront qu'il grecque pas eu les récompenses l'indépendance pensait être en droit d'espérer. contre les Ouahabites. Dans la première moitié du Campagne xviiie siècle un mouvement religieux s'était développé en Arabie dans la tribu des Nedji sous l'influence d'un certain Soliman. Le fils de ce dernier, Mohamed ibn abd oui Ouahab, entreprend de ramener l'islam à sa pureté primitive, proscrivant non seulement le luxe et les superstitions mais encore la vénération des tombeaux, des sanctuaires et le culte des Saints y compris Mahomet. A la mort de Ouahab (1791) l'Arabie était conquise par ces dissidents qui, dix ans plus tard, prennent et saccagent Kerbela, principal sanctuaire des Chiites et en 1803 occupent La Mecque et Médine, rendant impossible le pèlerinage. Le choc est rude dans tout l'islam. Le mouvement de religieux est devenu politique, aussi le sultan tentet-il de s'y opposer. En nommant en 1803 Méhémet Ali Pacha de Il oppose un rude deux coups. Djeddah, il fait d'une pierre combattant aux Ouahabites et il en débarrasse l'Egypte. Son autorité une fois affermie au Caire, Méhémet Ali décide d'entreAlbanais prendre cette campagne éloigner des contingents pour encombrants en garnison et qui constituent un danger permanent, affirmer son autorité et obéir au vieux dans le monde musulman réflexe égyptien ses souverains successifs au-delà de qui entraîne la Mer Rouge. En septembre 1811, Toussoun, deuxième fils de Méhémet Ali, à la tête de 6 000 fantassins et 2 000 cavaliers, essuie un sanglant échec dans les gorges de Bedr. Après avoir reçu des renforts, il prend Médine, La Mecque et Djeddah. Ces victoires ont un immense retentissement dans l'ensemble du monde arabe. Le pèlerinage est rétabli. Méhémet Ali va passer deux ans en Arabie à parfaire sa conquête par l'occupation du Hedjaz et du Nedjd. Enfin, en juin 1815, Toussoun obtient d'Abdallah chef des Ouahabites la conclusion d'une paix. Ibrahim, autre fils de Méhémet Ali, remplace Toussoun mort prématurément en 1816 et entre à nouveau en campagne contre les Ouahabites dont la capitale Derraych est enlevée le 10 septembre 1818, incendiée et rasée. Abdallah sera envoyé à Stamboul où le sultan le fera mettre à mort. Le Ouahabisme est supprimé en tant que force politique. Ibrahim est nommé pacha de Djeddah. La puissance de Méhémet Ali est désormais affermie.
398 Campagne
L'ÉGYPTE DU XVIe SIÈCLE A 1882 de Morée.
sont On a pu dire que de 1823 à 1841, Méhémet Ali et l'Egypte La décadevenus des facteurs capitaux de la politique européenne. en Europe et dence turque et les multiples difficultés rencontrées contre la Russie font que l'armée égyptienne est devenue le fer de lance d'une force militaire ottomane qui s'épuise à maintenir l'ordre s'est généralisée sans que les en Grèce où depuis 1821 l'insurrection forces turques aient pu en triompher. Mahmoud II, en 1823, demande à Méhémet Ali de réprimer le soulèvement crétois. La réussite de ses troupes lui rapporte le pachalik de Candie. Méhémet Ali est ensuite chargé de la répression de l'insurrection grecque. En 1825-1826, Ibrahim secondé par Soliman pacha villes. Le de Navarin (le colonel Sève) s'empare puis d'autres 22 avril 1826, il enlève Missolonghi. Athènes capitule le 5 juin 1827. L'insurrection grecque agonise. de nombreuses manoeuvres diplomatiques ont lieu en Cependant Europe pour tenter de détacher Méhémet Ali de la Russie, mais les avances faites aussi bien par les Français que par les Anglais n'aboutissent pas, si bien que le 6 juillet 1827 est conclu à Londres le traité réglant les modalités de l'intervention qui abouanglo-franco-russe tit au désastre naval de Navarin (20 octobre 1827) où la flotte de Méhémet Ali est complètement détruite. Les troupes d'Ibrahim continuent à être engagées à terre, mais un accord est bientôt conclu avec l'amiral Codrington par Méhémet Ali qui prévoit l'évacuation de la Morée par Ibrahim. Méhémet Ali, ulcéré des pertes qu'il a subies, ne participe en aucune manière au conflit turco-russe de 1828-29. Les cinq années d'interdes relavention égyptienne en Grèce ont abouti à un durcissement tions turco-égyptiennes et à la reconnaissance par les Européens de Autre acte de portée l'Egypte en tant que puissance internationale. franMéhémet Ali, dès 1827, a offert au gouvernement internationale, çais son aide pour châtier le dey d'Alger. Méhémet Ali contre la Turquie. Les relations sont tendues avec le sultan qui lui a refusé le pachalik de Saint-Jean d'Acre, ne lui a donné aucune indemnité pour les pertes subies durant la campagne de Grèce et a conféré à son fils Ibrahim (et non à lui) le titre de Prince de la Mecque. Le sultan Mahmoud jaloux de sa puissance lui en veut d'être reBté l'arme au pied devant la guerre turco-russe et le soupçonne d'avoir la conquête d'Alger par les accepté avec une neutralité bienveillante Français. La campagne de Syrie (1831-1833). La Syrie attire Méhémet Ali comme elle attirait déjà les pharaons, au siècle précédent Ali Bey et Mohamed Abou Dahad puis, sur la même
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399
route, le général Bonaparte. La conjoncture politique avec la Porte s'aggrave lorsque Abdallah, pacha de Saint-Jean d'Acre, reçoit le pachalik de Tripoli (1828). Méhémet Ali En 1831, sa flotte et son armée étant reconstituées, s'étant allié à Béchir, émir des Druses et aux Maronites, exige de la Porte le pachalik d'Acre. Le sultan refuse. Ibrahim aidé de Béchir, qui amène 15 000 hommes, enlève Acre le 27 mai 1832. Damas puis Jérusalem tombent. Ibrahim bat le pacha d'Alep à Homs (9 juillet 1832) et vingt jours plus tard l'armée turque d'Hussein bey. Dès lors l'armée s'avance à travers la Cilicie, la Caramanie. La dernière armée turque est écrasée à Konieh (décembre 1832). La Russie offre alors son alliance et c'est là que se joue une très grande partie diplomatique où Français, Anglais et Russes interviennent tour à tour. Ibrahim s'est arrêté à Koutayeh (janvier, février 1833), surtout sur les instances françaises. La flotte russe vient mouilMéhémet ler dans le Bosphore. Après de multiples tergiversations, Ali obtient, lors de la paix de Koutayeh, le pachalik d'Acre avec Jérusalem et Naplouse, ceux de Crète, de Tripoli, de Damas, d'Alep et le district d'Adana. Mais la fiction de l'autorité du sultan est maintenue en fait pour contrebalancer l'influence russe, grande bénéficiaire de (8 juillet 1833) qui met la l'opération par le traité d'Unkiar-Skelessi moscovite. sous protectorat Turquie virtuellement Les conséquences de cette campagne sont immenses. L'axe politique de la Méditerranée musulmane s'est déplacé vers Le Caire du fait de la puissance des armes égyptiennes mais aussi en raison de l'importance du facteur arabe. Si Méhémet Ali se considère encore comme turc, ses fils, venus jeunes en Egypte, se disent Arabes. Pour la première fois se forme un concept de nationalité égypto-arabe. Durant la période 1833-1839 qui constitue véritablement le sommet de la puissance de Méhémet Ali, ses armées sont constamment en campagne en Arabie où elles arrivent tout près du golfe Persique. Cette activité dans la péninsule arabe donne des craintes aux Anglais Aden pour la sécurité de la route des Indes. Aussi occuperont-ils en 1838. La ferme autorité de Méhémet Ali rétablit la prospérité en Syrie ; toutefois deux soulèvements auront pour motifs la levée de contingents militaires (1834-1838). La deuxième guerre contre la Turquie appartient à l'Histoire diplomatique européenne. Une armée ottomane de 150 000 hommes commandée par Hafiz Pacha pénètre en Syrie où le 24 juin 1839 elle est mise en complète déroute par les 40 000 soldats d'Ibrahim et de Soliman. La route de Stamboul est à nouveau ouverte et ce, d'autant que le sultan vient de mourir et laisse un successeur, Abdoul Medjid, jeune et sans expérience. Mais les tentatives des cinq grands d'arbitrage (Angleterre, Autriche, France, Prusse, Russie) vont aboutir à ramener l'empire de Méhémet Ali à son seul domaine africain. Seule la diplomatie française souvent maladroite verra plus loin que ses intérêts particuliers.
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Cette crise diplomatique (1839-1841) aboutit au maintien de l'emLa restitution de ces provinces pire ottoman. n'augmente pas sa force. Au contraire, la question d'Orient reste posée sur un nombre considérable de territoires. « Méhémet Ali avait taillé, l'Europe recoudra mais seulement pour rapiécer. » (1) L'Egypte reste en droit une province de l'Empire ottoman qui est dotée d'un statut spécial (du 19 avril 1841) et d'une dynastie propre. Les huit dernières années de la vie de Méhémet Ali se passent dans la paix. En 1846, il se rend même à Constantinople faire hommage au sultan. C'est durant ces quelques années que prend corps le projet de canal de Suez. Méhémet Ali avait fait de l'Egypte une puissance. Sous son règne s'était véritablement constituée une nation égyptienne de langue arabe.
IV. LES
SUCCESSEURS
DE MÉHÉMET
ALI
L'écrasante personnalité de Méhémet Ali, la diversité de son action militaire, économique et politique, fait paraître ternes ses successeurs. Après le médiocre Abbas (1844-1854) et Saïd (1854-1863) qui fait commencer les travaux du canal de Suez, le khédive Ismaïl (18631879) connaît une période de grand faste avant de sombrer dans la débâcle financière qui, après le bref passage de Thewfik, aboutira à la main-mise des Anglais sur l'Egypte. i. Abbas le mauvais
(1849-1854).
Petit-fils de Méhémet Ali, Abbas a laissé le souvenir d'un prince médiocre et borné. Sa politique est une réaction contre celle de Méhémet Ali. Xénophobe, il renvoie de nombreux conseillers techniques et ce sont les européens. Opposé à la France, il favorise l'Angleterre la voie ferrée Alexandrie-Le Caire-Suez. Anglais qui construisent Voulant pratiquer une politique d'étroite entente avec la Porte, il doit s'y opposer en refusant l'introduction de la réforme administrative turque connue sous le nom de Tanzimat. Cependant il fournit en fin 1853 pour la guerre de Crimée un contingent de 15 000 hommes. Il est assassiné le 13 juillet 1854 par deux de ses esclaves. 2. Mohamed
Saïd (1854-1863), le souverain du Canal. Mohamed Dernier fils de Méhémet Ali, né en 1822 à Alexandrie, Saïd avait neuf ans de plus que son neveu Abbas. Bon géant, Saïd fait revenir les étrangers exilés par Abbas. Il entreprend une série de réformes dont la principale est le retour à la propriété privée des terres, ce qui entraîne la liberté de l'agriculture, du commerce et de l'industrie. Le nombre des ministres est ramené à quatre (Affaires Étrangères, (1) F. CHARLES-ROUX, L'Egypte de 1801 à 1882, p. 181.
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Finances, Guerre, Intérieur) ; une autre réforme plus discutable supprime les gouverneurs de province (Moudir) devenus trop indépence qui dants. Les juges sont nommés désormais par le gouvernement, diminue la vénalité des charges. Une réforme fiscale rend les impôts moins lourds. Saïd favorise les ordres religieux et admet de nombreux chrétiens Mais son oeuvre majeure est le canal de dans son administration. Suez. Il eut l'intelligence de comprendre et de faire confiance à Ferdinand de Lesseps. Par deux actes conclus en 1854 et 1856, Lesseps reçoit le droit de fonder une société universelle chargée de construire un canal maritime et de l'exploiter pour une durée de quatre-vingtdix-neuf ans. Lesseps constitue une société anonyme au capital de 400 000 actions de 500 francs. 210000 actions étaient souscrites par des Français, 180 000 par Saïd lui-même. Outre les dividendes d'actions, le vice-roi a droit à 15 % des bénéfices de la Compagnie. En 1859 le premier coup de pioche est donné et les travaux seront poursuivis sur un rythme et à une échelle gigantesques. 3. Ismaïl le Magnifique
(1863-1879).
Le khédive Ismaïl est sans doute l'un des plus calomniés parmi les souverains d'Egypte. On ne voit trop souvent que la déconfiture financière de la fin de sa vie sans reconnaître le côté positif qu'a revêtu son action jusqu'en 1875. Le faste (1863-1875). Ismaïl est le fils d'Ibrahim, le meilleur général des guerres de son grand-père. Ancien élève de Saint-Cyr à titre étranger, il professe volontiers que l'Egypte appartient à l'Europe. Il sait recevoir avec faste et tact le sultan Abd oui Aziz. Son arrivée au pouvoir coïncidant avec la période de la guerre de Sécession qui tarit les fournitures américaines de coton ; la culture du coton prend alors un considérable essor : les exportations passent de 59 620 tonnes et 143 millions de piastres (1861) à 250 700 tonnes et 1 544 millions de piastres (1865). De cette période date l'extraordinaire essor de la culture du coton en Egypte (1). Ismaïl crée l'administration égyptienne des postes (1874). Le déindustriel s'accélère. L'accroissement des superficies veloppement cultivées en canne à sucre entraîne l'implantation d'une industrie sucrière. Des travaux d'urbanisme sont entrepris (adduction d'eau, usines à gaz). Sous le règne d'Ismaïl plus de 500 000 hectares de nouvelles terres sont mises en valeur représentant une récolte de 11 millions de livres sterling. Nombreux sont les Européens à son service. C'est Ismaïl qui, en 1869, engage l'Anglais Samuel Baker pour réprimer la traite des es(1) F. CHARLES-ROUX, La production de cotonen Egypte, Paris, Colin 1908. — Histoire de l'Afrique, Tome II. R. CORNEVIN.
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claves au Soudan. Baker s'était déjà signalé en 1861 par son exploration de l'Atbara puis, l'année suivante, il avait remonté le Nil blanc pour aller à la rencontre de Speke et Grant ; le 2 février 1863 il avait atteint Gondokoro et le 16 y avait accueilli ses compatriotes. Il avait, ensuite poursuivi sa route vers le sud et résolu complètement le problème des sources du Nil. En octobre 1873, Ismall nommera l'Anglais Gordon gouverneur de l'Équatoria puis gouverneur général du Soudan, Gessi, les Allemands cependant qu'en 1876, l'Italien Munzinger, Slatin commanderont Schnitzer (Emin-Pacha), l'Autrichien les provinces. Les congrégations s'installent catholiques toujours plus nombreuses en Egypte : Dames de Sion, Soeurs du Bon Basteur, Jésuites, missions africaines de Lyon. sont activement Les fouilles archéologiques poussées et en 1863, Ismaïl inaugure le musée fondé par Mariette à Boulak. Ismail se préoccupe de la presse et de nombreux journaux paraissent en arabe, français et anglais. Par ailleurs Ismaïl qui connaît le prix de la propagande organise à l'exposition parisienne de 1867 une de l'Egypte, présentation qui fait alors sensation. En 1869, le canal de Suez est inauguré devant plusieurs souverains au cours de festivités grandioses. Devant envoyer un corps expéditionnaire en Arabie puis en Crète, Ismaïl négocie cette aide contre des transformations constitutionnelles. Il reçoit le titre de Khédive. Après diverses tensions, un firman de 1872 autorise le Khédive à conclure certains traités et contracter des emprunts extérieurs. En 1875 la Réforme (judiciaire) entraîne la création de tribunaux mixtes et de tribunaux consulaires (différents d'après la nationalité des étrangers). Ces tribunaux constituent une juridiction hiérarchisée à deux degrés : trois tribunaux de première instance au Caire, à Mansourah et Alexandrie. Les magistrats étrangers sont nommés par le Khédive sur présentation de leur gouvernement. Les tribunaux mixtes appliquent une législation spéciale identique pour tous les étrangers. Elle se distingue des lois égyptiennes appliquées par les tribunaux indigènes et des lois étrangères appliquées consulaires. Cette juridiction par les tribunaux mixte, créée à l'essai pour cinq ans, fut une réussite qui dura jusqu'en 1949. La faillite (1875-1879). Les dépenses considérables du Khédive l'ont amené à contracter des emprunts. Ce n'est pas, comme on a pu l'écrire, sa prodigalité qui est responsable des difficultés financières mais son esprit d'entreprise et les multiples travaux qu'il voulut faire. Entre 1863 et 1875 une dizaine d'emprunts sont contractés à des taux d'intérêt de plus en plus élevés. En 1875 le produit des emprunts dépasse 2 milliards de francs or. Pour apaiser les créanciers Ismaïl vend les actions du Canal à l'Angleterre (la France ayant décliné l'offre) pour 100 millions de francs
L'ÉGYPTK DU xvie SIÈCLE A 1882
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or, mais la crise financière reste ouverte si bien que, à la suite des de l'Anglais Cave et du Français Outrey, une missions d'enquête Caisse étrangère de la dette publique est créée, gérée par quatre commissaires : un Anglais, un Autrichien, un Français, un Italien. Cette caisse et la France (pays où est dominée en fait par la Grande-Bretagne sont en majorité les porteurs de titres) dont les commissaires sont Baring et Blignières. Le décret du 18 novembre 1876 crée un véritable condominium franco-anglais par le fait que les deux contrôleurs généraux des finances égyptiennes, l'un aux recettes, l'autre aux dépenses, sont l'un est prescrite français, l'autre anglais. Une enquête internationale par les décrets khédiviaux du 27 janvier et 30 mars 1878. La commission présidée par De Lesseps comprend les Anglais Wilson et Baring, l'Autrichien Kremer, le Français de Blignières, l'Italien Bavarelli, l'Égyptien Riaz Pacha. Le secrétaire général est le Français Liron d'Airolles. Le rapport remis le 13 août 1878 est injustement accablant pour le Khédive, mais ce dernier se conforme aux conclusions de ce rapport qui insiste sur la nécessité de créer un contrepoids au pouvoir personnel du Khédive. Le 28 août 1878, Ismaïl forme un ministère européen (1) et présidé par Nubar Pacha. Le 8 décembre suivant, les postes des contrôleurs généraux, véritables syndics de faillite, sont supprimés. Ismaïl donne en gage ses propriétés de famille pour satisfaire ses créanciers. Le Français Bouteron, directeur de l' administration des domaines de l'état égyptien, contribuera au développement agricole du pays. Mais Ismaïl est profondément ulcéré de ce ministère « européen » et de cette tutelle. Comme une partie de l'armée a été licenciée, des manifestations ont lieu (février 1879). Il renvoie les deux ministres nomme son européens puis devant les protestations franco-anglaises, fils aîné Thewfik Pacha à la tête du Gouvernement. Enfin le 7 avril 1879, le Khédive exclut les ministres européens et nomme Chérif Pacha chef du gouvernement. La riposte franco-anglaise est brutale. On conseille au Khédive de démissionner puis, sur son refus, on le fait destituer par la Porte. En juin 1879, Ismaïl intronise Thewfik et quitte l'Egypte. 4- Le khédive Thewfik et les trois dernières années de l'Egypte autonome (1879-1882). La France et l'Angleterre la ont commis la faute de remettre Turquie dans un circuit égyptien où elle ne figurait plus. D'où pour la Porte une tentative de restreindre les pouvoirs khédiviaux. Le contrôle financier est rétabli (4 septembre 1879) et sous le gouvernement de Riaz Pacha une loi de liquidation est instituée qui redresse rapidement les finances égyptiennes. (1) Comprenant de Blignières (Travaux Publics) et Wilson (Finances).
L'ÉGYPTE DU xvie SIÈCLE A 1882
404 Rébellion
d'Arabi
Pacha.
On accusait le Khédive de l'armée est mécontente. Cependant favoriser les officiers circassiens. Par ailleurs les nombreux soldats les ardents supports d'un mouvement xénolicenciés constituaient phobe qui prirent comme chef un colonel beau parleur, Arabi Pacha. En 1881, Arabi Pacha contraint Thewfik à renvoyer Riaz Pacha à remplacé par Cherif Pacha. Une chambre est élue conformément la loi organique de 1866. La chambre, à la dévotion d'Arabi Pacha, porte au pouvoir Samy Pacha et fait sanctionner par le khédive une le pouvoir de voter le budget et donc loi donnant au parlement entraînant la suppression du contrôle financier. au pouvoir depuis novembre 1881, propose à l'AngleGambetta, terre une action commune. Il est renversé le 27 janvier 1882 et remfrançaise au bomplacé par Freycinet, lequel refuse la participation bardement d'Alexandrie réclamé par Gladstone après l'émeute du 12 juin 1882 qui a coûté la vie à 60 Européens. Le mois suivant, le ministère est renversé ; la Grande-Bretagne Freycinet peut agir seule. Lors du bombardement d'Alexandrie par la flotte anglaise, Arabi Pacha a déclaré la guerre à l'Angleterre. Le 23 juillet, le Khédive a fait publier la destitution d'Arabi, mais en fait Arabi tient Le Caire, cependant qu'à Alexandrie Thewfik est chef du gouvernement légal. Ainsi l'Angleterre agissant sur la demande du Khédive va mener une campagne militaire contre l'armée égyptienne aux ordres d'un chef insurgé. Intervention
anglaise. aux ordres du colonel Wolseley s'installe le long du L'expédition canal de Suez et attaque les positions de Tell el Kébir le 13 septembre 1882. Les défenses d'Arabi Pacha s'effondrent. Le 24 septembre, Thewfik fait son entrée dans la capitale. Les rebelles sont jugés, condamnés et exilés. ans après avoir quitté l'Egypte, les forces anglaises Quatre-vingts y reviennent et cette fois, elles sont décidées à rester. L'Egypte va devenir en fait un protectorat britannique. Si la personnalité de Bonaparte et l'expédition d'Egypte ont ouvert ce pays à la vie moderne, Méhémet Ali par la durée de son règne, la valeur de son armée et son dynamisme a constitué la Nation Égyptienne et étendu son domaine sur le Soudan Nilotique. Parmi ses successeurs Mohammed Saïd et Ismaïl ont été d'infatigables bâtisseurs, même si la gestion financière du second a contraint les puissances européennes à intervenir. A la suite du réflexe nationaliste d'Arabi Pacha, l'intervention militaire technique européenne s'est transformée en une intervention anglaise. La domination britannique durera quarante ans, et se prolongera en fait jusqu'à la deuxième guerre mondiale.
CHAPITRE
XI
DU MAGHREB L'ÉVOLUTION DE L'INTERVENTION TURQUE A LA PERTE DES INDÉPENDANCES
l'histoire du xvie de compartimenter Il est difficile au tournant du Maghreb qui est marquée en ce début de siècle par des événements des corsaires en Tunisie communs : croisade espagnole, intervention et en Algérie (les Barberousse), ainsi qu'à Tripoli (Dragut). Malgré l'identité de destin du Maghreb oriental, Tunis devient dès En 1587 un pachalik distinct rattaché directement à Constantinople. 1756, Tunis sera envahie par les troupes d'Alger et durant un demisiècle les bey hoçaïnites devront payer un tribut annuel et reconnaître la suzeraineté d'Alger.
LES FRÈRES
I. LA CROISADE AFRICAINE ET L'INTERVENTION BARBEROUSSE
TURQUE
A la fin du xve siècle la décomposition politique du Maghreb s'agL'état hafçide de Tunis maintient difficilegrave douloureusement. ment son autorité sur une mince bande côtière contre les tribus arabes auxquelles les villes du Djérid et les ports doivent payer tribut. Les derniers Abd el Wadides de Tlemcen, déchirés par des querelles de palais, voient leur autorité de plus en plus contestée. Des principautés autonomes se constituent. Ainsi la Kabylie obéit au roi de Kouko (8 km à l'Est de Michelet), les Arabes Dawawida contrôlent le Zab et le Hodna, cependant qu'une nouvelle dynastie s'installe à Tougrésistent difficilement aux entregourt. Au Maroc, les Wattasides prises portugaises. i. La croisade africaine. L'unification de l'Espagne réalisée par Isabelle la Catholique, à la mort de Jean II d'Aragon (1479), amène en Méditerranée à la place du marchand aragonais le rude soldat castillan. La même année 1479 un traité signé avec le Portugal — préfiguration de celui de Tordesillas — sépare les zones d'influence maghrébines réservant aux Portugais le royaume de Fès et donnant le reste à l'Espagne. Si l'installation des Fronteiras portugaises sur les côtes marocaines
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L'ÉVOLUTION DU MAGHREB
(Agadir : 1505, Safi : 1508, Azemmour : 1513, Mazagan : 1514) relève de l'occupation méthodique du continent africain, les présides espagnoles ne constituent qu'une occupation restreinte. En effet, pour l'Esune obligation reliconstituent pagne les opérations nord-africaines gieuse. Le testament d'Isabelle la Catholique décédée le 26 novembre 1504, au demeurant « chef d'oeuvre de lucidité et de prévoyance (1), prescrit à la princesse sa fille et au prince son mari... de ne pas se relâcher dans la conquête de l'Afrique et la lutte pour la foi contre les infidèles ». C'est le motif invoqué par le cardinal Ximenès de Cisneros pour à Tunis comme point persuader Ferdinand qui pense immédiatement stratégique important pour l'Aragon. Après un premier échec en 1505 devant le roi de Tlemcen, une véritable croisade part en 1508 avec le « double dessein de supprimer les refuges des Corsaires qui razziaient la mer espagnole et de créer en même temps de Séville à la Sicile riche en grains une route impériale adossée à la côte africaine » (2). Don Pedro Navarro, qui avait naguère fait la course, conduit une série d'expéditions victorieuses : Mers el Kebir (1505), le pefion de Vêlez (1508), Oran (1509), Bougie et Tripoli (1510) sont successivement enlevés. Tenès, Dellys, Cherchell, Mostaganem de acceptent payer tribut, ainsi que le Ziyanide de Tlemcen. Mais les cinq années durant lesquelles les forces espagnoles s'engagent en Italie sont mises à profit par les Barbaresques. Ainsi le seul résultat tangible de la grande offensive espagnole est d'avoir empêché la course barbaresque de s'établir à l'ouest d'Alger. Les garnisons espagnoles (presidios) se bornent à tenir les ports d'où elles lancent de temps à autre des raids (jornadas) dans la campagne. Mais au siècle de la grande conquête américaine, les éléments de valeur préfèrent les fructueuses expéditions outre-atlantique à ces présides-prisons. Comme le souligne Léo Barbes (3) : « La mauvaise organisation des enclaves côtières en pays maure, leur ravitaillement plus que déficient en vivres, en armes et munitions, en argent, l'abandon dans lequel étaient laissés les effectifs et leurs cadres, décimés par le climat et les fatigues, ruinaient les brillants résultats de la bravoure et du dévouement des magnifiques troupes espagnoles ». En fait cependant, dès 1512, l'Espagne contrôle pratiquement l'ensemble de la côte depuis Ceuta jusqu'à la baie de Bougie. Elle contrôle d'autre part Tripoli (remise en 1530 aux chevaliers de Saint-Jean de ce qui permet de neutraliser les ports tunisiens. Jérusalem), 2. Les frères Barberousse
et la genèse de l'intervention
turque.
Les populations musulmanes sont profondément traumatisées par ces conquêtes. Si le Maroc trouve sur son propre sol les ressources néHistoire d'Espagne, 1947, p. 150. MOUSSET, (1) ALBERT (a) MONLAO, p. 51. (3) La dominationturque, in Histoire de l'Algérie, 1962, p. 157.
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cessaires pour repousser l'infidèle, les autres pays du Maghreb devront rechercher à l'extérieur auprès de la grande puissance musulmane de Méditerranée orientale, l'aide nécessaire à leur défense. fait cesser la Le contrôle chrétien des côtes a presque entièrement piraterie. Cependant les corsaires sont là, disponibles. Ils vont trouver en des villes privées de leur gagne-pain un ferme soutien populaire. La puissance turque leur donnera quelques milliers de volonmais dès que ces taires et la caution d'une puissance musulmane, forts ils rejettent l'autorité chefs de guerre se sentent suffisamment du sultan et installent leurs propres dynasties. C'est à Alger que le marasme est le plus grand. En effet, l'installation d'une garnison espagnole sur le Penon a stoppé tout trafic. Alger est alors une sorte de république municipale administrée par une oligarchie bourgeoise protégée par la tribu arabe des Thaaliba. Leur chef Salem el Tsami demande secours aux frères Barberousse qui sont installés depuis 1514 à Djidjelli. La fulgurante
campagne
d' Aroudj.
fils d'un potier grec chrétien de Mytilène, Les frères Barberousse, s'étant fait musulmans, connaissent une prodigieuse carrière. L'aîné s'est distingué en 1504 en capturant deux Aroudj (1473-1518) sensationnel à galères papales au large de l'île d'Elbe, exploit l'époque et qui rend son nom célèbre. Puis il s'est installé à son de compte sur les petite îles Gelves que lui a laissées le souverain Tunis. Appelé par Abder Rahman, chassé de Bougie par les Espaà deux reprises la ville, mais se fait repousser gnols, il attaque (1514) et perd un bras ; il s'installe à Djidjelli et de là se constitue un royaume en prenant parti dans une querelle pour les Béni Abbès contre le chef berbère Kouko qui est tué dans un combat où font merveille les arquebusiers turcs. Appelés par Salem el Tsami, roi d'Alger, pour délivrer la ville de la garnison espagnole du Penon, les frères Barberousse viennent en deux fractions, l'une par mer avec Kheir ed dine, l'autre composée des contingents kabyles avec Aroudj par voie de terre. En mai 1515 l'assaut est livré contre le Penon, mais échoue, cependant qu'Aroudj, en visite de courtoisie chez Salem el Tsami, l'étrangle de son unique main et se fait proclamer roi d'Alger. Après avoir repoussé un assaut espagnol conduit par Diego de Vera (30 septembre 1516), il prend Tlemcen, soumet les Béni Snassen et avec le sultan Wattaside de Fès, mais il est engage des pourparlers très supérieures en nombre et attaqué par des forces hispano-arabes tué au rio Salado (1518) au moment où il s'enfuyait de Tlemcen avec quelques soldats. au courant de la politique looale, avait comAroudj, parfaitement pris le parti qu'un homme résolu peut tirer des querelles de clans. En trois ans il avait presque réalisé l'unité de l'Algérie utile. La puissance de l'Espagne et sa capacité d'intervention au moment de la campa-
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gne de Tlemcen ainsi que la haine suscitée quèrent sa perte.
par ses assassinats
provo-
Kheir ed dine et Vappel à la Sublime Porte. Son frère Kheir ed dine qui le remplace est le véritable fondateur de la régence d'Alger avant d'être grand amiral de la flotte turque. Kheir ed dine a l'intelligence de lier ses destinées à la Turquie. Menacé par les Espagnols, sentant la révolte en pays kabyle, il fait acte de vassal vis-à-vis du sultan Selim qui lui donne le titre de pacha et le nomme beylerbey (= émir des émirs). Ce fait lui donne un immense 2 000 hommes, de qu'il reçoit de Constantinople prestige d'autant l'artillerie et 4 000 volontaires. Grâce à ces renforts il peut repousser l'assaut de l'espagnol Hugo de Moncada (1519), mais subit un échec en Kabylie devant une armée hafçide si bien qu'il doit abandonner Alger pour Djidjelli où il redesa puissance, il vient corsaire (1520-1525). Peu à peu il reconstitue puis, avec le sultan prend Collo (1521), Bône (1522) et Constantine des Béni Abbès, chasse d'Alger les Kabyles de Kouko et occupe la Mitidja (1525). Il réprime avec la dernière énergie divers soulèvements puis le 27 mai 1529 réussit à prendre le Penon dont la garnison ne comde plusieurs jours, que 25 prenait plus, après un bombardement soldats sur 150. Avec les ruines du fort, Kheir ed dine fait construire un môle réunissant les îlots si bien que ce médiocre mouillage devient un port de guerre d'autant plus fréquenté par les corsaires que Bougie et Oran sont encore occupés par les Espagnols. Intervention
en Tunisie.
de Moulay Haçan sultan Les dissensions hafçides et l'impopularité de Tunis amènent Barberousse à tenter un coup de main sur Tunis qui tombe sans combat (18 août 1534). Il proclame alors la déchéance des Hafçides, place une garnison à Kairouan et soumet l'ensemble delà Tunisie. Mais la menace est trop forte pour Rome et la chrétienté. Par ailleurs la Perse menace la Turquie. Aussi, François 1er promettant sa neutralité, Charles Quint décide l'attaque sur Tuni3.30 000 hommes à Carthage. La Goulette est prise montés sur 400 navires débarquent (14 juillet 1535) puis Tunis où les esclaves chrétiens insurgés se rendent maîtres de la Qaçba. Charles Quint restaure Moulay Haçan, mais ce dernier, détesté par ses sujets, nécessite la présence d'une importante garnison. Après un voyage en Europe, son fils lui crève les yeux pour régner à sa place. Kheir ed dine replié sur Bône ne reste pas sur cet échec. Il attaque Mahon d'où il ramène 6 000 captifs et un énorme butin. Mais sa répuoù le sultan Soliman tation d'homme de mer l'attire à Constantinople l'avait nommé déjà en 1533 amiral en chef (capitan pacha). Il gardera jusqu'à sa mort (4 juillet 1546) une situation prépondérante dans la capitale de l'empire turc.
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3. Dragut et les côtes tunisiennes. Dragut avait été un élève de Kheir ed dine qui l'avait racheté alors les exploits de son qu'il était dans la marine génoise. Renouvelant maître sur la côte tunisienne, il ravage le littoral italien mais doit se replier devant l'offensive espagnole de 1550 et échoue devant Gafsa. Il échappe difficilement aux galères d'Andréa Doria (avril 1551), mais et va guerse place alors sous les ordres du sultan de Constantinople royer pour lui durant cinq années (juin 1551 — avril 1556). Nommé gouverneur de Tripoli, il lutte contre les cheikhs de l'arentre à Gafsa le 20 décembre 1556, chasse les rière pays tripolitain, Chabbiya de la Tunisie centrale et occupe Kairouan le 3 janvier 1558. Comme le souligne Braudel (1), Dragut, en deux ans, est devenu une Or cette puissance se trouve précisément puissance méditerranéenne. à la frontière du domaine espagnol, à l'endroit exact où Philippe II ne peut tolérer de bases permanentes hostiles. C'est ce qui explique l'opération de Djerba. Le duc de Medina-Coeli et les chevaliers de Malte occupent l'île sans difficulté (1559) mais au départ, l'escadre chrétienne est surprise par Dragut qui coule 30 navires et fait 5 000 prisonniers (15 mars 1560). La garnison chrétienne de Djerba après une brillante résistance est exterminée ; les crânes des défenseurs constituent une pyramide, la tour des crânes (borj er Rous) qui subsistera jusqu'en 1846. Dragut meurt en 1565 au siège de Malte. La bonne entente des chefs corsaires permet à celui d'Alger, Euldj Ali, de repousser aisément les contingents hafçides et de chasser Hamida de Tunis (1569) où il installe le caïd Ramdan. C'est l'époque du grand sursaut catholique suscité par la révolte de Grenade (1569-1570). Pie V réussit à liguer Venise et l'Espagne. Lépante (9 octobre 1571) marque la victoire de la coalition. Malgré le retrait de Venise de cette coalition, Don Juan d'Autriche, frère de Philippe II, s'empare facilement de Tunis (1573) où il laisse une garnison. La double défaite de Lépante et Tunis entraîne en réaction l'expédition de Sinan Pacha contre la Goulette et Tunis (1574). Les difficultés financières (1575) amènent Philippe II à signer une trêve avec le sultan (1581). Ces divers conflits avaient entraîné la séparation de la Tunisie et de l'Algérie qui, dès lors, sauf de rares périodes et malgré l'unité profonde du Maghreb, vont connaître un destin séparé. C'est l'évolution de chacun des états du Maghreb que nous allons maintenant envisager. (1) BRAUDEL, La Méditerranéeau temps de Philippe II.
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II. LA RÉGENCE DEPUIS LES FRÈRES JUSQU'AU DÉBARQUEMENT
D'ALGER BARBEROUSSE DE SIDI FERRUCH
Yves Lacoste a bien montré (1) la forme originale d'état algérien créé par Yodjaq et l'évolution économique du pays durant cette période. Si, dans certains cas — notamment pour les Hoçaïnides de Tunis — les éléments turcs sont véritablement devenus tunisiens, il n'en fut pas de même à Alger où la terre moins riche et les paysans plus durs les garnisons turques vers les opérations maritimes. rejetèrent On peut distinguer dans l'histoire de la Régence d'Alger trois périodes : celle des beylerbeys, qui est plus particulièrement turque, celle que l'on peut appeler Vanarchie des agha (1659-1671), enfin la période maritime de donner le poudes deys qui va permettre à l'aristocratie voir à l'un des siens, vieux raïs et riche armateur exerçant comme dey la présidence du divan. Léo Barbes est peut-être un peu sévère dit que ces trois périodes « n'ont de dans son jugement lorsqu'il commun que l'obscurité, les expédients sans vergogne, l'anarchie, le meurtre politique, la loi du plus fort et du plus cruel » (2). La ne manquera pas à plusieurs reprises d'une période des beylerbeys certaine grandeur. Quant à la période des deys, son éclat dépendra de la personnalité des responsables. i. La période des beylerbeys Le gouvernement
(1516-1588).
des beylerbeys.
Il est difficile de définir une véritable politique turque dans cette région. Il serait plus exact de parler d'actions personnelles des beylerbeys plus ou moins cautionnés par la Porte mais dont les expéditions presque toujours ont un double objectif : contrôle des provinces et pillage pour nourrir la milice turque toujours avide de gains. Certains auteurs ont représenté l'histoire de l'Algérie turque comme une rivalité entre le corps des janissaires, l'odjaq et la corpermanente poration des capitaines corsaires (taïfa des raïs). L'odjaq était composé de Turcs appartenant souvent aux plus basses classes de la société, qui venaient en Alger comme les Européens iront chercher fortune en Amérique ou comme les « petits blancs » iront plus tard en Afrique noire. Les corsaires appelaient ces janissaires turcs les boeufs d'Anatolie. Cet Odjaq, caste militaire constamment renouvelée et composée de une mercenaires réelle à Alger et patronne turcs, a une autorité sorte de complexe étatique dont les classes dirigeantes lui doivent le pouvoir. On peut dire que l'Odjaq a créé à son profit la première forme, le premier embryon d'État algérien. (1) L'Algérie, passé et présent, p. 142-150. (2) Op. cit, p. 163.
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Les corsaires, nous l'avons vu, sont rarement des Turcs, mais beau(Calabre, coup plus souvent des renégats des côtes méditerranéennes dans la course une vie plus Sicile, Corse, îles grecques), qui trouvent que sur les âpres terres du littoral médiagréable et plus fructueuse terranéen. : d'après Haëdo La population d'Alger était assez internationale (1), il y avait au temps des beylerbeys 12200 maisons pouvant contenir : « 60 000 habitants, non compris 25 000 captifs chrétiens dont beaucoup vivaient en banlieue. Près de la moitié des habitations appartenaient aux renégats, qui, avec les 10 000 Levantins, représentaient la grosse majorité de la population. Sous le nom de Maures, Haëdo englobait environ 12 500 Algérois d'origine (Baldis) ; 6 000 Morisques réfugiés d'Andalousie ou de Grenade (Moudejares, Andalous) ou de Valence, d'Aragon et de Catalogne (Tagarins), 3 500 Kabyles et un nombre indéterminé d'Arabes (3 000 ?) ; soit, pour le moins, 25 000 habitants. Dans le ghetto devaient s'entasser près de 5 000 juifs. » Les Kouloughlis (métis de Turcs et de femmes indigènes) participent aux affaires publiques. Par contre, les Kabyles ne sont guère Les Mzabites ont le monopole des que manoeuvres ou journaliers. bains publics. La plupart des Juifs descendent de ceux venus des Baléares à la fin du xiiie siècle (Chekliines), un puis d'Espagne, siècle plus tard (Kiboussiines). de 1391 constituent Ces kiboussiines une aristocratie intellectuelle. Fortement encadrés par leurs rabbins, ils sont les « vrais fondateurs du judaïsme algérien ». Les 25000 captifs chrétiens viennent de toutes les régions de la Méditerranée. de leur rachat Leur existence va poser le problème et entraînera le tableau poussé au noir du régime turc qui sera fait Ces prêtres ont en effet souvent tendance par les Rédemptoristes. à exagérer les sévices dont les chrétiens sont victimes pour émouvoir le coeur des fidèles d'Europe et obtenir d'eux des secours plus importants. Tous ces captifs parlent une sorte de lingua franca, langue de turc, véhiculaire, composée d'un mélange d'arabe, d'espagnol, d'italien et de provençal. Les beylerbeys, de la Course, se soucient néanmoins préoccupés de l'implantation de garnisons du territoire. (mounar) à l'intérieur Par ailleurs des colonnes (mehalla) pillent le pays. Ainsi les janissaires de l'Odjaq, les « boeufs d'Anatolie » ne sont pas trop jaloux des corsaires. Toutefois, les beylerbeys, n'ayant pas confiance dans les contingents turcs, vont souvent lever des contingents kabyles dans la tribu des Zwawa (Zouaves). Les beylerbeys doivent infléchir leur politique en fonction de celle d'Istamboul. L'essentiel de leur action est d'une part dirigée contre les voisins marocains ou tunisiens, d'autre part contre l'en(1) Cité par JULIENet LETOURNEAU, Histoire de l'Afrique du Nord, p. 264.
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vahisseur espagnol. Leur autorité épisodique sur Tunis et Tripoli. Campagnes
militaires
s'étend
de façon
théorique
et
des beylerbeys.
d'une part contre les Marocains, de l'autre Elles se développeront contre les Espagnols. et nommé Lorsque Kheir ed din est rappelé à Constantinople grand amiral (1535), Haçan Agha, son khalife, lui succède (1536de Charles Quint contre Alger (1541) 1543) et repousse la tentative qui rassemble une armada de 516 voiles portant 12330 marins et 24000 soldats (23 octobre). Les pluies diluviennes sont les meilleures auxiliaires des forces algéroises (23 octobre-3 novembre) qui rapportent un énorme butin. Cette victoire entraîne des mouvements notamment à Tlemcen où Moulay Mohammed dénonce la suzeraineté espagnole et livre aux Turcs le Méchouar. Aussitôt le comte d'un jeune d'Alcaudète, gouverneur d'Oran, patronne la candidature frère du roi Abd Allah qu'il installe dans Tlemcen (6 février 1543), mais il doit rapidement battre en retraite. Haçan Pacha (1544-1552), fils de Kheir ed din, remplace Haçan Agha et fait porter ses efforts dans l'ouest de la Régence où les Marocains de Mohammed el Mahdi vainqueur des Wattasides profitent de l'inaction turque pour occuper la capitale ziyanide (1551) puis enlever Mostaganem et remonter la vallée du Chélif. Haçan Pacha, qui a été nommé beylerbey lors du décès de son père (1546), réagit violemment. Une armée turque commandée par le renégat Haçan Corso et appuyée sur les tribus de l'ouest reprend Mostaganem, écrase l'armée chérifienne, la poursuit jusqu'à la Moulouya et rentre à Tlemcen où la confiscation opérée sur les biens des Tlemceniens de remettre un don de joyeux avèpermet au général vainqueur nement au nouveau Salah Raïs qui remplace Haçan beylerbey Pacha. Salah Raïs, ancien commandant de la flotte ottomane, passe son temps à guerroyer. Les Béni Abbès, qui l'aident à obtenir des caïds de Touggourt et Ouargla le paiement d'un tribut, se révoltent. Salah Raïs ne peut les vaincre mais s'attache le concours de leurs adversaires de Kouko qui constitueront sa cavalerie lors de la campagne marocaine. Après avoir mis en fuite le chérif à Taza (1553), il fait proclamer à Fès le wattaside Bou Haçoun, enlève le Penon de Vêlez (1554) d'où le chef des corsaires Yahya Raïs mènera de multiples expéditions sur les côtes espagnoles(1558-1562). Bougie tombe en 1555. Mais Oran réussit à tenir non par la vertu des Espagnols mais par la mort de Salah Raïs et le rappel des galères algériennes pour la défense du Bosphore. Par ailleurs le beylerbey Tekelerli, nommé par la Porte doit, pour occuper son poste, vaincre les janissaires et tuer Haçan Corso. Mais le désordre va dès lors s'installer à Alger. Haçan ibn Khaïr ed din est envoyé par le sultan (1557) pour
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à Tlemcen où l'armée chérifienne assiège rétablir l'ordre notamment la petite garnison turque dans le Méchouar. Le beylerbey entre au de l'attaque du Maroc mais doit revenir sur ses pas à l'annonce sur Mostaganem. Les Espagnols sont écrasés comte d'Alcaudète Dès lors (août 1558). Ils perdent 10000 soldats dont le gouverneur. les Espagnols resteront bloqués dans les places d'Oran et de Mers el Kébir (1). Haçan Pacha victime d'une mutinerie de l'Odjaq (1561) est rétabli dans le poste de beylerbey (1562). Il échoue devant Oran secourue à temps par la flotte de Doria (3 avril-7 juin 1563). Il est rappelé par le sultan pour prendre part au siège de Malte (1565) puis comavec le titre de capitan Pacha (début mander la flotte ottomane 1567). Le pacha Mohammed Ibn Salah Raïs qui le remplace s'emploie à faire partie de la à réparer les ruines ; il autorise les janissaires flotte. Il a rétabli l'autorité turque à Constantine lorsqu'il est chargé d'un autre pachalik et remplacé par le beylerbey Euldj Ali (mars 1568). Le dernier beylerbey est probablement Euldj Ali (1568-1587) avec Kheir ed din la plus grande figure de la domination turque en Alger. D'origine calabraise, fait prisonnier tout enfant lors d'un il rame longtemps sur les galères puis, pour raid de Barberousse, se venger d'un Turc qui l'a brutalisé, il se convertit à l'islam et mène la course. En 1557, il est gouverneur de Tlemcen, en 1560 khalifa de Dragut en Méditerrannée. En 1565 il hérite de la fortune de Dragut, est nommé pacha de Tripoli puis beylerbey. Euldj Ali donne une nouvelle impulsion de Lépante à la course. A la bataille (1571), il se conduit en héros et réussit à prendre à l'abordage la galère capitane de Malte. Il est alors nommé grand amiral de la flotte turque en même temps qu'il est maintenu dans la charge de beylerbey d'Alger. La fin des beylerbeys. de la Régence à des KhaEuldj Ali avait confié le gouvernement lifa : Arab Ahmad, puis le Caïd Ramdan (1574-1577) qui installe Abd el Malik à Fès et ramène 600 000 onces d'or et dix canons (mars 1576). Un renégat Veneziano vénitien, Haçan (1577-1580), se signale Ses exactions entraînent des révoltes si bien par son autoritarisme. que le vieil eunuque Jafar rétablit l'ordre. C'est durant son autorité que Euldj Ali revient à Alger préparer la conquête du Maroc sur El Mançour, mais il est rappelé pour d'autres activités en Orient avant d'avoir pu mettre son projet à exécution. Haçan Veneziano prend alors le pouvoir (1582-1588). Mais à la mort Le sultan érige d'Euldj Ali (1587) il est nommé Capitan pachan. alors en régences Tunis et Alger, désormais séparées, Tripoli, (1) CH.ANDRÉJULIENet LETOURNEAU, p. 269.
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administrées par des pacha renouvelables tous les trois ans. Avec cette réforme, les provinces africaines cessent de jouer le rôle de marches extérieures, de bastions de l'empire turc contre l'empire espagnol. Elles deviennent des provinces semblables aux autres. Leur éloignement difficile. va rendre leur contrôle singulièrement de Constantinople 2. La période des pacha triennaux (1588-1659). Cette période est l'une des plus lamentables de l'histoire du Maghreb assimile ces nids de corsaires, turc. En effet la réforme territoriale dont l'arrière-pays est pratiquement autonome, aux paisibles provinces de Thrace ou d'Anatolie. Le pacha qui vient d'acquérir sa charge au prix de multiples cadeaux souhaite récupérer aussi vite que possible ses frais, consolider sa fortune, c'est-à-dire en fait ne mécontenter personne et donner le plus souvent raison aux plus remuants. et les Raïs demeurent les véritables Le conseil des Janissaires maîtres d'Alger, le pacha ne conserve qu'un palais, une garde et la signature des actes officiels : « Nous Pacha et Divan de l'invincible milice d'Alger ». La tournée annuelle de collecte des impôts se présente pour les comme une opération de razzia sur les terres de l'arrièrejanissaires pays cependant que pour les Raïs la piraterie opérant sur les galions espagnols retour d'Amérique est infiniment plus rentable. Les pacha triennaux s'appuient sur la milice ou la Taïffe. Il est inutile d'énumérer ces personnages qui, de Dely Ahmed (1587) à Ibrahim (1654), se sont succédé dans le poste de pacha. L'un d'eux, Kheder, s'y retrouve à trois reprises (1589, 1595 et, versée par le Sultan 1603) et n'hésite pas à empocher l'indemnité aux commerçants à maltraiter français victimes des Janissaires, M. de Vidas, consul de France et à détruire le bastion de France sur la côte Est. La mesure est comble, Henri IV obtient la tête de ce pacha. Des expéditions chrétiennes ont lieu de temps en temps : Andréa dix Doria en septembre 1601 échoue devant Alger avec soixante navires et 10 000 hommes ; le 16 août 1607 Silvio Piccolomini à la tête d'un contingent de Toscans et de chevaliers de Saint-Etienne prend Bône. Trois ans plus tard (17 août 1610) les mêmes Toscans détruisent devant Alger et Djidjelli. plusieurs galiotes turques au début du xviie siècle, la prospérité d'Alger éclate. Cependant, La ville compte 150 000 âmes ; elle ne les retrouvera qu'au début du xxe siècle. Sur ce total les Baldis, vieux Algérois d'origine, sont environ 15 000, on évalue à 30 000 le nombre des renégats, à 25 000 le nombre des Moriscos ; par ailleurs, on compte 10 000 Levantins, 5 000 Turcs, 6 000 Kouroughlis, 5 à 6 000 Juifs, 3 000 Nègres, 5 à 6 000 Arabes. Enfin il faut ajouter les esclaves chrétiens dont le chiffre oscille entre 25 et 35 000. Beaucoup de captifs travaillent à l'extérieur de la ville et n'y reviennent que pour la nuit (1). (1) MONLAO, p. 108-109.
L'ÉVOLUTION DU MAGHREB Les incidents
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de 1619 et leurs suites.
En 1619, au moment où les ambassadeurs turcs, après avoir renouvelé les Capitulations à Tours, sont à Marseille et négocient les échanges et prend une de captifs, un raïs algérois, Regeb, viole l'armistice sauf deux hommes polacre marseillaise ; il massacre tout l'équipage contre qui portent la nouvelle à Marseille. A Alger le mécontentement les résidents européens atteint des proportions considérables et les des vaisseaux marchands Raïs se lancent à l'attaque trompés par l'annonce des traités de paix. En représailles, Français, Anglais et Hollandais vont croiser devant les ports algériens. Les pertes du commerce européen sont immenses puisque 936 bâtiments furent ramenés en huit ans dans la darse algéroise. Le brillant rétablissement
de Sanson Napollon
et la rélance de la course.
Le 17 septembre 1628, un gentilhomme de la chambre de Louis XIII, Sanson Napollon, orientaliste de valeur et personnalité d'un exceptionnel courage, arrive avec le titre Renvoyé du Roi et délégué du Duc de Guise pour les concessions. En quinze jours, grâce à ses relations et à quelques cadeaux et banquets, il parvient à obtenir un vote franavec la France. Les prérogatives général de paix perpétuelle çaises sont alors rétablies jusqu'en 1633, époque à laquelle Sanson La Napollon est assassiné par les Génois du comptoir de Tabarka. course recommence alors partout. En décembre des 1637, le divan d'Alger décide la destruction Bastions et de la Calle. Mais les tribus de l'est se soulèvent alors, suivante une flotte barbaresque cependant que l'année surprise dans l'Adriatique par l'amiral vénitien Capello subit de très lourdes pertes. 3. La période des agha (1659-1671). Le dernier pacha Ibrahim ayant détourné à son profit une partie des sommes envoyées par Constantinople aux raïs pour demander de rejoindre la flotte turque, du un divan proclame la déchéance pachalik et le remplace par une sorte de république militaire dont menée pour l'agha des Janissaires est le chef. Ainsi la révolution défendre les droits des raïs se terminait au profit de la milice en des conditions qui ne pouvaient mener qu'au chaos. En effet, l'agha changé tous les deux mois n'avait aucune continuité dans l'action. Aussi les quatre agha de ces douze années furent-ils assassinés. Durant cette période des agha on peut noter la fameuse peste de 1663 qui fit mourir chrétiens. Par ailleurs, 10 000 esclaves l'année suivante eut lieu l'expédition du duc de Beaufort sur Djidjelli qu Alexandre Dumas immortalisa dans son « Vicomte de Bragelonne » (23 juillet-31 octobre 1664). On peut citer encore le bombardement d'Alger par le même duc de Beaufort (27 mai 1665), celui de
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Cherchell (24 août), les bombardements 1668 et mars 1671).
anglais
d'Alger
(septembre
4. La période des deys (1671-1830). L'assassinat de l'agha Ali (septembre 1671) permet à la Taïffa des Raïs de faire une nouvelle révolution cette fois à son profit. L'autorité est exercée par les deys élus à vie par les raïs et non plus par les janissaires. La marine depuis longtemps se considère comme de substantiels et n'intervient avanque moyennant indépendante tages aux côtés de la marine turque quand la Turquie est en guerre. Le dey élu d'abord par la Taïffa le sera ensuite par la milice (1689). un pacha est encore envoyé par la Porte. Le dixième Cependant dey, Ali Chaouch, obtient du Sultan le titre de pacha (1711). Caractères
généraux
et évolution
du Deylik.
Le deylik comprend sous la présidence du Dey un conseil de cinq de membres : le kaznadji (trésorier), l'oukil el hardj (responsable la marine, des arsenaux et de la chiourme), l'agha (chef de la milice), le beyt el mal — littéralement chambre des fortunes (direction de et du recensement), enfin le khodjet el khil (recel'enregistrement veur général des impôts). Les dépenses sont exclusivement destinées à payer la solde des janissaires et à équiper les vaisseaux pour la Course. Aucun traitement n'est prévu pour les fonctionnaires qui sont payés de privilèges et non de deniers publics. Il s'agit en somme de la mise en place « d'institutions semi-féotelles qu'elles mettent dales, fondées sur les solidarités personnelles en mesure les agents du pouvoir aux différents échelons de prélever en même temps que pour l'état avec lequel ils pour eux-mêmes, se confondent — le beylik — une rente sur la production permanente du pays celle de la terre » (1). un corps extérieur au pays. Chaque L'Odjaq reste de fondation génération voit s'agglomérer à l'Odjaq des renégats, cependant que les Kouloughlis n'ont même pas droit aux biens acquis par leur père et héritent exceptionnellement de sa charge. Seuls les janissaires peuvent être mis à la tête des beyliks et même des Ouatan (circonscription Il s'agit par ailleurs d'une administration indirecte territoriale). sociales indigènes restent en place. La tribu puisque les structures kabyles (arch) menée par le cheikh, la cité des petits propriétaires gérée par la djemda. Pour étendre son autorité, cette administration doit concéder des avantages aux collectivités indigènes. Ainsi dans les Ouatan, les tribus Deira ou Ahl el Makhzen ont la charge de contrôler les tribus Ra'iya et lèvent chez elles les contributions. En temps de le concours de Mokhaz(e)ni aux guerre ces même tribus apportent (1) PRENANT, L'Algérie, passé et présent.
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fantassins de l'Odjaq. C'est le cas pour de grandes tribus et pour des confédérations religieuses ; comme les Oulad sidi Cheikh en Oranie ou les petites Zaouia. L'administration des provinces est confiée à trois beys : Constantine, Titteri (Médéa) et Oran (Tlemcen ou Mascara). Les beys sont nommés par le dey auquel ils fournissent deux fois par an le Denla part de l'impôt. Le Qaîd nouche, somme forfaitaire représentant ed Bar (ou Maire du palais) et le back kateb (secrétaire général) pardes principales tâches administagent avec le bey la responsabilité tratives. Si l'administration les circonsturque a une certaine uniformité, tances locales amènent des formes de statut régional entraînant une complexité, une décentralisation qui alourdit finalement le montant des taxes, provoque et aiguise les tensions internes et accroît le déséquilibre dans la mesure où l'état exige le versement, sous forme d'impôt, d'une part toujours plus forte de la production. Comme le souligne André Prenant (1), la décentralisation prive l'état « de la plus grande partie des fonds publics au profit, soit des communautés locales, soit des trois beyliks, soit de toute la gamme des « féodaux : chioukh (pi. de cheikh) de hameaux ou de villages kabyles (kharouba et taddert) ou de fractions nomades (douars) ; chioukh et kebar (grands) de tribus Çarch) ; qaîd, grands officiers et beys ». Les charges du beylik concernent la police des villes, l'entretien des contingents militaires chargés de collecter l'impôt et de multiples obligations, si bien que le budget des beyliks d'Oran et de Constantine est sensiblement supérieur à celui du deylik dont les dépenses officielles concernent l'entretien de la flotte et des bâtiments publics. Ainsi le produit des impôts de Constantine lors de l'entrée des troupes françaises était-il de 940130 piastres soit près d'un miïliard de francs 1955, alors que les recettes des deys d'Alger (296 000 piastres) étaient trois fois inférieures. Les impôts coraniques : concernent essentiellement l'agriculture 'achour (dîme de solidarité sur la récolte), zekkat (contributions sur le cheptel), des terres collectives) gharama (droit d'occupation ou kharadj dû seulement par les tribus Rà'ïya. Dans les villes, les conservent leurs privilèges contre certaines fournitures corporations gratuites au beylik, les citadins payent une patente (d'erreb) et des droits d'octroi de 5 à 10 % sur la circulation des biens. Les exportations sont autorisées moyennant des licences ; par ailleurs des prélèvements de 8 à 11 % sont opérés sur les produits de la course qui devient vers 1780 une entreprise nationale, les croisières privées étant interdites. Les monopoles de plus en plus nombreux sont affermés et de ce fait, pèsent très lourdement sur les échanges. Comme le souligne Prenant (2), les méthodes employées pour alimenter les finances publiques n'ont « pas peu contribué à appau(1) op. cit., p. 151. (2) op. cit., p. 155. R. CORNEVIN. — Histoire de l'Afrique Tomo II.
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vrir l'économie du pays, à accentuer la structure féodale de la société, de la Régence. L'aristocratie à affaiblir la position internationale militaire profite des richesses qu'elle accumule aux dépens des producteurs mal défendus pour affermer et étendre le mode de propriété féodal. La politique
française
vis-à-vis
d'Alger.
du xvie siècle a une considérable imporSi l'alliance franco-turque les excès tance et développe ses effets en Méditerranée occidentale, de la course algérienne, le problème des captifs et surtout l'influence une série des courants religieux à la cour de Louis XIV entraînent conduites. d'interventions aussi mal préparées que médiocrement se situent en quelque sorte sur un plan Toutefois ces interventions de mainde guerre privée, de vendetta commerciale. Elles permettent » la France très catenir l'alliance turque et cependant « dédouanent chrétiennes. tholique vis-à-vis des autres puissances de soluLe problème des captifs chrétiens reçoit un commencement tion grâce à l'activité de Monsieur Vincent (le futur Saint Vincent de Paul). Il semble à peu près démontré que sa captivité à Tunis de 1605 à 1607 est un mensonge de jeunesse. Toujours est-il que, précepteur de Gondi, général des galères royales, en 1613 des enfants d'Emmanuel il fonde en 1625 la Congrégation des Prêtres de la mission plus connus sous le nom de Laza(1632) à Saint-Lazare depuis leur installation ristes, qui vont aller en Afrique s'occuper des captifs. Monsieur Vincent garde l'immense mérite d'avoir fait entrer l'idée religieuse dans la politique française. Au temps de Mazarin, la politique barbaresque de la France est une forme de la cabale des dévots (1). Les Jésuites mènent cette politique et, malgré les réticences de Monsieur Vincent, la duchesse d'Aiguillon achète les consulats d'Alger (1646) et de Tunis (1648), qui sont confiés aux Lazaristes. Ceux-ci jouent un triple de du vicariat apostolique, rôle : titulaires ils sont les organisateurs l'église d'Afrique, ce qui implique le contrôle des Capucins italiens et des Trinitaires espagnols, les intermédiaires agréés pour le rachat des esclaves et enfin consuls. On comprend leur puissance et leur influence sur la politique française. Le premier missionnaire, M. Barreau, qui arrive à Alger en 1646, parvient à faire libérer plusieurs dizaines d'esclaves, mais il se fait emprisonner lors des succès chrétiens et aussi au cours de tractations où il se porte caution pour des aigrefins. C'est pour des motifs sordides et le plus grand profit des marchands à que Colbert enlève les consulats aux Lazaristes qui s'opposaient la contrebande d'armes. Dégagée de l'emprise catholique, la politique de Louis XIV, à partir de la paix de Nimègue (1678), est marquée par et le mépris. Elle entraîne une déclaration de guerre l'incompétence du dey à la France (18 octobre 1681). Duquesne, avec la flotte de (1) JULIENet LETOURNEAU, p. 287
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Toulon, bombarde Cherchell (25 août 1682), puis Alger (26 août-12 sepeffectué en juin 1683 provoque tembre). Un autre bombardement en représailles le meurtre du P. Le Vacher et d'une vingtaine de résidents français attachés à la bouche des canons. et l'amiral de Tourville signent En avril 1684, le dey Mezzomorto une paix « pour cent ans », mais quelques mois plus tard le nouveau consul M. Piolle et 400 résidents français sont batonnés. Le maréchal d'Estrées revient alors bombarder Alger (1er au 16 juillet), ce qui enMontmasson et traîne le supplice du Consul et des pères lazaristes Francillon. Le traité de Tourville est renouvelé mais la course reprend traité signé également pour cent ans en 1689 bientôt après, jusqu'au des armées navales. par Guillaume Marcel, commissaire La Régence d'Alger
au XVIIIe
siècle.
Il n'y a plus de grands corsaires. C'est une période de décadence. Le commerce français prospère, surtout sous la forme de « compagnie qui d'Afrique », compagnie royale sous le contrôle du gouvernement de la Calle, Bône et Collo. exporte du blé par les établissements Les deys se succèdent avec plus ou moins de relief : Hadj Mustapha, et marocaines, traite avec l'amiral vainqueur des troupes tunisiennes anglais Bing (1703), mais se fait étrangler par les janissaires. Les Espagnols sont chassés d'Oran (janvier 1708) et de Mers el Kebir (3 avril) par Mohammed Bagdach qui sera assassiné le 22 mars 1710. En 1771, le dixième dey d'Alger obtient du sultan de Constantimais cela ne suffit nople le titre de pacha et une quasi-indépendance, dimipas. En effet, les profits de la course ayant considérablement nué, ce sont les tribus de l'intérieur qui paient un impôt en céréales et en cuirs. Sous Kour Abdi (1724-1732), Oran et les Espagnols reprennent Mers el Kebir (1er juillet 1732). Baba Ali (1755-1756) fait emprisonner une année durant le consul de France, M. Lemaire. Sous le règne de Mohammed ben Otman (1766-1791), du l'expédition espagnole Lieutenant général O'Reilly échoue totalement (juillet 1774). Après deux bombardements d'Alger (9 août 1783 et juillet 1784) un traité est finalement signé avec l'Espagne (14 juin 1786). Sous le règne de évacuent définitivement Oran Haçan Dey, les troupes espagnoles (décembre 1791) et Mers el Kebir (mars 1792), cependant que les beys de Constantine et Titteri se rebellent. Durant cette période le consul de France, nommé Vallière, prend à Alger une considérable et s'entremet pour le ravitailimportance lement des armées de la République en grains, viande Française salée, cuirs ; ceci entraînera indirectement d'Alger. l'expédition Au début du xixe siècle, un sentiment commun existe, fait d'hostilité contre le régime féodal turc. Ce régime est accusé de composer avec les puissances de favoriser les maisons étrangères chrétiennes, et les hommes d'affaires juifs aux de frapper dépens des musulmans, les croyants non coraniques, d'établir contrairement au d'impôts
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Coran des inégalités entre Musulmans. La résistance intérieure prend diverses formes : extension du nomadisme, formation de grands fiefs notamment dans le Constantinois. Les Kabyles, quasi indépendants, à se gouverner entre eux. jamais complètement soumis, continuent En 1824 une révolte éclate en petite Kabylie. Les mouvements les plus importants s'organisent autour des chefs religieux. Comme dans le reste du Maghreb, les confréries se sont beaucoup développées à partir du xve siècle et leurs chefs sont souvent tentés de joindre le temporel au spirituel. en Oranie où les confrése développe particulièrement L'agitation ries savent trouver un appui dans le tout proche Maroc. Ainsi les Derde Masqaoua, rattachés à la tariqa Chadiliya du Maroc, s'emparent cara en 1814. Si la nation tunisienne s'est véritablement constituée au xviie siècle et surtout au xviiie, les linéaments étatiques de la Régence d'Alger sont beaucoup moins nets, même si la permanence relative des frontières au xviiie siècle et les relations internationales lui donnent les apparences de l'État. Par ailleurs, le caractère musulman de turc maintient le plus grand nombre de confréries dans l'occupant une attitude de discipline. En 1830, la structure administrative était vermoulue. Certes, le mais en même français précipita son effondrement débarquement temps la perspective de la guerre sainte (Jihad) contre l'occupant chrétien polarisera les mouvements de résistance diffus sans pour autant créer un véritable nationalisme algérien qui n'apparaîtra véritablement qu'au xxe siècle. III. DE LA RÉGENCE DE TUNIS AU PROTECTORAT (1574-1881) FRANÇAIS En reprenant Tunis (1574), les Turcs mettent fin au royaume hafçide qui existait depuis 1236 et, depuis plusieurs décennies, se survivait difficilement. i. Du Pachalik
au Beylik.
La Régence de Tunis est un pachalik dont l'organisation est analogue à celle d'Alger avec une milice turque aux ordres d'un agha, une taïffa de raïs et des contingents makhzen chargés de collecter l'impôt. L'odjaq comprenait en 1590 quarante compagnies de cent hommes commandées par des officiers, que l'on appelait dey (= oncle maternel). Ce sont ces deys qui font la révolution militaire de 1590, laquelle aboutit au massacre des Bouloukbachi (= capitaines) constituant le divan. Les 40 deys élisent l'un d'eux pour exercer le commandement de la milice. Ce dey deviendra bientôt le chef du gouvernement. Othman Dey (1590-1610) réduit le rôle du divan à celui d'une
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chambre d'enregistrement ; il s'appuie sur le chef de la marine (Qabtân) des troupes makhzen et soumet les tribus et sur le bey commandant rebelles. Il laisse un pays d'autant plus prospère qu'il a pu accueillir en 1609 près de 80 000 Moriscos expulsés d'Espagne. L'aristocratie fut installée en des quartiers spéciaux et industrielle commerçante cependant que les paysans, qui avaient si bien mis en oeuvre les Huerta transformèrent les terres riveraines de d'Andalousie, complètement la Medjerda. Son gendre Youçof (1610-1637) protège la course. Il arabes et les incursions des Algériens. lutte contre les insurrections Hamouda bey (1637-1663) est déjà plus puissant que le pacha. Au xviie siècle, l'autorité des beys s'accroît du fait de leur autorité sur les tribus et leur contrôle des ressources fiscales. Le bey Mourad sa charge (1612-1631) obtient le titre de pacha et le droit de transmettre à son fils Hamouda (1631-1659) qui accroît son prestige en rattachant Djerba au pachalik de Tunis. Mourad bey (1659-1675) s'installe au palais du Bardo. Les vingt ans de guerres civiles qui suivent sa mort aboutissent au massacre de tous ses descendants par Ibrahim, l'agha des spahis, qui devient bey (1702), puis dey avant de recevoir du sultan le titre de pacha. 2. La Tunisie Hoçaïnide
jusqu'en
1835.
Ibrahim vaincu et pris par les troupes d'Alger et Tripoli (1705), Hoçaïn ibn Ali, agha des spahis, rallie les fuyards, s'enferme dans Tunis et se proclame bey. En 1710, Hoçaïn fait assurer par une assemblée générale la succession de sa charge à ses descendants. Le règne à une remarquable d'Hoçaïn correspond prospérité économique renforcée. Des traités sont une sécurité intérieure accompagnant conclus avec la France (1710 et 1728), l'Angleterre (1716), l'Espagne (1720), la Hollande (1728) et l'Autriche (1725). En 1729, des désordres éclatent. Le neveu d'Hoçaïn, Ali Pacha, évincé du pouvoir, reçoit l'appui des Algériens pour attaquer les fils d'Hoçaïn. Le fils d'Ali parvient à prendre Kairouan (1740). Ali Pacha (1740-1756) manifeste une ombrageuse indépendance, rompant avec la France (1741) qu'il soupçonne les révoltes. d'encourager Son règne est marqué par la création de nombreuses écoles. Les Algériens profitent de la révolte de son fils pour envahir la Tunisie, décapiter le bey et proclamer à sa place Mohammed, un fils d'Hoçaïn. Mohammed rétablit la paix dans la Régence. Son (1756-1759) frère Ali Bey (1759-1782) reconnaît aux Français le monopole de la pêche du corail sur les côtes, ainsi que le droit d'ouvrir un comptoir à Bizerte. Hamouda Bey (1782-1814), son fils, résiste à l'emprise européenne. Il rompt avec Venise qui bombarde Sousse (1784) et détruit la Goulette (1785). Le règne d'Hamouda Bey correspond à l'épanouissement du commerce français qui se développe surtout grâce aux caravaneurs provençaux dont le cabotage se développe. Mahmoud Bey (1814-1824), fils de Mohammed bey, est contraint par les puissances européennes de supprimer l'esclavage (1819), il
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signe la paix avec Alger (1821), mais plus du bout des lèvres que du fond du coeur. La destruction par la flotte française de la flotte tunisienne à Navarin n'entraîne Aussi qu'un bref sentiment d'hostilité. de 1827-1830 le bey Hussein (1824lors de la tension franco-algérienne 1835) reste neutre et même, en raison des bonnes relations entretenues avec le consul Mathieu de Lesseps, il signe le 8 août 1830 un traité aux autorités franavec la France, cependant qu'il fait transmettre sur la situation intérieure de l'Algérie. çaises des renseignements 3. La période des réformes
et de la diplomatie
triangulaire.
La conquête de l'Algérie et surtout la prise de Constantine modifient les conditions locales de la Tunisie qui vivait jusqu'asensiblement lors en symbiose avec l'Algérie orientale. La frontière réduisant les des puissances toujours plus importante échanges et l'intervention en Méditerranée les structures européennes changent complètement de la Tunisie. Pendant ans la Tunisie économiques quarante-cinq où la Turquie souhaite réinstaller est le siège d'un jeu diplomatique son autorité à Tunis, cependant que la France protège le Bey contre les tentatives de la Porte que l'Angleterre le préserve contre sont une protection française trop étroite. Ces bonnes dispositions maintenues sous le Bey Ahmed (1837-1855). Très impressionné par les réformes de Méhémet Ali, il fait réorganiser son armée à l'européenne par une mission militaire française. Un effort de modernisation est entrepris. Sur le plan social, le Bey supprime l'esclavage et met fin au statut diminué dont souffrent les israélites tunisiens. La Tunisie évolue rapidement. La période des réformes s'ouvre avec Mohammed Bey (1855-1859), souverain traditionnaliste qui, sous la pression du Congrès des Puissances réuni à Paris après la guerre de Crimée, octroie le 10 septembre 1857 à ses sujets un pacte fondamental inspiré des chartes mal accueilli ottomanes de 1839 et 1856. Ce pacte fondamental, en Tunisie, est l'occasion pour les Français d'obtenir de nouveaux avantages. Sous Mohammed Sadok (1859-1882) les réformes sont poursuivies (Conseil municipal décrets de Tunis, loi sur le recrutement, sur l'organisation des ministères), aboutissant à la Constitution de 1861 qui organise en Tunisie une monarchie tempérée par un Conseil suprême législatif de 60 membres nommés par le Bey. C'est une expérience sans précédent. Mais cette assemblée s'avérant peu docile aux impératifs que européens est mise en sommeil d'autant la situation financière s'aggrave. En 1863 un emprunt de 37 millions est lancé par la maison Erlanger. Tenaillé par les échéances, le Bey double l'impôt personnel (Mejba), ce qui entraîne la révolution de 1864 animée par Ali Ben Ghedahem, notable des Majeurs, qui insdu talle des gouvernements dans les villes révoltées provisoires Sahel. Cette révolte a un caractère national par le fait que les chefs
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étrangère par des appels expriment leur hostilité à l'intervention au Sultan. La révolte échoue en raison des dissensions entre tribus (1). viennent Aux ruines de la révolte et de la répression s'ajouter les calamités : sécheresse, famine, choléra. Après avoir contracté un second emprunt (1866), le Bey est acculé à la faillite et contraint (5 juillet 1869) d'accepter une Commission financière internationale chargée de percevoir les revenus de la Régence et de payer ses dettes. ne peuvent C'est la mise en tutelle. Mais les moeurs administratives des impôts ne se fait être réformées, si bien que le recouvrement guère mieux qu'auparavant. 4. De l'intervention
européenne
an protectorat.
l'avenir de l'influence Le contrôle anglo-franco-italien présume en 1871 de Constanfrançaise. Le Firman rapporté par Khaireddine turque en Tunisie, mais comme ni tinople réaffirme la suzeraineté la France, ni l'Italie n'en reconnaisse la validité et que la Turquie a d'autres cette mesure reste lettre préoccupations par ailleurs, morte. La disgrâce de Mustapha Khaznadar et l'arrivée au pouvoir de Khaireddine le rétablissement de la situation intépermettent rieure de la Tunisie : il organise l'administration des biens Habous, des études réorganise la justice, le statut du métayage, l'organisation à la grande mosquée, la création du collège moderne Sadiki où seront formées les élites nationalistes, mais Khaireddine tombe en 1877. Il est remplacé par Mustapha moins hostile Ben Ismaïl beaucoup aux Français. En 1878, lors de la Conférence de Berlin, lord Salisbury pour avoir Chypre garantit à la France les mains libres en Tunisie. Dès lors le duel devient franco-italien, c'est une suite de querelles entre le Consul français Roustan et le Consul italien Maccio aussi bien des de l'Enfida pour l'affaire des terrains que pour le monopole télégraphes ou le chemin de fer Tunis-La Goulette. Aussi, prétextant au début de 1881 une incursion de Kroumirs en territoire algérien, Jules Ferry, le 4 avril, obtient du parlement les crédits nécessaires une expédition devant mettre pour envoyer contre les Kroumirs à l'abri « d'une façon sérieuse et durable la sécurité de l'avenir de l'Algérie ». Trois semaines après le début des opérations, les troupes françaises arrivent aux portes de Tunis et imposent au Bey la signature du traité du Bardo. Quelques semaines plus tard, alors que les troupes françaises, ont regagné la métropole, une insurpour des raisons... électorales, rection populaire se déclenche nécessitant une campagne plus importante. La fin du soulèvement coïncide avec l'ère du protectorat. (1) MMEB. SI.AMA,La révolte de 1864 en Tunisie, Diplôme d'Études Supérieures, La Tunisie, p. 26. dactylographié, cité par ANDRÉRAYMOND,
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IV. TRIPOLI Du début du xvie siècle à la guerre italo-turque (1912), Tripoli ans de domination va connaître chrétienne, puis après quarante la conquête de Dragut (1551), une autorité turque plus nominale au xviie siècle par les Sakizli originaires de que réelle marquée Chio. De 1715 à 1835 ce sera le siècle des Karamanli indépendants de la Porte avant que l'autorité turque ne s'exerce à nouveau. Nid de corsaires au débouché du commerce saharien, Tripoli reçoit de temps à autre aux xviie et xviiie siècles la visite des escadres des captifs. Au début du soucieuses du traitement européennes vers le xixe siècle, Tripoli devient la grande base d'exploration Soudan nigérien et le Tchad, que dans la deuxième cependant moitié du xixe siècle s'affirme l'autorité d'une nouvelle et xénophobe la Senoussiya. confrérie musulmane, i. Les quarante
ans de garnison
chrétienne.
des beys hafçides de Tunis en Libye ne fut marLa domination En 1510 la côte libyenne important. quée par aucun événement est prise par Pedro de Navarro dans la vaste croisade méditerranéenne orchestrée par le cardinal Ximenès de Cisneros. En 1530 cette conquête est donnée en même temps que Malte aux chevaliers de de Jérusalem pour les dédommager de la perte de Rhodes. Saint-Jean En dehors des frères de l'ordre, Tripoli se trouve défendue par Bientôt Mourad Agha, venu de Constantinople des mercenaires. à Tadjoura, les incursions, si bien que, le et installé multiplie 13 août 1551, après un siège de huit jours, Dragut, accompagné de sont Sinan Pacha et Mourad Bey, prend la ville. Les mercenaires massacrés mais le gouverneur Gaspard de Valier et les autres chevaliers sont autorisés à gagner Naples. turque et l'oligarchie des janissaires. Dragut transforme Tripoli en base de corsaires et devient en deux Tué au siège de Malte (1565), il ans une puissance méditerranéenne. fut enterré dans la mosquée qu'il avait fait construire à Tripoli. Tripoli demeure entre les mains d'une oligarchie de janissaires où se marque l'influence des Kouloughlis avec son divan, son administration aux ordres du Dey et son armée commandée par le Bey. La souveraineté turque, d'ailleurs lointaine, trouve que les interventions coûtent cher. Aussi, lorsque Tripoli se révolte en 1589 on avec cinq galères à l'expéoffre le pachalik à qui pourra participer dition ; Haçan Veneziano, ancien khalifa d'Eudj Ali chassé en 1580 d'Alger, emmène finalement 35 galères. Des corsaires originaires de Chio gouvernent Tripoli au milieu du xviie siècle : Mehemmed Pacha Sakizli (1632-1649) remplacé par son gendre (1645-1669). 2. Dragut,
la souveraineté
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La piraterie et la présence de nombreux esclaves chrétiens entraîde l'escadre de Reuilly démonstration nent bientôt une première 1681 imposé en 1671, puis le traité du 27 novembre d'Humières par Duquesne à Mustapha Reis. Les violations de ce traité provoquent d'Estrées de Tripoli par l'amiral le bombardement qui obtient la libération des esclaves traité d'un nouveau prévoyant signature d'une amende à la France. Après l'emprieuropéens et paiement sonnement du consul de France à Tripoli, un nouveau bombardement (1692) entraîne un nouveau traité. 3. Les Earamanli
(1715-1835).
En 1711, Ahmed Bey Karamanli à la tête des soldats arabes renverse le pacha de Tripoli et massacre la garnison. Quatre ans plus tard, il se sépare de la Turquie. Il encourage la Course et nous sommes sur cette période grâce au chroniqueur Ibn assez bien renseignés Pacha Galbun qui écrivit l'histoire de Tripoli (1731-32). Muhammad Karamanli (1745-1754) succède à son père et réprime une révolte d'Albanais (1752). Un nouveau traité, signé entre la France et Tripoli le 4 juillet le 2 août 1729 et comporte 1720, est renouvelé après bombardement l'installation de consuls à Derna et Benghazi, ainsi que la livraison des colonnes de marbre de Leptis Magna qui vont orner le maîtreautel de l'ancienne des Prés. De nouveaux église de Saint-Germain traités franco-tripolitains seront signés le 30 mai 1752 et le 12 décembre 1774. Ali Pacha de peste connaît (1754-1793) l'effroyable épidémie et la famine de 1784-85. Il est chassé le 30 juillet 1793 par Ali Borghoul, un aventurier qui avait eu à Alger des fonctions officielles et qui, ayant armé plusieurs bateaux avec quelques centaines de mercenaires grecs, prend la ville. Ali Pacha réfugié à Tunis revient en février 1795 avec Hamouda Ali BorPacha, faisant rembarquer ghoul. Ahmed II Pacha se voit remplacer en juin 1795 par son frère Yousouf qui va régner jusqu'en Pacha ravitaille 1832. Yousouf la base française de Malte durant (1798). l'expédition d'Egypte Toutefois la force de l'escadre anglaise contraint Yousouf à se prononcer contre la France (janvier 1799). Bien que l'amiral Ganteaume ait échoué dans sa tentative à Derna le 23 mars de débarquement 1801, un accord est signé le 19 juin 1801 par l'intermédiaire du Maltais Xavier Nandi qui prévoit le ravitaillement de l'armée d'Egypte par les pistes du désert. Les positions sont assez fortes en ce début de siècle françaises qui voit Tripoli devenir pour la Royal African Society une base essentielle de l'exploration de l'Afrique noire. Par contre, de 1803 à 1815, Tripoli se trouve en conflit avec les Etats-Unis. Les décisions prises au Congrès de Vienne contre l'esclavage amènent lord Exmouth devant Tripoli.
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Nous avons vu également (1) l'importance du comparticulière merce transsaharien. Tripoli situé entre la mer et le désert, sans ne peut être qu'un marché qui s'est particulièrement arrière-pays, du Soudan nigérien après développé à la suite de l'effondrement la conquête marocaine du royaume Sonrhay. Nous avons montré des états haoussa pour l'artisanat et la nécessité des l'importance leur approvisionnement en soie brute de Tripoli, en soieries lyonnaises, perles ou verres de Venise. En échange, ces régions expédiaient des esclaves engraissés dans le Fezzan et vendus dans tout l'empire turc. Yousouf Pacha doit faire face à la rébellion d'un neveu et abdiquer en faveur de son fils (août 1832), mais les incursions des nomades et de multiples pillages rendent la situation extrêmement précaire si bien que les Turcs débarquent le 27 mai 1835 et installent l'autorité de Constantinople qui s'exercera jusqu'à la conquête italienne de 1912. 4. La domination
turque
(1835-1912).
Les contingents turcs viennent aider à réprimer l'insurrection du Fezzan qui a rompu en 1831 avec Tripoli. Les deux chefs de l'insurrection sont écrasés : Rouma à Yffren (1840), Abd el Dehlich à El Baghla (1842). se développe et l'on voit Cependant le commerce transsaharien en 1860 El Hadj Mohammed-Naçouf, commerçant de Tripoli, revenir avec une cargaison de plumes d'autruche dont c'était alors la mode en Europe. Les profits sont énormes (125 francs la livre de petites marchands plumes noires), si bien qu'il fait école et que d'astucieux de Zinder coulent du plomb dans le conduit intérieur des pennes... ce qui aboutit — la supercherie étant découverte — à la ruine de Durant cette période le gouvernement et les plusieurs marchands. marins turcs se consolent en ces régions d'Afrique de leurs déboires européens. Ainsi en 1857 une attaque navale de Tahir Pacha échoue devant Tunis. Huit ans plus tard les forces turques essaient de pénétrer en Tunisie par l'intérieur. Lors du Congrès de Berlin en 1878, la Turquie, mécontente des décisions prises, laisse fomenter une insurrection senoussiste dans le sud tunisien. Le fondateur de la Senoussiya est né en 1792 au douar Torch près de Mostaganem. Après des études à Fès il part à La Mecque en passant contre les réformes européennes par Le Caire d'où ses prédications de Méhémet Ali le font expulser. Son séjour à La Mecque (1835) lui fait découvrir une nouvelle voie (tariqa) qu'il prêche en Cyrénaïque, dans la zaouia du djebel Akhdar à Djeraboub (1843) avant de s'installer (1855) dans le désert libyque à 300 kilomètres au sud de Tobrouk. Après sa mort, son action est reprise par son fils aîné, Cheikh el Mahdi, qui mène(1) Supra, p. 236.
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hostile aux chrétiens dans l'ensemble du ra une action violemment Sahara oriental. de 1873, se en vertu des Capitulations Cependant des Italiens, sont établis en Libye où fonctionnent plusieurs écoles. italien Des incidents ont lieu parfois, si bien que le gouverneur 1911 ; la guerre le 25 septembre saisit ce prétexte pour protester est déclarée le 3 octobre, Tripoli est bombardée le 5, deux mille marins y débarquent qui prennent la ville le 11. Un décret du 5 novembre italienne sur la Libye. Le traité de 1911 proclame la souveraineté italienne sur Lausanne du 18 octobre 1912 reconnaît la souveraineté la Cyrénaïque et la Tripolitaine. V. LE MAROC Le Maroc reste en dehors de la conquête turque et le xvie siècle contre les Portugais est marqué par la lutte du peuple marocain sur le déclin et par la querelle du nord contre le sud, des Wattasides contre les Saadiens qui vont prendre le pouvoir. i. Les Saadiens. Les Saadiens venus d'Arabie au xive siècle, sans doute un peu avant leurs cousins les Chorfa alaouites, étaient considérés comme descendants du Prophète au moment de leur ascension. Ils bénédu Sous, ficient du sursaut d'indignation religieuse des populations de l'Anti-atlas et du Draa devant les incursions portugaises, si bien que l'un d'eux, Mohammed ibn Abd er Rahman, est désigné comme chef de guerre en 1511. Ses fils transforment Taroudant en base fortifiée puis s'installent à Marrakech (1525). Bien qu'ils aient fait acte d'allégeance aux Wattasides de Fès, le sultan marche contre eux, se fait battre (1537) et traite. La prise d'Agadir (1541) et l'évacuation par les Portugais consolident leur de Safi et d'Azemmour réputation ; bientôt le chérif Mohammed el Mahdi parvient à prendre Fès et à en chasser la dynastie wattaside (1549). Malgré le soutien des Turcs qui reprennent sur le trône Bou Hassoun Fès et remettent le Wattaside. Ce dernier est tué si bien que les Saadiens sont maîtres du Maroc. Les premiers Saadiens. Hommes de guerre, hommes rudes, les Saadiens sont mal à l'aise dans le cadre raffiné de Fès, aussi Mohammed ech Cheikh transfèret-il la capitale à Marrakech qui, après trois siècles d'éclipsé, retrouve son rang. Pour entretenir sa cour et son armée il doit étendre aux des montagnards l'impôt foncier (kharaj). Ces mesures provoquent, rébellions durement réprimées. Il n'hésite pas à rechercher l'alliance réussissent espagnole pour lutter contre les Turcs qui, finalement,
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à le faire assassiner (1557). Comme le soulignent Julien et Le Touret élevé au neau (1), « ce chef, né du mouvement maraboutique pouvoir pour mener la guerre sainte, n'avait pas hésité, lorsqu'il et même à avait buté sur l'obstacle turc, à brider les marabouts faire cause commune avec les Espagnols contre les Turcs ». Son fils Moulay Abd Allah el-Ghalib bi-llah (1557-1574) lui succède et continue à rechercher contre les Turcs l'alliance des Espagnols il auxquels il cède le port de Badis (Vêlez) en 1564. Parallèlement attaque les Portugais mais échoue devant Mazagan (1562), cependant que le commerce anglais est encouragé. Sur le plan intérieur il lutte contre les groupements religieux qui supportent mal sa politique européenne. Il vient facilement à bout des Qadiriya et des Cheraga d'origine algérienne, mais doit composer avec des familles maraboutiques du Maroc central. Mohammed el Motawakkil succède à son père alors que ses oncles obtiennent du sultan Mourad III de l'argent et des hommes pour conquérir le Maroc. En 1576 Abd el Malik débarque, pourchasse son neveu qui, après avoir tenu quelques mois dans le sud, se réfugie en Espagne d'où il gagne le Portugal. On sait dans quelles conditions est organisée l'expédition du roi Sébastien et comment une armée de 20 000 hommes peu entraînés, dont seulement quelques centaines de Marocains restés fidèles à El est anéantie le 4 août 1578 par cinquante mille MaroMotawakkil, cains disposant d'une forte cavalerie, animés par l'esprit de la guerre sainte et qui bénéficient de la crue de l'oued-el-Makhazin où se noient contingents chrétiens, el Motawakkil et don Sébastien. d'importants Abd el Malik très malade a réussi par un prodige d'énergie à, lancer ses troupes à l'attaque, mais est mort avant la décision. La bataille d'Alcaçar Quivir ou Ksar el Kebir connue des historiens arabes sous le nom de bataille de l'oued el-Makhazin est également appelée bataille des trois Rois. Elle pourrait aussi bien s'appeler la bataille des quatre rois, puisque, en dehors du souverain de Portugal, d'El Motawakkil et d'Abd el Malik, tous trois morts dans cette journée, il faut compter Aboul Abbas Ahmed, proclamé roi sur le champ de bataille. Al Mançour
le plus grand des Saadiens
(1578-1603).
mondiale de la mort de Sébastien a déjà été soulignée L'importance mais, sur le plan marocain, les conséquences ne sont pas moins imEn effet, Aboul Abbas Ahmed, frère d'Abd el Malik, qui portantes. est proclamé sultan sur le champ de bataille, prend le nom à'Al Mançour (= le victorieux). Il bénéficie de l'immense prestige de la victoire qui lui apporte un énorme butin et les rançons de milliers de captifs chrétiens. Dès lors, le Maroc victorieux d'un Portugal au sommet de sa puissance, est considéré avec respect par les nations d'Europe dont (1) Op cit.,p. 209.
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sont fastueusement les ambassadeurs reçus à Marrakech au palais du se disputent l'alliance d'Al Mançour, les Badi. Anglais et Espagnols de la cité de Londres échangent volontiers leur drap commerçants Il y a même un contre l'or, le sucre, le cuir et le salpêtre marocains. lors de la grande projet de Barbary Company qui avorte. Cependant, menace espagnole, la reine Elisabeth essaie de nouer une alliance aveo marocaine à, l'égard de l'EspaTurcs et Marocains. Malgré l'hostilité gne, Al Mançour préfère traiter avec Philippe II qui, en échange de sa neutralité, accepte de céder Arzila (1589). le Pour subvenir aux somptueuses dépenses de ses constructions, celui du sucre en particulier sultan crée des monopoles commerciaux, les impôts et qu'il afferme à, des juifs ou des chrétiens. Il augmente lance la fameuse expédition contre le royaume Sonrhay de Gao (1) qui d'or et d'esclaves noirs, et lui perlui rapporte une grande quantité met d'ajouter à, son nom celui d'Al Dehbi (= le Doré). des l'insurrection Sur le plan intérieur, Al Mançour doit combattre Branès (1595-96) et plusieurs petits mouvements. On lui doit l'ordu Maroc, laquelle demeurera pratiquement ganisation administrative français. inchangée jusqu'au protectorat de tribus administrées par L'empire chérifien est une fédération un organisme officiers, central, le Makhzen, comportant ministres, de palais et tribus militaires (tribus guich), gouverneurs, corporations dispensées d'impôt et pourvues de terres. Il y a dès lors deux Maroc, le bled el Makhzen comprenant musulles terres de la communauté mane soumises à l'impôt foncier, occupées par les tribus arabes et le bled es Siba groupant les tribus montagnardes pour l'immense majorité berbères. Les tristes événements la fin du règne sont attribués qui marquent au caractère sacrilège de l'expédition du Soudan lancée par un musulman contre d'autres musulmans. La peste, sept années durant (15961603), ravage le Maroc et la mort d'Al Mançour ouvre une ère de troubles qui va durer jusqu'en 1659. La décadence saadienne
et les nouvelles forces.
A la mort d'Al Mançour, trois de ses fils se disputent le pouvoir : Moulay Zidân proclamé à Fès, Abou Faris reconnu à Marrakech, et Mohammed ech Cheikh ol-Mamoun que son père a fait emprisonner peu avant en tride disparaître. Un jeu guerrier tragique angle va successivement opposer les frères à deux contre un jusqu'à l'assassinat d'Abou Faris (1610) par Abd Allah fils El Mamoun. Ce dernier s'empare des Espagnols de Fès grâce à la complicité qui reçoivent Larache en contrepartie. Ainsi, comme au xve siècle, le Maroc est divisé en deux royaumes dont : Fès et Marrakech l'autorité croissante va s'amenuisant en raison de l'importance des marabouts et de l'immigration massive des Moriscos expulsés d'Espagne. (1) Cf. supra, p. 238.
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détiennent la réalité du pouvoir. Ceux des régions Les marabouts sur les Arabes tout puissants au sud de l'Atméridionales s'appuient donc plus dangereux, cherchent las, ceux du nord moins anarchiques, à noyauter les Berbères Sanhaja du Moyen Atlas et à refaire l'unité du Maroc à leur profit comme les Almohades l'avaient faite à partir des Maçmouda du Haut Atlas. La zaouia de Dila près de Khenifra sert de base pour lutter contre les Saadiens battus en 1640 et 1641. Les Dilaïtes occupent Fès. Ils entrent bientôt en conflit avec les Chorfa du Tafilelt. Après la révolte des Moriscos (1568) ceux-ci ont été expulsés du en noyaux royaume de Grenade, non d'Espagne, mais ils demeuraient d'où la décision prise entre 1609 irréductibles, jugés inassimilables, et 1614 par Philippe II d'expulser à la fois les juifs et les musulmans. Si les juifs viennent en petit nombre au Maroc, les musulmans viennent" s'installer notamment à Tétouan et Chechaouen, mais surtout du Bou Regreb où ils constituent à l'embouchure à Rabat et Salé de véritables de corsaires. Ces Moriscos ont à l'égard du républiques Maroc des sentiments d'une part il détestent les contradictoires, chrétiens d'Espagne qui les ont chassés, d'autre part ils s'intègrent mal dans un système socio-économique fondamentalement différent de ce qu'ils ont connu dans la péninsule ibérique. Ils introduisent une civilisation citadine et andalouse (hadriya) qui a laissé des traces jusqu'à nos jours dans le domaine des arts et de la musique. En 1627 devant l'anarchie ils constituent du Bou à l'embouchure marocaine, Regreb une république oligarchique. 2. Les Alaouites
et l'oeuvre des premiers sultans
(1666-1822).
une famille de chorfa haçaniens Après un demi-siècle d'anarchie, de Haçan, lui-même fils d'Ali, gendre de Mahomet, d'où (descendants le nom d'Alaouites) va rétablir l'ordre. Fixé au Tafilelt au début du xme siècle, cette famille vit depuis plusieurs générations dans l'estime générale et c'est seulement lors des menaces dilaïtes que les Filaliens mettent à leur tête Mohammed ech Chérif (1631) qui parvient difficilement à contenir les puissants rivaux. Son fils Moulay Mohammed, choisi comme chef en 1636, chasse la garnison dilalte du Tafilelt (1638) puis rallie certaines tribus du haut Guir, prend Oujda, razzie Tlemcen et pousse jusqu'à Laghouat si bien que les Turcs traitent pour délimiter à la Tafna sa zone d'influence. Appelé en 1649 à Fès pour défendre la ville contre des Dilaïtes il ne peut s'y maintenir et retourne au Tafilelt. Les premiers
sultans.
En 1659 son frère Moulay er Rackid part chercher fortune dans la zone trouble du Maroc oriental, se constitue une troupe et finit dans la plaine des Angad (1664) par infliger à Moulay Mohammed une défaite où ce dernier trouve la mort.
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Deux ans plus tard (6 juin 1666) il est proclamé sultan. De 1666 à 1670, Moulay Rachid s'empare de la presque totalité du Maroc. Il allait réprimer la révolte d'un neveu lorsqu'il meurt accidentellement à Marrakech (1672). de Moulay Ismaïl qui monte sur le trône est le contemporain Louis XIV. Henri Terrasse le décrit comme un « métis saharien d'une pas moins de prodigieuse vitalité ». Son harem, dit-on, ne comptait 700 enfants. De moeurs simples et rudes 500 femmes et on lui attribuait il se voulait champion de l'islam et n'hésita pas à écrire à Louis XIV et Jacques II pour qu'ils se convertissent. Après la longue période de troubles que le Maroc a traversée, Moulay Ismall veut d'abord l'armée grâce à 40 000 esclaves rétablir l'ordre. Aussi réorganise-t-il noirs ou abids groupés en soixante seize Qaçba (forteresses) disséminées à travers le territoire. Leur fonction varie suivant qu'elles contrôlent ou la sécurité les zones de dissidence, les voies de communications d'avoir ces soldans les villes. Ce Saharien métis a compris l'intérêt dats noirs, neutres a priori par rapport aux querelles de clans berbères ou arabes. Comme le recrutement à travers le Sahara demeurait aléatoire, le sultan organise près du Sebou, entre Meknès et Salé, à Mechra-er-Remel, une sorte de « dépôt de remonte » (1) où l'on « fabrique des négrillons » militaire puis se voient à quinze ans qui reçoivent une instruction mariés pour assurer la relève sur place des contingents d'abids fondus au combat. Il reprend la guerre sainte, assiégeant les présides de Melilla, Ceuta, du Penon de Vêlez et du Penon d'Alhoucemas, ainsi que la lutte contre les Turcs en accord avec le bey de Tunis, mais il ne peut prendre l'avantage qu'à l'occasion des révoltes d'Alger. exisSur le plan extérieur d'importantes relations commerciales tent avec l'Angleterre qui importe du drap et des cauris de Guinée, la Hollande, l'Espagne. La position française prépondérante à la fin du xviie siècle est compromise par l'orgueil, la brutalité et les maladresses de Louis XIV (2). Cupide et féroce, Moulay Ismaïl impose à ses sujets soumis par la terreur, une fiscalité écrasante pour financer la construction de Meknès dont l'enceinte fortifiée ne mesure pas moins de vingt-cinq kilomètres. Mais l'absence de réformes constructives se fait sentir au lendemain de sa mort (1727). L'arbitrage 1757).
des abids et les trente années d'anarchie
marocaine
(1727-
Dès la mort de Moulay Ismaïl, ses fils se disputent, les marabouts la s' agitent, les Turcs deviennent agressifs. Les abids représentent seule force organisée. Ils prennent les fils à l'essai successivement de leur ancien maître Moulay Admed ed Dehbi, Abd el Malik, Moulay (1)JULIENet LETOURNEAU, cit., p. 230. op. (2) Ibid, p. 234.
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L'ÉVOLUTION DU MAGHREB
Abd-Allah, Moulay el Arej... etc.. Moulay abd Allah exerça le plus longtemps une autorité précaire.
fut celui qui
Sidi Mohammed ibn Abdallah (1757-1790) qui a fait ses preuves à la tête de la région de Marrakech rétablit l'ordre. L'armée est reconstituée : le corps des abids, très éprouvé par les trente années d'insécurité, est remplacé en partie par des haratin des oasis et des tribus arabes de la plaine. Il sait agir sur les tribus berbères grâce notamment à rallié à la monarchie. l'écrivain Es-Zayyani Il réussit à chasser les Portugais de Mazagan (1769) mais échoue avec la France. devant Melilla. Il renoue des relations diplomatiques d'un autre C'est au négociant marseillais Salva, après la tentative Marseillais, J. E. Rey, que revient le mérite d'avoir fait aboutir le traité signé en 1767 par le comte de Breugnon (1). La même année (28 mai), un traité avec l'Espagne est d'autre part conclu qui reconnaît que la souveraineté chérifienne ne s'étend pas au sud de l'Oued Noun. Le nouveau Sultan développe le commerce avec l'Europe et fonde la ville de Mogador tracée par l'avignonais Cournut qui draine le commerce transsaharien. Les produits du sud pouvaient en effet difficilement atteindre le littoral méditerranéen en raison de l'insécurité interne du pays. C'était l'amorce d'une relance économique à travers l'activité renouvelée des ports ; malheureusement le zèle tatillon des amin des Douanes éloigne le commerce européen. Sur le plan religieux Sidi Mohammed ibn Abdallah, séduit par la rigueur du Wahhabisme, répète volontiers : « je suis malékite de rite et wahhabite de dogme ». A sa mort recommence l'anarchie. Moulay el Yazid (1790-92), qui de s'est déjà signalé du vivant de son père par plusieurs tentatives rébellion, se rend coupable d'exactions. Alors qu'il met le siège devant Ceuta, l'un de ses frères, Moulay Hicham, est proclamé sultan à Marrakech. Un autre, Moulay adb er-Rahman, est maître de Tafilelt. Le nouveau sultan, qui reprend Marrakech, est tué lors d'un retour offensif de Moulay Hicham (1792). Moulay Sliman (1792-1822) est alors proclamé sultan de Fès mais doit successivement triompher de chacun de ses frères rebelles : Moulay Moslama au nord de Fès, puis les deux autres, Moulay Hicham et Moulay el Hosaïn qui se disputent le sud. Marrakech est occupé en 1796. Le sultan, ayant rétabli son autorité sur le makhzen, maintient l'ordre par d'incessantes tournées de police. Une violente insurrection va, à partir de 1811, ensanglanter le moyen Atlas soulevé par le berbère Abou-Bekr Amhaouch qui inflige dans le Tadla une terrible défaite au sultan. de bonnes relations avec les Turcs et Moulay Sliman entretient les Européens. Il s'engage même en 1817 à supprimer la Course dans son royaume. Mais interdiction est faite aux Marocains de voyager Marseille el la Colonisationfrançaise, p. 153-155. (1) MASSON,
L'ÉVOLUTION DU MAGHREB à l'extérieur. difficilement Tanger.
433
Les voyageurs de plus en plus européens se déplacent ils sont installés à ; quant aux agents diplomatiques
3. Le Maroc entre la modernisation
et les convoitises
européennes.
Moulay A bd er-Rahman (1822-1859) garde une prudente neutralité lors de l'invasion française de 1830 en Algérie, mais la fuite d'Abd el Kader au Maroc, un incident de frontière en mai 1844, l'ultimatum au conflit marqué par la bataille de l'Isly et de Guizot aboutissent le bombardement de Mogador et Tanger. Les protestations anglaises mettent bientôt fin à la guerre. La convention de Lalla Maghnia délimite la frontière algéro-marocaine jusqu'au Sahara « puisque la terre ne s'y laboure pas ». Ce tracé arbitraire sera la source de multiples contestations. C'est durant cette période que le Makhzen s'organise avec ministres de la guerre, des finances, de la justice, des affaires étrangères (ou « ministre de la mer ») et surtout le Grand Vizir (ministre de l'intérieur). Les finances sont alimentées par des impôts variés : dîme les récoltes, le capital, droits de douane. coranique sur les troupeaux, Comme le souligne Vincent Monteil (1) : « La distinction classique entre les régions du Maroc qui payaient l'impôt et celles qui le refusaient ne tient pas compte du fait que les montagnards « dissidents » reconnaissaient l'autorité religieuse du sultan et qu'en cas de danger extérieur ils fournissaient deniers et soldats à leur souverain ». Sidi Mohammed (1859-1873) voit les influences étrangères se développer sur le Maroc. Ainsi la diplomatie anglaise qui a signé (1856) avec le sultan un traité d'amitié, de commerce et de navigation contraint les Espagnols à signer un traité de paix et à évacuer Tétouan qu'ils viennent de conquérir. En 1862, la Belgique signe un traité de commerce et, en 1863, la France obtient un règlement relatif à la protection des nationaux ; cette protection qui s'étend à certains Marocains soustraits à leurs juridictions nationales sera la source de nombreux conflits. Moulay Hassan (1873-1894) est énergique, courageux, infatigable « la tente impériale est toujours dressée » ; le souverain parcourt le Maroc pour réprimer les abus, mais les intrigues et la concussion restent les éléments de la vie politique. Malgré l'appui de missions européennes il ne peut créer une grande armée marocaine à l'étaindispensable blissement de son autorité sur l'ensemble du Maroc. A sa mort le bled Makhzen ne s'étend que sur un tiers du pays et sur la moitié environ de la population. Sur le plan extérieur Moulay Hassan qui règne lors de la compéti(1) Le Maroc, p. 54. R. Go RNEVIN.— Histoire do l'Afrique, Tome II.
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L'ÉVOLUTION DU MAGHRBB
tion coloniale essaie d'utiliser les rivalités européennes (1). La Conférence de Madrid (1880) réunie pour régler la question de protection étend aux nations participantes Angleterre, (Allemagne, Espagne, Italie) les avantages de la France qui mène la difficile « politique du chien de jardinier » et évite à grand-peine au sultan le traité de commerce anglais de 1892 et un conflit avec l'Espagne l'année suivante. Il reste très jaloux de la souveraineté marocaine au point de refuser aux étrangers la possibilité d'acquérir des propriétés au Maroc, ce qui est pourtant prévu par les accords de Madrid. Par contre, il favorise les relations commerciales : l'Angleterre domine le marché du thé et des cotonnades, la France fournissant le sucre et achetant la moitié de la laine exportée. L'Allemagne, à partir de 1886, arrive au troisième rang. souvenir : celui d'une Moulay Hassan a laissé un extraordinaire grandeur qui, selon la formule d'Henri Terrasse, « s'attache à ceux qui défendent jusqu'au bout les causes perdues ». A sa mort Moulay Adb el Aziz est encore un enfant de treize ans, aussi le grand Vizir Ba Ahmed, un noir, assure-t-il la Régence en poursuivant la même politique. Les échanges commerciaux continuent de s'accroître (85 millions de francs or en 1900). Ba Ahmed se fait construire à Marrakech un somptueux palais, la Bâhiya. A sa mort, en 1900, Abd el Aziz fait confisquer ses biens. Le nouveau sultan dépense facilement et épuise le trésor. Aussi doit-il emprunter aux banques européennes à des taux excessifs. Il essaie d'instituer un impôt unique, le tertib. Mais des révoltes ont lieu avec l'homme à l'ânesse (Bou Hamara) et Raysouli. Ces difficultés vont ouvrir « la question marocaine » et la France négocie avec l'Italie en 1900, avec l'Angleterre (l'Egypte contre le Maroc) en 1904. La Conférence d'Algésiras (1906) établit l'égalité économique des à la France et à l'Espagne puissances au Maroc tout en reconnaissant des droits particuliers. Une banque d'état du Maroc est créée qui accorde aux étrangers le droit d'acquérir des terres sans l'autorisation du Makhzen. La « compagnie marocaine » créée par Schneider en 1902 entreprend les travaux du port de Casablanca. Le massacre d'ouvriers européens y travaillant (juillet 1907) et les pillages provoquent l'occupation par les troupes françaises du port et d'Oujda à la frontière algérienne. Les protestations allemandes assorties des difficultés nées à l'occasion de l'affaire des déserteurs de la légion étrangère aboutit à un compromis, sorte de condominium Mais l'insurrecéconomique franco-allemand. tion fait rage et Moulay Hafid, monté en 1909 sur le trône, assiégé dans Fès par les tribus révoltées (avril 1911), fait appel aux troupes françaises. Un mois plus tard le général Moinier occupe la ville. En même temps l'Espagne fait occuper Larache et El Ksar Kébir. On sait comment la visite de la canonnière Panther à Agadir remet II et le (1) Cf. pour l'action de Léopold II au Maroc l'étude de A. DUCHESNE, Léopold Maroc (1885-1906),A R S O M, Bruxelles 1965.
L'ÉVOLUTION DU MAGHREB
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en question le problème marocain finalement réglé par la cession à 2 de Congo français). Le km Neu Kamerun 000 du (275 l'Allemagne 30 mars 1912 est signé le traité de protectorat qui met fin à l'indépendance du Maroc. Moulay Hafid, au lendemain du traité de protectorat, déclare : « Je représente un peuple qui n'a jamais été une colonie, qui n'a jamais été un peuple soumis, un peuple asservi, je représente un empire qui depuis des siècles et des générations est un empire autonome ». Il n'est pas facile de tirer des conclusions d'ensemble de ces trois ou quatre siècles d'imprégnation particulaturque, de mouvements et d'affirmation d'arabisation ristes, d'islamisation, progressive nationale. Au xvie siècle, les niveaux de culture, les niveaux techniques, l'arsont mement entre les forces de l'Europe et celles de Constantinople à peu près équivalents. A partir du siège de Malte (1565) et de la bataille de Lépante (1570), le fossé ne cesse de se creuser entre l'occident chrétien et l'orient turc et seules les dissensions entre nations d'Europe et l'alliance française permettront à la Turquie de subsister. Sur le plan religieux, dès le xviiie siècle, avant l'arrivée massive des chrétiens dans l'Afrique méditerranéenne, la création de nouvelles de l'islam confréries prouve la vitalité et le besoin de particularisme africain. La Ramaniya fondée à la fin du xviie siècle en Kabylie par Sidi Mohammed ben Adberrahman (1) était affiliée en orient aux Khalouatia (de khaloua : retraite). Ses Zaouia les plus célèbres sont à El Hamel et Tolga. Les Aîssaoua fondés par Sidi Mohammed Ben Aïssa (mort en 1523) de Meknès, se rattachent Jazouli au Chadzilisme par le prédicateur décédé en 1470 et enterré à Marrakech. Les Ammaria, dont l'origine est située au xviiie siècle près de Guelma, sont une forme déguisée des manifestations du culte des Aîssaoua. La Tidjaniya est fondée en 1781 par Sidi Ahmed Tidjani originaire d'Aïn Mahdi (entre Laghouat et le djebel Amour) dans le sud algérois. Cette confrérie s'étend vers la Mauritanie par Fès où meurt Ahmed Tidjani (1815) et vers les Touareg du Sahara central. La prédication d'El Hadj Omar (1837-1864) allait répandre, comme nous l'avons vu, la Tidjaniya dans l'ensemble du Soudan. Nous venons de voir, d'autre part, l'importance en Tripolitaine de la Senoussiya qui semble avoir voulu réaliser la synthèse des confréries dans un sons puritain et théocratique. Le culte des saints est très répandu en Afrique du Nord. Il corresnaturelle de pond, d'après Emile Dermenghem, à « une stylisation l'universel sentiment religieux dont les religions « évoluées » ne pourraient se couper sans risque. » Quelle que soit l'importance des facteurs économiques, politiques (') EMILEDERMENGHEM, L'Algérie religieuse, p. 255.
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L'ÉVOLUTION DU MAGHREB
et militaires dans l'affaire du Maghreb, le facteur islamique joue un rôle immense. Devant la pénétration européenne, il catalyse et soutient et la résistance à l'envahisseur les mouvements nationalistes qui prendra, en de nombreux points du continent africain, la couleur, l'intensité et le fanatisme de la guerre sainte.
QUATRIÈME LES
RAPPORTS L'AFRIQUE
PARTIE
DE L'EUROPE ET DE AU XIXe SIÈCLE
jusqu'à Après avoir traité l'Afrique noire et l'Afrique septentrionale ce que furent les la conquête et montré européenne politique les xvie, xviie et et de l'Europe durant relations de l'Afrique maintenant la quatrième et dernière xviiie siècles, nous abordons missionpartie, qui correspond à l' ouverture de l'Afrique, à la tentative à un commerce qui naire chrétienne, à la connaissance géographique, n'est plus la traite des esclaves, enfin à la progressive implantation politique des Européens qui va déboucher sur l'Afrique entièrement colonisée à la fin du siècle. Il n'est pas facile de faire la distinction entre les diverses activités européennes. Les croisières anglaises et françaises chargées de lutter contre la traite clandestine ont aidé à l'implantation et politique de nombreux missionnaires sont en même temps des explorateurs. Missionnaires et explorateurs ont par ailleurs souvent aidé à l'implantation politique des nations européennes. l'ensemble d'un problème complexe aux Cinq chapitres présenteront multiples aspects. D'abord l'évolution de la traite au XIXe siècle sera envisagée, puis les missions chrétiennes depuis les origines jusqu'au début du XXe siècle, les explorations depuis le XVIIIe siècle jusqu'au scramble, l'implantation politique européenne jusqu'en 1880, date de départ du scramble, enfin le partage de l'Afrique ou les vingt ans qui ont défini les frontières de l'Afrique seizième et dernier d'aujourd'hui, chapitre.
CHAPITRE ÉVOLUTION
DE
LA TRAITE
XII AU
XIXe
SIÈCLE
Nous avons vu qu'au xviiie siècle la traite était devenue l'activité des Européens sur la majeure partie de la côte atlanquasi-exclusive de tique de l'Afrique noire. Le xixe siècle verra enfin la disparition à un commerce légitime ne ce honteux trafic, mais la reconversion s'est pas faite sans peine, et d'autre part la traite arabe de la côte à partir orientale a augmenté dans des proportions catastrophiques du milieu du siècle au moment même où la lutte entreprise contre la traite atlantique à faire sentir ses effets. Cette coïncicommençait dence a d'ailleurs permis à la vertueuse Europe d'oublier très vite ses dans la dégradation des sociétés africaines propres responsabilités touchées par la traite, et de placer la conquête de l'Afrique sous le signe de la lutte antiesclavagiste. La profonde hypocrisie qui a présidé au dépeçage du continent africain à la fin du xixe siècle n'a pas été perçue par les lecteurs des nombreux ouvrages justifiant la campagne antiesclavagiste grâce à des considérations de haute moralité. On a tendance à oublier les très d'idées longs délais qui ont parfois séparé un généreux mouvement de ses applications En outre ces dernières sont loin d'avoir pratiques. entraîné des résultats immédiats : en 1847, quarante ans après l'acte du Parlement la traite illégale, l'effectif des déclarant britannique esclaves transportés était trois fois à partir de la côte ouest-africaine plus important qu'en 1842. Nous sommes d'ailleurs très mal renseignés sur la façon dont les choses se sont passées en Afrique ; en raison justement du caractère illicite de la traite au xixe siècle, les chiffres dont nous disposons sont des évaluations et non des chiffres officiels comme au siècle précédent. Nous envisagerons d'abord le mouvement d'idées ayant conduit à l'abolition de l'esclavage, puis les mesures officielles prises par les gouvernements européens, enfin les résultats obtenus sur la côte atlantique et sur la côte orientale. I. LE MOUVEMENT
D'IDÉES
Nous avons vu (1) que, dès 1671, les Quakers s'étaient opposés à Cette protestation n'eut l'esclavage à la Barbade et en Pennsylvanie. f1) Supra, p. 363.
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ÉVOLUTION DE LA TRAITE AU XIXe SIÈCLE
et il faut attendre le milieu du xviiie siècle aucun retentissement commencent à s'émouvoir. européens pour que les intellectuels ouvre le feu en 1748. Les évêques anglicans Hayter en Montesquieu 1755 et Warburton en 1760 proclament que « l'infâme trafic des esclaves enfreint simultanément la loi divine et la loi humaine » (1). Mais c'est incontestablement l'Anglais Granville Sharpe (1735-1813) de l'émancipation des qui doit être considéré comme le pionnier esclaves. En 1769 il écrit un mémoire sur The injustice and dangerous tendancy of tolerating Slavery in England. Le 22 juin 1772 l'arrêt du juge Mansfield déclarant libre l'esclave James Somerset s'en inspire directement. Cet arrêt fera jurisprudence. Désormais il n'y aura plus d'esclaves sur le sol anglais. La mesure sera étendue à l'Ecosse en 1788. En 1774 John Wesley publie ses « Pensées sur l'esclavage ». Après la guerre d'indépendance américaine le protestant français Bénezet, écrit un pamphlet directeur de l'école quaker de Philadelphie, sur ce même sujet en 1771. En France naît le type littéraire du « bon sauvage » avec le Voyage aux îles d'Amérique du P. Labat qui sera prolongé par Paul et Virginie de Bernardin de Saint-Pierre (1787). L'abbé Raynal est contraint à l'exil en 1781 à la suite de la saisie de son Histoire philosophique et politique des établissements et du commerce européen dans les deux Indes. L'ouvrage de Moreau de Saint-Méry, Description de la partie française de Saint-Domingue (2) est une remarquable base d'information sur la situation des esclaves aux Caraïbes. La Société des Amis des Noirs, fondée, suivant les auteurs, par Lafayette en 1786 ou par Brissot en 1788, rassemble tous les hommes des Noirs : politiques que préoccupe le problème de l'émancipation Le Pelletier de Saint-Fargeau, Necker, Petion, Lavoisier, Sieyès, Mirabeau, « tonnant contre ces bières mouvantes qu'étaient les navires l'abbé Si les beaux discours négriers » (3) et surtout Grégoire. n'ont aucune influence sur prononcés dans ce cénacle d'intellectuels le grand public (4), la qualité des orateurs déterminera cependant les très importantes décisions prises par la Législative et la Convention. Le 24 mars 1792 l'égalité des droits civils et politiques est étendue à tous les Noirs libres, sans distinction En juillet 1793 la d'origine. Convention abolit la prime attribuée en 1784 à la traite des Noirs. Enfin le 4 février 1794 Danton fait décréter par acclamation l'abolition de l'esclavage. La constitution de l'an III consacre cette mesure et l'article 15 de la Déclaration des droits de l'Homme affirme une nouvelle fois l'abolition de l'esclavage : « Tout homme peut engager son temps et ses services, mais il ne peut se vendre ni être vendu ; sa personne n'est (1) SIR REGINALDCOUPLAND.The british antislaeery movemcnl, Londres, 1933, 2e éd., 1964. Introduction de J. D. FAGE. (2) Il faut louer Me Maurel et M. B. Taillemlte d'avoir réédité ce monument pour la Société française d'Histoire d'Outre-Mer, 3 vol. 1565 p. (3)CHARLES DE LARONCIÈRE,Nègres et négriers, p. 148. (4) Sur plus de 1 200 cahiers de doléances présentés aux États Généraux, moins de cinquante évoquent la traite et aucun n'en demande l'abolition.
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» Dans la partie française de Saintinaliénable. pas une propriété Louverture (2) utilise les généreuses Domingue (1) le noir Toussaint déclarations des Assemblées révolutionnaires pour fonder la première république noire du monde et la deuxième en date des républiques américaines. Nommé général de brigade en 1794, général de division en 1795, il tient en échec les Anglais et chasse les Espagnols en 1801. vaincu par l'expédition du généLe destin de Toussaint Louverture le ral Leclerc en 1802 et interné au fort de Joux illustre tragiquement « retour aux lois et règlements en vigueur avant 1789 » proclamé le 29 mars 1815 pour par la loi du 20 mai 1802. Il faudra attendre qu'un décret proclame la suppression de la traite et interdise dans les Ce décret colonies françaises la vente des esclaves qui en proviennent. sera confirmé par Louis XVIII en 1815. En 1818 une loi établit les à pratiquer la traite et sanctions pénales contre ceux qui continuent une croisière française est instituée sur la côte d'Afrique dix ans après l'établissement de la croisière britannique. Les avatars de la politique d'émancipation poursuivie par la France nous ont fait abandonner Granville Sharp en 1772 après l'arrêt du juge Mansfield. Cependant l'action de ce pionnier ne s'est pas arrêtée là. Elle ne pouvait pas s'arrêter, car les esclaves libérés sur le sol anglais posaient un problème social de plus en plus difficile. A ceux qui demeuraient sans ressources sur la pavé de Londres vinrent s'ajouter, américaine après la déclaration (1783), les esclaves d'indépendance de leur participation à la guerre du côté émancipés en récompense britannique. Les appels à la charité privée ne suffisaient pas et Sharp en vint à considérer l'idée d'un rapatriement de ces « pauvres nègres » en Afrique comme la seule solution réaliste. Il fut puissamment aidé par un groupe d'amis abolitionnistes parmi lesquels il faut retenir les noms de Henry Thornton Charles Grant (1746-1823), (1760-1815), Zachary Macaulay (1768-1838), et surtout William Wilberforce (1759de la traite. Pas 1833) dont le nom est resté lié à la loi sur l'abolition plus que les diatribes enflammées prononcées à Paris à la Société des Amis des Noirs, les discours des « Saints » (tel était le surnom donné au à ne pouvaient groupe d'abolitionnistes qui siégeaient au Parlement) cette époque émouvoir le grand public et surtout les West Indians, sur ou marchands de sucre qui exerçaient propriétaires, banquiers les décisions gouvernementales une pression indéniable. Commencé sensiblement en même temps en Angleterre et en France, défendu des deux côtés du channel par des personnalités de premier de l'esclaplan, le mouvement d'idées qui devait aboutir à l'abolition vage n'allait pas évoluer de la même façon. On mesure ici peut-être mieux qu'ailleurs des le fossé séparant le pragmatisme britannique Le progénéralisations des Français. verbales et souvent utopiques gramme des abolitionnistes plus anglais visait en réalité beaucoup loin que celui des Français. Il comprenait trois moyens d'action indis) En 1697 le traité de Ryswick avait concédé à la France le tiers occidental de la (1 grande tle de Saint-Domingue ou Hispaniola. Toussaint Louverture, Paris, 1965, 260 p. (2) KOOERDORSINVILLE,
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ÉVOLUTION DE LA TRAITE AU XIXe SIÈCLE
solublement liés : l'évangélisation, le commerce, la colonisation. Le commerce « légitime » était mis sur le même plan que l'évangélisation et ce fait doit être souligné car il est de nature à échapper à un esprit latin et il a influencé toute l'action britannique en Afrique non seulement au xixe siècle mais durant la période coloniale. Nous avons dit précédemment la destinée du premier établissement d'esclaves libérés débarqués le 9 mai 1787 dans la baie de Freetown. En 1791 une charte gouvernementale est accordée à la Sierra Leone Company. En 1807 la Sierra Leone est proclamée Colonie de la Couronne. Elle va servir de base à l'action britannique en faveur de la la traite à tout sujet suppression de la traite. En effet la loi interdisant à partir du 1er janvier 1808 a été votée le 25 mars 1807 britannique et la croisière britannique établie en 1808. antiesclavagiste Ce n'est pas sans peine que Wilberforce a enfin gagné la cause qu'il soutenait inlassablement devant les Communes depuis 1788. Les abolitionnistes de sympaqui avaient d'abord rencontré beaucoup thisants s'étaient vu accuser d'antipatriotisme à la suite de la révolte de Saint-Domingue d'une qui avait fait craindre les conséquences extension des « horribles doctrines jacobines » aux Antilles britanniques. Finalement leur victoire doit être attribuée surtout, comme l'a montré Eric Williams (1), à la nouvelle conjoncture économique et policonsidérablement la tique du début du xixe siècle qui affaiblissait classe, si puissante au xviiie siècle, des West Indians en faveur des East Indians et des industriels de la métropole.
PRISES
II. LES MESURES OFFICIELLES PAR LES GOUVERNEMENTS DES PAYS DANS LA TRAITE
IMPLIQUÉS
Quoi qu'il en soit des raisons exactes qui ont fait voter le bill de a pris cette année-là 1807, il reste que le Gouvernement britannique en charge l'oeuvre matérielle réalisée par les abolitionnistes anglais sur la terre africaine. Alors que Napoléon avait biffé d'un trait de des Assemblées révolutionnaires plume les généreuses déclarations en 1807 la ligne de conduite des françaises, l'Angleterre adoptait abolitionnistes, exprimée dans les trois mots désormais indissolublement liés : évangélisation, commerce, colonisation. Avant le fameux bill de 1807, le Danemark avait déclaré la traite suivirent en 1808, la Suède en 1813, illégale en 1804 ; les États-Unis les Pays-Bas en 1814, la France — nous l'avons dit — en 1818. Seule parmi tous ces pays la Grande-Bretagne disposait de la puissance navale suffisante pour faire appliquer la loi. Aussi conclut-elle en 1817 avec l'Espagne et le Portugal un traité de droit de prise réciproque. Avec la France la querelle du droit de visite (2) déchaîne les passions Capitalism and Slavery, 1944. (1) ERICWILLIAMS, MARTIN,Histoire de l'esclavage dans les colonies françaises, p. 263-279. (2) GASTON
ÉVOLUTION DE LA TRAITE AU XIXe SIÈCLE
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de la Convention du avant de faire l'objet franco-britannique 22 mars 1833. Entre 1808 et 1869 une escadre de la British Navy séà Freetown dont les cours de justice émanjournera en permanence 1877. Nous avons ciperont au total 74 000 esclaves libérés jusqu'en vu le rôle capital joué par eux dans l'expansion coloniale britannique au cours du xixe siècle. A juste titre, Wilberforce n'avait pas estimé son oeuvre terminée en 1807. L'abolition de la traite n'était qu'un pas vers son but final, Les West-Indians évidemment l'abolition de l'esclavage. y restaient farouchement opposés, mais chacun sentait que le temps de la splendeur des « îles à sucre » britanniques était passé devant la concurrence du sucre cubain ou brésilien ou du sucre de betterave européen. Aussi la Société contre l'esclavage un fondée en 1823 va-t-elle connaître plus grand succès que le fameux Comité des Douze fondé en 1785. Dès la première année, la Chambre des Communes adopte une résolution de la condition des esclaves. Le 28 août 1833 le pour l'amélioration bill d'émancipation est voté sous la condition d'une période d'appren1er août 1838 pour les esclaves tissage de la liberté durant jusqu'au urbains et jusqu'au 1er août 1840 pour les ruraux. Les planteurs propriétaires seront indemnisés jusqu'à vingt millions de Livres. En 1838 de tous les esclaves des colonies britanniques est un l'émancipation fait accompli. Le gouvernement français de son côté prend une série de mesures libérales. Dès le début du règne de Charles X, la France renonce officiellement à ses droits sur Saint-Domingue, d'où l'effacement du et le mouvement de plus en plus vioparti des anciens propriétaires lent pour l'abolition de l'esclavage. En juillet 1832 la taxe d'affranchissement est supprimée, est en 1833 le recensement obligatoire institué. Ces ordonnances ne concernent en Afrique que les habitants de Saint-Louis du Sénégal. En 1834 se forme à Paris une Société pour l'abolition de l'esclavage présidée par le duc de Broglie et comprenant de Rémusat, Odilon Barrot. L'aboparmi ses membres Lamartine, lition de l'esclavage est enfin proclamée le 27 avril 1848 sous l'impulsion de Victor Schoelcher, sous-secrétaire d'état aux Colonies. Notons des droits de citoyen que l'octroi français accordé de ce fait à 12 000 esclaves résidant dans la colonie française du Sénégal n'entraîna aucun trouble.
SUR
III. ÉVOLUTION DE LA TRAITE LA CÔTE ATLANTIQUE DE L'AFRIQUE
A lire les pages précédentes on pourrait se figurer que les mesures officielles prises contre la traite à partir de 1807 ont entraîné sa disparition rapide. Il n'en est hélas rien. Bien au contraire, la traite augmente considérablement de en 1847 un maximum jusqu'à atteindre 84 356 esclaves exportés à partir des côtes du golfe de Guinée en une seule année. Augmentation des auteurs au attribuée par la plupart
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ÉVOLUTION DE LA TRAITE AU XIXe SIÈCLE
Sugar Act de 1846 qui, réduisant les droits de douane sur le sucre en en Grande-Bretagne et entraîne par contreaugmente la consommation à Cuba. Car, si la demande coup une demande accrue de main-d'oeuvre a pratiquement disparu après 1840 en ce qui concerne les Antilles elle s'est accrue dans les États du sud des françaises et britanniques, à Cuba et au Brésil, où l'on procède à de nouvelles plantaÉtats-Unis, tions de canne à sucre et de coton. En 1812 on a compté 50 000 arau Brésil. Entre 1791 et 1840 on estime qu'un rivées d'esclaves million d'esclaves ont débarqué à Cuba. Tous d'ailleurs ne proviennent pas de la côte atlantique. A partir des années 1860 on observera une nette diminution, après auront aboli l'esclavage sur leur territoire (1863) et que les États-Unis se sera établie à Lagos, l'un des deux grands que la Grande-Bretagne ports négriers de la côte de Guinée. Le second, le port de Ouidah, Bahia (1), continuera à trafiquer avec le Brésil et plus particulièrement mais il s'agit d'une traite illicite, alors que la traite légale subsistera jusqu'en 1878 entre l'Angola et le Brésil. De 1878 à 1888 une traite clandestine subsistera à partir des côtes des actuels Gabon, Congo et ne sera aboli au Brésil qu'en 1888 et à Cuba en Angola. L'esclavage 1892. C'est en 1901 qu'un ultime convoi d'esclaves vers l'Amérique sera arraisonné. La traite atlantique aura donc mis près d'un siècle à disparaître tout au moins au sud de l'équateur où sa longue persistotalement, tance explique en partie le décalage d'évolution avec les pays du golfe de Guinée plus tôt débarrassés de ce fléau. IV. ÉVOLUTION
DE LA TRAITE
SUR LA CÔTE
ORIENTALE
Il faut distinguer la traite européenne sévissant au sud du Cap Delgado sur la côte du Mozambique et la traite arabe de Zanzibar et Kilwa. La première (2) était, nous l'avons vu, minime jusque vers 1780. Entre 1780 et 1800 elle portait sur 10 000 esclaves par an environ dont la moitié transportée sur des navires portugais. Entre 1800 et 1850 elle augmente sensiblement puisque l'effectif annuel est estimé entre 15 et 25 000 ; les esclaves sont transportés sur des bateaux espagnols, brésiliens, américains qui les amènent en Amérique ou bien français essentiellement les Mascareignes. de qui alimentent Après l'abolition dans les colonies françaises (1848) les Français recrutent l'esclavage ce qu'on appellera pudiquement des « travailleurs libres avec contrat de cinq ans » pour la Réunion et les Comores. Napod'émigration léon III abolira ce système d'esclavage déguisé en 1859. Mais un trafic de contrebande subsistera jusqu'en 1884. Cependant la très grande majorité des esclaves achetés à Ibo, Delgado ou Quelimane sont envoyés à Cuba et à Zanzibar. (1) Supra, p. 305. (2) J. DUFFY,Portugusse Africa, p. 145-148.
ÉVOLUTION DE LA TRAITE AU XIXe SIÈCLE
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La traite de Zanzibar est en effet infiniment plus importante que Elle augmente dans des proportions catasla traite du Mozambique. trophiques vers 1860, année où l'on estime que 50 à 70 000 esclaves A Kilwa 18 500 esclaves atteignent la côte chaque année, à Bagamoyo. sont comptés à la douane en 1862, 22 000 en 1866, mais il s'agit est beaucoup plus importante. d'un décompte officiel et la contrebande On estime par exemple que 37 000 esclaves ont passé en contrebande dans les années 1867-68-69 où 2 645 esclaves ont été libérés par les croiseurs britanniques (1). Notons qu'une partie de ces esclaves libérés est envoyée comme travailleurs libres à l'île Maurice et aux Seychelles, de main-d'oeuvre de très qui s'apparente procédé de recrutement près au système employé pour la Réunion, et qui sera abandonné pour les mêmes raisons. Nous avons vu précédemment les régions d'origine de la traite arabe de Zanzibar et de Kilwa et les estimations des pertes humaines Celle de Cameron d'un demiportées par les grands explorateurs. million de vies humaines par an sera reprise par le cardinal Lavigerie et H. Waller. Elle servira de paravent aux préoccupations sordides de de la Conférence internationale de Léopold II et des participants géographie de Bruxelles (1876), de la conférence de Berlin (1884-85) et de la conférence antiesclavagiste de Bruxelles (1889-90). (1) SIR REGINALDCOUPLAND,The Exploitation of East Africa, 1856-90, Londres, 1939, p. 164.
CHAPITRE LES
MISSIONS
CHRÉTIENNES
XIII DU
XVIe
AU
XIXe
SIÈCLE
Les missions chrétiennes ont pour l'Afrique noire une importance Elles vont jouer un rôle immense dans la connaissance considérable. scientifique du continent (1) du fait même de la présence des missionnaires, qui vont aux xviiie et xixe siècles être les seuls hommes cultivés et désintéressés dans ces régions. Par ailleurs ces missionnaires, dont l'objectif est la conversion des païens, doivent étudier les lanles coutumes et les croyances africaines. Devant gues vernaculaires, la solidité et le profond enracinement des religions païennes ils commencent leur oeuvre par les enfants plus perméables à l'évangile et du catéchuménat à l'école dont l'analpasseront tout naturellement Confrontés avec la phabétisme général rend la création nécessaire. misère physiologique, ils soignent. Le avec les grandes endémies, rôle social des missionnaires, immense en Afrique, ne l'est pas moins en Europe où ils feront connaître une certaine image de l'Afrique et de l'action chrétienne qui contribuera à la bonne conscience de leurs auditeurs et lecteurs. Nous verrons au chapitre de la décolonisation le rôle capital joué dans la prise de conscience nationale des par les missions chrétiennes élites africaines grâce à un livre de référence commun, la Bible, et à la transcription de langues nationales jusqu'alors strictement orales. Nous avons vu (2) dans quelles conditions les premiers missionnaires avaient travaillé au royaume de San Salvador et en Angola au xvie siècle ; aux xviie et xviiie siècles il en est de même. Le mouvement missionnaire catholique est une opération conçue à l'échelle du monde où l'Afrique jusqu'à la fin du xviiie siècle occupe une place modeste en raison du climat meurtrier et des immenses possibilités de l'Améle les missions sont davantage rique et de l'Asie. Du côté protestant fruit d'initiatives individuelles, d'abord celle des Frères Moraves (1732) sous l'influence du comte de Zinzendorf, puis de 1792 à 1824 douze une missions (dont six anglaises, une américaine, une hollandaise, suisse et une française, deux allemandes) qui seront suivies de beaucoup d'autres. (1) Cf. notamment P. FOURNIER,Voyages et découvertes scientifiques des missionnaires naturalistes français à travers le monde (XVe à XXe siècles), Paris, Paul Le Chevalier, 1932, Afrique, p. 154-181 ; Madagascar, p. 182-188. (2) Supra, p. 36-67.
DU XVIe AU XIXe SIÈCLE
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comme celui de l'église catholique, Même dans un corps hiérarchisé individuelles les missions seront beaucoup plus le fruit d'initiatives du Vatican. Elles appuyées par Rome que l'effet d'ordres émanant des événements la papauté, subissent le contrecoup qui affectent les conflits entre certains ordres religieux et les états. Le notamment leur donne une indépencaractère privé des entreprises protestantes des nations et de dance certaine aussi bien vis-à-vis européennes coloniales que vis-à-vis des souverains africains. Au leurs ambitions serviront souvent d'interprètes moment du scramble les missionnaires afrilors des palabres et des traités à la demande des interlocuteurs cains dont ils ont la confiance. successivement la mission catholique en Afrique Nous envisagerons noire, puis la mission protestante.
I. LA MISSION
i. Le Patronat
CATHOLIQUE MISSIONNAIRE portugais
DE LA POLITIQUE (ÉVOLUTION EUROPÉENNE)
(1492-1622).
La Bulle Inter cetera ou Bulle de démarcation qui fixe au 6e degré de longitude ouest la limite des souverainetés et portuespagnoles les gaises est la troisième d'une série, les deux premières rappelant droits et obligations des souverains et leur reconnaissant catholiques les pouvoirs indispensables Ces pour entreprendre l'évangélisation. sont confirmées par la bulle Universali Ecclesiae (1508) prérogatives du Patronat qui sanctionne l'institution hispano-portugais (le padroado incluant l'Asie et depuis le traité portugais). Le domaine portugais de Tordesillas le Brésil, l'Afrique, essor catholique après le brillant du royaume de San Salvador dans la première moitié du xvie siècle, connaît des succès moins brillants en Angola, au Mozambique (1) et en Ethiopie où les Jésuites qui se succèdent de 1554 à 1634 ne parviennent pas à s'implanter. La limite des diocèses de Santiago (Cap 1534 par une bulle Vert) et de Sâo Thomé est fixée le 4 novembre du pape Paul III sur la rivière Sassandra. Le siège des diocèses demeure dans les îles périphériques aux pour des raisons qui tiennent facilités de communications, mais aussi sans doute aux conditions sanitaires. Nous avons déjà dit les inconvénients de ce patronat, surtout en ce qui concerne le petit Portugal qui ne disposait pas d'un potentiel humain suffisant pour évangéliser l'immense territoire qui lui était échu. Ce partage, qui excluait fâcheusement d'autres nations comme la rrance, incitait les pouvoirs civils à s'immiscer dans les affaires qui relevaient de la hiérarchie régulière et de la papauté (2). p. 72-85. (1) Supra, ( ) GEORGES GORRÉEET GERMAINCHAUVEL, L'Église et sa mission, p. 82-83.
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LES MISSIONS CHRÉTIENNES
2. La Propagande. A partir de 1580, durant la période où le Portugal est annexé par des l'Espagne, les papes Grégoire XIII et Clément VIII constituent commissions de cardinaux pour s'occuper des missions, l'une devenant en 1592 la congrégation des affaires de la foi et de la religion catholique. L'idée tout naturellement est agitée que la papauté reprenne directement en charge l'évangélisation de par le monde. Les Portugais, qui ont obtenu du pape Clément VIII le 12 décembre 1600 un décret contre tout missionnaire d'excommunication embarquant pour l'Afrique dans un port qui ne serait pas Lisbonne, voient cette mesure rapportée par le pape Paul V le 2 juin 1608. En 1613, un carme déchaussé espagnol, Thomas de Jésus, consacre dans un traité publié en latin (Des moyens d'apporter le salut à toutes les nations) un chapitre à la création d'une Congrégation De Propason chemin et Grégoire XV, le ganda Fide. L'idée fait désormais 6 janvier 1622, fonde la Congrégation de la Propagande dont l'organisation et le fonctionnement sont déterminés par la bulle Jhcrustabili Dlivinae (22 juin 1622). Six ans plus tard le collège de la Propagande est créé. Le premier secrétaire de la congrégation, Mgr Ingoli (+ 1649) établit une véritable doctrine missionnaire et dans trois mémoires sévère contre publiés en 1625, 1628 et 1644, dresse un réquisitoire les abus du patronat, et rigousouligne le caractère supranational reusement des missions et préconise leur adaptation apolitique au caractère particulier des des peuples à convertir, la prohibition méthodes de contrainte, le recrutement et la formation du clergé l'aide financière à apporter aux missions. Des décrets autochtone, interdisent aux missionnaires de faire du commerce et soumettent à la congrégation de la Propagande toutes les missions fondées par les ordres religieux. La campagne menée par Rome contre le patronat se heurte à une violente opposition du Portugal dont nous avons vu les difficultés (1) durant les soixante années d'union espagnole et qui ne recouvre sa pleine indépendance qu'en 1640. Nous avons vu (2) l'importance des missions au Congo et les demandes faites par les souverains du royaume de San Salvador pour de nouveaux missionnaires. Les premières tentatives faites par Rome auprès de Philippe IV se heurtent à l'opposition du Conselho de Portugal (3) et tous ces efforts ont pour conséquence l'ouverture à San Salvador d'un collège de Jésuites portugais qui fonctionnera 45 ans (1623-1669). Une nouvelle tentative est faite à partir de 1642 qui rencontre (1) Supra, p. 321. p. 46-56. (2)Supra, La (3) Pour cette période se reporter à l'excellente introduction du P. BONTINCK, fondation de la mission des Capucins au Royaume du Congo,Paris, Nauwelaerts 1968, p. XI et XII.
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de la junta (nouveau cette fois (4 décembre 1643) l'avis favorable en raison sans doute de la prise de nom du Conselho) de Portugal, et italiens Douze Capucins Loanda par les Hollandais. espagnols arrivent le 25 mai 1645 au Congo. Nous avons vu dans quelles conditransférée en Angola. Toute cette tions l'autorité religieuse s'était où le patronat pèse encore très période de conflit de juridiction a été parfaitement lourdement sur les relations entre missionnaires analysée par le chanoine Jadin (1). 3. Le tournant
décisif de 1659-1663.
A cette époque la situation en Asie pèse sur la situation générale des missions, certes en raison du recul portugais face aux Hollandais en Indonésie et devant les Français aux Indes, mais surtout à cause de l'extraordinaire du père Alexandre de Rhodes qui, personnalité dans un fondamental rapport sur l'église au Tonkin, insiste sur l'imdes vocations et sur la nécessité de nommer portance indigènes sans en référer aux autorités des vicaires apostoliques portugaises ou évêques in partibus infidelium. C'est d'ailleurs en partie un mouvement français puisqu'il au Porest devenu difficile de recruter offre d'importantes tugal et que le catholicisme français disponibilités. La papauté par ailleurs espère compenser dans les pays lointains les pertes causées par la Réforme. Les trois premiers vicaires nommés en 1658 sont apostoliques l'un Mgr de Montigny-Laval Pierre les deux autres au Canada, Lambert et François Pallu au Viet Nam. En même temps est crée en France la Société des missions étrangères. En 1659 la Congrégation de la Propagande rédige les fameuses instructions qui sont une première codification des méthodes missionnaires préconisées par le Saint-Siège, on y trouve déjà la nécessité d'un clergé indigène et à cet effet l'urgence de la fondation d'un séminaire. Un séminaire des missions étrangères est ouvert en 1663, bien que les statuts de la Société des missions étrangères n'aient été approuvées qu'en 1700. Cette même année 1700 voit la création sur l'initiative d'un jeune Breton, des Poullart Claude François Places (2), de l' établissement des pauvres écoliers qui reçoit le nom de Compagnie du Saint-Esprit en 1703. 4. Les heures difficiles du XVIIIe et l'année
1773.
Le xviiie siècle est un siècle de repli en raison des difficultés éprouvées par les Jésuites en 1758-59 par le expulsés du Portugal marquis de Pombal, de France en 1764 par ordre royal, d'Espagne en 1767. Finalement, le bref Dominus ac Rcdemptor (1773) du pape et les Capucins du Congo et d'Angola aux XVIe et XVIIe siècles, (1)le clergé séculier de l'Institut historique belge de Rome, t. XXXVI (1964), p. 185-483. in Bulletin (2) Cf. JOSEPHMICHEL,Claude François Poullart des Places, Paris, éd. Saint-Paul. R. CORNEVIN. — Histoire de l'Afrique, Tome II. 29
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LES MISSIONS CHRÉTIENNES
de Jésus, frappant notamment Clément XIV abolit la Compagnie Cette 300 missions de par le monde et près de 3 000 missionnaires. mesure survient l'année même où Mgr Borgia, secrétaire de la Congréremet son rapport sur l'état des missions gation de la Propagande, déclin tenant au dans l'univers qui prend acte d'un incontestable de la Propagande manfait qu'à l'échelon romain la Congrégation dans ses déciété heureuse n'a pas toujours quant de ressources sions (1) et n'a pu susciter un nombre suffisant de vocations. du mouvement En France, la Révolution aggrave la situation missionnaire. Une loi de 1792 a dissous en effet toutes les congréde Rome par les troupes françaises en 1809 gations. L'occupation de la Proa d'autre part mis fin aux activités de la Congrégation pagande. Propagation 5. Le réveil du XIXe et les oeuvres missionnaires. (1822), Sainte Enfance (1843), Saint Pierre apôtre (1889).
de la Foi
Rétablie en 1814 des le retour du pape Clément VII, la Propagande n'est réorganisée et dotée de ressources nouvelles qu'en 1817. Louis XVIII a rétabli dans leurs droits le séminaire du Saint-Esprit et les Lazaristes (3 février 1816). Un mouvement d'idées favorables aux missions se développe en France dans la mouvance du catholicisme libéral et sous l'influence de livres comme le Génie du christianisme et les Martyrs de Chateaubriand ou les Lettres édifiantes et curieuses des Jésuites, récits missionnaires réédités trois fois entre 1803 et 1824. Ce mouvement d'idées aboutit à la création de trois oeuvres missionnaires qui constituent en quelque sorte la base européenne de soutien à l'action engagée outre-mer. En 1816 Mgr Dubourg, évêque de la Louisianne, est venu dans la région lyonnaise organiser des collectes, l'année suivante le pape a rétabli une association de soutien aux missions d'extrême-orient. C'est alors qu'une Lyonnaise de vingt trois ans, Pauline Jaricot (2) des collectes et le 3 mai prend la tête d'une organisation méthodique 1822 jette les bases de l'oeuvre de la propagation de la foi. En août 1823 tous les évêques de France sont avisés de l'existence de cette oeuvre qui publie un bulletin, Nouvelles des missions dont le titre devient les Annales de l'association de la Propagation de la Foi qui tire bientôt à 16 000 exemplaires, chiffre énorme pour l'époque. en L'institution se développe en Suisse, en Italie, en Allemagne, En 1842, les recettes atteignent 3 233 486 francs, cepenAngleterre. dant que les Annales tirent à 180 000 exemplaires. D'autres oeuvres sont lancées par Marie-Zoé du Cliesne en 1838 (oeuvre apostolique) et surtout par Mgr de Forbin-Janson, évêque de Nancy qui, s'apitoyant sur le sort des enfants païens, crée l'oeuvre GORRÉEET GERMAIN (1) GEORGES CHAUVEL, cit., p. 97. op. (2) Cf. à ce sujet la biographie du R. P. GEORGESGORRÉE,Pauline Jaricot : une laïque engagée, éd. La Colombo, Paris 1902, 130 p.
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aux jeunes Français de la Sainte-Enfance (1843) qui va permettre do participer à une oeuvre de solidarité. Un demi-siècle plus tard, les dames Bigard de Caen, sur les idées émises par leur compatriote Mgr Cousin, évêque de Nagasaki, fondent l'oeuvre de Saint-Pierre apôtre (1889), dont le but est de constituer des bourses d'études en faveur des séminaristes indigènes et d'ouvrir des séminaires en pays de mission. 6. Valeur de la papauté sionnaires.
; naissance
et développement
des Sociétés mis-
le monde A cette époque de relance de l'action missionnaire, XVI (1831-1846) d'un bénéficie avec Grégoire pape catholique missionnaires car il a été, admirablement les problèmes connaissant son pontificat, durant les cinq années précédant préfet de la Procondamne l'esles missions, pagande. Il soutient vigoureusement in Supremo clavage et la traite des noirs par sa lettre apostolique fondamentaux (3 décembre 1839) et surtout pose deux principes de la doctrine missionnaire : constitution catholique d'églises locales et promotion du clergé indigène Neminem (Instruction profecto adressée à tous les chefs de mission à l'étranger). Pie IX (1846-1878) préside à l'essor du mouvement missionnaire illustré en direction de l'Afrique sociétés : celle du par plusieurs de en 1848 avec celle du Saint-Coeur Saint-Esprit qui fusionne de Lyon (1856), les Pères de Scheut Marie, les Missions africaines (1862), de Mill Hill (1866), de Vérone (1867), les Pères Blancs (1868), de la Société du Verbe Divin (1875). En même temps les congrégations féminines missionnaires poursuivent leur action sociale. En 1847, les Soeurs bleues de Castres commencent à travailler en Sénégambie ; en Italie est fondée la des Pieuses mères de la Nigritie (1872) et en 1876 les Congrégation soeurs de N. D. des apôtres commencent leur travail au Dahomey. Ces sociétés missionnaires certes sont le résultat d'un mouvement d'opinion favorable soutenu par un pape conscient de ces problèmes, mais elles n'auraient le dynamisme pas vu le jour sans l'initiative, et le sens de l'organisation d'un homme (souvent aidé d'un ou deux En 1839 autres) qui, pour chaque société, prit en mains l'affaire. le fils d'un rabbin de Saverne, (1), François Marie Paul Libermann fonde avec un créole de l'île Bourbon, et Frédéric Le Vavasseur, un jeune prêtre, le P. Tisserant, des chréde la situation préoccupé tiens, en Haïti, l'oeuvre des noirs. C'est l'amorce de ce qui sera deux ans plus tard la Société du Saint-Coeur de Marie dont le P. Libermann roussit la fusion avec la société des Pères du Saint-Esprit ; il est nommé supérieur le 16 novembre 1848.
! P. BRIAULT,La reprise des missions en Afrique au XIXe siècle : le vénérable père Libermann, Paris 1940, 580 p.
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La société des Missions Africaines de Lyon (1) est l'oeuvre d'un des Indes, Mgr de Marion-Brésillac, aidé du ancien missionnaire du R. P. Planque ; le P. Théophile Verbiest crée la Congrégation de Marie (Scheut), le P. Daniel Gomboni fonde Coeur immaculé la Société des missions de Vérone, le P. Arnold Janssen la Société du Verbe Divin à Steyl (Pays-Bas) et il n'est pas besoin d'insister sur le formidable dynamisme du cardinal Lavigerie (2) et de ses missionnaires de N. D. d'Afrique. dont Mgr Lavigerie est officiellement La lutte contre l'esclavage en conquérant chargé par Léon XIII (1888) pose le catholicisme et l'Afrique adversaire de l'islam négrier. Le Congo (Léopoldville) très profondément orientale en resteront marqués. le scramble en aiguisant les nationalismes Sur le plan politique à une sorte d'alignement national des missionnaires va contraindre surtout dans l'esprit des indigènes (dans l'Ouganda par lorsque, de catholique. Soutenues par la exemple), Français est l'équivalent puissance coloniale (ce qui est parfois gênant) les missions chrétiennes sociale cohérente. vont alors se lancer dans une politique il faut attendre 1893 pour que Rome Sur le plan de l'évangélisation définitivement l'interdiction de traduire la bible dans supprime une langue vivante. Dans cette organisation européenne des missions catholiques, l'Extrême Orient et l'Amérique montrent encore bien souvent la voie : c'est à la suite d'une collecte pour la Louisiane que Pauline Jaricot réussit à monter son oeuvre, c'est grâce aux petits Chinois que l'on parvient à apitoyer les chrétiens d'Europe sur les orphelins des pays exotiques, c'est par le problème des prêtres japonais que l'on aborde celui des séminaristes indigènes, c'est à partir des Indes que Mgr de Marion Brésillac conçoit ses missions africaines. A partir de la deuxième moitié du xixe siècle les missions se préocde l'Afrique, sans doute parce que la quinine percupent davantage met une amélioration des conditions sanitaires, mais aussi parce que la difficile perméabilité de l'Asie au christianisme leur est apparue alors que le paganisme noir, géographiquement plus proche, présente des défenses moins sévères et qu'au demeurant ouvrent les explorations un continent jusqu'alors inconnu. II.
MISSIONNAIRES
CATHOLIQUES EN AFRIQUE
AUX
XVIIe
ET XVIIIe
La politique missionnaire menée à Rome ou dans les nations euroen Afrique. II péennes ne se répercutait pas toujours immédiatement M.J(1) R. P. RENÉ F. GUILCHER,La Société des missions africaines, Lyon 1956;220 p. BANE,Catholic pioneers in West Africa, éd. Clonmore and Reynolds, Dublin, Un géant de l'apostolat : le cardinal Lavigerie ; EDMOND Langerai RENARD, (2)CUSSAC, éd. Spes, 1926, 294 p. ; MGRCRISTIANI, Le cardinal Lavigerie un grand bienfaiteur« l'Afrique (1825-1892), éd. France-Empire, Paris 1961, 334 p.
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délais de route, mais aussi faut compter d'abord avec d'importants locales sans compter les soutiens à éclipavec certaines obstructions subitement absorbés par de nouvelles ses des souverains européens à l'autre bout de l'Europe ou des Améguerres ou des préoccupations riques. tentatives faites sur les côtes ici les principales Nous envisagerons africaines sans revenir sur ce qui a été déjà étudié à propos du Congo et de l'Angola. i. L'échec des Capucins occidentale d'Afrique.
dans la mouvance
des compagnies
soi la Côte
le cardinal Antoine Barbarini, Le premier préfet de la Propagande, l'activité missionnaire de ces à l'ordre des Capucins, appartenant Plusieurs d'entre eux pasderniers prend une ampleur considérable. sent en 1630 au Caire en vue de gagner l'Ethiopie. du Frère Colombin de Nantes, Après un voyage de reconnaissance les missions de vieille Guinée sont confiées aux Capucins de la Province de Bretagne. Le père Alexis de Saint-Lô fonde le 3 novembre 1635 à Rufisque le premier poste missionnaire chrétien. Après huit mois de séjour il va chercher des renforts en France et visite l'année suivante Joal et Portudal. Malheureusement plusieurs de ses compaet la mission est abandonnée gnons et lui deviennent paralytiques en 1644 (1). En 1637 cinq Capucins ont débarqué à Assinie, mais, trois d'entre eux étant morts, les deux survivants se sont réfugiés à Axim où les Portugais ont un comptoir. Les tentatives effectuées en 1638 par des Capucins français à Axim et Komenda (actuel Ghana), d'abord couronnées de succès, doivent être abandonnées mais aussi à cause du pour des raisons sanitaires conflit luso-hollandais. Les Capucins français achèvent au Brésil leur tentative africaine. Au début de 1651 sur la foi de renseignements donnant le chef supérieur du Bénin comme catholique, des Capucins espagnols font une tentative à Takoradi (2) qui ne dure que jusqu'en 1653. Cinq ans plus du roi d'Arda Tohonou à la cour de tard, à la suite de l'ambassade Philippe IV, onze Capucins espagnols dont le supérieur est Luis Antonio de Salamanque vont à Ouidah. Cinq d'entre eux meurent, les autres sont bientôt priés de quitter le pays. Le supérieur meurt en mer. Deux survivants, Athanasio de Salamanque et Carlos de Los en 1661 et rendent Hinojosos sont rappelés en Espagne compte de l'échec de la mission. Le voyage d'un Capucin belge à Ouidah (3) dans les années 16811683 présente un immense intérêt, car le Frère Célestin de Bruxelles Gold Coast Mission History, 1956, p. 56-57. (1)RALPH Sur cetteWILTGEN, et RIVET,Le royaume d'Arda, Paris 1929. entreprise, cf. LABOURET (2) Capuchin at Ouidah Stresses schools in Gold Coast Mission History, A Belgian 66et mon article sur le frère Célestin, dans France-Eurafrique, n° 166, oct. 1965, P-59-
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parti comme aumônier de la Royal African Company à Ouidah semble avoir compris la nécessité d'installer des écoles pour instruire les fils de chefs et de notables dans la religion catholique. Le frère Benedict de meurt au village de Choa le 15 novembre 1683 Hulst qui l'accompagne à l'âge de 33 ans. Malade et peut-être à cause de la faillite de la Royal African Compagny, le frère Célestin doit rentrer en Europe (1683). Il meurt à Messine le 26 décembre 1684. En 1685, un dominicain provençal, le frère Gonzalez François, arrive à Ouidah où le chef Bangaza lui fait bon accueil. Le frère François établit un plan de campagne visant à installer une station à Komenda, une à Ouidah et une à Bénin. Après un voyage en France il revient avec Ducasse le 28 février 1688, mais ne résiste pas au climat et meurt peu après. Au Sierra Leone l'installation sur l'emplacement actuel de Granville Town d'un prêtre noir venu d'Amérique, Signor Joseph, mardans cette région que en 1714 le dernier effort des Jésuites d'Afrique. Dans le royaume de San Salvador au xviie siècle les prêtres italiens vont, de longues années durant, évangéliser, mais les pertes dues à la maladie sont considérables. Grâce aux relations des Capucins italiens nous avons sur ces régions des renseignements de premier ordre. Par ailleurs, le diocèse de Loanda fonctionne et le chanoine Jadin (1) nous a bien restitué l'atmosphère de cette période marquée par la vie fort peu édifiante de ces prêtres qui s'entassent à Loanda et refusent d'aller en brousse. Le remède consistant à ordonner prêtres des métis n'est utilisé qu'avec la plus grande réticence. Aussi l'état matériel des missions est-il des plus médiocres, ainsi qu'en témoignent différents rapports. Les seuls missionnaires d'aller évangéliser en brousse sont les qui acceptent Capucins italiens. Des prêtres séculiers sont venus également, les Ils uns pour faire fortune, les autres avec un réel idéal missionnaire. utilisent les services de maestri ( = interprètes catéchistes) disséminés dans le royaume. Un prêtre noir, Manuel de Sa, dénonça par lettre avec vigueur leurs insuffisances et complaisances. En 1727, un rapport du gouverneur de l'Angola, Joâo Manuel de Noronha, insiste sur l'état misérable des missions (2). Les résultats cependant furent médiocres tant la mission paraissait liée au trafic européen des esclaves. C'est ce que devait constater une mission portugaise d'une vingtaine de religieux emmenés par le Père franciscain Raphaël de Castello de Vide qui, flanqué d'un Bénédictin, d'un tertiaire régulier et d'un prêtre noir élevé à Lisbonne, passa huit années (1780-1788) de prédications notamment dans l'ancien royaume du Congo. (1) Louis JADIN,Le clergé séculier et les Capucins du Congo et d'Angola aux XVI' et XVII' siècles, Bulletin de l'institut historique belge de Rome, t. XXXVI (1964), p. 185-483. (2) JADIN,p. 445.
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2. La Côte orientale. C'est seulement en 1612 que le Mozambique est détaché de l'archeune vingtaine de vêché de Goa. En 1624 huit stations comptant jésuites existent déjà le long du Zambèze. Le P. Luis Mariano, après ses tentatives malgaches, s'installe à Tété. treize stations et vingt cinq Les Dominicains en 1630 comptent missionnaires. Mais nous avons déjà vu (1) comment les querelles de Mavura et de Capranzine n'ont finalement pas donné les résultats escomptés du point du vue chrétien. Le bilan missionnaire sur la Côte orientale au portugais xviiie siècle s'avère bien mince : le baptême d'une reine de Pemba, la réintégration dans l'église de quatre cent captifs libérés et le baptême de cinq cents esclaves conquis sur les Arabes (2). 3. Les jésuites portugais
en Abyssinie.
En Abyssinie d'excellentes établies après l'inrelations s'étaient tervention de Christophe de Gama, mais c'est seulement au début du xviie siècle que le jésuite portugais P. Paes (1603-1624) ayant converti le négus Socinius obtient la permission de prêcher dans les provinces du Tigré. Il semble qu'une partie de la Cour ait été sur le point de se convertir au catholicisme, mais le P. Mendez ayant voulu introduire l'inquisition provoque une formidable réaction nationale copte dont le négus Fasilidès prend la tête et qui aboutit à l'expulsion des missionnaires portugais (1640). 4- Les Lazaristes
à Madagascar.
Après l'échec des jésuites portugais en 1620 et 1621 dans l'Anosy, la Propagande confie en 1647 la mission de Madagascar aux Carmes déchaussés. A Madagascar Saint-Vincent-de-Paul envoie les RR. PP. Nacquart et Nicolas Gondrée (1648) qui trouvent bon accueil auprès d'Andrian Dramaka, lequel avait été dans son enfance éduqué à Goa et gardait bon souvenir de rudiments d'instruction religieuse donnés par des prêtres portugais. Morts des fièvres après un an de séjour ils laissaient 600 indigènes baptisés. Par ailleurs le P. Nacquart a laissé une relation détaillée de son voyage et de ses travaux missionnaires. Le P. Aimeras, successeur de Saint-Vincent-de-Paul, poursuit son oeuvre. Mais l'abandon par Colbert de l'entreprise de colonisation entraîne une violente réaction des Malgaches et la mort des frères Etienne et Patte. Les autres Lazaristes et Capucins cependant réfugiés à l'île Bourbon réussissaient dans un milieu de colonisation (1674). (1) Supra, p. 83-84. KILGER,Die ersten zwei Jahrhunderte ostafrikanischer Mission et Christliche (2) Islam Mission und Islam Politik in alten Ostafrika, Zeitschrift fur Missionswissenscnaft 1917 et 1919, cité par BARONDESCAMPS, p. 486.
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5. Les tentatives françaises du Loango et du Sénégal.
postérieures
à la guerre de sept ans : mission
Les amputations territoriales de 1763 dans l'Inde et au Canada sont en partie responsables de l'enthousiasme suscité par de peut-être nouvelles tentatives missionnaires sur la côte d'Afrique. Ces tentatives ont à vrai dire des causes fortuites. Un jeune mousse nommé Belgarde avait été en 1762 embarqué sur un vaisseau à destination du Loango. Ayant eu la vocation missionnaire il étudie au séminaire des missions étrangères, le quitte pour des raisons de santé et arrive à persuader le Vatican qu'il irait évangéliser le Loango. Nommé par la Propagande préfet de la mission il y fait un premier voyage, mais doit rentrer pour raisons de santé, remplacé par deux nouveaux prêtres dont un certain Descourvières qui publie en 1772 une brochure sur le Loango. Descourvières y retourne en 1773 mais doit, en 1776, rentrer en France avant d'aller poursuivre sa carrière missionnaire en Chine (1). Au Sénégal, l'abbé Demanet, installé en 1763 dans l'île de Gorée, de l'évangélisation envisage un développement grâce aux convertis africains. Mais il tombe malade et rentre en France où il publie en 1767 sa Nouvelle Histoire de l'Afrique française (2) dans laquelle est envisagée une Afrique devenant progressivement catholique et française. Ce sont les hasards d'un naufrage qui amènent au Sénégal en 1777 deux pères du Saint-Esprit, MM. Bertout et de Glicourt, normalement destinés à Cayenne. Ils constatent le piteux état de la chrétienté dépourvue de prêtres depuis 1763, si bien que, revenant en France, les pères font connaître l'état de la colonie et que à Versailles de 1778 (3) réinstalle des missionnaires. Ainsi l'abbé l'expédition Coste évangélise les Sérères entre 1780 et 1784, mais sa mort met fin à l'effort missionnaire dans cette région jusqu'en 1815, date à laquelle l'abbé Judicelly est envoyé avec le titre de préfet apostolique (4). Le bilan de ces trois siècles de contacts entre chrétiens et païens, après le brillant départ du royaume de San Salvador, est particulièrement décevant. Tributaire l'action de compagnies de commerce, des missionnaires est liée à celle des chefs de comptoirs négriers. Par ailleurs l'attrait des Indes Orientales et occidentales comme le caracdes tère malsain des postes côtiers a fait bien souvent abandonner missionnaires ni clairement entreprises conçues, ni qui n'étaient méthodiquement organisées.
(1) ABBÉPROYART,Histoire des missions dans les Royaumes de Loango et Kakongo, Paris 1776. (2) 2 vol. 356 p. p. 349. (3) Supra, (4) ABBÉBOILAT,Esquisses sénégalaises, p. 29.
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DU XVIe AU XIXe SIÈCLE
III.
AU XIXe MISSIONNAIRES CATHOLIQUES DU RENOUVEAU L'ÉPOQUE
SIÈCLE
:
l'écrasante navale des La période révolutionnaire, supériorité d'Egypte, complètement coupé Anglais ont, en dehors de l'expédition Tout se passe comme si cette période de la France de l'extérieur. claustration avait aiguisé chez les Français la soif d'horizons nouveaux. Nation nombreuse et cultivée, la France dispose à cette époque d'un solide potentiel humain. Il suffira de quelques personnalités dynamiques pour les mettre en oeuvre. Le premier appel à la mère Javouhey viendra de l'île Bourbon et des noirs de Bourbon et de Haïti que le c'est à cause de la situation de Marie. Mais, au crée la société du Saint-Coeur père Libermann milieu du siècle, l'Afrique est accrochée et dès lors l'oeuvre missionnaire ne s'arrêtera plus. i. La mère Javouhey
: La Réunion
et le Sénégal.
La mère Javouhey des (1) qui avait fondé en 1807 la Congrégation soeurs de Saint-Joseph, installée à Autun puis en 1812 à d'abord à l'appel de M. Desbassyns de Richemont, Cluny, répond d'abord intendant de l'île Bourbon qui demande des religieuses pour les oeuvres scolaires et sanitaires (1817), puis c'est à Saint-Louis du Sénégal (1819) En 1822 la mère Javouhey que les soeurs vont s'installer. embarque elle-même pour le Sénégal sur la Panthère qui porte à son bord le baron Roger. Elle installe un poste à Dagana, puis se rend à l'appel du gouverneur Mac Carthy en Gambie et au Sierra Leone. Revenant en France en 1824, elle a véritablement lancé la vie d'une communauté catholique en Afrique noire. Des hôpitaux qui n'étaient que de misérables cases, antichambres du cimetière, prennent figure humaine ; deux écoles ont été ouvertes à Saint-Louis et à Gorée. Cependant de 1822 à 1825 une sorte de dissidence parmi les soeurs de Saint-Joseph de Cluny s'est établie à l'île Bourbon. 2. Les frères de Ploërmel
et la « querelle
des anciens
et des modernes
».
La mère Javouhey avait fait venir en France trois jeunes Africains pour poursuivre leurs études au séminaire, les abbés Boilat, Fridoil et Moussa. Le 8 février 1848, l'abbé Boilat de retour est nommé inspecteur de l'enseignement au Sénégal. Il fonde un collège secondaire, et se trouve alors en opposition avec les frères de Ploërmel au travail à Saint-Louis 1841, mais ceux-ci qui dondepuis novembre nent une formation rentable professionnelle plus immédiatement finalement. l'emportent Anne-Marie Javouhey, Paris, Grasset 1942, 297 p. ; RENÉE BERNOVILLE, (1)GAÉTAN La merveilleuse épopée d'Anne-Marie Javouhey, Ed. du Soleil Levant, TRAMOND, Namur 1964, 248 p.
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LES MISSIONS CHRÉTIENNES
3. Les difficiles débuts du vicariat
des deux Guinées et les Spiritains.
Préoccupés des noirs affranchis qui vont s'installer depuis 1828 au Libéria, l'évêque de Philadelphie Mgr Henrick désigne son vicaire général Edouard Barron qui débarque à Monrovia en compagnie du R. P. John Kelly et d'un catéchiste laïque, Denis Pindar. Après avoir visité El Mina et Accra, il fait depuis Lyon un rapport détaillé à la Propagande qui, le 3 octobre 1842, le nomme vicaire apostolique de Guinée et Sierra Leone. Il entre en relation avec le P. Libermann et l'entente est immédiate entre Mgr Barron, pasteur d'un territoire sans missionnaire et ce supérieur des missionnaires auxquels manque un champ d'action. En même temps la mère de Villeneuve, fondatrice (1836) des soeurs de l'Immaculée Conception (soeurs bleues de Castres), les met en 1842 à la disposition de Mgr. Barron. Elles seront en Afrique à partir de 1847 les auxiliaires des pères du Saint-Esprit. Des sept Pères et trois Frères établis fin 1843 au Cap des Palmes seul le P. Bessieux, considéré en France comme mort, s'installe au Gabon, cependant que, découragé, Mgr Barron donne sa démission. Le P. Bessieux isolé, sans nouvelles, se met au travail et, le 1er janvier 1845, ouvre la première classe en terre gabonaise, puis, des renforts arrivant, développe la mission. Nommé en 1848 vicaire apostolique de Sénégambie et des deux Guinées, laissant Mgr Kobès en Sénégambie, il retourne au Gabon où la mission catholique prend un considérable essor. Après 1871 Mgr Bessieux s'opposera vigoureusement aux projets d'échange du Gabon et de la Gambie qu'avaient français et britannique. envisagés les gouvernements Les pères du Saint-Esprit, à Lindana (Congo) depuis 1865, ont avec le père Augouard une personnalité de premier plan. En 1881 celui qu'on appellera l'évêque des anthropophages part vers Mfoa de Pointe Noire, qui deviendra Brazzaville. Il aide à l'organisation fonde Saint Joseph de Linzolo et fait construire un petit vapeur pour faciliter les liaisons. Il est nommé en 1890 vicaire apostolique de Brazzaville. L'action des Spiritains depuis Lindana s'exerce en direction du futur État indépendant du Congo et de l'Angola où le P. de formation du clergé Duparquet accomplira une oeuvre remarquable indigène. Mais en 1878 les Pères Blancs de Mgr Lavigerie atteignaient les grands lacs. En 1886 le Provicariat du Haut-Congo est confié à un Père Blanc belge, Mgr Roëlens, cependant que les Scheutistes en 1887 sur le Kassaï. s'installent De l'autre côté de l'Afrique, Mgr Maupoint, évêque de la Réunion, décide en 1860 d'entreprendre de la côte orientale. l'évangélisation Dès 1862 la préfecture apostolique de Zanzibar est confiée aux pères du A cette époque, on traite à Zanzibar environ 65 000 esSaint-Esprit. claves par an. Aussi les missionnaires rachètent-ils des enfants, ouvrent des orphelinats et en 1868 installent un orphelinat agricole à Bagamoyo. C'est l'oeuvre du Père Horner qui sera la providence des Pères Blancs de Mgr Lavigerie lorsqu'ils entreprendront leur longue marche vers les grands lacs.
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xvie
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SIÈCLE
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L'action des pères du Saint-Esprit, après l'extraordinaire figure fut menée par Mgr Le Roy qui fut de londu vénérable Libermann, gues années au Gabon avant de diriger la Société à Paris. 4. Madagascar et les .Jésuites. de la Réunion se fait également sentir à Madagascar. Le rayonnement C'est en 1829 que la Grande Ile cesse d'être rattachée à Maurice pour de Bourbon. C'est l'époque des tentatives de l'être à la préfecture l'abbé de Solages qui, débarqué en 1830 à Tamatave, meurt deux ans plus tard près d'Andevorante par suite de l'hostilité de la reine Ranavalona Ire qui interdit le christianisme (1835). En 1844 Madagascar constitue une préfecture apostolique puis en 1848 un vicariat confié en 1850 aux Jésuites. Mais il faut attendre 1861 et la mort de la reine les missionnaires. Très vite les soeurs de pour faire entrer librement de Cluny viennent depuis la Réunion puis, à la demanSaint-Joseph de de Mgr Cazet, les Lazaristes s'installent dans la partie méridionale de l'île. 5. Les Missions Africaines de Lyon et la bande guinéenne (1). Mgr de Marion Brésillac (2), à cause de ses relations avec M. Régis, avait envisagé d'aller au Dahomey. Ce fut commerçant marseillais, en Sierra Leone qu'il partit ; arrivé le 14 mai il était emporté le 25 juin par l'épidémie de fièvre jaune qui anéantissait la totalité de l'effectif missionnaire. Le P. Planque qui succéda à Mgr de Marion Brésillac fut assez heureux pour obtenir la fondation du vicariat du Bénin (1861) et du Dahomey qui fut la base des missionnaires de Lyon ; ils s'étendirent vers Lagos et la future Nigeria, puis (1880) la Gold Coast et (1895) la Côte d'Ivoire où le gouverneur Binger favorisa leur installation qui s'étendit même (1906) au Libéria. Ainsi, sauf au Togo où ils ont été remplacés par les missionnaires du Verbe Divin en 1892, les Missions Africaines de Lyon tiennent l'ensemble des secteurs côtiers compris entre Nigeria et Libéria. A partir de 1876, les soeurs de N. D. des apôtres viennent au Dahomey aider les pères des missions africaines de Lyon dans le domaine sanitaire et scolaire. Il faut mentionner à côté de l'oeuvre sociale l'action diplomatique de certains missionnaires, comme l'ambassade du P. Dorgère à Abomey (1890). Par ailleurs les Missions Africaines de Lyon sont installées depuis le 13 novembre 1877 en Egypte où la préfecture apostolique du delta du Nil leur est confiée en 1886. 6. La mission du Soudan et Daniel Comboni. Le 30 mars 1846 est constitué le vicariat apostolique centrale dont les limites assez imprécises vont à l'ouest
d'Afrique jusqu'au (1) RENÉ-FRANÇOIS GUILCIIER,Missions Africaines, Lyon 1956, 3e édition mise à jour, 1962. (2)MGRDEMARION éd. du Cerf, Paris 1962, 190 p. BRÉSILLAC,
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V. A. des Galla vicariat des deux Guinées et au sud jusqu'au (Ethiopie). En fait, ce vicariat correspond à la mission de Khartoum marquée par les efforts et les échecs successifs du lazariste italien Montuori (1842-46), du chanoine maltais Casolani, du Père jésuite Ryllo, de l'Autrichien Mgr Knoblecher (1851-57), qui s'adresse à l'institut Don Mazza (de Vérone), « Institut des missions pour l'Afrique sauvage allemands et autrichiens, centrale », de Franciscains puis italiens. échelonnant leurs échecs sur 23 ans, Daniel Après ces sept tentatives Comboni (1) qui a fait plusieurs voyages en Afrique à partir de 1857, fonde la Société des missions de Vérone (1867) qui aura une influence décisive au Soudan. à l'Afrique 7. Les pères blancs de Mgr Lavigerie s'attaquent Ils partent orientale. de Bagamoyo en 1878 et parviennent aux grands lacs (2) ; à Tabora le 1er octobre la caravane se scinde, une partie avec le P. Deniaud se rend à Oujiji, une partie avec le P. Livinhac vers le Nyanza ( = lac Victoria) et le royaume du Bouganda (3). C'est là qu'en février 1886 devaient périr brûlés vifs les jeunes pages chrétiens qui viennent d'être canonisés (4). essor de la mission catholique devait provoquer L'impressionnant en janvier 1892 une querelle avec les Protestants et l'intervention du Capitaine ultérieurement ; les pères Lugard qui sera traitée blancs devaient étendre leur action vers le Kenya et vers le lac Nyassa. Il est frappant de constater combien la spécialisation « arabe » des Pères blancs formés en Algérie et en Tunisie guide leur action sur la côte orientale où ils suivent la route des négriers arabes et parfois leur livrent combat. Ces faits s'expliquent par le fait que Mgr Lavigerie avait basé une partie de son action sur la campagne antiesclavagiste dont il avait été officiellement chargé en 1888 par le pape Léon XIII. des Pères blancs (5) doit beaucoup à Mgr Livinhac, L'organisation et successeur de Lavigerie qui fut un remarquable orgacollaborateur nisateur. Si l'Afrique noire doit beaucoup à ces trois sociétés majeures (SaintEsprit, Missions africaines de Lyon, Pères Blancs), il faut aussi mentionner l'action d'autres sociétés. Ainsi à la suite de l'exploration 1) PAULCATRICE,Un audacieux pionnier de l'église en Afrique, Daniel Comboni, ( Lyon,Vitte 1964, 139 p. (2)A l'assaut des pays nègres, Paris. (3)Supra, p. 168-172. sur ce sujet : J. F. FAUPEL,African holocaust: the storyofthe (4) Nombreuses études La flammequi Uganda martyrs, éd. Chapman, Londres 1962, 242 p. ; G. HUNERMANN, chante : les martyrs de (Ouganda, éd. Salvator, Mulhouse 1963, 170 p. Un numéro spécial de Vivante Afrique, n° 234 (sept.-oct. 64) est consacre à l'épopée des martyrs baganda. L'oeuvre fondamentale en ce domaine est l'ouvrage de SoeurMARIE-ANDRÉ DUSACRÉ-COEUR, Uganda terre de martyrs, éd. Casterman, 1963, 300 p. (5) Cf. au sujet des Pères Blancs le numéro spécial de Vivante Afrique (n° 222 sept.oct. 1962)qui leur est consacré.
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des frères d'Abbadie en Abyssinie, un appel adressé à Rome entraîne d'un lazariste, le P. de Jacobis, à la tête du vica(1846) la nomination Par ailleurs, le vicariat du Galla est confié en 1846 riat d'Abyssinie. aux Capucins de Mgr Massaïa. Au Soudan (Khartoum), après des de Jésuites et des Franciscains (1861-1872), les missions africaines de en charge ce secteur qui subira le contre-coup Vérone prennent l'explosion mahdiste. En Afrique du Sud, le travail est vigoureusement poussé par les Oblats arrivés en 1851 au Natal et dix ans plus tard au Lessouto où l'action du P. Gérard (1) sera déterminante. à la fin du xixe siècle Si l'on fait le bilan des missions catholiques de la contribuon est frappé d'abord par l'importance prépondérante de soutien (Propagation tion française dans les oeuvres européennes de la Foi, Sainte Enfance, OEuvre de Saint Pierre apôtre) comme dans les sociétés missionnaires où quatre sociétés (Oblats, Saint-Esprit, en tiennent l'essentiel de l'Afrique Lyon, Pères blancs) françaises cours de christianisation cependant que les pères de Scheut (belges), de Mill Hill (anglais), du Sacré Coeur de Vérone (italiens), du Verbe Divin et Pallotins (allemands) des champs occupent progressivement plus étendus. à la pénétration en Afrique dans Quant à la stratégie d'ensemble, la période précoloniale, l'action est menée à partir des îlots et des La Réunion, au sud-est, constitue une base comptoirs périphériques. et pour Madagascar et pour l'Afrique orientale. Mais les missionnaires des compagnies commerpauvres ont recours aux passages gratuits ciales ou des bâtiments de guerre. De même sur le plan matériel ils devront être fréquemment ravitaillés locaux. par les traitants dans l'ambiance Après le scramble, un deuxième facteur apparaît de même natioimpérialiste qui est le souci de placer des missionnaires nalité que l'autorité coloniale. Ainsi les Pallotins allemands remplacent en 1890 les Spiritains français au Cameroun, alors que les Pères du Verbe divin remplacent en 1892 les missionnaires de Lyon au Togo. IV. LE DÉVELOPPEMENT DES MISSIONS PROTESTANTES EN
EUROPE
Le départ de l'entreprise missionnaire est beaucoup protestante plus tardif que celui des missions catholiques. Cela tient certes aux guerres de religion, mais aussi au fait que les souverains protestants et Angleterre) ont probablement (Pays-Bas, Danemark peur de proAussi la présence voquer des troubles chez leurs sujets d'outre-mer. religieuse sur les côtes africaines se borne-t-elle le plus souvent aux aumôniers — souvent médiocres — des compagnies. Ce fait explique que la mission protestante ait été avant tout l'affaire d'individus ou (1) AIMÉROCHE,Clartés australes, éd. du Chalet, Lyon 1951, 400 p. et Le cavalier des Malouti, 1955, 173 p.
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et en Allemagne que le réveil piétiste d'églises. C'est au Danemark fit d'abord vibrer la corde apostolique. Le pasteur Francke, fondateur du pàdagogium de Halle, exerça une profonde influence sur Lutkens, aumônier du roi Christian IV de Danemark et sur le comte Zinzendorf qui organisa dans sa propriété de Bethelsdorf en Saxe une comsorte de phalanstère munauté fraternelle, religieux, le Herrnhut (1). A la fin du xvme siècle, c'est dans la mouvance de la lutte antiesmissionnaire se développe en Grande clavagiste que le mouvement Bretagne et dans la jeune république américaine. Ce mouvement, mis des Anglo-Saxons, aboutit à en oeuvre avec le sens de l'organisation d'extraordinaires résultats. La Suisse, l'Allemagne, la France, les pays Scandinaves vont alors cette étude des l'action missionnaire. Nous arrêterons développer à la Conférence d'Edimbourg missions protestantes (1910) qui est le premier essai de coordination missionnaire à l'échelle mondiale. i. Zinzendorf, néerlandaise.
les
frères
Moraves,
la
S. P. G. et l'église
réformée
Invité à Copenhague au couronnement de Christian VI (1731), le comte Zinzendorf (2), fondateur des Frères Moraves est ému par les récits d'un noir des Antilles danoises sur la misère des esclaves. Un an vont aux plus tard, deux frères Moraves, un potier et un charpentier, Antilles commencer une oeuvre destinée à soulager les esclaves. En 1735, au cours d'une autre visite à Copenhague, Zinzendorf rencontre un mulâtre de vingt ans, Jakob Protten, fils d'un soldat danois de Christianborg et de la fille d'un chef de Petit Popo. Depuis 1727, Protten poursuit ses études en des conditions difficiles. Il accepte de venir à Herrnhut, puis part en 1737 à la Côte de l'Or, mais alors de pour les possessions hollandaises (les Danois provoquant multiples difficultés), avec un frère morave qui meurt quelques semaines après son arrivée. Jakob Protten (3) se rend alors à Anécho dont le chef est son proche parent. Après un voyage en Europe en 1741, les Moraves essaient de l'utiliser à Saint-Thomas. Reparti en 1757 comme aumônier des Danois à Christianborg, il dirige un temps une école pour métis, mais ayant tué accidentellement l'un de ses élèves, il doit rentrer (1761). Il revient encore une fois (1764-1769) et accueille une nouvelle tentative de ces frères moraves qui tous mourront en quelques semaines. En 1736, une lettre adressée par deux Hollandais du Cap montre la dramatique situation des Hottentots. Une semaine plus tard, Georges Schmidt, un protestant quasi-illettré, part pour l'Afrique du Sud. Histoire générale comparée des missions, Paris, Bruxelles (1) BARONDESCAMPS, 1932, p. 702. Der Junge Zinzendorf, (2) Sur Zinzendorf se référer au livre d'ERicn BEYREUTIIER, Verlag der Francke Buchhandlung, Marbourg 1957, 238 p. (3) Sur Protten, cf. Mon Histoire du Togo, p. 126 ; voir également STEINERin Enang. Miss. Magazin, Bàle 1887,p. 435 s. et HANSW. DEBRUNNER, Frillie westafrikanische Porträts, Sonntagsblatt, Basler Nuchrichten, dimanche 10 janvier 1965, p. 11et 12.
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à l'Est du Cap, à une centaine de kilomètres Installé à Bavianskloof mais doit six années durant il évangélise en hollandais les Hottentots Les Moraves ne seront de la Compagnie. rentrer en raison de l'hostilité Genaautorisés à revenir qu'en 1792 et feront de leur station baptisée centre artisanal. dendal (vallée de la Grâce) un remarquable et nous Les frères Moraves ont une véritable vocation missionnaire les aumôniers des comptoirs ne ferons que mentionner (ou chapelains) La S. P. G. (Society for européens qui en sont en général dépourvus. the propagation of the Gospel) fondée en 1700 avait précisément pour de la Royal African aux comptoirs objectif de fournir des aumôniers Company. L'un d'eux, Thomas Thomson, qui avait été en service parmi dans le fort de les esclaves noirs du New Jersey au lieu de s'installer Cape Coast où il arrive en 1751, s'établit auprès d'un chef Fanti mais il a pu doit rentrer gravement malade cinq ans plus tard ; cependant en Angleterre, dont l'un, s'instruire envoyer trois jeunes Africains Quaque), orthographié Philippe Kwakou (le nom est habituellement ans il travaillera sera consacré pasteur en 1765. Pendant cinquante comme aumônier et maître d'école jusqu'à sa mort en 1816. Il fut le ans Mais vingt-trois africain de l'église anglicane. premier pasteur avait consacré Jakob auparavant (1742) l'église réformée hollandaise en Gold Coast Capitein, lequel originaire de Côte d'Ivoire et transporté comme esclave, avait étudié la théologie à Leyde où il fit une dissertation remarquée sur la défense de l'esclavage (!). Il fut cinq années durant aumônier à Elmina où il mourut en 1747. Il peut sembler curieux que la consécration ait été donpastorale née à des Africains ou à des métis en un temps où la traite des esclaves était florissante. Cela s'explique d'abord par l'incontestable valeur de ces trois pasteurs africains, par le fait aussi qu'ils résistaient incommieux que les Blancs aux rigueurs du climat et surtout parablement et compagnies en faire des auxiparce que gouvernement espéraient liaires de la politique indigène. Notons à ce propos la rigueur morale du pasteur Kwakou qui, lors d'une attaque contre le fort, refusa de se battre contre les assaillants africains pour ne pas porter atteinte à la dignité de son ministère. Il fut suspendu de ses fonctions par le Gouverneur ce que le Directeur de la Compagnie lui rende jusqu'à justice. Par ailleurs, il n'est pas besoin d'insister sur le caractère étroit des relations entre les Antilles et la Côte de l'Or. La façon dont les frères Moraves furent traités par les autorités danoises en Gold Coast est fonction de leur position vis-à-vis du de Saint-Thomas. gouverneur 2. L'essor anglais
de la fin du XVIIIe siècle.
Los auteurs font volontiers du savetier prédicateur britanniques William Carey (1761-1834), le « Père des missions modernes » en raison de son Enquête sur les obligations des chrétiens de convertir les païens, du retentissement de son sermon de Nottingham (31 mai 1792) et de son action dans l'Inde de l'East India Company. En malgré l'hostilité
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fait, comme le souligne le pasteur Stephen Neill (1), son action marque dans l'oeuvre missionnaire où il va l'entrée du monde anglophone prendre bientôt une place prépondérante. avait marqué de nombreux milieux La campagne anti-esclavagiste de Sierra Leone montrait que de la bourgeoisie anglaise. L'entreprise : en 1792 la de véritables sociétés spécialisées étaient nécessaires B. M. S. (Baptist Missionary Society) est fondée et trois ans plus tard la L. M. S. (London Missionary Society), société missionnaire de LonEn 1799 c'est le tour de la C. M. S. dres qui est interconfessionnelle. (Anglican Evangelical Church Missionary Society), société des missions de l'église anglicane qui s'appelle d'abord Society for mission to Africa and the East, ce qui marque le souci africain de cette société. Quant aux méthodistes (Wesleyens), ils n'attendront pas la création d'une une action africaine société missionnaire (1810) pour entreprendre une oeuvre au Sierra Leone. L'Ecosse et, dès 1796, commencent elle-même, en 1796, constitue à Glasgow une société missionnaire. du Cap entraîne Durant la même période, la situation particulière la constitution à Rotterdam de la Société Sud-africaine pour favoriser l'extension du Royaume du Christ (1797) dont les promoteurs, Théodore Van der Kemp et Kicherer, vont en 1799 évangéliser les Hottentots. sont Les deux pôles d'attraction africains de ces missionnaires l'Afrique du Sud où les Anglais sont désormais installés et la Sierra Leone. Nous avons vu (2) la place que cette dernière a tenue dans l'essor colonial anglais. 3. La mission de Bâle (3) et son influence sur les missions et françaises. Les missions Scandinaves.
allemandes
Située au point de rencontre des frontières allemandes, suisses et françaises, Bâle était au xviiie siècle un foyer culturel très vivant qui était le siège notamment d'une Christenthum Gesellschaft (Société de dans l'ensemble christianisme) qui avait un très grand rayonnement de l'Europe. Le pasteur Steinkopf, secrétaire de la Christenthum Gesellschaft de 1798 à 1801, commence à éveiller l'intérêt pour les missions. En 1801 il devient pasteur de l'église allemande de Londres. Un an plus tard, il est membre du Comité de la L. M. S. et entretient des relations suivies avec la C. M. S. Les relations qu'il conserve avec l'Europe et notamment avec ses successeurs Spittler et Blumhardt donnent à ceux-ci l'idée de créer à Bâle un institut missionnaire qui ne pourra fonctionner en 1816. Mais qu'après la fin des guerres napoléoniennes la grande activité de Blumhardt réside dans la création des comités (1)A History of Christianmissions, Penguin Books, 1964,p. 261. (2) Supra, p. 298. La mission de Bâle célèbreson 150 (3) Cf. le remarquable article d'EnENNE KRUGER, anniversaire (1815-1966), Journal des missions évangéliques, juin-juillet 1965, p. 120-129.
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: ce fut le cas de la mission rhénane (1819), de la Société indépendants de Berlin (1824), de la mission de Brème (1836) et de Dresde, devenue celle de Leipzig (1836). Quant à la mission de Paris elle ne fut pas comité auxiliaire de la mission de Bâle, mais sa fondation fut la conséà Paris (avril 1822). Le mouquence directe de la visite de Blumhardt telle qu'en novembre 1822 la vement déclenché prit une importance société des missions de Paris était créée. En 1826 c'est la recommande la maison dation de Blumhardt qui fit choisir comme directeur de alors suffragant des missions de Paris le pasteur Grandpierre, l'Église française de Bâle. « filles » de la mission En même temps que ces missions allemandes la mission de Hermannsburg de Bâle, il faut mentionner (Hanovre) d'une paroisse devenue missionnaire qui est un exemple particulier à équiper un sous l'impulsion de son pasteur Harms et qui parvient navire baptisé la Candace (1), lequel devait transporter quatre évanPort Natal. gélistes jusqu'à des missions ScanLa deuxième moitié du xixe voit le démarrage les Norà Massaouah, dinaves : les Suédois en 1866, qui s'établissent végiens en 1867 venus en pays betsileo. 4. Missions américaines. La présence d'esclaves noirs aux États-Unis avait excité l'intérêt et des Méthodistes pour les missions en Afrique noire des Baptistes américains qui considéraient d'un cette oeuvre comme la « réparation crime de lèse-humanité commis par leurs ancêtres » (2). Par ailleurs, de nombreux noirs américains avaient des idées de retour en Afrique et d'évangélisation de leurs frères de race. Un noir affranchi, John en Libéria. Les BapStewart, essaie une entreprise d'évangélisation tistes américains établissent des postes à Monrovia, cependant que les Presbytériens unis d'Amérique une oeuvre consientreprennent dérable en Egypte. V. L'ACTION
MISSIONNAIRE EN AFRIQUE
PROTESTANTE
Cette action fut menée avec un dynamisme variable suivant les du champ de mission. L'action personnalités responsables put être menée avec vigueur en Afrique du Sud où le climat était favorable aux Européens. Elle fut plus difficile sur la côte ouest-africaine, encore malsaine, où seuls les pasteurs mulâtres ou africains résistaient aussi l'initiative du pasteur L. Jaenicke do Berlin qui, en (1) Il faut mentionner 1800, fonda le premier institut missionnaire d'Allemagne... mais apparemment sans autre résultat que d'attirer l'attention du public pieux et cultivé sur ces problèmes anglaises du personnel qualifié. et defournir aux missions L'islamisme et le christianisme en Afrique. Paris, Hachette, (2)G. BONET-MAURY. — Histoire de l'Afrique, Tome II. R. CORNEVIN. 30
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serau climat. Par ailleurs, les missions protestantes britanniques la politique anglaise contre les Boers vaient même involontairement ou chez les chez les Hottentots soumis, en organisant l'enseignement Bantou. i. Afrique du Sud. Autorisés à revenir en 1792, les frères Moraves s'installent auprès des Hottentots dans l'ancienne station fondée par Georg Schmit qu'ils Genadendal et qu'ils développent appellent jusqu'à devenir une station prodigieusement prospère d'Afrique du Sud. En 1828, ils fondent un nouveau poste à Silo (un millier de kilomètres à l'est du Cap), et en charge un hôpital de lépreux hottentots. L'évangélisaprennent tion des Hottentots est également entreprise en 1799 par les pasteurs hollandais Théodore Van der Kemp et Kicherer. La L. M. S. envoie dès 1803, lors de l'intallation anglaise au Cap, des missionnaires chez et chez les Griqa. En 1819 le Dr Philip part évangéliles Hottentots ser les Bochimans du Haut Orange. En 1820 la mission s'installe au Betchouanaland et il n'est pas besoin d'insister sur le rôle de Moffat puis de Livingstone que nous étudierons au chapitre des explorations. La mission anglicane s'est vigoureusement implantée dans la région du Cap grâce au pasteur Gray qui fut le premier évoque du Cap. En 1824 les Allemands de la Mission rhénane évangélisent les Hotle fleuve tentots à Stellenbosch. Onze ans plus tard ils franchissent Orange chez les Nama, puis chez les Herero et les Ovambo. En 1829, les colonies françaises leur étant fermées par ordre gouvernemental, les missionnaires protestants de la mission de Paris, Casalis, Arbousset et Gosselin, se rendent en pays tchouana lorsqu'ils apprennent qu'un chef a envoyé au Cap quelques centaines de têtes de bétail pour « acheter un missionnaire ». Ce bétail a été volé en route, mais l'intention exprimée est certifiée par le chasseur Adam Krotz qui s'offre à guider les nouveaux arrivants. C'est le début de la mission du Lessouto (1) qui se développe grâce au souverain Moshesh. De la mission du Lessouto est issue, grâce au pasteur Coillard, la mission du Zambèze (1885). La mission de Berlin vient en 1834 chez les Korana (S. W. de l'Etat d'Orange) et dans le Griqaland occidental avant d'aller (1859) chez les Ba Souto émigrés au Transvaal. Nous avons vu par ailleurs dans quelles conditions les missionnaires de Hermannsburg sont venus (1857) évangéliser les Ba Souto du Transvaal. 2. La Côte ouest-africaine. Nous avons déjà vu l'importance de l'effort consenti au Sierra Leone. des négro-américains Indépendamment qui avaient une formation (1) C. H. MALAN,La mission française au sud de l'Afrique, trad. MmeG. Mallet,éd. J. Bonhome, 1878, 235 p.
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AU xixe
SIÈCLE
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de Glasgow et d'Edimbourg les sociétés missionnaires chrétienne, Les discuss'unissent avec la L. M. S. pour envoyer six missionnaires. entraînent durant la traversée sions théologiques sépaentreprises chez les Sousration. Les missionnaires Greig et Brunton s'établissent des écoles... mais Greig est assassiné sou du Rio Pongo et commencent l'année suivante. de Glasgow meurent sur l'île Sherbro. Cette preLes missionnaires de la C. M. S. qui mière tentative, qui est un échec, attire l'attention des missions de Berlin fondé par Jaenicke... fait appel à l'institut En fait, ces missions étaient peu de chose : « pas plus de deux ou alors qu'ils trois écoles dans lesquelles des missionnaires allemands, le Soussou, encore d'apprendre enseignaient l'anglais s'efforçaient — à quelques garçons africains (souvent ne connaissaient guère qu'ils de négriers habillés et nourris aux frais de la misdes descendants sion) » (1). de la traite a enle décret de 1807 sur la suppression Cependant, et le débarquetraîné la constitution de la croisière antiesclavagiste ment d'esclaves libérés. Le gouverneur Me Carthy réussit à créer des etc) Waterloo, Hastings, villages de libérés (Wilberforce, Régents, de constituent un terrain Ces déracinés qui se peuplent rapidement. choix pour l'action missionnaire, alors que les collectivités païennes structurées sont beaucoup plus difficiles à pénétrer. le champ de mission de la Aussi Bickersteth, qui vient inspecter G. M. S. au Sierra Leone, comprend l'importance de ces esclaves libérés de tout l'ouest-africain provenant de plusieurs dizaines d'ethnies qui dans leurs pays d'origine. pourraient ensuite porter l'évangile En 1811 la mission méthodiste vient à son tour à Freetown, mais, comme le souligne le pasteur Jean Faure dans un manuscrit demeuré hélas inédit (2), « les méthodistes leurs caractéristiques ont apporté Ils sont en d'où une certaine autosatisfaction. religieuses d'Amérique, quelque sorte une enclave dans un milieu indigène qu'ils se refusent à pénétrer. L'oeuvre scolaire cependant est importante (en 1837 : plus de 1 100 élèves). Sur deux pasteurs africains consacrés vers 1840, l'un, Charles Knight poursuivra 35 années durant son ministère au Sierra Leone. Les méthodistes font une tentative en Gambie à la suite des Quakers et d'Anna Kilham (f 1832) qui, ayant appris le ouolof en Angleterre, vient fonder plusieurs écoles au cours de trois voyages. C'est en Gambie que, pour la première fois en Afrique (1836), il est question de traductions de l'évangile en mandingue par les soins du missionnaire Me Braid et de la Société biblique. La Sierra Leone au milieu du xixe siècle est exceptionnellement offiet un inspecteur développée (3). Fourah Bay forme des catéchistes ciel des écoles de la mission constate de la populaque « le cinquième tion est à l'école ». M. S., I, p. 95. (1) STOCK, History of C missions protestentes en Afrique occidentale, p. 18. (3) Infra, p.526 (3) Histoiredes
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Le Libéria, du fait que les noirs transportés des États-Unis en Africonnaît plusieurs déjà à des églises protestantes, que appartiennent tentatives missionnaires. La mission baptiste américaine issue de la Triennal Baptist Convention fondée en 1814 envoie deux prédicateurs. L'un d'eux, Lott Carey, arrivé en 1825 et devenu le bras droit du gouverneur Ashmum, est tué lors d'un coup de main des négriers. De 1835 à 1840, 18 missionnaires arrivent au Libéria (dont 14 meurent). Le missionnaire Cracker va s'installer chez les Bassajdont il transcrit lallangue. En 1833 arrivent des missionnaires de trois organismes : la mission méthodiste épiscopale, la mission presbytérienne américaine et l'American Board of Commissioners for foreign missions. La première sera illustrée par miss Farrington qui travaillera vingt années sur la côte et par John Seys originaire des Antilles qui installe une imprimerie pour éditer le journal de la mission, African luminer. La mission comprend 200 élèves. Un médecin viendra des prédicateurs noirs, 6 instituteurs, en 1836. Pinney, qui vient pour la mission presbytérienne américaine, ouvre une ferme missionnaire à Millsbury (1834). Devant les pertes la société décide (1837) de n'envoyer que des noirs. Enfin John Leighton Wilson est envoyé par l'American Board of Commissionners for foreign Missions. En 1835 la mission protestante épiscopale (branche américaine de l'église anglicane) envoie un prédicateur noir puis en 1836 le Dr Savage et le pasteur Payne qui va devenir l'un des plus célèbres évêques missionnaires. En Gold Coast, en dehors de l'activité de Thomas Birch Freeman, nous assistons aux difficiles efforts des missions de Bâle et de Brème. En 1828, la mission de Bâle, à la requête du roi de Danemark, reabandonné par les Moraves un demiprend le poste de Christianborg siècle plus tôt, mais cinq des sept missionnaires meurent dans les quelques mois qui suivent leur installation. Aussi le pasteur André Rys (1) débarqué en 1832 va-t-il s'installer en 1835 sur la colline d'Akropong où il parvient à constituer une communauté puis ouvre protestante des écoles. Deux missionnaires, Zimmermann et Christaller, s'attaquent au problème linguistique, le premier dans le dialecte ga, le second en twi. Un certain nombre de familles antillaises sont amenées comme auxiliaires de la mission. On leur doit l'introduction du café dans l'Akwapim. Les missionnaires de Brème qui arrivent en 1847 commencent d'abord leur action à Christianborg et Peki, mais, après la mort des quatre premiers missionnaires, ils s'installent à Keta (1853) et vont se spécialiser dans le pays évhé (2). fait plusieurs voyages A partir de ces postes, Christian Hornberger dans l'intérieur, notamment à Atakpamé et Ho. Les d'exploration postes missionnaires de la mission de Brème sont en plein essor lorsque OELSCHNEWII (MUne excellente biographie d'André Rys nous est donnée par WAI.TER Landung in Osu, Evang. Missionsverlag,Stuttgart 1959. MOLLER,Geschichleder Ewe Mission, Brème 1904. (2) Pasteur GUSTAV
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menace leur oeuvre. La paix achanti des cohortes le déferlement dans PAvatimé s'installent à Amedzofé revenue, les missionnaires all'installation années qui précèdent (1878). Pendant les quarante sont envoyés par Brème lemande au Togo, plus de cent missionnaires dans cette région. Ces missionnaires qui ont l'estime des Africains entre l'autorité de témoin et d'arbitre jouent un rôle d'interprète, du paslocales. Ce fut le cas notamment coloniale et les collectivités lors du traité de Djeloukové teur Homberger (1874) entre les chefs Anlo et le commodore Hewett. Lors de l'installation allemande au Togo, la mission de Brème est à au gouvernement copied d'oeuvre pour fournir une aide importante lonial. Les travaux du pasteur Jakob Spieth sur Die Ewestâmme, ceux sur la langue evhé font le plus grand du pasteur Diedrich Westermann honneur à la mission de Brème. L'expédition Crowther.
du Niger
— Thomas
Birch
Freeman
et Samuel
Ajayi
La campagne contre l'esclavage entreprise par Fowel Buxton (1) met en valeur les possibilités de commerce légitime et de mise en valeur Elle reprend le mot chrétienne. agricole de l'Afrique avec l'éducation de Metternich : « Il n'y a que le christianisme et la charrue qui puissent civiliser l'Afrique » (2). L'une des conséquences de la campagne de Buxton est de mettre en évidence l'idée que l'esclavage ne pourrait être supprimé qu'à sa source, c'est-à-dire en pénétrant Ainsi est dans l'intérieur de l'Afrique. décidée l'expédition du Niger (1841) qui comprend trois bâtiments et emmène le missionnaire Schôn du Sierra Leone et Samuel Crowther (3), ainsi que plusieurs de cette région chrétiens (originaires comme Thomas King et Jonas. d'Afrique) pour servir d'interprètes L'accueil reçu chez les Ibo est excellent, celui chez les Egara bien que moins bon, permet aux premiers éléments d'une ferme modèle d'être cependant installés. La baisse des eaux du Niger ne leur permet pas d'atteindre le Noupé, mais surtout cette croisière de colonisation s'achève en hécatombe. Schôn au retour laisse à Eggara le cathéchiste Thomas King et se regroupe à Fernando Po, on compte 41 morts. lorsque l'expédition Cette expédition coïncide avec le retour en pays yorouba de plusieurs centaines d'esclaves libérés (environ 500 entre 1839 et 1842) qui avaient racheté un navire négrier à Freetown et avaient organisé le retour le long de la côte jusqu'à Lagos. Ces hommes, chrétiens pour la Plupart, montraient dans leurs lettres les possibilités d'ouverture d'un nouveau champ au pays yorouba. la traite esclavesen Afrique et des moyens d'y remédier, trad. française 1840, (1) De des (2)Cité dans le J. M. E., 1841, p. 243. du Niger est traitée de façon fondamentale dans le 4e chapitre (Die (3) Lamission Kirche am Niger) du livre de PETERBEYERHAUS, Grundlegung der anglikanischen Selbstandigkeit der jungen Kirchen als missionarisches Problem, p. 123-162.
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écho. L'appel ainsi lancé devait avoir un extraordinaire décident d'envoyer Les Méthodistes Freeman alors installé à Cape de Thomas Birch Freeman, Coast. On sait l'étonnante personnalité fils d'une servante d'auberge anglaise et d'un Africain habitant Londres qui réussit d'intéressants contacts avec les souverains d'Abomey et de Koumassi et parvint à implanter les premiers échelons de l'église méthodiste sur cette partie de la côte ouest africaine (1). Malheureusement Freeman ne parlait aucune langue africaine et ses voyages des dépenses incessants, son activité un peu désordonnée entraînaient considérables d'autant plus mal vues du Comité de Londres que Freeman était incapable de tenir une comptabilité. Néanmoins c'est à ses efforts qu'est due la première implantation missionnaire au Nigeria, au Dahomey et au Togo. La C. M. S. de son côté fonde avec Townsend et Crowther la première mission anglicane à Abeokouta (1846) qui devient à l'intérieur un centre de renouveau, alors que les négriers commandent encore sur la côte. Townsend, lors d'un congé, sert d'ambassadeur des Yorouba auprès de la reine Victoria. La mortalité chez les missionnaires restant très élevée, devant les succès de Crowther, le secrétaire pour l'Afrique occidentale du Comité de Londres, Henry Venn, obtient l'autorisation royale de consacrer « un évêque indigène pour les pays situés hors des possessions britand'Oxford décerne par ailniques d'Afrique occidentale ». L'Université leurs à Crowther — eu égard à ses travaux linguistiques en yorouba — le titre de docteur Honoris causa. Ainsi Crowther (2) bénéficie de toute l'autorité de l'église d'Angleterre et de l'appui d'Henri Venn. Si en apparence son activité est analogue à celle de Freeman, en réalité il va beaucoup plus au fond, d'abord quant au travail linguistique (yorouba, ibo, noupé), ensuite quant à de catéchistes après ses visites, enfin quant à la lutte l'implantation contre l'influence musulmane. La mission
du Calabar
(3) et du Cameroun. en 1845 des Baptistes anglais installés Après une première tentative écossaise sous depuis 1841 à Fernando Po, la mission presbytérienne de Hope Wedel, missionnaire à la Jamaïque, réussit à s'iml'impulsion planter et à durer grâce à l'exceptionnelle longévité de trois pasteurs, Waddell, Goldie et Anderson qui devaient mourir en 1895 respectivement âgés de 80, 84 et 90 ans. En 1845 également, le missionnaire Saker s'installe à Douala sur la côte du Cameroun, puis, lorsque les rigueurs de l'Espagne catholique se font sentir à l'égard des protestants jamaïcains de Fernando Po (1858), il les installe au village d'Ambas qu'il appelle Victoria (Cameroun ocDes stations missionnaires sont installés à Deïdo et Bonacidental). (1) Cf. mon Histoire du Dahomey, Berger-Levrault 1962, p. 296 et la brochure de Paul WOOD-LAINÉ,Le missionnaire Freeman et les débuts de la mission protestantea Dahomey-Togo, Porto-Novo 1943. (a2 Supra, p. 310-311. (3) Donald Mc FARLANE,Calabar, Thomas Nolson, Londres 1957, 184 p.
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Fuller accomplit une beri (Hickory Town) où le pasteur jamaïcain oeuvre importante. l'oeuvre C'est au chapitre des explorations que nous envisagerons du pasteur Grenfell qui, de 1874 à 1884 avait reconnu au Cameroun le cours inférieur du Wouri, de la Dibamba, du Mongo et de l'Abo avant d'aller en 1884 chercher de nouveaux champs de missions sur l'Oubandu Congo. gui dans ce qui va devenir l'État Indépendant La Mission de Paris
au Sénégal.
du SénéLe passage du protestant au gouvernement Jauréguibery gal (1862) est l'occasion de la venue de la société des missions évangéJacques, s'établit à Sedhiou liques de Paris. Le premier missionnaire, en Casamance où il est rejoint en 1865 par Andrault, mais l'insalubrité fait replier l'entreprise sur Saint-Louis. les serA Saint-Louis, un nouveau missionnaire Villéger s'attache vices de Taylor. Né au Sierra Leone de parents yorouba, Taylor évangélise le quartier de Sor, puis vient à Paris suivre des cours ; il est consacré à l'Oratoire le 4 juillet 1878, est naturalisé français, rejoint enfin Saint-Louis où il se trouve bientôt seul avec une monitrice et un moniteur. Finalement l'action de la mission de Paris s'exerce parmi les esclaves Bambara libérés au village de Pont-de-Khor. Ainsi la mission de Paris a abandonné la Casamance où, sans concurrence catholique, elle aurait pu accomplir une grande oeuvre pour travailler dans le contexte des Bambara détribalisés de Saint-Louis. 3. L'Afrique de l'Est. Le travail missionnaire protestant sur la côte orientale de l'Afrique commence en 1844 avec Johann Krapf, Allemand au service de la L. M., de Mombasa et se S., qui tente sans succès d'évangéliser l'arrière-pays rendra célèbre, avec ses compatriotes Rebman et Ehrardt, par la découverte des monts Kenya et Kilimandjaro. Livingstone est missionnaire au service de la L. M. S. jusqu'en 1856. Son appel de décembre 1857 à Cambridge entraine dans les milieux universitaires un puissant mouvement cend'intérêt pour l'Afrique trale et la fondation de l'U. M. C. A. (Universities Mission to Central dirigée par l'évêque MacAfrica). Cependant, la première tentative, kenzie et fixée en 1861 dans la vallée du Shiré (émissaire du lac Nyassa vers le Zambèze), se solde par un échec total. En 1874 sous l'impulsion de l'évêque Steere, l'U. M. C. A. reprend son oeuvre en établissant deux centres destinés aux esclaves libérés à Magila et à Masasi des missions parmi les Yao et les Nyanja (Tanzanie) et en installant habitant à l'est du lac Nyassa (Malawi). En cette même année 1874 où les funérailles faites à nationales Livingstone ont déclenché le véritable départ des missions protestantes britanniques en Afrique, les églises écossaises décident de s'intéresser à la région du lac Nyassa. En 1875 les Presbytériens C. S. (F. — Free Church sur la rive occidentale of Scotland) fondent Livingstonia
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LES MISSIONS CHRÉTIENNES
du lac, tandis que l'Église d'Ecosse (C. S. M. = Church of Scotlani) fonde la station de Blantyre (du nom de la ville natale de Livingstone) dans les montagnes au sud du lac. Dès le départ les missions écossaises du lac Nyassa se trouvent confrontées à des problèmes de ravitaillement extrêmement difficiles. Pour les résoudre James Stevenson de Central African Trading ComGlasgow fonde en 1878 la Livingstonia pany dont le quartier général est à Mandala près de Blantyre. Après douze années d'existence indépendante la L. C. A. T. C. sera absorbée par la B.S.A. C. de Cecil Rhodes sous le nom d'Afrikan Lakes Corporation. Nulle part mieux qu'au Nyassaland n'apparaît la liaison entre les activités missionnaires, commerciales et enfin politiques delà Gran(1). de-Bretagne Le 15 novembre 1875 paraît dans les colonnes du Daily Telegraph des missionnaires l'appel de Stanley demandant pour le Bouganda. La C. M. S. (Church L'Eglise d'Angleterre réagit immédiatement. Missionary Society) avait jusque là borné son action à la région de Mombasa où elle avait fondé deux établissements pour les esclaves libérés (Freretown et Rabaï). Grâce à d'importantes contributions d'oriSmith et Wilson gine privée, la C. M. S. envoie les deux missionnaires par la route de Tabora et trois autres l'année suivante par la voie du Nil. Nous avons dit par ailleurs (2) le développement remarquablement rapide de la mission et son antagonisme d'abord théologique, puis politique envers les Pères Blancs du Cardinal Lavigerie arrivés au Bouganda à partir de 1878. C'est en 1875 également que la L. M. S. (London Missionary Society) sur les rives du lac Tanganyika, organise cinq stations missionnaires stations qui seront toutes abandonnées en 1893, cependant que la L. M. S. aura concentré son activité dans l'actuelle Zambie. coloniale allemande introduit sur le territoire de l'acL'implantation : Beihel tuelle Tanzanie allemandes plusieurs sociétés missionnaires Missions-Gesellschaft (1886), Mission de Leipzig (1893), Berliner Mission (1903). Au Kenya c'est seulement en 1898 que s'installe la East African Scottish Mission. Elle est suivie en 1899 par la C. M. S. et en 1901 par l'Africa Inland Mission. Si l'on fait le bilan des missions protestantes en Afrique au xixe siècle, on est d'abord frappé par les effrayantes hécatombes que provoque le climat sur la côte ouest africaine. Cette mortalité entraine l'installation de missionnaires de couleur beaucoup plus résistants. Dans cette perspective, en dehors des Yorouba comme Crowther, évêque en Nigeria et Taylor, pasteur de la mission de Paris au Sénégal, on a affaire à des métis venus d'Angleterre comme Freeman ou venus des Antilles (Jamaïcains au Calabar) et des États du Sud (Libéria). Ce phé(1)Lire pour toute l'Afrique de l'Est la pénétrante étude de R. OLIVER,The missionary factor in East Africa, Londres 1952, 302 p. 2° éd., 1965. (2) Infra, p. 168-172.
DU XVIe AU XIXe SIÈCLE
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nomène de « retour » qui s'arrêtera quasi-totalement après la guerre convenable au climat, mais d'asde Sécession montre une adaptabilité chez les païens de la brousse. sez grandes difficultés pour travailler noirs Aussi l'oeuvre sera-t-elle menée au Libéria parmi les protestants américains ; et à Freetown chez les esclaves libérés par la croisière qui à une action scolaire et évangélisatrice. plus perméables apparaissent A la fin du xixe et au début du xxe siècle, le nombre des missions si bien qu'en certaines rés'accroît considérablement, protestantes différente se disputent les mêmes gions plusieurs missions d'obédience fidèles. Par ailleurs, la diversité des méthodes présente de multiples c'est pour ces divers motifs que la Conférence d'Ediminconvénients, Elle doit être considérée comme le prebourg (1910) sera convoquée. missionnaire à l'échelle mondiale ; l'Afrique mier essai de coordination en profitera largement. et protesAu début du xxe siècle l'oeuvre missionnaire, catholique et l'action scientifique. tante, se confond avec l'action civilisatrice Sauf en Ouganda où l'affaire a tourné à l'affrontement sanglant, les missions catholiques et protestantes ne se gênent pas mutuellement. Elles deviennent en bien des endroits les auxiliaires de l'action colodes catholiques niale, d'où par exemple le remplacement français du Togo par les pères allemands du Verbe Divin et celui de certains missionnaires anglais à Madagascar français. par des protestants Si l'on fait au début du xxe siècle une carte de l'implantation des missions chrétiennes on s'aperçoit qu'elle coïncide avec celle de la richesse. Certes cette richesse correspond aux proches secteurs côtiers déjà depuis longtemps au contact des Européens et plus faciles d'accès, mais il y a peut-être cependant plan concerté pour que les collectivités chrétiennes puissent dès que possible subvenir financièrement à leurs constructions, à leurs écoles, à leurs prêtres. Chez les Protestants on trouve Voeuvre comme chez les Catholiques des orphelins. En ces périodes d'esclavage, racertains missionnaires chetaient les enfants pour en faire des chrétiens, mais alors les mauvaises langues disaient qu'ils avaient leurs propres esclaves. Le bilan scientifique des missions au début du chrétiennes xxe siècle est remarquable, l'effort scolaire est en plein développement. Par contre, les missions sont bien souvent dans la mouvance de l'autorité coloniale qui subventionne leurs oeuvres mais aussi les compromet vis-à-vis des nationalistes africains. Bien que des églises dissidentes à aient commencé (éthiopiennes) se manifester, les mouvements ne se développeront messianiques vraiment que postérieurement à la première guerre mondiale. Nous étudierons dans le troisième volume le rôle de l'impact missionnaire dans les sociétés africaines, si important pour leur évolution culturelle comme pour la genèse des nationalismes africains.
CHAPITRE L'EXPLORATION JUSQU'AU
XIV
DE L'AFRIQUE SCRAMBLE
Nous limiterons volontairement ce chapitre à l'essentiel. L'histoire des explorations de l'Afrique a en effet été écrite de multiples fois et les personnalités des explorateurs ont exalté de nombreuses générations d'Européens en raison des périls encourus et de l'importance des problèmes posés comme de la modicité des moyens mis en oeuvre pour les résoudre. Les explorateurs européens de l'Afrique doivent aussi sans doute une partie de leur gloire à Sir Baden Powell, fondateur du scoutisme mondial qui fit une partie de sa carrière en Afrique, et mourut au Kenya, aux responsables du scoutisme français (auquel Lyautey s'intéressa longtemps) comme du scoutisme autrichien dirigé quelque temps par Slatin Pacha. C'est d'Afrique que les exemples donnés à la jeunesse allemande, anglaise, autrichienne, belge, française, italienne, furent tirés. C'est africain a bien souvent une valeur d'exemple pourquoi l'explorateur alors que des exploits comparables auprès de la jeunesse européenne, accomplis par exemple au Laos par Pavie, au Thibet par les PP. Hue et Gabet sont beaucoup moins connus. Ce qu'on exalte encore aujourd'hui dans les manuels scolaires, ce sont les exploits individuels des explorateurs, ceux de Caillié, Barth, de sans se préoccuper de l'échelon arrière, c'est-à-dire Livingstone, et matél'opinion publique et de ceux qui ont soutenu moralement riellement l'entreprise. inOn ne peut séparer la recherche géographique du mouvement tellectuel qui agite l'Europe à la fin du xviiie siècle. Ce que nous avons dit à propos des abolitionnistes d'intérêt correspond au mouvement de la bourgeoisie libérale européenne pour le continent noir qui se développa au début du xixe siècle, soutint les explorations, puis servit avant d'épouser au milieu du xxe siècle la cause de l'impérialisme l'anticolonialisme.
L'EXPLORATION DE L'APRIQUE
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I. LE MOUVEMENT INTELLECTUEL, DE L'AFRIQUE LES IDÉES ET LA CONNAISSANCE A LA FIN DU XVIIIe SIÈCLE i. Le mouvement
intellectuel
du XVIIIe siècle.
Le milieu des Encyclopédistes français, celui de la Société des Amis au groupe anglais des Humanitarians des Noirs, correspond qui de curiosité géose développe à partir de 1780. Le mouvement en a son équivalent graphique déclenché par les Encyclopédistes Angleterre. Il est important de noter que les idées de cette bourgeoisie éclairée, en relation avec les armateurs et négociants, rejoignent les préoccupations économiques : demander à un continent beaucoup plus proche des produits exotiques (thé, café, cacao, tabac, sucre, épices) dont l'acheminement depuis les Indes orientales est aléatoire, long et coûteux. Parallèlement à la consommation croissante de ces produits, la botanique tropicale, à la suite des travaux de Michel Adanson au Sénégal, de Sparrmann (1772-76) en Afrique du Sud et de Palinot de Beauvois dans le royaume de Warri (actuelle Nigeria), connaît une immense en Angleterre. vogue particulièrement Par ailleurs de nombreux Africains se trouvant à Londres éveillent le l'intérêt des intellectuels sur leur origine, ce qui explique succès des Letters d'Ignatius Sancho et de l'Autobiography d'Olandah Eguiano (1). Les milieux intellectuels sont soucieux de s'instruire et si, en France, les Encyclopédistes se passionnent pour les récits de voyage, en Angleterre les bonnes bibliothèques possèdent des Collections of travels rendant compte des progrès réalisés dans la connaissance du monde. Toutefois l'Amérique où tant d'Européens sont allés s'installer représente une part notable des sujets des nouvelles publications, cependant que les explorations de Cook (1768-1778) attirent l'attention des lecteurs vers le Pacifique. C'est précisément un botaniste de Cook durant son compagnon et premier voyage, Joseph Banks qui, par ses qualités d'ethnologue de naturaliste, se fait élire en 1778 à 35 ans Président de la Royal années. Sa résidence Society, poste qu'il va conserver quarante-deux de Soho Square à Londres devient l'un des rendez-vous du monde savant. Une partie importante de son énergie et de son intelligence sera consacrée à l'exploration de l'Afrique (2). Du côté français les énergies qui auraient pu se trouver disponibles pour l'exploration de l'Afrique sont absorbées par l'expédition interesting narrative of the life of Olandah Eguiano or Gustavus Vassa, the (1) Thewritten by himself, Londres 1789; cf. THOMAS HODGKIN, Nigerian perspectives. african (2)ROBINHALI.ETT, Recordsof the African Association (1788-1831),p. 11.
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L'EXPLORATION DE L'AFRIQUE
résultats scientifiques que d'Egypte qui donne les extraordinaires l'on sait (1). Au xixe siècle, après 1815, l'Europe entre dans une ère d'expansion de stabilité monétaire. Les grandes industrielle, de paix internationale, puissances ont les mains libres, des militaires disponibles et de l'argent pour étudier le monde extérieur à l'Europe. L'exploration puis vont meubler leur oisiveté en donnant à une opinion la colonisation publique avide de gloire son contingent de héros. Si l'officier à la conquête des colonies est fréquemment attaqué et de la dans la presse en raison de la disproportion de l'armement sur les arcs, les saformidable des armes perfectionnées supériorité par contre, qu'il s'agisse gaies ou même les fusils de traite, l'explorateur de Livingstone, Barth ou Brazza, figure en avantageuse image d'Épinal sous l'aspect hâve et fiévreux d'un vagabond solitaire et barbu. Comme le dit André Leroi-Gourhan (2) : « Il marche et s'épuise, grelotte de fièvre, mange et dort avec les porteurs, perd ses cantines, laisse sa dernière paire de bottes dans un marais et vient frapper, couvert d'oripeaux, à la porte d'un planteur perdu à la frange du monde admis sur les cartes. C'est le dernier qui connaîtra les sentiments de précurseur de tous les explorateurs, du pèlerin des débuts. » Si l'African Association jusqu'au début du siècle assume une part c'est le gouvernement considérable des entreprises d'exploration, britannique qui prend la relève dès 1805. Les problèmes du Tchad, du Niger et de Tombouctou dominent les du début du xixe, ce qui tient aussi en préoccupations européennes en à l'installation partie à la croisière antiesclavagiste, britannique Sierra Leone et aux efforts français sur le haut Sénégal. Les colonnes les militaires françaises qui font la conquête de l'Algérie n'explorent franges sahariennes qu'à partir de 1850. Après l'Afrique de l'ouest, l'Afrique du sud à partir de 1820 fait son entrée dans les préoccupations avant qu'au milieu britanniques du siècle l'intérêt ne se transporte avec Livingstone vers l'Afrique centrale, les lacs, puis vers les sources du Nil. Après la mort de Liest inaugurée une période congolaise marquée, avec la vingstone Conférence de géographie de Bruxelles, par un essai de coordination du continent africain. générale des explorations Il faut relire la collection des bulletins de la société de géographie de Paris ou des sociétés de géographie de province ou des Petermann's Mâteilungen pour apprécier la place tenue par l'Afrique dans les des savants. préoccupations A ce sujet il faut admirer la promptitude avec laquelle les traductions des livres des explorateurs sont publiées. En ce domaine les lecteurs francophones sont en général beaucoup mieux informés sur (1)Cf. supra, p. 389-390. Les Explorateurs célèbres, éd. d'art Lucien Mazenod, Genève, (2) LEROI-GOURHAN, p. 12.
CARTE 21 : Les explorations.
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sur les les explorations que les lecteurs anglophones britanniques françaises. En effet, si le livre de Mollien fut très rapiexplorations dement traduit par Bowdich, par contre nombreux sont les ouvrages de Binger : Du Niger au Golfe de Guinée, français (le livre fondamental celui de Charles Monteil : De Saint-Louis à Tripoli par le Tchad, etc) anglaises. qui n'ont jamais bénéficié de traductions 2. Connaissance
de l'Afrique
an siècle des lumières.
A la fin du xviiie siècle que sait-on de l'Afrique? Guère plus que les vers de mirliton en forme mnémotechnique que récitent les écoliers. « L'Afrique a douze parts. Le Caire, Alexandrie, et Damiette et Suez en Egypte ; Barca, Tripoli près Tunis, Alger et puis Ceuta, Fez, Maroc sous l'Atlas sont de la Barbarie ; Le Bileduglrid, le désert ou Zara, Nigritie et Guinée, Cafres, Ethiopie. On trouve à l'orient le Monomotapa, le Zanguebar, l'Ajam, enfin l'Abyssinie. » Ce siècle qu'on appelle celui des lumières fut en effet une extraordinaire période de rayonnement européen où la France, malgré ses échecs maritimes et coloniaux, en raison de son avance démographique et culturelle, imprima sa marque et sa langue à l'Europe. Ce siècle des lumières fut, pourrait-on dire sans jeu de mots, celui d'une prise de conscience européenne des obscurités africaines, d'une ignorance à peu près complète de ce qui existe à l'intérieur de ce continent qui fournit à l'Europe par la traite une partie de son capital et de son bien-être. Après les travaux de Guillaume Delisle (1675-1726), ceux de Bourconstituent mise une remarquable (1697-1782) guignon d'Anville au point (1), un état de l'ignorance européenne surl'inlérieur du continent africain. La carte de l'Afrique est assez bien dessinée quant à ses contours extérieurs. Le Niger est noté comme coulant d'ouest en est... et se jetant dans le lac Tchad. De nombreuses cités sont situées sans de trop notables erreurs. Sur ces travaux, pour remarquables du xix° qui vont résoudre l'époque, vont travailler les explorateurs les uns après les autres les principaux problèmes. Mais tous les géographes rendent à d'Anville l'hommage qu'il mérite. Au lieu des monet des lacs bizarremment tagnes fantaisistes placés, d'Anville situe, référence à l'appui, ce qui peut l'être. Nous avons vu d'ailleurs que des parties relativement importantes de l'Afrique sont assez convenablement connues clans les régions visi(1) J. B. BOURCUIGNON d'ANVILLE,Mémoires concernant les Rivières de l'intérieur de ; Recueil des Mémoires de l'Académie des inscriptions et belles lettres l'Afrique64-81 Notice sur les Ouvragesde M.d'AnXXVI, (1759); J. D. BARBIERDUBOCACE, ville, Paris 1802.
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en Ethiopie, au Zambèze et en Angola, par les tées par les Portugais Français sur le haut Sénégal, par les Anglais sur la Haute Gambie. on dispose essentiellement des travaux Pour le Soudan occidental, d'Idrisi et de Léon l'Africain (1550) ainsi que des notes de quelques voyageurs. disserté sur les motifs de l'ignoDe bons esprits ont savamment africain. La « barrière » du à l'égard du continent rance européenne Sahara, les difficultés d'accès aux côtes en raison de la barre, la rareté l'obstacle des l'insalubrité du des fleuves forêts, navigables, valables mais la barrière du climat. Tous ces motifs sont assurément caravanes souvent Sahara laissait passer chaque année plusieurs des la barre n'empêchait très importantes, pas le débarquement de centaines de milliers d'esclaves. négriers, ni l'embarquement Quant aux fleuves, le Sénégal a été remonté par André Briie dès la fin du xviie siècle et la Gambie est une fort convenable voie de pénébientôt ses possibilités. En tration. Quant au Niger on appréciera L'or du Bamfait, ce qui arrête les voyageurs c'est l'absence d'intérêt. ou anglais bouk a été pour les chefs de comptoirs français de Saint-Louis du Fort James des motifs suffisants. Pour le reste on croit à la pauvreté de l'intérieur des souet l'on se soucie peu, devant l'hostilité verains africains des régions côtières, d'y aller voir. Seuls des missionnaires pour chercher des âmes à évangéliser ou des soldats sur ordre des explorations. pouvaient entreprendre Nous avons vu l'apport des missionnaires italiens du scientifique à vrai Ces renseignements Congo, des jésuites portugais d'Ethiopie. dire seront peu connus. en Ainsi deux prêtres italiens envoyés mission au Bornou en 1711 vont mourir de la dysenterie à Katsena (1). Nous avons vu d'autre part (2) l'échec des expéditions entreprises notamment sur la Côte d'Afrique orientale par les Portugais. Aussi, faute de pouvoir aligner des effectifs suffisants et disposant d'une supériorité d'armement qui ne sera réellement obtenue qu'à la fin du siècle avec les mitrailleuses, isolé reste l'affaire de l'individu l'exploration un âne, une pacotille) qui sait se faire accueillir par une (un interprète, société africaine, à laquelle il ne pose aucun problème de ravitaillement et pour laquelle il n'est pas une menace. de James Bruce à cet égard a une valeur éminente L'exploration d'exemple. 3- Importance
de l'exploration
de Bruce.
La romantique de ce voyageur écossais a été si souvent physionomie décrite (3) qu'il est inutile d'y revenir. On sait l'importance de son via Thèbes jusqu'à voyage depuis Alexandrie Koçeir puis, après une ) Le premier récit de celte mission obtenu soit par le Capitaine Srayth, soit (1 par le consul Warrington des pères catholiques do Tripoli ligure dans une note écrite par John BARROW, 1818, 181-3751. Quarterly Review, (2)iupra, p. 88-94. (3) Notamment avec beaucoup d'esprit par GRIAULEdans Les Explorateurs célèbres,éd. Mazenod, Gonève 1947, p. 104-107.
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escale à Djedda, son départ de Massaouah (1769) pour Adoua, Gondar, Sennar, Shendi. On lui doit sinon la découverte des sources du Nil bleu (1) déjà visitées par Jérôme Lobo qui fut en Ethiopie de 1625 à des jésuites), du moins une remarquable 1633, date de l'expulsion description de l'Ethiopie et du Sennar à cette époque (2). de Bruce eut une grande importance à cause du renom L'exploration acquis par cet explorateur qui mit très longtemps à publier ses notes de voyage parues seulement en 1790, mais démontra qu'un homme décidé pouvait accomplir de grandes choses sans importants moyens pécuniaires. Il laisse cinq volumes qui se lisent comme un roman et qui, effectuées, renseignent de façon grâce aux observations astronomiques sur la topographie de l'Ethiopie. remarquable IL L'AFRICAN
ASSOCIATION
ET SES ENTREPRISES
Les douze membres du Saturday'Club qui se réunissent à la taverne Saint-Alban et Pall Mail (les clubs constituent à cette époque une forme de la vie sociale) sont préoccupés de l'Afrique, aussi décident-ils le 9 juin 1788 de transformer leur club en une Association for promoting the Discovery of the interior parts of Africa. Parmi ces douze fondateurs, le plus remarquable est incontestablement Sir Joseph Banks, lequel a aidé en 1772 à l'envoi en Afrique du Sud de Francis Masson, un jeune botaniste et, en 1780 en Gold Coast de William Brass, jardinier du duc de Northunberland. Sir Joseph Banks est le premier trésorier de l'association, cependant que le premier secrétaire est Henry Beaufoy. La vie interne londonienne de l'association n'intéresse l'histoire du contides nent africain que dans la mesure où elle explique le comportement explorateurs engagés à son service et permet la solution des problèmes. i. Échec de Lucas et Ledyard. Dès la première séance l'association reçoit les propositions de Simon Lucas ; capturé dans son jeune âge par des corsaires sur la côte d'Espagne, il a passé trois ans à la cour du sultan du Maroc. Libéré, il est devenu vice-consul à Fès et s'est lié avec un ambassadeur de Tripoli, Abdrahman, qu'il a piloté dans Londres. Lucas offre d'aller de Tripoli au Fezzan, puis de là vers le sud. En même temps, John Ledyard, un Américain qui a participé au troisième voyage de Cook et dont la vie a été marquée par de multiples aventures depuis le passage du Nord-ouest jusqu'en Sibérie, offre à Banks ses services pour partir du Nil en direction de l'ouest. Ainsi toute une partie du nord-est de l'Afrique pourrait être explorée. Mal(1) C'est, semble-t-il, l'anglais Ch. Beke qui le premier démontra que le mérite de la découverte du Nil bleu appartient aux jésuites portugais Pedro Paës et Jérôme Lobo; in Bull. Soc. géog., Paris, mars, avril, mai 1848. Travellers in Ethiopia, O. U. P, (2) Cf. à ce sujet l'ouvrage de RICHARD PANKHURST, 1965, p. 67-82.
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meurt au Caire et Lucas ne peut partir en heureusement Ledyard raison de la révolte des tribus qui coupent la route de Mourzouk. son voyage avec un certain Inhammed (1), il a Toutefois, en préparant et les régions du Tibesti, du Borrecueilli sur le trafic transsaharien un progrès nou et de Katsena d'amples informations qui représentent certain sur Léon l'Africain. Au début de 1789, alors que Lucas est encore à Tripoli, un certain dans sa jeunesse Ben Ali, vivant à Londres, dit avoir visité Tombouctou et offre d'y accompagner un explorateur en partant de la Gambie. Le : un négociant nommé projet prend corps sous une forme commerciale de Philip Samson (qui devint plus tard directeur de la Compagnie Sierra Leone) accepte d'envoyer une cargaison pour être vendue à Tombouctou. Mais l'explorateur désigné, le Dr Swediaur, un Suédois né en Autriche, tombe malade et Ben Ali disparaît mystérieusement. En 1795 à Londres, Lucas reçoit et interroge un commerçant marocain, Asid el Hadj Salam Shabeni, dont il a connu les parents à Tétouan et qui a été libéré d'Ostende A grâce aux bons offices britanniques. 14 ans, Shabeni avait accompagné et en pays son père à Tombouctou haoussa. Il avait vécu douze ans dans ces régions sur lesquelles son rapport fournit d'intéressants (2). renseignements 2. Premières
lueurs sur le cours du Niger : Houghton
et Mungo Park.
En août 1789, le major irlandais Daniel Houghton offre ses services. Il a vécu au Maroc et a servi trois années à Gorée durant l'occupation anglaise de l'île. Il remonte la Gambie au début de la saison sèche de 1790. Bien reçu par le souverain du Bambouk il s'en va mourir en 1791 au Kaarta. Mais son rapport révéla que le Niger coulait vers l'est et non vers l'ouest. En 1794, James Watt (3) et Matthew Winterbotton, envoyés par la Sierra Leone Company, atteignent Timbo et Labé chez les Peuls du Fouta Djalon et reviennent résulpar le rio Nunez. Les intéressants tats de ce voyage sont éclipsés par ceux de Mungo Park. En juillet 1794 ce médecin écossais est engagé par l'association avec le même dont il suit la route ; après de objectif que le major Houghton à Ségou. Il est le premier Européen à multiples difficultés il parvient atteindre le Niger (20 juillet 1796) et à le remonter sur plusieurs dizaines de kilomètres. Ainsi Park confirme l'information de Houghton sur la direction prise par le cours du Niger. Cette exploration, magnifique témoignage d'énergie individuelle, lui permet d'insister sur la nécessité et l'urgence de développer des relations politiques et commerciales avec cette région d'Afrique. cit., p. 26. (1) ROBIN HALETTop An account of Timbuctou and Haoussa, Londres, 1820. (3)J.G JACKSON, du voyage de James Watt à Timbo est conservé à Rhodes House A Le manuscrit (Uxford),d'après CURTIN,The Image of Africa, p. 144, noto 4. II. CORNLVIN. _ Histoire de l'Afrique, Tome 11. 31
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L'EXPLORATION DE L'AFRIQUE
au voyage de Frédéric Hornemann, Dans l'introduction du voyage de Park (1) : Young souligne l'importance
Guillaume
« L'an 1798 sera toujours célébré comme l'époque mémorable où les recherches de cette société annoncèrent au monde que le cours du Niger était de l'ouest à l'est et, après un espace de 2 300 ans, confirmèrent le témoignage des Nasamons et la relation d'Hérodote contestée durant cette longue période par des écrivains anciens et modernes, et finalement rejetée dans le siècle dernier par le savant d'Anville. » 3. Brown et Hornemann. un autre Quelques mois après le retour de Park en Angleterre, explorateur, William George Brown, regagne Londres après un voyage qui, partant d'Assiout, l'a conduit au Darfour où il a été contraint de demeurer trois années. Mais, premier européen à être demeuré là, il documentation. Ces deux apporte sur cette région une extraordinaire réussites, à l'est celle de Park et à l'ouest celle de Brown, sont complétées par l'entreprise d'un jeune Allemand, Frédéric Hornemann. Fils d'un pasteur d'Hildesheim, il est présenté à la société en 1796, est envoyé à Gôttingen pour apprendre l'arabe et en général les sciences de l'aider dans son voyage. Il est notamment l'élève du susceptibles l'un des fondateurs de l'anthropologie. professeur Blumenbach, Revenu en Angleterre en mai 1797, il arrive à Londres en juillet, dont les puis se rend à Paris où il est reçu à une séance de l'Institut membres lui apportent leur aide, notamment l'astronome Joseph Lalande et le botaniste Pierre Broussonet, d'ailleurs tous deux fellows de la Royal Society. Lalande lui offre son Mémoire sur l'Afrique et le recommande Broussonet à M. Laroche, consul à Mogador, qui lui fait faire la connaissance d'un Turc de distinction, natif de Tripoli. Ce dernier lui donne à Paris de multiples renseignements sur les contrées qu'il doit aller visiter. C'est ensuite Marseille et Alexandrie, puis Le Caire où la campagne de Bonaparte le fait un moment interner. Il est bientôt libéré et les personnalités du corps expéditionnaire s'ingénient à faciliter son voyage, qu'il s'agisse de Monge, de Berthollet ou du général Bonaparte lui-même qui fait acheminer ses rapports à l'African Society. Au Caire, Hornemann s'est attaché comme interprète un Allemand, l'arabe et qui, ayant Joseph Frendenburgh, parlant très couramment été contraint d'embrasser l'islam, a participé à de nombreuses caravanes et fait à trois reprises le voyage de La Mecque. Ainsi équipé, Hornemann fait en 1798 le voyage de Siouah, Aoudjila, Mourzouk où meurt des fièvres, puis, ne voyant pas de caravanes susFrendenburgh ceptibles de l'emmener avant de longs mois, il regagne Tripoli pour rédiger son rapport. Il repart en 1800, passe par Bilma, Kouka, Kat(1) Voyagesdans l'intérieur de l'Afrique par Frédéric Hornemann pendant les années 1797, 1798, traduit de l'anglais chez André, libraire rue de la Harpe, Paris, 1802, p. XXIX.
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C'est sena et le Noupé où il meurt à Bokani d'une crise de dysenterie. à Tripoli un marchand ayant Lyon qui rencontrera l'explorateur d'Hornemann et obtiendra des renseignefait partie de la caravane ments exacts sur sa mort (1). fezzaretrouve les deux marchands Cinq ans plus tard, Clapperton rencontrés par Hornemann à Kano nais, Hat Salah et Benderachmani, avec lui lorsqu'il mourut. Malheureusement les et qui se trouvaient avaient brûlé avec son hôte Youssouf Fellata papiers de l'explorateur dans sa case (2). On mesure avec le recul combien proche de son but mort à quelques dizaines de kilomètres du Hornemann se trouvait Niger, à l'endroit où son cours s'infléchit vers le sud. Alors que l'association ne sait encore rien du destin du malheureux à partir de la Hornemann, Banks a l'idée de reprendre l'exploration côte du golfe de Guinée pour résoudre le problème du cours du Niger. Calabar, où des relations se trouvent déjà établies avec les chefs loNichols y meurt trois mois après caux, est choisi. Malheureusement son arrivée et l'entreprise est abandonnée. III. LES ENTREPRISES GOUVERNEMENTALES ANGLAISES A ce tournant de siècle ÏAfrican Association ne va plus jouer aucun rôle pour l'exploration de l'Afrique de l'ouest. Seul Henry Sait fera une brève exploration en Ethiopie (1809-1811). Burckhardt, qui va mourir avant d'entreprendre n'est le grand voyage transsaharien, connu en matière africaine que comme explorateur de la Nubie et c'est vers la vallée du Nil que les explorateurs de l'association, Gordon, Linant de Bellefonds et Welford, vont se diriger à la suite de l'expédition militaire de Méhémet Ali. Gordon (1821-22) et Welford (1830) s'en iront mourir au Sennar, cependant que Linant de Bellefonds ne pourra franchir la barrière du royaume Chillouk. de l'effort britannique consenti en Sierra Leone, la L'importance maîtrise des mers après Trafalgar sont autant de motifs qui poussent le gouvernement de Londres à prendre directement en charge les missions d'exploration, l'African Society prenant dès lors à son compte les explorations faites en des pays où son caractère et scientifique privé donnent des facilités qui seraient refusées à une entreprise officielle anglaise. i. Le second voyage de Park. Le gouvernement résultats britannique, après les extraordinaires de Mungo Park, lui offre on 1803 de repartir pour explorer à nouveau F- G- LYON,A narrative of Travels in Northern Africa, Londres 1821, (1)C APTAIN 132. p. ( ) DENHAMET CLAPPERTON, Narrative of Travels and discoveries in northern and central Africa, Londres 1826, II, 264, cité par B. V. BOVILL,Missions to the Niger,
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le Niger. Malgré les objurgations de son voisin et ami Sir Walter Scott, Park accepte et part le 27 avril 1805 avec une caravane de 42 ânes et 40 hommes dont 4 charpentiers et 34 soldats de la garnison de Gorée. La caravane gagne Ségou par une route plus courte que lors de sa première expédition, mais un excès de confiance a fait partir la est ravagé colonne en saison des pluies si bien que le détachement par les fièvres et qu'à l'arrivée à Ségou (19 août), son effectif est réduit à un charpentier et six soldats. Le souverain bambara lui donne un guide, Amadi Fatouma, et des pirogues. A Yaouri le guide débarque et la pirogue baptisée « Joliba » montée par le lieutenant Martyn, trois blancs, trois esclaves et Park, continue sa route. On sait comment, au cours d'une embuscade aux rapides de Boussa, leur pirogue heurta un rocher; Park, Martyn et les deux survivants européens moururent noyés. A Boussa, Park était bien près du but. Il avait sur près de 2 000 km découvert le cours du Niger et il doit être considéré comme l'un des plus grands explorateurs de tous les temps (1). D'autre C'est en effet part cette deuxième entreprise marque un tournant. la première exploration qui bénéficie d'un soutien gouvernemental considérable. 2. Burckhardt. On ne sut la fin tragique de l'exploration de Park qu'en 1811 et YAfrican Society accepta en 1808 les propositions d'un jeune Suisse de 25 ans, Johann Ludwig Burckhardt (2), qui devait apprendre à fond l'arabe pour faire avec une caravane le voyage du Soudan occidental. Mais sa préparation fut telle qu'en dehors d'une exploration en Haute Egypte et en Nubie (1813-1814) (3), il compte surtout parmi les tout du Moyen-Orient. Il est le premier Européen à premiers explorateurs avoir visité les lieux saints de l'Islam. Il s'apprêtait à partir avec une caravane vers l'Afrique centrale lorsqu'il mourut d'une dysenterie le 15 octobre 1817 à l'âge de trente-trois ans. 3. Le problème du Niger. Le major Houghton et Mungo Park ont démontré que le Niger coule d'Est en Ouest et trois, solutions sont alors proposées par le monde savant : le Niger aboutissant au Nil, le Niger rejoignant le Congo, ou encore (c'est la théorie du célèbre major Rennel) à un lac intérieur où l'eau s'évapore. Une quatrième solution a été proposée — en 1802 — par le géographe allemand Christian Gottlieb Reichard (4). Elle place (1) Cf. EDWARDLYNAM,Mungo Park in Les explorateurs célèbres,p. 108-109. Burckhardt (1784-1817)in Les explorateurs célèbres, p. 198-199. (2) HANSDIETSCHY, (3) Ses notes de voyage sur la Nubie (Travels in Nubia) furent les premières publiées par l'African Association (1819). Uber die Vermulhung desD' Seelzenzu .lever, dass sich der Niger (4) C. G. REICHARD, in Afrika vielleichl mit dem Zaïre vereinigen kônne, Monatliche Correspondani zur Befôrderung der Erd und Himmelskunde V, 402-15 (Gotha, mai 1802) et Uberden angekttndigten nun bald erscheinenden Atlas des ganzen Erdkreises, m Allgomsin' African Image, geographische Ephemeriden, XII, 129-70 (août 1803), cité par CURTIN, p. 203.
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l'embouchure du Niger dans le golfe du Bénin. Mais cette théorie a été rejetée en raison d'une chaîne de montagnes parallèle à la côte et qui de la fameuse chaîne de Kong formerait barrière. C'est le prolongement que l'on verra sur toutes les cartes pendant des années. britanAprès avoir financé le voyage de Park, le gouvernement achevées, essaie le Congo. nique, en 1816, les guerres napoléoniennes en désastre (1), après avoir Tuckey va se terminer L'expédition l'estuaire du fleuve. De 1816 à remonté sur environ 600 kilomètres 1821 des expéditions vont se succéder à partir de la Gambie. Après la mort du major Peddie, puis du capitaine Campbell, le major Gray, aidé du Dr Dorchard poursuit des explorations toutes vouées à l'échec en raison de l'opposition des souverains africains (2) et des maladies contractées. On peut même dire que c'est le métis saint-louisien Partarrieu qui, par son énergie et son habileté, empêcha l'expédition du major Gray de tourner au véritable désastre. IV. EXPLORATIONS
FRANÇAISES
A PARTIR
DU SÉNÉGAL
Ces explorations bénéficient du dynamisme des commerçants métis de Saint-Louis et Gorée qui veulent remplacer le trafic des esclaves par celui de la gomme et des produits du haut fleuve. Dès 1818, un poste militaire avec Du Mélay et de Chastellux s'installe à Bakel (où il demeurera du Sénégal) jusqu'à l'indépendance montant aux frontières du monde exploré une garde fiévreuse. Ce sont les soldats de cette garnison qui porteront assistance au major Gray. La même année 1818 le commis de la marine Mollien, un rescapé du radeau de la Méduse, parvient au cours d'une extraordinaire randonnée avec un interprète toucouleur Diai Boukari et un âne à traverser le Fouta Djalon et à découvrir les sources de la Gambie, de la Falémé, du Bafing et du Rio Grande. La relation de ce voyage (3) de Saint-Louis à Timbo et à Bissao fut traduite par l'anglais Bowdich et parut à Londres quelques mois après l'édition française. Mollien inaugure cette méthode d'exploration à revers qui sera plus tard illustrée par Binger et qui consiste à partir d'un point connu de l'intérieur pour aboutir en un point différent de la côte, surprenant ainsi et les chefs africains et les espions étrangers traînant dans les ports. En 1828, le commerçant s'établit au Khasso où français Duranton il se marie avec la fille du roi de Médine et mène une politique personnelle qui, sans lien avec les directives gouvernementales de Saint-Louis, accroît l'influence française en ces régions et facilite les explorations ultérieures. Bouet-Willaumez cherchant l'accès du Niger charge le commissaire (1)Cf. mon Histoire du Congo, p. 77- 78. ( ) GRAYET DORCHARD, Travels in western in Oie Years 1818, 19, 20 et 21, Londres 1825 ; trad. française : Voyagedans Africa Paris 1826, 394 p. occidentale, l'Afrique ) G. MOLLIEN,Voyage dans l'intérieur de l'Afrique, 1820 (t. 1 : 337 p. ; t. 2:318p.), trad. anglaise Travels in the interior of Africa.
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L'EXPLORATION DE L'AFRIQUE
de la marine Anne Rafîenel (1), le pharmacien Huard-Bessinières et le Saint-Louisien Potin Patterson, d'une exploration vers commerçant l'intérieur. Après Bakel, ils visitent les mines d'or de Kéniéba et reviennent à Saint-Louis par la Gambie en 1844. Deux ans plus tard, en 1846, le même Rafîenel accompagné du métis Saint-Louisien Léopold Panet part vers l'est, mais ils ne peuvent dépasser le Kaarta où ils restent huit mois prisonniers. Deux ans plus tard, Léopold Panet réussit la première liaison de Saint-Louis à Mogador, apportant le premier témoignage écrit d'un Africain en langue française (2). V. LA SOLUTION
DES PROBLÈMES
DU NIGER
ET DU TCHAD
vont être C'est par l'Afrique septentrionale que des explorations à nouveau entreprises depuis Tripoli qui bénéficie de la présence d'un le colonel Warringvice-consul anglais particulièrement dynamique, très discutée et souvent encombrante, ton. Personnalité auquel ses supérieurs londoniens passent tout en raison de son mariage avec une fille naturelle du Régent ou peut-être du Roi, il demeure en poste de 1814 à 1846 à Tripoli où il exerce, de longues années durant, une très forte influence sur le pacha et joue un rôle considérable en tant vers le sud. que base arrière des explorations britanniques Grâce à son intervention, Joseph Ritchie est nommé vice-consul pour le Fezzan avec résidence à Mourzouk. Après sa mort, l'un de ses compagnons, George Francis Lyon, écrit un rapport (3) sur son voyage, apsur le Soudan nigérien. En 1821 portant de nouvelles informations comprenant le Dr Walter Oudney, le major Dixon part l'expédition Denham et le capitaine Hugh Clapperton. Denham explore la région au sud et à l'est du lac Tchad, Clapperton visite Kano et Sokoto. Il est reçu par le sultan Ahmadou Bello. Malgré le décès du Dr Oudney, le résultat est remarquable (4). Le lac Tchad a été découvert le 4 février 1823 et les explorateurs ont démontré qu'il n'a aucune relation avec le Niger. Depuis Hornemann, dont on connaît le destin, ils sont les premiers Européens à avoir vu le Tchad et à avoir pu en témoigner lors de leur retour en Angleterre (1825). Pour élucider le problème du Niger, deux expéditions sont envoyées : l'une depuis Tripoli, celle de Gordon Laing (5) qui simultanément a déjà montré ses capacités lors d'une mission effectuée au Fouta Mac Carthy, mission au Djalon en 1822 sur l'ordre du gouverneur cours de laquelle il a visité Falaba et les sources de la Rokelle. L'autre (1) ANNERAFFBNEL,Voyage dans l'Afrique occidentaleexécutéen 1843 et 1844, éd. Artus Bertrand 1846, 512 p. Relation d'un voyagedu Sénégal à Es Soueira, Revue Coloniale, 1850, p. 379-445. 2) A Narrative of Travels in Northern Africa in the Years 1818, 19, 20. (3)DENHAM ET CLAPPERTON, Narrative of travels and discoveries in northern and 4) central Africa in the years 1822, 1823 and 1924, Londres 1826 ; trad. Eyriès et Larenaudière, Voyageset découvertesdans lenordetdans lesparties centrales de l'Afrique, Paris 1826. (5) G. LAING,Travels in the Timanee, Kooranko, and Soolima Countries in Western Africa, Londres 1825 ; trad. Eyriès et Larenaudière, Paris 1826.
L'EXPLORATION DE L'AFRIQUE
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partant de Badagry va essayer de gagner l'empire peul. Clapperton Old Oyo, Boussa, Zaria, Kano, Sokoto, mais le passe à Abéokouta, sultan Ahmed Bello refuse de signer le traité de commerce et d'amitié avec l'Angleterre. Clapperton, qui meurt à Sokoto, est le premier Européen qui soit parvenu au même point de l'Afrique intéde la Méditerranée rieure en partant successivement et du golfe du Bénin. Son domestique, Richard Lemon Lander, rapporte ses notes (1) à Badagry (1828) et, avec son frère, remonte jusqu'à Boussa puis descend le Niger jusqu'à Brass (1830). Le problème du cours du Niger est alors définitivement résolu (2). Un commerçant, Me Gregor Laird (3), à la tête de l'African Inland Commercial Company, vient installer un poste commercial au confluent Niger-Bénoué en 1832/33, puis Par ailleurs longe la Bénoué sur quelques dizaines de kilomètres. Beecroft remonte en 1842 la rivière Cross, cependant que Baikie en 1854 navigue sur la Bénoué jusqu'au-delà de Yola.
VI. TOMBOUCTOU
LA MYSTÉRIEUSE
hante les Lié au problème du Niger, le problème de Tombouctou pensées de nombreux voyageurs qui ont entendu les récits des caravaniers arabes et pensent à une ville fabuleuse, centre commercial et culturel important. Après Park, c'est Gordon Laing qui part de Tripoli. Nous venons de voir le succès de sa mission au Fouta. Par la suite il a participé à la campagne de l'Achanti où fut tué Mac Carthy et a été choisi pour rendre compte à Londres de la gravité de la situala connaissance de tion, ce qui lui a permis de faire personnellement lord Bathurst, fondateur du Colonial Office. Arrivé à Tripoli, Laing et, deux jours épouse Emma, deuxièmb fille du Consul Warrington il est tué à une cinMalheureusement après, part pour Tombouctou. quantaine de kilomètres de Tombouctou par les Bérabiches. Ses papiers sont brûlés et il est décapité (4). Son corps devait être retrouvé par Bonnel de Mézières lors de l'enquête prescrite par le gouverneur Clozel en 1910. La personnalité de René Caillié (1799-1838) est aussi émouvante Les Britanniques dont nous venons d'étudier les exqu'exemplaire. ploits sont des officiers de bonne famille. Au contraire, le père de René Journal of a second expédition into the interior of Africa from (1) HUGHCLAPPERTON, the Bight of Bénin to Soccatoo,Londres 1829. — R. L. LANDER,Records of Captain Clappertons last Expédition in Africa... ivith subséquent Adventures of the author, Londres 1830. (2) RICHARDET JOHNLANDER,Journal of an Expédition to explore the Course and Termination ofthe Niger, Londres 1832. (8) LAIRDETOLDFIELD, Narrative of an Expédition into tho interior of Afica, Londres 1397, 2 vol. DEMÉZIÈRES, (4)Cf. BONNEL Le major GordonLaing, Paris 1927 et surtout les remarquables commentaires de BOVILLaux Lettres of major Gordon Laing (1824-1826) dans Missions to Ote Niger, The Hakluyt Society, Londres 1964, p. 123-390.
L'EXPLORATION DE L'AFRIQUE
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Caillié (1) entrait au bagne de Rochefort quelques semaines après sa naissance. Ce malheur infamant est peut-être partiellement à l'origine de cette volonté mûrie dans la solitude chez cet apprenti cordonnier de 17 ans qui réussit à partir avec le convoi du Colonel Schmaltz allant reprendre en compte le Sénégal. Après de multiples péripéties il fait partie de l'expédition du major Gray. Rentré en France, il repart au Sénégal en 1824 et passe deux ans chez les Maures où il apprend quelques mots d'arabe et met au point son histoire : enlevé tout enfant par les soldats de Bonaparte en Egypte, il veut regagner sa patrie. Parti de Boké en 1827, il met un an pour atteindre Djenné sur le Niger où il troque son parapluie contre une pirogue. Il embarque le 23 mars 1828, descend le fleuve et arrive à Kabara, le port de Tombouctou. Il reste 15 jours dans cette ville « triste, bâtie dans les sables, où les gens, faute de bois, brûlent la fiente de chameaux, où il faut acheter de l'eau sur le marché, où l'on n'entend pas le chant d'un oiseau ». Parti le 4 mai avec une caravane de Maures il traverse le Sahara par Araouane et le Tafilalet. Il est à Fès le 12 août et à Tanger le 7 septembre. La Société de Géographie de Paris lui accorde sa médaille d'or. Son président/ M. Jomard, fait éditer le récit de son voyage (2). Mais la santé de l'explorateur est ébranlée et il meurt quelques années plus tard, à 39 ans, sans avoir pu retourner en Afrique. Son oeuvre scientifique est immense. On doit à Caillié d'avoir démystifié la fabuleuse cité de Tombouctou, de l'avoir ramenée à son rang (déchu sur les grandes heures de l'empire Sonrhay) de bourgade de quelques milliers d'âmes. Marcel Griaule a dit à propos de René Caillié : « Il est le type de l'explorateur pauvre, exempt de tout souci de lucre, seul devant la difficulté. Il reste l'un des plus beaux exemples de la ténacité française. » VII.
LES
EXPLORATIONS DU MILIEU DANS L'OUEST AFRICAIN
DU
SIÈCLE
Cette période correspond à la grande campagne antiesclavagiste européenne, celle de Fowel Buxton. On note le voyage de John Duncan au-delà d'Abomey à la recherche des montagnes de Kong (184546) pour le compte de la Royal Geographical Society (3), mais surtout l'exploration majeure du demi-siècle, celle de Richardson, Overweg et Barth. i. Exploration
de Richardson, Overweg et Barth. James Richardson avait occupé des postes consulaires au Maroc et à Tunis. Il était vice-consul à Ghadamès lors de la conquête turque (1) Sur René Caillié, cf. ANDRÉBASSET,Caillié, in Les explorateurs célèbres,p. 110-111, et les livres de BRIAULT,H. CÉLARIÉ,LAMANDÉ G. DE ET NANTEUIL, J. NORMAND, RAULIN,etc. (2) Journal d'un voyage à Tombouctouet à Djenné dans l'Afrique centrale, Paris 1830, 3 vol. + atlas, réédition éd. Anthropos, Paris 1965. Travels in westernAfrica, Londres 1847. (3) J. DUNCAN,
L'EXPLORATION PE L'AFRIQUE
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du récit de ses voyages (1) lui donne la de la Libye. La publication son idée d'ouvrir notoriété qui fait accepter par Lord Palmerston au commerce britannique l'Afrique de l'ouest. Le géographe berlinois Ritter et le baron von Bunsen, représentant de la Prusse à Londres, font admettre comme adjoint à Richardson un jeune Allemand, Heinrich Barth qui, après une solide formation a déjà archéologique, accompli un important périple méditerranéen (1845-47) par l'Espagne, le Maroc, la Tripolitaine, il « rentre à Berlin durci, sportif, l'Egypte... géographe accompli, féru d'arabe et d'islamisme, passionné par cette Afrique qui ne lâche plus le coeur de ceux qui l'ont connue » (2). Un moment, par amour filial, Barth se désiste pour son ami Overweg, agréé en second par Richardson, mais le démon de l'aventure est le plus fort et il se joint finalement à eux. Le 2 avril 1850, c'est le départ pour le Fezzan, l'Aîr et les terres inconnues. Au début de 1851 les voyageurs se séparent, se donnant rendez-vous pour fin avril à Kouka sur le Tchad. Barth explore le Kanem et rentre à Kouka le 2 avril. Il y apprend la mort de Richardson au Bornou et le 7 mai accueille Overweg fort mal en point. Ce dernier se rétablit et, utilisant le canot démontable emporté depuis Tripoli, explore le lac. Cependant Barth gagne PAdamaoua, découvre la Bénoué et sa navigabilité (3) jusqu'à Yola d'où il se fait chasser. Revenu le 8 août à Kouka, Barth se joint à des expéditions militaires qui lui font connaître le Kanem. En mars 1852 il accompagne les soldats du sultan du Baghirmi vers le sud-est et visite le Chari. De retour à Kouka il trouve Overweg très affaibli après sa récente exploration du Bornou et qui meurt en septembre après avoir perdu la raison. La route de Zanzibar, objectif il réside quelqueprimitif de la mission, se révélant impraticable, temps à Zinder d'où il expédie à Tripoli le résultat de ses explorations.Puis il marche vers Say, visite Tombouctou en septembre 53. Le' 2 août, 1854 il prend congé du chef de Say. Sur le chemin du retour il rencontre Vogel envoyé à sa recherche et avec lequel il a la joie de Puis il regagne Tripoli et en s'exprimer en sa langue maternelle. septembre 1855 il est à Londres. L'oeuvre de Barth a un caractère exemplaire. et la L'intelligence culture jointes à une exceptionnelle puissance de travail lui ont permis d'apprendre le haoussa, le peul, le kanouri, les dialectes touareg ; de l'histoire il montre archéologue de formation, l'importance médiévale des empires soudanais, décrit les moeurs et apporte un extraordinaire coup de projecteur sur toute une région. Comme le soulignait Jacques Richard-Molard, Barth est un géant parmi les africanistes non seulement par la richesse de la documentation, mais encore par la grandeur humaine de la pensée, lui qui, à la veille de sa mort, donnait comme idéal de « faire rentrer dans la famille humaine des peuplades que leur milieu et historique en avaient géographique W J. RICHARDSON, Travels in the Great Désert of Sahara, Londres 1848. Barth in Les explorateurs célèbres, p. 116. RICHARD-MOLARD, (3) JACQUES information, parvenue à Londres au début de 1853, permettra les démarches Cette de Mc Gregor Laird et l'exploration de Baikie (été 1854).
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L'EXPLORATION DE L'AFRIQUE
in Nord und Zentenu à l'écart » (1). Ses Reisen und Entdeckungen tral Afrika in den Jahren 1849 bis 1855 (2) sont une oeuvre monumenencore. tale sur laquelle les chercheurs de tous les pays travaillent Les notes de Vogel, après sa mort au Ouadaï, furent éditées en Allemagne par Hermann Wagner (3). de Barth clôt une période, celle des expéditions pureL'expédition de Protêt et FaidA partir des gouvernements ment scientifiques. sont du ressort de l'expansion coloniale. Elles herbe, les entreprises saharienne. coïncident avec la pénétration s. Explorations
françaises.
Bou el Après l'exploit du métis goréen Léopold Panet, l'interprète cependant que le Capitaine Moghdad fait la liaison Maroc-Mauritanie, Vincent affirme la souveraineté française sur la côte au nord de Saintet Portendik ; il en profite pour Louis, sur Arguin via Nouakchott explorer l'Adrar. L'enseigne Bourrel aux environs d'Aleg, le lieuteAlioune nant de vaisseau Mage au Tagant, enfin le sous-lieutenant Sali dans la région d'Araouane les renseignements complètent à la reprise de la pacification dans la proche Mauritanie indispensables vers et le Sahara soudanais. Faidherbe multiplie les reconnaissances le Soudan : le sous-lieutenant Pascal explore la haute Falémé, le lieutenant Lambert atteint le coeur du Fouta Djalon à Timbo, puis rela plus importante base d'action vers l'intérieur. joint Senoudébou, En inaugurant en Guinée un monument à la gloire de René Caillié, Faidherbe matérialisées soudanaises par les marque ses ambitions de Mage et Quintin dans la région de Ségou. explorations Mais ces explorations de Faidherbe — est-il besoin de le dire ? — ont un but nettement Il s'agit d'agrandir le domaine de la politique. souveraineté a fait campagne en française et peut-être (Faidherbe Algérie) de joindre les domaines sénégalais et algériens de la France. La conquête de l'Algérie, réalisée à partir de 1830 par la France, ouvre de l'Afrique à la recherche ; les documents arabes une part importante conservés en Afrique du nord peuvent être exploités et une fraction non négligeable de cette zone s'ouvre aux chercheurs d'abord français, mais aussi étrangers : Berbrugger, et archéologue, Von ethnographe etc. Puekler-Muskau, Wagner, géologue et ethnographe, Ce n'est qu'à partir du milieu du siècle que les colonnes françaises la limite du désert : Laghouat atteignent (1852), Géryville (1853), (1854). Puis c'est une longue pause jusqu'à la Ouargla et Touggourt prise d'El Goléa par le général de Galliffet en 1870. le Touat en 1859, part d'El Oued Duveyrier, qui n'a pu atteindre le dans le Sahara constantinien, s'avance vers Ghadamès, puis gagne d'écrire Ghat. Les notes recueillies pendant son voyage lui permettent MOLARD, (1) RICHARD op. cit., p. 117. (2) Voyages el découvertesdans l'Afrique équatoriale et centrale pendant les annal 1849-1865, Paris 1860-61. 4 vol. der Reisen und Enfdeçkmgen des Dr Eduard Vogel in Central Afrika OSchUderung lipzig 1860.
L'EXPLORATION DE L'AFRIQUE
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son monumental ouvrage sur les Touaregs du Nord où sont étudiées simultanément géographie, flore et faune du pays des Touareg Ajjers. de Joubert (1873-74), de Paul Les explorations de Dournaux-Duperé, Soleillet (1874), de Largeau (1875-1877), ont complété ces premières notations. Après avoir servi dans la légion étrangère, l'Allemand Rholfs comsérie d'explorations. Il quitte Tanger en mence une extraordinaire 1862 sous un déguisement et visite Fès, Marrakech et le Tafilalet. En 1864 il visite le Touat, puis gagne Tripoli par Ghadamès. En 1865, par Mourzouk, il atteint le Bornou et descend la Bénoué et le Niger. Après avoir participé à l'expédition anglaise du colonel Napier en Abyssinie, Rholfs va de Tripoli à Siwa et à Alexandrie, puis retourne à Siwa en 1874 avant d'entreprendre une fois encore une exploration au Ouadaï, qui ne peut dépasser Koufra. En 1869, un autre Allemand, Gustave Nachtigal, s'en va par Tripoli, le Fezzan, le pays toubou, porter les cadeaux du roi de Prusse au vieux cheikh Omar du Bornou. Depuis Kouka, Nachtigal suit la route méridionale du Tchad et remonte le Chari. Il traverse ensuite le Baghirmi, le Ouadaï méridional, le Darfour et rentre en Europe en 1874 il a révélé à l'Europe les par la vallée du Nil. Par ses explorations, états du Soudan oriental jusqu'alors inconnus et marqué de façon définitive qu'il n'existait pas de communication fluviale entre Tchad et Nil. VIII.
EXPLORATIONS ET ORIENTALE.
AUSTRALE DANS L'AFRIQUE DAVID LIVINGSTONE
Les efforts britanniques durant cette période ne sont pas, dans l'ouest, très considérables. Ce sont les problèmes de l'Afrique australe et orientale qui polarisent les énergies. i. En Afrique Australe nous avons vu les conditions particulières des explorations En 1801 Truter après les voyages de Levaillant. et Sommervil passent le fleuve Orange et explorent le Betchouanaland, poussant une reconnaissance jusqu'au lac Ngami. Lichtenstein dépasse vers le nord le confluent de l'Orange et du Vaal (1803) cependant que le missionnaire Campbell en 1812 relève le cours du fleuve Orange et découvre les sources du Limpopo. Plusieurs explorations entreprises à partir de 1822 près de la baie de Delagoa s'achèvent en 1826 par la tragique fin de l'explorateur Owen sur le Zambèze. En 1829, Cowie et Green font des reconnaissances de détail dans le Natal. Si l'année 1833 est connue pour être celle du premier trek boer, elle voit la fondation de l' Association du Cap de Bonne Espérance pour l'exploration de l'Afrique Centrale. Smith en 1834 atteint le tropique du Capricorne et reconnaît le cours supérieur du Limpopo ; en 1836, Harris visite le Betchouanaland, cependant qu'Alexander se rend à travers le Namaqualand du Cap à la baie de la Baleine. Wahlberg, en 1841-43, reconnaît la zone située au
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L'EXPLORATION DE L'AFRIQUE
nord du Natal. Le pasteur (1836). C'est donc à partir va travailler Livingstone. 2. David Livingstone
Arbousset reconnaît les sources de l'Orange d'une zone déjà passablement reconnue que
: Du lac Ngami aux sources
du Nil.
dans la découverte de l'Afrique La part qui revient à Livingstone n'a pas d'équivalent. On ne sait en effet ce qu'il faut admirer le plus, ou des résultats scientide la personnalité morale de ce missionnaire fiques obtenus. Comme le souligne Bernard de Vaulx (1) : « Il a, le premier, exploré le centre de la partie australe du continent africain, découvert le cours du haut et moyen Zambèze, les lacs Ghiroua, Nyassa, vu le Tanganyika, précisé la ligne de partage des eaux entre le Congo et le Zambèze, fait connaître enfin dans un récit, passionnant encore aujourd'hui, la richesse de ces contrées considérées avant lui, sur de vagues témoignages, comme à peu près désertiques. » Les livres concernant se comptent par centaines et il Livingstone est inutile de rappeler l'enfance de ce garçon qui dut travailler à dix ans dans une filature et poursuivit des études en des conditions effrayantes, celles d'une usine où la journée de travail était de douze heures. A Glasgow il achève sa médecine et se fait consacrer par la société des Missions de Londres. Il est destiné à la Chine, mais la guerre de l'opium le conduit en Afrique. Après un bref séjour à la baie d'Algoa (1840), il se rend en char à boeufs à Kourouman, puis plus au nord à Kolonberg où il s'installe avec sa famille. C'est à partir de là qu'il fait ses premières randonnées qui l'amènent le 1er août 1849 au lac Ngami. En avril 1850 il repart vers le nord avec sa femme et ses trois enfants et en juin 1860, à Séshéké, il découvre le Zambèze et constate que la traite sévit avec la côte orientale. Après avoir renvoyé sa famille en Angleterre (1852), il va chez les Makololo de Linyanti puis explore le Liambaï, lit principal du Zambèze. Constatant le caractère malsain de cette région et les difficultés d'un poste missionnaire, il franchit la ligne de partage d'implantation des eaux du Zambèze et du Congo et atteint Loanda fin mai 1854. Il regagne alors le Zambèze et, en novembre 1855, repart de Linyanti, remonte le Zambèze, découvre les chutes de Victoria. En mars 1856 il atteint le poste portugais de Tété au Moçambique d'où il rejoint Quélimane (22 mai 1856) et de là rentre en Angleterre. Ces seize années de séjour et de voyage africain en font une personnalité dont l'importance est exceptionnelle au triple point de vue missionnaire et britannique. Sur le plan géographique géographique, il confirme la théorie de Murchison que cette partie du continent africain est un plateau déprimé au centre, en forme d'auge, coupé de fissures latérales par où les fleuves gagnent la mer. Sur le plan (i) En Afrique : cinq mille ans d'exploration, Paris 1960, p. 145.
L'EXPLORATION DE L'AFRIQUE
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est à l'origine de la Mission Universimissionnaire, son intervention le gouvertaire pour l'Afrique centrale. Enfin sur le plan britannique, nement le nomme consul à Quélimane et chef d'une nouvelle expédition en Afrique centrale et orientale bénéficiant de puissants moyens à vapeur pour remonter le Zambèze. Plusieurs dont un bâtiment John Kirk, le futur consul à Zanzibar, Européens l'accompagnent. son frère Charles Livingstone, un géologue, un ingénieur et un artiste. en mars 1858, l'expédition éprouve d'abord Quittant l'Angleterre des difficultés. Tété est atteint en septembre. Le lac Chirwa est découvert puis, le 16 septembre 1869, le lac Nyassa (déjà connu des Portugais). Après avoir installé des missionnaires sur le plateau de Shiré, Livingstone revient à la côte et trouve un groupe de dames missionnaires dont sa femme qui bientôt succombe aux fièvres. Le rappel de ne doit pas faire minimiser les résultats l'expédition en Angleterre obtenus, résultats bien maigres il est vrai, compte tenu des moyens du cours mis en oeuvre puisqu'ils se limitaient à une reconnaissance de la Luangwa et du lac Nyassa. Son retour à Londres, en juillet 1864, coïncide avec l'approfondissement de la recherche des sources du Nil à la suite des découvertes de Speke et Grant. Sir Roderick Murchison, président de la Société royale de Géographie, persuade Livingstone de combiner la recherche d'une voie d'accès au Nyassades sources du Nil avec l'exploration suit la en août 1865, Livingstone land. Ayant quitté l'Angleterre vallée de la Rovouma, atteint le lac Nyassa, puis le Tanganyika et le lac Bangouéolo (1er avril 1867), le lac Moëro (8 novembre) (18 juillet 1868). De là il remonte le lac Tanganyika vers Oudjidji où il parvient le 14 mars 1869, puis s'avance à l'ouest du lac pour vérifier si les cours d'eau appartiennent au réseau du Nil. En mars 1871 il atteint à Nyangwé le Loualaba. C'est en revenant à Oudjidji qu'il reçoit la visite de Stanley envoyé à sa recherche par le New York Herald. Les deux hommes font ensemble la circumnavigation du lac Tangaavec le réseau nyika qui leur confirme la non-liaison du Tanganyika du Nil. Ils se séparent à Ounyanyembé. Stanley repart à Zanzibar. puis part en direcLivingstone attend une colonne de ravitaillement, tion du lac Bangouéolo. Mais il est épuisé, on doit le porter et il meurt dans la nuit du 30 avril 1873. Le bilan de ses trente-trois est africaines années d'explorations extraordinaire. de l'Afrique lui doit Si la connaissance géographique beaucoup, c'est en réalité tout un tableau de l'Afrique centrale et orientale verdoyante, peuplée et riche qui est portée à la connaissance de l'opinion publique britannique. 3- Explorations
dans l'Afrique
centre-australe.
La valeur exemplaire des explorations de Livingstone ne faire oublier les autres explorations de cette époque. Ainsi Magyar en 1847 visite le Kalahari, puis en 1848 remonte jusqu'à Yellela, puis longe le cours du Kwanza jusqu'au
doit pas Ladislas le Congo Kwango.
L'EXPLORATION DE L'AFRIQUE
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L'année suivante il part de Benguela puis atteint le royaume de Biné où il épouse la fille d'un chef local. Il part ensuite vers l'est jusqu'à la Welwitsch trahaute vallée du Zambèze et du Congo. Le naturaliste verse en 1853 l'Angola, cependant que l'année suivante Léal découvre de la Cunene et en 1858 Bastian reconnaît le bas Congo. l'embouchure vers le lac En 1850, F. Galton et K. J. Andersson font une tentative de Walfisch Bay, mais ils ne peuvent dépasser Ngami en partant l'Etocha Pan. Trois ans plus tard Anderson parviendra jusqu'au lac Ngami. En 1859 le même Andersson atteint la rivière Okavango vers 17° 31' de latitude sud et 19° de longitude est. Il reconnaît son cours sur cent cinquante kilomètres et... le prend pour un affluent du Zamau pays des Ovambo. bèze. En 1857, Hahn et Green parviennent circule six à tendances J. Chapman, Un commerçant naturalistes, dans le Betchouanaland oriental (1849-1855) où il années durant retourne en 1861 avec Baines. Sur la côte est, Gassiott va de Durban sur le cours supérieur du également les Portugais Texeira et Montana Limpopo qu'atteignent Erskine en 1868 atteint la rivière des partis de la côte à Inhambane. Olifants qu'il suit jusqu'au Limpopo dont il descend le cours jusqu'à Le pasteur Moffat, beau-père de Livingstone, relève l'embouchure. une notable partie du cours du fleuve Orange (1856). Pendant vingtdeux ans (1844-1866) le zoologiste Fritsch visite l'état libre d'Orange et le Betchouanaland. Mohr, peu après 1860, traverse la Rhodésie Zambèze. A. Renders découvre en 1868 les ruines de Zimjusqu'au babwe que visite ensuite Mauch. Il est évident que la voie ouverte par Livingstone a suscité de nombreux imitateurs et que l'exploration dans approfondie progresse l'Afrique australe. Moins d'un an après sa mort, Livingstone est inhumé au caveau La dernière phase de ses voyages l'a tout natude Westminster. rellement conduit au problème des sources du Nil et de la ligne de partage des eaux entre le bassin du Nil et celui du Congo. IX.
L'AFRIQUE
DU
NORD-EST
ET
LES
SOURCES
DU NIL
Nous avons déjà dit l'importance de l'expédition de Bonaparte en Egypte sur le plan de la connaissance scientifique du pays. Elle permit un levé exact du cours du Nil jusqu'à Assouan. Avec Méhémet Ali et la conquête du Soudan, les Français Cailliaud (1) et Letorzec sur toute la région du Soudan une documentation de preapportent mier ordre. En 1836-38, les Autrichiens Th. Kotschy et J. Russegger parcourent le Kordofan. conduite en 1839 par Méhémet Ali lui-même remonte L'expédition le Nil jusqu'au 6°39' de latitude nord et celle de 1841, où figurent le (1) F. CAILLIAUD, Voyage à Meroè, au Fleuve Blancet au-delà du Fazogl fait dans Us années 1819 à 1822, Paris, 4 vol. 1826-1827.
L'EXPLORATION DE L'AFRIQUE
495
Français Arnaud et l'Allemand Verne, dépasse le Bahr el Gazai et atteint le 4° 42'. aient Il semble d'ailleurs qu'au xviie siècle certains missionnaires exacts sur les sources du Nil. eu des renseignements Au cours d'une Conférence donnée en 1873 à la Société de Géographie de Paris (1), Denys de Rivoire cite la carte du père Terbiest décédé à la fin du xviie siècle à la cour de Pékin et qui donnait la situation à peu près exacte des lacs tels qu'ils furent découverts ensuite. Cette carte ornait alors rue de Sèvres la maison des pères Jésuites. recueillis auprès des caravanes arabes menLes renseignements tionnaient pour les sources du Nil des lacs confirmant l'hypothèse de Ptolémée. Cette information fut à l'origine de la malheureuse expédition de l'enseigne de vaisseau Maizan qui, parti de Bagamoyo sans attendre une escorte, fut assassiné par un chef de village en des conditions atroces. En 1848 les pasteurs Krapf et Rebmann découvrent les cimes neis'attirant le scepticisme du monde savant geuses du Kilimandjaro, des sommets enneigés sous ces quant à la possibilité de trouver latitudes. i. Les sources du Nil : Burton,
Speke, Grant, Baker.
Le problème des sources du Nil (2) restait entier si bien que le président de la Société Royale de Géographie de Londres confie à deux officiers, Burton et Speke, la mission de gagner le lac Nyassa puis de marcher au nord en essayant de découvrir les sources du Nil. Le 13 février 1858 ils atteignent le Tanganyika. Après avoir exploré le nord du lac, Speke quitte Burton et va, de son côté, découvrir le 3 août le lac qu'il baptise Victoria et qu'il considère comme l'une des sources du Nil. Mais Burton conteste violemment l'opinion de Speke. Ce dernier, en effet, s'est trompé dans ses calculs et affirme que la pointe septentrionale du lac Victoria se trouve entre 4° et 5° de latitude nord, Burton objecte que l'expédition de Méhémet Ali ayant atteint 3° 25' aurait dû rencontrer le lac. alors une nouvelle expéSpeke accompagné de Grant entreprend dition. Ils partent le 2 octobre 1860 de Bagamoyo, le atteignent Victoria, découvrent la rivière Kagéra, puis séjournent chez Mutesa, roi du Bouganda. Speke part vers l'est et baptise Ripon Fall (en l'honneur de celui qui était président de la Société Royale de Géographie lors de son départ) les chutes par lesquelles le lac Victoria se déverse dans le Nil Après avoir séjourné dans le Bounyoro, les explorateurs traversent le Nil aux chutes de Karouma et rejoignent par voie de terre le fleuve (1) Revue Scientifique de la France et de l'étranger, 2° série, 3e année, n° du 3 janpar CHARLES 197. BUET, p. vier 1874sur,Cité le Problème du Nil les articles rassemblés par MEHRICK The POSNANSKY, (3)Cf : VentenaryEssay and Catalogue,East African literature bureau, Kampala Quest 1962 1962 26 p.
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L'EXPLORATION DE L'AFRIQUE
à la hauteur du coude de Nimoulé. Speke est dès lors pressé de retourde au monde savant l'exactitude ner en Angleterre afin d'annoncer son point de vue dans la controverse qui l'oppose à Burton : le Nil sort bien du lac Victoria comme il l'avait soutenu dès 1858. A Gondokoro, le 16 février 1863, Speke et Grant, venant du sud, sir Samuel Baker et sa femme partis du Caire le 15 avril rencontrent 1861. Speke profite de la flottille de Baker pour rejoindre Khartoum et le Caire. de Speke en Baker, pour sa part, va compléter la démonstration explorant la portion de fleuve non reconnue par Speke et surtout le à l'ouest du Bounyoro lac Louta N'sigé signalé comme se trouvant et qui pourrait être aux dires des indigènes une seconde source du Nil. Ce lac Louta N'Sigé avait d'ailleurs été signalé dès 1860 par le Dr Peney, l'un des voyageurs français qui furent nombreux à cette époque à parcourir le Nil supérieur et le bassin du Bahr el Gazai où le Savoyard Alexandre Vaudey et ses deux neveux Ambroise et Jules Poncet (1) avaient installé de nombreux postes commerciaux sur lesquels ils firent hisser le drapeau français après le rattachement de la Savoie (1860). Baker, après avoir été longtemps retenu à la cour de Kamurasi, roi du Bounyoro, parvient le 14 mai 1864 au lac Louta N'Sigé qu'il baptise Albert en mémoire du prince pleuré par la reine Victoria. Il longe en barque la rive est du lac et constate que le Nil pénètre à son extrémité nord et en ressort presque aussitôt. En remontant le fleuve vers l'est il découvre, sans les dépasser, les chutes qu'il appelle Murchison en l'honneur du président de la société de géographie de Londres. Il reste donc, lors de son retour à Khartoum le 5 mai 1865, un secteur inexploré du Nil, celui du lac Kioga qui sera reconnu en 1874 seulement par le colonel Chaillé-Long, Américain au service de l'Egypte, sous les ordres de Gordon. Néanmoins la découverte du le Nil, lac Albert, second des deux grands réservoirs qui alimentent confirme le principe général décrit par Ptolémée et fera attribuer à son auteur, Sir Samuel Baker, la grande médaille d'or de la société de géographie de Paris en 1867. Cependant Speke, le principal auteur de la découverte des sources mérités du Nil, n'a pu recevoir les témoignages de reconnaissance pour son exploit. Le 20 septembre 1864, il est mort dans un accident de chasse dans la campagne anglaise, survenu au moment même où la société royale de géographie était réunie à Bath en assemblée généR. Murrale avec Grant, Livingstone et Burton parmi les participants, chison étant président. 2. Explorations de Schweinîurth et de Giovanni Miani. du de l'exploration Nous avons dit par ailleurs (2) l'importance naturaliste Schweinfurth qui entre en février 1870 dans le pays des P) CH. BUET,Les premiers explorateurs français du Soudan équalorial : Alexandre Vaudey, Ambroise et Jules Poncet, Paris 1887, p. .1. (a)Histoire du Congo-Léo,p. 82-84.
L'EXPLORATION DE L'AFRIQUE
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Azandé puis rencontre les Tvides (Pygmées) de la région de l'Ouellé. et une assez Son livre (1) comporte de multiples détails intéressants effrayante description des effets de la traite des esclaves qui lui fait l'idée d'un grand état nègre suffisamment recommander puissant pour résister à l'invasion des négriers arabes venus du nord. Cette idée reprise et développée par Léopold II aboutira, nous le verrons, du Congo. à l'État Indépendant doit être rattaché celui de l'Italien Au voyage de Schweinfurth Giovanni Miani qui, de janvier à novembre 1872, élucide quelquesdu Haut bassin de l'Ouellé. A uns des problèmes hydrographiques du Dr Papagiotis Potagos (2) qui signaler également l'exploration franchit la ligne de partage des eaux et, au-delà du Bomou, s'avance et Miani. Junker (3), médecin russe plus à l'ouest que Schweinfurth amateur de voyages, essaie de résoudre les problèmes posés par Poncet et Schweinfurth possible de l'Ouellé et du quant à l'identification Chari. Les explorations de Casati dans cette région coïncident pour une large part avec celles de Junker. 3. Explorations
dans la Corne de l'Afrique.
Dans la corne de l'Afrique, de multiples expéditions se succèdent : Ruppell puis Ferret et Galinier qui explorent de 1831 à 1833 la région au nord et à l'est du lac Tana. Combes et Tamisier (1835 et 1836) poussent jusqu'à Ankober, cependant que Lefèvre (de 1839 à 1842) Rochet d'Héricourt, explore l'Afar jusqu'au golfe de Tadjoura. qui débarque à Tadjoura, prend la route du Choa. La cordialité de l'accueil du roi Sahlé Sélassié l'encourage à faire un deuxième voyage dont la relation constituera pour longtemps une remarquable source de documentation sur ce pays. En 1840, l'Anglais Beke visite la ligne de partage des eaux entre le Nil et l'Aouache, le plateau de Godjam et la région des sources du Nil bleu. Mais on peut dire que la deuxième moitié du xixc siècle a vécu sur Arnauld fondamental des frères d'Abbadie. l'apport géographique d'Abbadie passa douze ans en Ethiopie (1837-1848). Son frère Antoine ne le quitta que pour aller plaider auprès de la Propagande la cause de la mission lazariste fondée par le père Sapeto à Adoua. De Masont effectué saouah, au nord du lac Rodolphe, les frères d'Abbadie de multiples levés géodésiques qui se sont trouvés d'une remarquable exactitude. Leur ouvrage (4) est un très précieux bilan de l'Ethiopie au milieu du xixe. De multiples explorations de détail vont compléter l'oeuvre des frères d'Abbadie; ce sont celles du missionnaire Sapeto (1851) autour de Massaouah, de Hamilton (1854), Munzinger (1855), S. Baker (1861), Von Heuglin et Hildebrandl. Le pays au nord du lac Tana est reconnu de l'Afrique (1868-1871),trad. H. Loreau, Paris. (1) Au coeur Dix années de voyagesdans l'Asie centrale et l'Afrique équatoriale, DrPOTAGOS, (2) Paris1885. P. LOTAR,Junker in Biographie coloniale belge,p. 560. (3)R. (4)Douzeans dans la Haute-Ethiopie, Paris 1868. R. CORNEVIN. — Histoire de l'Afrique, Tome II. 32
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L'EXPLORATION DE L'AFRIQUE
par Dufton, Von Heuglin, Steudner et Lejean. Au sud de l'Abyssinie, l'expédition de Burton et Speke (1855) fait mieux connaître la région de Harar. Von der Decken est assassiné en 1865 au cours d'une reconnaissance de la rivière Djouba. Sa mort va se trouver à l'origine de de Cecchi la vocation coloniale de Cari Peters. Après la reconnaissance et Chiarini en pays kaffa, Giuletti explore, en 1881, la région comprise entre Harar et Zeila. de l'Abyssinie, le commerçant Sur la côte méridionale français Revoil visite en 1877 la côte Somali, puis un an plus tard les environs du cap Guardafui. En 1880 une mission du ministère de l'Instruction Publique lui permet de visiter la montagne du Karkar sur laquelle il rapporte une documentation de premier ordre. X. LES
EXPÉDITIONS
TRANSAFRICAINES ET STANLEY
: CAMERON,
avait provoqué une intense émotion en Le destin de Livingstone Angleterre si bien que deux expéditions furent envoyées à sa recherche. L'une par l'ouest fut confiée au lieutenant Grandy, qui remonta cataractes avant le Congo jusqu'aux d'aller mourir à premières San Salvador. fut confiée à un jeune officier do marine, Verney Lovet L'autre de la côte orientale Cameron, qui avait une bonne connaissance d'Afrique pour y avoir navigué près de trois ans. Parti de Bagamoyo le 15 mars 1873, il rencontre en route la caravane ramenant la dédu Il décide alors de continuer l'entreprise pouille de Livingstone. il Arrivé le 18 février 1874 au lac Tanganyika, grand explorateur. longe la rive orientale du nord au sud, passe sur l'autre rive et découvre la Loukouga qu'il suit assez longtemps pour remarquer qu'elle coule vers l'ouest. Il franchit la Louama, puis arrive à Nyangwé sur la Loualaba où il constate que l'altitude du fleuve est plus basse que celle du Nil à Gondokoro. C'est la démonstration que ce réseau hydrographique ne coule pas vers le Nil. Après avoir tenté de descendre la Loualaba (mais on lui refuse les il continue sa route par le Lomami, oblique vers le embarcations), haut Kassaï et atteint Catombela le 6 novembre 1875. Cameron est le premier à signaler les gisements de cuivre, de charbon et d'or du à avoir traversé l'Afrique d'est Katanga et le deuxième explorateur en ouest. de Cameron, remarquable en soi, allait être éclipsée L'exploration par celle de Stanley, célèbre jusqu'au nombre total de journées (999) qui lui permit d'aller d'un océan à l'autre. Stanley était un pou considéré comme le fils spirituel de Livingstone et il avait été l'un des à tenir les cordons du poêle lors de ses obsèques. quatre personnages Stanley, avec l'aide du Daily Telegraph et du New York Herald, décide de reprendre son exploration. Sa notoriété est telle qu'il reçoit le reste 1 200 offres de services (700 anglaises, 300 américaines, émanant principalement de Français et d'Allemands). Mais Stanley
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tous trois Anglais : les frères se contente de trois collaborateurs, Pocock et Frédéric Barker. constitue une véritable armée, bien approvisionnée L'explorateur Il quitte Bagamoyo en coupons d'étoffes et matériel scientifique. des lacs Victoria, Albert le 17 novembre 1874, fait la reconnaissance et Edouard, puis, après avoir reconnu entièrement le lac Tanganyika, il suit le cours de la Loukouga et arrive au Loualaba qu'il descend jusqu'à Nyangwé. C'est là qu'il rencontre le fameux Tippou Tib dont, moyennant 5 000 dollars, il obtient le concours. Le 5 novembre 1876 Stanley part vers l'est, mais sept semaines plus tard Tippou Tib Pour remonter le refuse d'accompagner plus loin l'explorateur. moral de la troupe, Stanley organise alors une petite fête, puis descend difficilement le fleuve. Le 8 février, alors que le fleuve s'oriente nettement vers l'ouest et que la colonne livre son trente et unième combat, un riverain à qui l'on demande le nom du fleuve répond Ikoutou- Ya-Kongo (le fleuve Congo). Le 12 mars c'est l'étendue d'eau Le 25 juillet les chutes de Yellela que Pocock baptise Stanley-Pool. sont atteintes et le six août Stanley rédige le message historique adressé à « n'importe d'Emboma (Borna) parlant quel gentleman anglais ». Le lendemain 7 août les messagers de Livingstone reviennent avec une délégation de cinq Européens dont le Belge Alexandre Delcommune qui va jouer un rôle considérable dans l'exploration du Congo. Le 9 août 1877 Stanley fait son entrée à Borna. En deux cent quatre-vingt un jours il a résolu le problème hydrographique majeur de l'Afrique centrale. En 999 jours, l'expédition avait eu cent soixante-treize morts dont dans les combats, quarante-cinq de la variole, vingt cinquante-huit et un de la dysenterie, quatorze noyés. Celui qu'on appellera plus tard Boula matari (le briseur de roc) avait rempli sa mission en d'extraordinaires conditions. Nous verrons le parti que Léopold II saura tirer de cette exploration véritablement sensationnelle. XI. L'EXPLORATION DU GABON ET DU BAS CONGO SAVORGNAN DE BRAZZA
:
du Cependant les Français ne restaient pas inactifs à l'embouchure Congo et sur la côte gabonaise. Plusieurs marins avaient déjà repéré la brèche ouverte dans la forêt équatoriale par l'estuaire du Gabon où s'engagent dès 1846 le lieutenant Pigeard et l'ingénieur Deschamps. Bouët et le commandant Baudin poussent jusqu'aux sources du Como (1853). Peu après, un Américain d'origine française, Du Chaillu, explore le rio Mouni, puis l'Ogoué (1) où le lieutenant Aymès fait en 1867 une brillante reconnaissance. Au lendemain de la guerre de 1870-71, c'est un naturaliste français, M. Bouvier, qui organise à ses frais une exploration confiée à deux perla suite du Gouverneur DESCHAMPS et archives orales au Gabon, (Tradition A (1) P- 10), nous adopterons l'orthographe Ogoué au lieu de Ogooué.
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sonnalités de premier plan : Alfred Marche et le marquis de Compiègne. Durant cette période la concurrence étrangère commence à se faire chez les Anglais (Walker et les frères Grandy), puis sentir notamment chez les Allemands : Gussfeldt (1873-76), Bastian (1874), enfin Oskar Lenz qui remonte l'Ogoué jusqu'à la rivière Sébé et se heurte à l'hostilité des tribus. une personnalité C'est alors qu'intervient hors série, Savorgnan de Brazza, qui, par son extraordinaire dynamisme, va donner un empire à la France. Né dans l'aristocratie romaine, Brazza entre à l'école navale à seize ans (1868), fait la guerre de 1870 dans l'escadre de la mer du Nord, puis prend part à la campagne de Kabylie (1871), enfin, au cours d'une croisière sur la côte atlantique, il remonte l'Ogoué sur une partie de son cours. Une rencontre avec Marche et Compiègne détermine sa vocation. Le 23 janvier 1874, Brazza soumet au ministre delà marine et des colonies un projet de reconnaissance du cours de l'Ogoué. Son rapport transmis il rentre en France pour le faire appuyer de ses relations et notamment l'amiral de Montaignac, par son protecteur alors ministre de la marine. L'amiral approuve son projet et lui fait avancer un an de solde. Brazza constitue sa première expédition : douze laptots l'aide-médecin Noël Ballay et le qu'accompagnent quartier maître Hamon. Arrivé le 20 octobre 1875 au Gabon, il remonte l'Ogoué, palabre avec Renoké, roi des Irenga, puis atteint en février 1876 Lopé où Lenz de passer décide de qui attend depuis de longs mois l'autorisation revenir vers la côte. Brazza remonte le cours de l'Ogoué presque jusqu'à sa source, mais le fleuve décrit une boucle... et ne pénètre pas dans l'intérieur. Brazza prend alors en pleine saison des pluies la décision de marcher vers l'est. Trois mois plus tard l'expédition se trouve sur les bords du N'Gambo, lui-même affluent de l'Alima. Il se heurte aux Ba Téké et renvoie vers la côte en juillet 1878 les plus fatigués de ses hommes sous la conduite du Dr Ballay. Il repart ensuite vers le Nord-Est avec six laptots et dix porteurs ; après avoir atteint en août la Likona il rebrousse chemin.
DE
XII. PRÉLUDE AU SCRAMBLE : LA CONFÉRENCE DE BRUXELLES AU TOURNANT DE 1880
Lorsque Brazza revient en France, la Conférence de géographie de Bruxelles a eu lieu et les appétits des nations d'Europe commencent à se manifester. L'importance de la conférence de Bruxelles est considérable du fait qu'elle marque le premier essai de coordination des informations à l'échelle des puissances mondiales et du continent africain. i. La conférence
internationale
de géographie
de Bruxelles.
C'est Brazza, semble-t-il, qui, le premier, aurait énoncé l'idée que mules sociétés nationales do géographie devraient se communiquer tuellement leurs informations.
L'EXPLORATION DE L'AFRIQUE
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Léopold II a déjà manifesté son intérêt pour l'Afrique. Il a offert 1 000 francs (or bien entendu) au congrès organisé par la Société de de Paris en août 1875 ; d'autre part il a proposé géographie 100 000 francs à la Société de géographie de Londres pour aider au financement du retour de Cameron. Cette offre, qui fut d'ailleurs déclinée, mettait dans son jeu une partie de l'opinion publique anglaise. Avant de convoquer la conférence de Bruxelles, Léopold II se rend avec plusieurs géographes et explorateurs. à Londres où il s'entretient le baron de Borchgrave, En même temps l'un de ses collaborateurs, prend d'utiles contacts à Berlin. la conférence de Minutieusement préparée par Emile Banning, Bruxelles réunit du 12 au 19 septembre 1876 les délégués de six naGrande Bretagne, France, Italie, tions : Allemagne, Autriche-Hongrie, Russie. Elle groupe des personnalités aussi remarquables que Schweinle vice-amiral de furth pour l'Allemagne, Cameron pour l'Angleterre, la Roncière Le Noury pour la France. Les objectifs de la conférence (1) visent à « planter l'étendard delà civilisation sur le sol de l'Afrique centrale et de lutter contre la traite des esclaves... » Les premiers frémissements annonciateurs de rivalités du Scramble se manifestent à l'occasion de la discussion concernant les emplacements pouvant le mieux convenir à l'établissement des stations. Deux commissions sont chargées d'étudier le problème. Le premier groupe (anglo-italo-français) propose le « choix par une autorité navale compétente des points les mieux appropriés sur les côtes orientales et occidentales de l'Afrique dans le voisinage de Zanzibar d'une part et de Saint-Paul de Loanda de l'autre ». Cette proposition aurait donné aux Anglais une situation prépondérante sur la côte orientale. Elle est combattue par les Allemands suivis par les Autrichiens et les Russes qui préfèrent réduire les bases côtières au rôle de simples entrepôts normalement confiés aux commerçants européens déjà installés à Bagamoyo et Loanda. A ce dernier projet se rallient les Français si bien que les Anglais isolés n'insistent pas. La conférence se borne à créer une « Association internationale et la civilisation pour l'exploration de l'Afrique centrale » dont le comité exécutif présidé par Léopold II comprend Sir Bartle Frère, futur gouverneur du Cap, le Dr Nachtigal et le professeur français de Quatrefages. Chaque nation est représentée par un comité national conservant sa propre liberté d'action pour une zone délimitée à l'intérieur du continent africain (au nord le Soudan égyptien, au sud le bassin du choisit un draZambèze, à l'est et à l'ouest les océans). L'association peau bleu orné d'une étoile d'or (symbolisant l'espérance qui luit dans les ténèbres africaines). Des comités nationaux sont créés. Grâce à l'exceptionnel animateur qu'est Emile Banning (2), le comité belge rassemble très vite la somme Bruxelles, cf. mon Histoire du Con£o,p. 93-97. (1)Sur la Conférencede (2)Il fait paraître une brochure intitulée L'Afrique et la Conférencegéographique de
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L'EXPLORATION DE L'AFRIQUE
rondelette de 500 000 francs et met sur pied une première mission, la mission Crespel-Cambier (1877) qui sera suivie de celles de Popelin (1879), Ramaekers (1880), Storms (1882) et Becker (1884). Toutes partent de la côte orientale et vont jouer leur rôle dans la construction léopoldienne dont Stanley sera le maître d'oeuvre africain. 2. L'effort portugais
: Serpa Pinto.
Cependant les Portugais qui n'ont pas été invités à la conférence de Bruxelles s'émeuvent des explorations dans un Hinterland qu'ils considèrent comme de leur domaine. Nous avons vu (1) en effet l'exploration de Lacerda (1798-99), la double traversée des Pombeiros du major Monteiro et du capitaine (1802-1814), puis l'exploration Gamitto (1831) en pays Maravi et Gheva, celle de Joaquim Rodriguès Graça (1833-37) aux sources du Zambèze et en pays lounda, celle de Joâo da Silva (un serviteur de Silva Porto, colon portugais installé condepuis seize ans au Bihé) qui, avec une caravane de marchands, tourne le Nyassa par le sud, traverse le Ghiré, remonte la Rovouma et va remettre au gouverneur du Moçambique les lettres qui lui avaient été confiées. Certes on ne pouvait parler de souveraineté portugaise sur ces régions qui tout au plus étaient dans la mouvance commerciale des autorités de l'Angola et du Mozambique. Aussi les grandes manoeuvres déclenchées à Bruxelles par Léopold II ne peuvent laisser les Portugais indifférents et la Société de Géographie de Lisbonne est fondée en 1876. Elle servira de base sciendont l'un, Serpa Pinto, tifique arrière aux entreprises des explorateurs est devenu une sorte de figure de légende. Deux officiers de marine, Capello et Ivens, ont bien voulu admettre Serpa Pinto dans leur groupe. Gentilhomme portugais, mathématicien distingué et champion de tir à la carabine, cet officier bénéficie en France d'un prestige considérable du fait que, venu en curieux en 1870 au secours de la France envahie, il a gagné la légion d'honneur au feu. Devant les résultats de Stanley les trois explorateurs constatent que la mission d'explorer la zone intermédiaire entre Zambèze et Congo est sans objet ; ils partent donc vers le sud et rencontrent partiellement d'immenses difficultés notamment quant aux porteurs, puis le désaccord se met dans l'expédition si bien qu'en février 1878, Serpa Pinto quitte Capello et Ivens et gagne le Haut Zambèze en suivant la ligne des crêtes et de partage des eaux. Il reconnaît les sources du Kwando, descend ses affluents la Coubangui et la Couchibi et atteint ainsi le pays des Barotsé et sa capitale Lealui, où il obtient revolver au poing des embarcations. Il descend alors le Zambèze jusqu'à son confluent avec le Kwando le naturaliste rencontre anglais (ou Linyanti), Bradshaw puis est accueilli par le pasteur Coillard avec lequel il traverse le Kalahari jusqu'à Shoshong. Le 19 mars 1879 il est à Durban puis revient par Lourenço Marques, Zanzibar, Aden et Bordeaux. (1) Supra, p. 92 et 68.
L'EXPLORATION DE L'AFRIQUE
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Son voyage a couvert à travers le continent africain près de 4 000 kilomètres. Il a duré dix-sept mois. la solution d'aucun problème géograCertes, ce voyage n'apporte phique, mais il a permis de déterminer les sources des affluents du Koubango et du Kwando, de relever le cours de la Coubangui, de la Couchibi et du Haut Zambèze entre Lealui et Embaria. Abbadie, l'explorateur de l'Ethiopie qui a bien connu Pinto, le définit parmi les explorateurs comme ayant, en plus de magnifiques qualités personnelles, la et pleine possession des sciences exactes que sont la topographie dit son biographe Georges l'astronomie. Jamais les pires dangers, de remonter à temps ses chronomètres Le Gentil, ne l'empêchèrent lui valent un satellite de Jupiter. Ses explorations ou d'observer de Londres et de la grande médaille des sociétés de géographie Paris. Ivens et Capello ont reconnu le cours du Koubango, delaKwanza et du Kwango. Ils rentrent à Loango en octobre 1878, si bien à leur brouille s'est révélée hautement que finalement profitable l'exploration portugaise. 3. L'expédition
décisive de Brazza
(1879-1881).
Cette expédition marque peut-être le premier élément du scramble. Lorsque Brazza est revenu en France (1878), Léopold II, parle comité d'études du Haut Congo, envoie le 25 janvier 1879 Stanley avec 13 Européens et 200 Zanzibarites pour remonter le fleuve. Brazza obtient quelques subsides (cent mille francs de Jules Ferry, ministre de l'instruction publique, des soutiens plus modestes du Comité franAfricaine et de la Société de Géoçais de l'Association Internationale graphie de Paris). Le 27 décembre 1879 il s'embarque pour le Gabon. Malgré le retard qu'il a sur Stanley il remonte l'Ogoué, fonde le poste de Franceville où il laisse Noguez puis, avec l'interprète Ossiah, le sergent Malamine et une petite troupe africaine, il traverse les plateaux Ba Téké, atteint la Léfini et le Congo. Le 10 septembre 1880 à M'fa chez le Makoko, il signe un traité plaçant ce roi sous la souveraineté française. Il veut alors rejoindre la côte et s'engage dans la vallée du KouilouNiari ; une tribu s'opposant à sa marche, il passe sur la rive droite du est passée à l'état d'image Congo et rencontre Stanley ; l'entrevue » et Stanley. Ce d'Épinal entre Brazza « le va-nu-pied aristocratique dernier poursuit sa marche vers le Djoué, où il reçoit le 27 juillet 1881 la visite du sergent Malamine. Stanley peut ironiser sur le nombre de drapeaux tricolores déployés par Malamine ; la ferme attitude du sergent africain et l'ascendant considérable qu'il exerce alentour ne lui aucun espoir et l'obligent permettent à passer sur l'autre rive du Pool pour fonder ce qui va devenir Léopoldville. Si cette rencontre Stanley-Brazza fait incontestablement partie du de cette mêlée ne vont pas tardera scramble, les autres manifestations se manifester on dos conditions d'ailleurs différentes suivant les ré-
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L'EXPLORATION DE L'AFRIQUE
gions. Ainsi nous avons vu comment la Tunisie et l'Egypte avaient été prises en charge par la France et la Grande Bretagne. allemandes en Angola et au Congo. 4. Explorations dans la course qu'en 1884, ainsi L'Allemagne par contre n'entrera engagés par Léopold II Von qu'en témoigne le nombre d'Allemands Michow en 1880 dresse la carte du cours moyen du Kwango ; Kund et ensuite au Cameroun, vont au sud du Tappenbeck, qui se distingueront toutes les rivières Stanley Pool puis, obliquant vers l'Est, traversent du Kwango au Kassaï. Butiner fait un intéressant voyage dans l'intérieur à l'est de San Salvador. de Von Wissmann se rend En 1881 l'Allemand Pogge accompagné jusqu'au confluent du Kassaï et de la Louebo. Pogge, avec l'Autrichien dans Lux, avait participé en 1874 à l'expédition Von Homeryerschen l'intérieur de l'Angola. Se séparant de Lux, Pogge reconnaît la région des hauts tributaires du Kassaï pour aller s'installer à Kapanga sur la Louloua où se trouve alors la résidence du Mwata Yamvo. Il y demeurera deux ans et donnera dans son livre Im Reich des Mwata Yamvo une intéressante relation de son séjour. Les renseignements fournis par Wissmann lors de son retour en Eucette région. Wissmann, rope incitent Léopold II à faire reconnaître Von François et du Dr Ludwig Wolf, des lieutenants accompagné de Loanda et, au passage à Malanga, en Millier, passe par Saint-Paul février 1884, il rencontre Pogge de retour de sa nouvelle visite au Mwachez le chef Mouta Yamvo. Par le même itinéraire ils parviennent de Loulouabourg. kenge qui leur cède le terrain pour la construction Von François dresse la carte de la région pendant que Wissmann fait construire les pirogues qui lui serviront à descendre le fleuve. Partie le 28 mai, l'expédition entre le 5 juin dans le Kassaï, le 10 elle est au confluent du Sankourou, le 2 juillet au confluent du Kwango et le 4 à celui du Mfini, le 9 enfin elle parvient au Congo. Wissmann a contribué du Kassaï. de façon décisive à la solution du problème hydrographique 5) Sur Madagascar nous ne pouvons que renvoyer le lecteur à la fondamentale étude du gouverneur Deschamps (1) et nous ne ferons la reconnaissance détaillée de l'île effectuée par Grandiqu'énumérer dier entre 1865 et 1870, les travaux des RR.PP. Rollet et Colin qui, à partir de 1873, donnent une bonne carte des diverses régions de l'Ile. Il est Nous arrêtons ici le chapitre des explorations scientifiques. bien évident que la limite est loin d'être aussi nette et que, si la polipar Brazza et Stantique des « traités indigènes » menée simultanément ley marque de façon précise le début du scramble, la véritable « mêlée » ne commencera vraiment qu'après le Congrès de Berlin. C'est dans les quinze dernières années du siècle que les expéditions vont se multiplier et la reconnaissance de l'Afrique se compléter. géographique reste la même. La différence La valeur scientifique des explorations est que l'explorateur emporte dans son bagage le drapeau de sa patrie. (1)Histoire de Madagascar, p. 217-218.
CHAPITRE
XV
L'IMPLANTATION EUROPÉENNE POLITIQUE EN AFRIQUE AU XIXe SIÈCLE SCRAMBLE) (JUSQU'AU
A plusieurs reprises au cours des chapitres précédents nous avons envisagé l'action politique des Européens en Afrique, du point de vue « africain », dans la première partie, comme fait administratif au chaNous allons maintenant étudier pitre des missions et des explorations. dans quelles conditions s'est faite l'installation européenne en divers points d'Afrique jusqu'au scramble puis comment, à la Conférence de Berlin (1884-85), ont été déterminées les modalités d'appropriation de terres qui seront entièrement réparties à la fin du xixe siècle. 1. LES ORIGINES EUROPÉENNE
DE L'IMPLANTATION POLITIQUE EN AFRIQUE AU XIXe SIÈCLE
La récente décolonisation a provoque la naissance d'une abondante littérature donnant de nombreuses explications quant aux origines de l'expansion européenne du xixe siècle. Les auteurs marxistes intègrent cette expansion dans le phénomène capitaliste au moment où l'accumulation de capitaux en Europe y rend leur rétribution insuffisante. L'affaire est plus complexe que ce schéma no le laisse supposer. Tout d'abord il faut insister sur le fait que cette expansion européenne est un phénomène mondial qui n'est parvenu que tardivement en Afrique. i- La ruée vers l'Asie et le Pacifique siècle.
dans les trois premiers
quarts
du
fermé l'AméDepuis que la déclaration de Monroe a virtuellement rique aux entreprises attirées celles-ci sont davantage européennes, par l'Asie. Alors que les Russes s'avancent dans les steppes sibériennes et aux confins de la Chine, la Grande Bretagne consolide l'empire des Indes, s'installe en en Malaisie, cependant Chine, en Birmanie, que la France prend pied en Indochine. On peut dire que, dans les trois premiers quarts du xixe siècle, cette expansion se limite à une poussée vers l'Extrême-Orient Les de la France et de l'Angleterre. marins français s'installent à Tahiti (1842), en Nouvelle Calédonie (1853), au Cambodge et dans trois provinces de Cochinchine (1863).
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L'IMPLANTATION POLITIQUE EUROPÉENNE
en Birmanie Les Anglais s'installent (1852) et implantent, après leur influence en Chine (second la scandaleuse guerre de l'opium, traité de Tien Tsin : 1858). La révolte des Cipayes (1857) qui met un instant en péril la puissance anglaise aux Indes entraine finalement un salutaire coup de barre. Dix ans plus tard la Malaisie passe sous contrôle l'Extrême L'ouverture du Canal de Suez, rapprochant britannique. Orient des pays d'Europe achève cette période asiatique occidentale, et océanique de l'expansion Pendant cette vaste poussée européenne. vers l'orient lointain, l'Angleterre a borné son action africaine, indédu Natal et de ses difficultés avec les Boers, à Lagos pendamment et 1861 : colonie de la Couronne) et à la GoldCoast (1852 : protectorat où les établissements danois de Christianborg (1850) ont été achetés et les comptoirs hollandais de Gold Coast échangés contre les établissements britanniques de Sumatra. Mais le raid de la colonne Napier en Les Français du Sénégal, Ethiopie (1867) s'est borné à un aller-retour. sous Protêt et Faidherbe, se sont donnés de l'air ; Libreville a été fondée et quelques comptoirs commerciaux encouragés au Dahomey et en Côte d'Ivoire. Durant toute cette période des trois premiers quarts du xixe siècle, mais demeure un continent insal'Afrique est en cours d'exploration, lubre. Livingstone des va révéler au public britannique l'existence méridionaux et orientaux de l'Afrique. plateaux 2. Les facteurs
de l'implantation
européenne.
Si nous analysons les divers facteurs de l'implantation européenne en Afrique par rapport aux facteurs d'expansion dans le reste du si important en monde, nous voyons que le facteur démographique en Nouvelle Zélande ne joue pas. En effet, l'immigration Australie, en Afrique du Sud est peu importante, celle concernant l'Algérie n'est dans sa française. L'Afrique, pas due à une pression démographique plus grande partie, demeure un pays au climat meurtrier où des missionnaires peuvent aller servir et mourir, mais où des colons européens à s'implanter. répugnent Les causes économiques et techniques sont beaucoup plus importantes. Le xixe siècle européen, en effet, voit l'industrialisation accroître la production en d'énormes proportions (de 1848 à 1870, la production française quadruple), cependant que la mise en place du réseau ferré facilite les échanges. En 1860 l'industriel anglais Bessemer invente le procédé permettant de produire l'acier à moindre prix. En 1880 Thomas et Gilchrist réussissent à éliminer industriellement le phosphore. Ces procédés donnent à l'industrie une avance sensible sur ses concurbritannique rentes. Sur le plan financier, la production des gisements aurifères de Californie (1851) et d'Australie (1857) provoque une hausse des prix sti-
EN AFRIQUE AU XIXe SIÈCLE
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est facilitée par de commerciale mulant la production. L'expansion du milieu du siècle Cette période nouvelles formes de crédit. du Libre-échange (fin de l'Acte correspond en Angleterre au tournant : 26 juin 1849), alors qu'en France la loi du 3 juillet de navigation 1861 établit que les colonies pourront désormais acheter et vendre toute aux étrangers et même se servir des navires espèce de marchandises de tous les produits, y compris ceux destiétrangers pour le transport C'est la fin du pacte colonial. nés à la métropole. L'Europe à ce moment a des besoins accrus en produits tropicaux : les Anglais absorbent une quantité croissante de thé ; avec l'introducdans l'armée, les Français vont en consomtion du café par l'intendance Il en va de même pour le cacao, le coton, mer toujours davantage. le sucre, plus tard le caoutchouc. hérissée de En même temps que de matières premières, l'Europe, a besoin de débouchés. Sur le plan financier, les barrières douanières, ne trouvent bénéfices accumulés plus sur place de rémunération coloniales des planteurs par les autorités suffisante. L'indemnisation des outre-mer après l'abolition de l'esclavage entraîne l'implantation et d'affaires organismes de crédits qui vont stimuler le mouvement développer les formes de « commerce légitime ». Au moment précis où la traite s'achève, la technique européenne des huiles végé(notamment le procédé Rougier) permet l'utilisation tales africaines (arachides et palme) pour la fabrication du savon, donnant un important produit nouveau à traiter au commerce européen qui n'avait jusqu'alors que la gomme très employée dans l'industrie textile et l'ivoire, matière plastique avant la lettre, utilisée pour les manches de couteaux. Vers 1850 tout le secteur de la palmeraie côdelta du tière prend de l'importance depuis la Sierra Leone jusqu'au Niger (OU Rivers). La guerre de Sécession, en coupant de 1861 à 1865 l'approvisionnement en coton américain entraine l'essor des filatures européennes, de la production ainsi cotonnière et de l'exportation égyptienne activement menée sur la côte ouest africaine. qu'une prospection En 1869 la découverte des champs diamantifères du Griqaland attire l'attention des capitalistes anglais sur l'Afrique du Sud. La même année l'ouverture du Canal de Suez valorise l'Afrique orientale. Entre 1850 et 1870, les milieux d'affaires européens prennent conscience de la richesse potentielle du continent africain. L'achèvement du Canal de Suez (1869) a montré la puissance des milieux d'affaires. En effet l'oeuvre monumentale de Ferdinand de Lesseps n'a été rendue possible, malgré la réticence gouvernementale anglaise, que grâce aux à l'appui des chamsouscriptions massives de l'épargne européenne, bres de commerce britanniques et au soutien des compagnies de navigation. La révolution des moyens de transport est en effet un facteur essentiel de l'expansion outre-mer. Le passage à la vapeur est déjà sensible en 1870 où, sur un tonnage brut de 20 millions de tonneaux,
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L'IMPLANTATION POLITIQUE EUROPÉENNE
on en compte 5 millions à vapeur ; en 1913 on comptera 43 millions entraîne sa concentration sur 49 millions. Mais le coût de l'armement and Oriental, les et des compagnies comme la Cunard, la Peninsular Rubbatino et Florio en Italie Messageries Maritimes, la compagnie deviennent de véritables puissances influençant les orientations poliLa vapeur permet une accélération des tiques de leurs gouvernements. si bien que les hommes d'affaires ne se contenmoyens de transport au parfum exotique de leurs agents mais se tent plus des rapports sont accélérées par le En même temps les transmissions déplacent. câble sous-marin et le télégraphe. La crise économique de 1873 joue dans l'expansion européenne un industriel rôle particulier. Pour la première fois en effet l'équipement met sur le marché plus de produits qu'il n'est possible d'en absorber. les pays d'outre-mer étaient essentiellement considérés Jusqu'alors comme fournisseurs de matières premières pour aider à la production En cette année 1873 où se pose pour la première fois en européenne. la conception de termes dramatiques le problème des débouchés, l'expansion prend un décisif tournant. Comme le souligne Crockaert (1) : « On est donc entré désormais dans l'ère des grandes compétitions mondiales. Et celles-ci auront désormais un triple objet : la possession des terres exotiques, qui possèdent d'incalculables ressources en matières premières dont l'industrie moderne fait une consommation effrayante; la mainmise sur les marchés exotiques, qui groupent de nombreux clients dont l'industrie moderne a besoin pour rester en vie ; la domination des moyens de communication internationaux qui seuls permettent au commerce moderne de vivre et de se développer. » Facteurs
militaires
et politiques
Le xixe siècle, malgré ses quelques crises, est un siècle de paix où l'Italie et l'Allemagne leur unité cependant parachèvent que le vieil doit lutter pour conserver les divers peuples empire austro-hongrois rassemblés sous la couronne des Habsbourg. La France et l'Angleterre sont disponibles pour l'outre-mer. En 1854 le Colonial office est créé, qui va jouer un rôle immense dans l'expansion impérialiste de l'Angleterre au moment où la Compagnie des Indes est supprimée (1858). Le gouvernement une certaine décentralisation britannique entreprend de sa puissance en conférant l'autonomie à certains de ses territoires — exclusivement peuplés de Blancs il est vrai — comme la Nouvelle Ecosse et le Nouveau Brunswick (1848), l'île du Prince Edouard (1851), puis le dominion canadien (1867). En France Théodore Ducos, ministre de la marine au lendemain du coup d'État, inaugure une grande politique coloniale menée ensuite par Hamelin et surtout Chasseloup-Laubat (1859-1867). Ces ministres Histoire de l'Empire Britannique, p. 363. (1) JACQUES CROCKAERT,
EN AFRIQUE AU XIXe SIÈCLE
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sont aidés outre-mer par des officiers de haut mérite : Protêt et Faidherbe au Sénégal, Rigault de Genouilly, Doudart de Lagrée et Francis Le passage à la vapeur de la marine de guerre Garnier en Indochine. de servir d'entreprovoque la recherche de bases navales susceptibles pôts de charbon (« un navire de guerre sans charbon est une épave ») Ce fait entraînant l'installation de points et de bassin de radoub. les passages stratégiques va placer l'And'appui (1) qui verrouillent gleterre et dans une moindre mesure la France en toutes les parties du monde. Un autre aspect militaire est le rôle de réservoir d'hommes joué par l'Afrique dès 1870 avec quelques unités de « Turcos » venues d'Algérie. La France et l'Angleterre, après 1815, ont des navires et des troupes coloniales. Par ailleurs la supériorité disponibles pour des conquêtes avec les fusils à tir rapide, les canons et, d'armement va croissant La France disposant de troupes indigènes, après 1870, les mitrailleuses. les pertes en Européens sont relativement faibles (quelques dizaines d'ofliciers et de sous-officiers), si bien que l'opinion publique est bien moins touchée par les deuils qu'elle ne le sera plus tard lors des guerres De même les difficiles campagnes menées d'Indochine et d'Algérie. en Afrique du sud par les forces britanniques le seront en grande partie indiens et des troupes locales. Sauf lors des granpar des contingents des catastrophes militaires (1878), Majuba Hill, révolte (Isandlwana mahdiste, Adoua, etc), les pertes par maladies sont presque toujours supérieures à celles des combats. Toutefois la diffusion du sulfate de mortalité quinine évite l'effrayante palustre qui fut celle de l'expédition de 1841 au Niger (2) et qu'illustrent les cimetières éloquemrnent de la côte ouest-africaine. Les motifs patriotiques n'interviennent que tardivement mais comptent pour l'opinion publique franbeaucoup C'est à partir des années 1880, çaise après la perte de l'Alsace-Lorraine. au début du scramble que se constituera qui l'esprit impérialiste atteindra son apogée entre 1890 et 1900. Les facteurs économiques, étant en place, stratégiques politiques, de conquête, il était indisl'Europe disposant des moyens techniques pensable de trouver une justification morale. Celle-ci fut donnée par l'oeuvre missionnaire leur avant que les autorités coloniales n'assurent paix (pax britannica, etc) empêchant pax belgica, pax germanica, des effectivement les guerres tribales, assurant une libre circulation personnes et supprimant l'esclavage. — revenant — protestants Les missionnaires en et catholiques (1)Bernard Schnapper dans son remarquable ouvrago sur « La politique et le commerce français dans le golfe de Guinéo » discute p. 14 l'opinion de Christian Schéfer selon laquelle Guizot aurait élaboré à l'échelle du monde une « politique des points de relâche ». L'idée est exprimée déjà parle capitaine de vaisseau, bientôt amiral, Montagniès de la Roque, commandant de la station navale de la côte occidentale d'Afrique en 1839, puis dans un rapport du 29 décembre 1842 de Henri Galos, directeur des Colonies au ministère de la Marine, enfin la Chambre de Commerce de Nantes oui appelle « avec confiance l'attention du gouvernement sur la nécessité d'avoir des points de refuge et do protection de nos intérêts nationaux sur toutes les routes du globe ». (a) Cf. supra, p. 469.
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L'IMPLANTATION POLITIQUE EUROPÉENNE
pour leur mision en vue de collecter des congé en Europe prêchaient d'une misère africaine d'ailleurs souvent fonds, d'où la description des fidèles. Mais surtout les miexagérée pour émouvoir l'escarcelle lieux missionnaires aux mêmes classes sociales de bourappartenaient les officiers, les médecins, les geoisie et de noblesse qui fournissaient Très vite on admit que l'homme blanc devait jouer le parlementaires. à s'élever, rôle du « grand frère », aider les populations primitives leur donner un meilleur niveau de vie, les instruire, les soigner. Les et commerçants premiers missionnaires européens, témoins des pra» ou des sanglantes « coutumes danhoméennes tiques de cannibalisme en général que seule l'intervention de l'aupar exemple, pensaient torité européenne de redresser ces moeurs, de supprimer permettrait le servage, d'empêcher les guerres intertribales, etc. du scramble, de nombreux missionAussi, dès le déclenchement naires et commerçants intervinrent (d'ailleurs de façon souvent maladroite) dans la politique locale en faveur de leur patrie. Les auteurs marxistes insistent sur la rapacité des maisons de commerce, mais en réalité, comme le souligne Jean Ganiage (1) : « La minorité qui donne le branle au mouvement colonial intéressés. La plupart rarement aux milieux matériellement ce sont des écrivains, des professeurs, des hommes politiques. ouvrages de grande diffusion suscitent des mouvement d'opinion ensuite des cercles, des revues, des groupes parlementaires, que sont nés un peu partout les partis coloniaux. »
appartient du temps, Quelques ; viennent c'est ainsi
Ainsi la colonisation se présentait sous l'aspect engageant d'un devoir honorable et glorieux qui se doublait (pour d'autres) d'une bonne affaire. Le mouvement d'idées débute par l'Angleterre malgré le caractère incontestable de sa prépondérance économique sur tous les continents, y compris depuis 1860 l'Europe. Les ouvrages de Charles Dilke (2) et du professeur Seeley de Cambridge (3) ont une profonde résonance dans le public anglais, cependant que les écrits de Francis Garnier (1873) et l'ouvrage fondamental « De la colonisation de Paul Leroy-Beaulieu, chez les peuples modernes » (1874), influencent profondément l'opinion publique française. Il est aussi indispensable de tenir compte des personnalités qui ont mené la politique coloniale, que ce soient ceux qui ont agi en Europe dans une ambiance souvent difficile (Léopold II, Jules Ferry, Mac ou les proconsuls Crispi, Chamberlain) Faidherbe, (Bugeaud, cette période. Carthy, Mac Lean, etc), ils ont marqué profondément Pour les gouverneurs, placés dans Une situation donnée, ils devaient les décisions qui s'imposaient prendre parfois immédiatement (et leur (1) L'expansion colonialeet les rivalités internationales de 1871 à 1914,1964, t. 1,p. 14. (2) Greater-Britain (1866-08). (3) Expansion of England, 1883.
EN AFRIQUE AU XIXe SIÈCLE
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d'où une décentralisation ensuite seraient reprochées), peut-être des pouvoirs. réglementaire de présenter le mode d'implantaNous allons essayer maintenant tation des diverses (françaises, européennes puissances anglaises, scramble en laissant de côté l'Afrique du Sud portugaises) jusqu'au traitée (1). précédemment II. POLITIQUE
FRANÇAISE
EN AFRIQUE
AU
XIXe
SIECLE
souvent Les spécialistes des français méconnaissent l'importance dans l'action outre-mer. efforts accomplis par leurs compatriotes Dans un livre publié en 1806 (2) l'Anglais John Barrow souligne avec de l'effort français dans la connaissance des amertume l'importance régions extra-européennes. « On me croirait peut-être dominé par un sentiment de jalousie, si je relevais les funestes erreurs où nous sommes tombés par le défaut des connaissances locales. Elles sont consignées en grand nombre dans les monuments de notre histoire. Il n'est pas inutile d'observer que les Franet plus çais, ces éternels ennemis de notre gloire, sont plus persévérants heureux que nous dans les recherches qu'ils font chez les nations étrangères... ...les Français, quels que soient les motifs qui les engagent à voyager n'oublient jamais, loin de chez eux, les intérêts de leur nation... ...il n'est pas un coin du globe où les Français ne déploient toutes les ressources de leur génie pour faire des recherches, et contracter des liaisons utiles à leur gouvernement. Aussi, c'est à leurs travaux que l'Europe est principalement redevable des lumières qu'elle a acquises sur les autres contrées. » de John Barrow, le domaine français Malgré les paroles désabusées en 1815 était sensiblement réduit et les Anglais avaient montré un dans la mise en oeuvre des exploraremarquable dynamisme tions. i. Les Français
au Sénégal
et sur la côte occidentale
d'Afrique.
Si les moribonds et les morts du radeau de « la Méduse » furent pour le peintre Géricault un magnifique sujet de tableau, ce naufrage n'est qu'un dramatique épisode d'une difficile reprise en charge des de la marine c'est le baron Portai, comptoirs français. Au ministère un conseiller d'Etat issu d'une famille d'armateurs bordelais, qui anime la relance d'une politique coloniale. Le colonel du génie Schmaltz, nommé au Sénégal en 1816, fut un bâtisseur dont les prooptimiste jets de colonisation agricole n'eurent pas de chance. De ses trois anp. 121-135. (1)Supra, (2)Nouveau voyage dans la partie méridionale de l'Afrique, Paris 1806, p. 5-6 et 14.
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L'IMPLANTATION POLITIQUE EUROPÉENNE
nées de séjour il reste le choix de Dagana et de Bakel (1), un inventaire du fleuve et le traité de 1819 avec le brak du Oualo. Après le neurasthénique Lecoupé chargé de liquider la prétendue faillite de Schmaltz, le baron Roger (1821-1827) apporte son dynanisme appuyé par d'effiSes successeurs, caces relations mesquins parisiennes. bureaucrates, n'ont aucun mal à ramener le Sénégal à son rôle de comptoir médiocre, alimentant une sordide maison de commerce, la compagnie de Galam, de la gomme. C'est durant cette période exclusivement préoccupée vers l'intérieur cependant que sont relancées les explorations que la croisière de la « Malouine » a mis en place quelques installations la Côte-d'Ivoire et le à terre qui sont en germe la Guinée, Gabon. la culture de l'arachide est développée à Sur le plan économique, marseillais Jaubert. Son développement de l'industriel l'instigation va marquer de façon décisive l'économie sénégalaise. A la suite de la visite d'une commission interministérielle assistée du xxe siècle auront rarement cette chance) de (les gouverneurs bons connaisseurs des problèmes africains, le gouvernement du Sénégal prend un nouveau départ. Le capitaine de frégate Protet dure quatre ans et applique avec bonheur des instructions précises. Podor est reconstruit. Une armée toucouleure est dispersée au combat de Dialmath. Faidherbe, méthoqui remplace Protêt, est un polytechnicien dique qui cache sous des dehors sévères un esprit sensible, une curiosité universelle et une grande générosité de coeur. Obligé d'entrer en guerre ouverte avec les Maures, il écrase le chef trarza Mohammed el Habib, rejette ses troupes sur la rive droite du fleuve et annexe le Oualo (1855). Après avoir défait à nouveau les Maures au lac Cayar et dans le Dimar, il impose aux Trarza un traité de paix à Saint-Louis (1858) et à Podor un traité similaire aux Brakna. Nous avons vu (2) dans quelles conditions El Iladj Omar avait mené sa campagne et comment il fut arrêté devant Médine par le traitant Paul Holle, sept soldats européens et cinquante laptots. On sait comment El Hadj Omar, après avoir signé un traité, poursuivit l'offensive contre les Peuls du Macina. Le 23 mai 1857, les marins de la « Jeanne d'Arc » installent un poste à Dakar en face de Gorée. Ainsi le poste précède ce qui va devenir l'un des plus grands ports de la côte d'Afrique. du Faidherbe a marqué le Sénégal de son empreinte. Commandant Génie, homme des fortins bien placés, il sait se mouvoir vite et son commandement est une suite de succès légitimes dus à des opérations et menées avec résolution méthodiquement préparées jusqu'à leur terme. Au passif de Faidherbe on peut noter cependant son médiocre intérêt pour les rivières du sud; il avait en 1852 construit le fort de Dabou et signé des traités avec les Attié, les M'Baté, les Adioukrou. (1) GEOUCESHARDY,La mine en valeur du Sénégal de 1817 à 1851, Larose 1921. (2) Supra p. 251-253.
EN AFRIQUE AU XIXe SIÈCLE
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Par ailleurs il avait choisi, comme damel du Cayor, le piteux Madiodio contre Macodou le chef réel. L'année 1855 a vu la fondation de la Banque du Sénégal, l'installation d'une imprimerie et du journal officiel de la colonie. Faidherbe a inauguré une véritable politique de l'enseignement des écoles coraniques et un enseignement basée sur une organisation confié pour l'essentiel aux frères de Ploërmel. D'autre part il assurait son action politique par l'école des otages devenue Vécole des fils de de cercle et chefs qui assura la formation de nombreux commandants officiers auxiliaires de la colonisation française. le voyage de Bouêt-Willaumez sur la Nous avons vu comment Malouine avait permis de reconnaître l'estuaire du Gabon et de passer le 9 février 1839 un traité en bonne et due forme avec le roi Denis Deux ans pour obtenir une bande de terre au sud de l'embouchure. obtient du roi Louis, sur l'autre rive, un plus tard Bouêt-Willaumez traité de protectorat et une autre bande de terre (1). Il faut noter que c'est sans instruction du gouvernement que Bouêt signe les traités avec des chefs de villages côtiers du Gabon et de Garde la station roway (cap des Palmes). Nommé au commandement navale de la côte occidentale d'Afrique, Bouêt fait poursuivre les croisières et passe avec différents chefs indigènes, dont celui de Grand Bassam, des traités analogues à ceux de 1839. Bouêt envisageait de créer des comptoirs commerciaux fortifiés sur la côte ouest qui permettraient aux commerçants de charger et décharger commodément leur marchandise. « Elles fourniraient des points de relâche à la marine de guerre qui n'en avait pas au sud de Gorée. Elles seraient aussi des aux Africains des goûts qu'ils ne foyers de civilisation qui donneraient pourraient satisfaire que par leur travail. Au lieu de se livrer à la traite de leurs semblables, ils produiraient les objets d'un commerce licite ». Mais c'est aussi pour devancer les Anglais que Bouêt veut créer ces comptoirs. C'est pour lutter contre le renouveau d'influence anglaise et les nouveaux projets vers la Gold Coast que le Roi accorde pour l'installation immédiate des comptoirs des crédits exceptionnels. Le plan d'installation prévoyait trois points : Garroway, Assinie et le Gabon, mais devant les projets anglais, l'expédition de Garroway fut détournée sur Grand Bassam. Ainsi fin septembre 1843, trois comptoirs s'ajoutaient à ceux que possédait la France. En 1849 le brick négrier Elizia est saisi par la croisière et les esclaves libérés sont installés sur la rive droite de l'estuaire constituant Libreville. Cette ville bien située devient bientôt le centre de l'administration française. Nous avons vu au chapitre des missions (2) le rôle de Mgr Bessieux et de la mission catholique, au chapitre des explorations (3) le rôle de Libreville comme base d'exploration. Sur le voyage de la Malouine, le rôle de la chambre de commerce de Bordeaux et (1) le rapport du capitaine de marine marchande Broquant. on se référera à l'étude de Schnapper, op. cit., p. 15-21. (2)Supra, p. 458. 3) Supra, p. 499-500. R. CORNEVIN. — Histoire de l'Afrique, Tome II. 33
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L'IMPLANTATION POLITIQUE EUROPÉENNE
conclu en 1851 Au Dahomey (1) le traité de commerce et d'amitié de vaisseau Auguste Bouët et le roi du Dahomey entre le lieutenant du capitaine de vaisseau Vallon (1856 est prolongé par les ambassades la maison Régis qui avait depuis 1843 un agent et 1858). Cependant installé à Ouidah renforce les positions françaises par de nouvelles factoreries ouvertes en 1856 à Agoué et 1858 à Grand Popo. Devant sollicite le les empiétement des Anglais de Lagos, le roi de Porto-Novo français qui lui est accordé le 22 février 1863. L'influence protectorat renforcée devait être notablement française sur la côte dahoméenne de la Société des missions africaines de par l'arrivée des missionnaires Lyon (1861). et un traité L'autorité française cependant poursuit ses avantages du 19 mai 1868 prévoit la cession de Cotonou à la France, cependant que les droits des maisons de commerce françaises sont notablement accrus à Petit Popo (1864), Agoué et Porto Seguro (1868). En Côte d'Ivoire, les traitants français de la maison Régis ayant été commandant de Grand Bassam, lance molestés, Martin-Despallières, une expédition fond de l'Ebrié en avril-mai 1852 et conclut jusqu'au a lieu peu après; une douzaine de traités. Mais un grave soulèvement une expédition punitive est menée en 1853 par Baudin accompagné le fort de Dabou. de Faidherbe Mais le commerce qui construit des éprouve de graves difficultés si bien qu'après 1871 l'évacuation d'Assinie, Grand Bassam et Dabou est prescrite. Le dynacomptoirs misme d'un commerçant de comptoirs français, Verdier, propriétaire à Assinie et Grand Bassam, le fait nommer Résident français sous le et du contrôle du commandant naval de la division de l'Atlantique Treich-Lacommandant supérieur du Gabon. L'un de ses adjoints, de l'Indénié et de Bettié. plène, se distingue dans l'exploration En Guinée, le traité du 21 avril 1859 établit les droits de commerce de la France sur le Rio Pongo. En 1866 Pinet-Laprade fait occuper le plateau de Boké et construire un fortin. Dinah Salifou, dernier roi des Nalou, est destitué. Dix ans plus tard, le poste de Boffa est créé et les positions s'affirment sur la Mellacorée. En 18801a françaises est placée sous l'autorité région de Dubreka française, cependant Olivier de Sanderval, obtient une place qu'une étonnante personnalité, du Fouta où il bat un moment — auprivilégiée auprès de l'almamy — monnaie à son nom. baine des numismates A la veille du scramble, après des hésitations et desater moiements, les bases de départ françaises sont marquées sur la côte occidentale. aux s'est manifestée chez les traitants Déjà la rivalité franco-anglaise limites de la Côte de l'or, du Dahomey et de la Nigeria, au Gabon. De façon tacite on peut dire que, pour certaines zones, les limites des sphères d'influence françaises et anglaises existent déjà. Mais c'est l'affaire du pool (Stanley-Brazza) qui va marquer le véritable départ du scramble(>)(1)Pourl'installation française au Dahomey, cf. mon Histoire du Dahomey, p. 273-296-
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2. Conquête de l'Algérie. La politique française en Afrique noire menée par le ministère de la aucune incidence sur l'expédition Marine n'a pratiquement d'Alger. Dans un récent et magistral ouvrage (1), Charles André Julien a » la conquête de l'Algérie, cependant que entrepris de « démystifier M. Emerit en plusieurs articles (2) donnait de l'Algérie avant les FranLa prise d'Alger présente pour optimiste. çais une image peut-être l'Histoire de l'Afrique en général un immense intérêt car, malgré l'anen Angola et au Mozambique, tériorité des établissements portugais au Cap, anglais au Sierra Leone et en Gold Coast, hollando-anglais le français au Sénégal, la conquête française de l'Algérie représente véritable début de la période coloniale en Afrique ouvrant à l'Historien de faits historiques de nouvelles possibilités. En effet l'établissement et de leur chronologie exacte devient facile avec les documents eurobénéficie de tout le frémissant dispopéens. Le récit des événements sitif d'autocritique toujours en action chez les militaires comme chez les civils en des pays démocratiques où la presse est généralement libre et dont les voisins européens sont prêts, le cas échéant, à dire ce qui pourrait ne pas être autorisé dans la métropole. Certains ont cru pouvoir « renverser l'Histoire » telle qu'elle était enseignée jusqu'à une date récente dans les manuels européens. Il était, en effet, particulièrement facile de puiser dans la masse de documents traduisant l'opposition à la conquête pendant les règnes de Charles X, Louis-Philippe et Napoléon III. Mais en ne replaçant pas les citations dans leur contexte, en confondant française et l'opposition la résistance algérienne du xixe siècle avec l'anticolonialisme du xxe siècle, on aboutit à un véritable contresens historique puisque l'anticolonialisme n'a pu apparaître qu'après le fait colonial. Il faut donc replacer la conquête de l'Algérie dans son cadre maghrébin, à une époque où la guerre était une affaire d'individus responsables et non une question de masses anonymes et mécanisées. Nous avons marqué l'état de l'Algérie à la veille de la conquête, le caractère assez nominal de l'autorité turque surtout dans les régions kabyles à l'est d'Alger. L'impact européen va réussir à plusieurs reprises à unir contre l'infidèle des groupes héréditairement hostiles. Le débarquement d'Alger. On connaît les faits qui sont à l'origine de la campagne : une affaire complexe de fournitures militaires effectuées à l'époque du Directoire par les juifs livournais Bacri et Busnach leur avait laissé des créances sur tout le littoral méditerranéen, sauf auprès du Dey Hussein d'Alger dont ils étaient débiteurs. Le Dey, croyant à la mauvaise foi de M. Deval, Consul de France, le le 30 avril 1827 frappe publiquement l'Algérie contemporaine, Paris 1964, 632 p. (1) Histoire de économiquede.la Régence en 1830, Information historique, nov-déc. (2) p.situation 169-172; L'état intellectuelet moral de l'Algérie en 1830, R. H. M. G., juillet1952, sept. 1954, p. 201-212.
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de trois coups de manche d'évantail. Le consul rentre en France, Alger est bloquée par la marine et les établissements français de la Calle sont vassal d'Alger. Le 3 août 1829, le détruits par le bey de Constantine, est bombâtiment venu tenter une ultime démarche parlementaire bardé. Le ministère Polignac qui, le 8, remplace le ministère Martignac, n'est pas fâché de mettre un peu de prestige militaire sur un régime vacillant. Partis les 25, 26 et 27 mai de Toulon, les 37 000 hommes de Bourmont débarquent le 14 juin à Sidi Ferruch ; le 19 Staouéli est pris, le 4 juillet, Alger tombe et le dey capitule. Les beys de Titteri et d'Oran annoncent leur soumission cependant français va qu'un détachement « Vingt jours occuper Bône pour obtenir celle du bey de Constantine. ont suffi, dit un ordre du jour de Bourmont, d'un pour la destruction État dont l'existence fatiguait l'Europe depuis trois siècles. » facile et fructueuse suscite quelques Cette campagne remous et : « Pour prendre Alger, Charles X répond à l'ambassadeur d'Angleterre je n'ai considéré que la dignité de la France ; pour le garder ou le rendre avant la je ne consulterai que son intérêt. » Dernière parole historique la révolution de juillet. Louis-Philippe aurait peut-être abandonné nouvelle conquête lorsque l'insurrection sur Anvers belge, ramenant les préoccupations le décide à rester. On mesurera dans britanniques, les années suivantes de ce que Jules Ferry appelait un l'importance « acte de haute police méditerranéenne ». Les Français qui arrivent à Alger en 1830 ne savent pas grand'chose si complexe du Maghreb central. Les difde la société arabo-berbère ficultés rencontrées seront aggravées par le caractère flou de la poliLes auteurs français insistent longuement sur tique gouvernementale. le nombre et le manque de personnalité des neuf gouverneurs qui se succèdent de 1830 à 1840, sur le manque de moyens matériels et pécutiraillé entre niaires, sur les ambiguïtés de la politique de Louis-Philippe ses préoccupations aux une forte opposition intérieure européennes, outre-mer et l'envie de donner un certain « panache » à la expéditions royauté bourgeoise. de L'ère des tâtonnements la nomination (1830-1834) voit d'abord Clauzel. Militaire de la Révolution et de l'Empire qui a été proscrit et, en cinq mois de travail, ébauche après 1815, il remplace Bourmont une politique indigène et remplace les bey d'Oran, Constantine et Médéa. Après que la garnison de Médéa ait été contrainte au repli sur Alger, Clauzel est rappelé avec 10 000 hommes de troupe. Berthezène, Savary, Voirol se succèdent, occupant avec Bône, Bougie, Oran, Arzeu et Mostaganem, des bases qui permettent une action sur l'arrière-pays. C'est alors que le général Desmichels la division qui commande d'Oran passe avec un jeune émir de vingt-quatre ans, Abd el Kader, un traité de protectorat (26 février 1834) qui donne à cet « interlocuteur valable » un surcroît de prestige. Si le traité Desmichels inaugure l'ère à la de l'occupation restreinte (1834-1841), cette période correspond formation et à l'expansion du royaume d'Abd el Kader en Algérie
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occidentale et la résistance du bey Ahmed dans le beylik de Constantine jusqu'à la prise de la ville (novembre 1837). En 1841, Bugeaud entame la troisième période, celle de l'occupation sait comtotale (1841-1847). Bugeaud, qui a fait la guerre d'Espagne, battre la guérilla. Il « se fait nomade pour traquer le nomade ». Il constitue des colonnes légères souvent formées de troupes indigènes (zouaves, spahis, chasseurs d'Afrique, turcos, tirailleurs algériens) qui lui permettent de harceler et de refouler partout Abd el Kader dont la smaenlevée par le duc d'Aumale. Nous avons vu (1) lah est brillamment comment l'entrée en guerre de Moulay Abd er Rhaman avait entraîné de Tanger et Mogador par le prince de Joinville, le bombardement ce qui puis la bataille de l'Isly où Bugeaud défait l'armée marocaine, contraint le sultan du Maroc au traité de Tanger. La Résistance d'Abd el Kader (1834-1847). La personnalité d'Abd el Kader domine la résistance à la conquête française. Pourtant Abd el Kader (1808-1882) n'a pas représenté toute des montagnes kabyles a toul'Algérie (en particulier la quasi-totalité aux nomades zénètes, Abd el jours refusé son autorité). Appartenant Kader apparaît comme le dernier en date des grands fondateurs d'emoccidental pire qui ont si fortement marqué l'histoire du Maghreb depuis la conquête arabe. Il se considérait lui-même comme le successeur des Abd-el-wadides et le montra par la particulière solennité de son entrée dans Tlemcen en juillet 1837 ; il est probable d'autre part qu'en choisissant le site de l'ancienne capitale ibadite pour établir la Villeneuve de Tagdempt en 1836, il évoquait l'époque vieille de mille ans où Tahert était le centre d'un mouvement islamique mondial. Les débuts d'Abd el Kader rappellent cependant plutôt ceux de la dynastie saadienne du Maroc au xvie siècle quand Mohammed ech Cheikh avait utilisé sa qualité de chérif (descendant du prophète) et la guerre sainte contre les Portugais pour servir ses propres ambitions. La famille d'Abd el Kader descendant de Moulay Idriss, fondateur de Fès au ixe siècle, était de noblesse égale à celle des Saadiens ou des Alaouites. Mahi ed Din, le père d'Abd el Kader, était en même temps chef de la tribu des Hachem qui résidait dans les environs de Mascara et Moqqadem de la confrérie Qadriya pour la région d'Alger. Il avait été emprisonné à deux reprises (1818 et 1824) par l'autorité turque et avait entrepris le pèlerinage avec Abd el Kader, alors âgé de seize ans. Les deux voyageurs étaient revenus en 1829 après avoir séjourné dans les villes saintes, à Bagdad et au Caire où les réalisations de Méhémet Ali les avaient fortement impressionnés. Le 21 novembre 1832, Abd el Kader est proclamé sultan par les tribus des environs de Mascara et reprend à son compte l'appel à la guerre sainte lancé en avril de la même année par son père. Le 26 février 1834, son prestige encore limité augmente considérablement après la conclu(1) P. 433.
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sion du traité Desmichels qui fait de lui un souverain indépendant traitant d'égal à égal avec la France ; de 1834 à 1837 il utilise sa positour à tour l'aide des tion avec une extraordinaire habileté, requérant forces françaises contre ses ennemis personnels puis celle des tribus contre les Français. Il assure des contacts avec le Maroc toujours intéressé par l'Oranie et avec l'Angleterre toujours heureuse d'intervenir dans les affaires françaises. Abd el Kader est une puissance telle que Bugeaud, soucieux d'avoir les mains libres à l'est pour venger l'échec subi par Clauzel devant les murs de Constantine (novembre 1836), signe le 30 mai 1837 le traité de la Tafna qui reconnaît la souveraineté de l'émir sur la province de Titteri et l'ensemble de la province d'Oran sauf les villes d'Oran, Mostaganem, Mazagran et Arzeu. Ce royaume ainsi reconnu, Abd el Kader l'accroît encore considéra1839 vers le sud-ouest de la Kabylie et au sud jusblement jusqu'en Mais il ne parvient pas à soumettre Aïn Mahdi, qu'à l'Atlas saharien. rivale de la Qadriya. Les principes de centre de la confrérie Tidjaniya l'administration d'Abd el Kader sont très différents de l'administraentre tribus Makhzen et tribu tion turque ; il supprime la distinction Ralya, ne conservant que les impôts coraniques ; le pays conquis est divisé en huit khalifaliq avec administration hiérarchisée : justice, finances. Mais c'est l'armée qui requiert toute son police, instruction, de soldats de métier (deux attention avec un important contingent cent quarante artilleurs servant vingt pièces de campagne, deux mille et les dizaines de milliers de guerriers cavaliers, huit mille fantassins) volontaires des tribus soumises. Mais cet état est extrêmement fragile. C'est en effet un état madhiste dont l'unité repose sur la guerre sainte, et c'est le déclenchement de la guerre sainte le 19 novembre 1839 qui va le perdre parce que Bugeaud, assuré du soutien de Paris, va se décider à mener la guerre jusqu'à son terme. de 1841, les villes nouvelles, construites Au printemps par Abd el Kader sur la lisière du Tell et des Hauts-plateaux (Boghar, Taza, sont prises ainsi que ses places fortes du Tell : Médéa, Tagdempt), Mascara. Les appels de l'émir au sultan de ConstantiMiliana, restent vains. Le 14 mai 1843, sa Smala est nople et à l'Angleterre surprise par le duc d'Aumale puis, après la défaite de l'Isly, il se voit interdire par le traité de Tanger (10 septembre 1844) le séjour marocain. Bou Devant l'effacement forcé de l'émir les confréries se réveillent. Maza (l'homme à la chèvre) appartenant à la confrérie Taibiya soulève tout l'est de l'Oranie. Abd el Kader, réfugié dans les confins algéroune colonne franmarocains, profite de cette diversion pour surprendre de Sidi Brahim (23 septembre 1845). L'insurrection çaise au marabout se généralise. Mais Bugeaud revient et réagit avec vigueur : les différents « maîtres de l'heure » Taibiya sont capturés l'un après l'autre. Abd el Kader ne pouvant soulever les Kabyles, traqué dans ses retraites se rend finalement au général La Moricière le successives, 23 décembre 1847.
EN AFRIQUE AU XIXe SIÈCLE La fin de la conquête (1847-1857)
et les dernières
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insurrections.
La reddition d'Abd el Kader marque la fin de la guerre des Arabisés de l'ouest algérien. Par contre les sédentaires kabyles des massifs montagneux et les tribus du sud demeurent insoumis comme ils l'étaient sous l'occupation turque. Les officiers de l'armée d'Afrique, imprégnés de ces régions d'histoire ancienne, persuadés que la non-soumission du Limes avaient précipité la fin de l'Afrique roet la perméabilité à partir de 1848 des « opérations de pacification ». maine, entreprennent vont s'avérer particulièrement destructives dans les Ces opérations des oliviers ont des conséKabylies où les razzia et la destruction sédentaires qui ne peuvent, quences effroyables sur des populations leur richesse avec eux. comme les nomades, fuir en emportant met fin à l'indépendance En 1857 le combat d'Icheriden kabyle. L'Aurès a été soumis dès 1849 et les oasis du sud (El Abiod, Laghouat, les opérations doivent être Touggourt) entre 1852 et 1854. Cependant menées sur les confins marocains par le général de Martimprey contre les Beni-Snassen et Angad (1859). Cinq ans plus tard le colonel Beauprêtre est massacré dans le djebel Amour avec toute une colonne et il faudra cinq années d'incessantes au général de Wimpfen campagnes alimentée pour en terminer avec cette zone d'insurrection permanente dans le tout proche territoire marocain. En 1864 les Ouled sidi Cheikh du Sud Oranais déclenchent une insurrection qui gagne le Sud Constantinois et le Tell oranais où les populations veulent empêcher l'installation de colons. En 1866 débute un cycle de quatre années consécutives de calamités Des fortement la démographie climatiques qui affectent algérienne. de la une diminution (évidemment statistiques peu sûres) indiquent population algérienne de 22 % entre 1861 et 1872. Les causes éconodonc très importantes, mais pour la dernière miques apparaissent facteurs politiques celle du Moqrani, plusieurs grande insurrection, vont s'ajouter à une grave situation c'est d'abord la économique; défaite militaire de 1871, c'est ensuite le décret Crémieux donnant la c'est enfin le remplacement citoyenneté française aux Israélites, par l'administration civile française des colons des fameux protectrice bureaux arabes qui comprenaient sans doute mieux les besoins des est du 22 janvier Si le début du soulèvement populations autochtones. 1871, c'est le 16 mars que le bachaga Moqrani, grand propriétaire foncier du sud de la Grande Kabylie, prend la tête de la révolte. Il s'allie avec le cheikh Haddad toute de la confrérie des Rahmaniya, En quelques mois, malgré la mort de puissante dans le Constantinois. Moqrani (5 mai), l'insurrection l'Algérois et le gagne le Constantinois, Sud Oranais. La répression indure près d'un an. Les populations de guerre de vingtsurgées sont durement punies. Une contribution sept millions de francs payable en deux ans est exigée. Par ailleurs, 446 406 hectares de terres dont les exploitants sont chassés sont donnés à des colons, notamment les Alsaciens-Lorrains qui, après 1870, ont choisi la France.
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de 1871 est le dernier mouvement L'insurrection généralisé de rébellion armée en Algérie avant novembre 1954. Sur le plan de l'Histoire algérienne elle présente un caractère très différent de la tentative d'Abd el Kader. Si cette dernière peut être considérée comme un ultime la révolte de du brillant et tardif sursaut moyen âge maghrébin, de 1954la guerre d'indépendance au contraire Moqrani préfigure 1962 parce qu'elle tirait sa force — déjà — du sentiment de frustration de du paysan algérien dépouillé de ses meilleures terres et contraint travailler pour le colon européen. L'administration
de l'Algérie.
aussi vaPeu de pays ont « bénéficié » d'une gamme d'expériences des quatre premières années connaît riées. L'ère des tâtonnements du génécivil d'abord indépendant d'abord un assez curieux intendant général qui cenral, puis placé sous ses ordres, ensuite un gouverneur dont les sous-intendants tralise les diverses branches d'autorité, placés de notables. dans un certain nombre de villes à la tête de municipalités L'intendant indépendant reparaît, puis est éliminé avec les municiest divisée en trois provinces, palités en 1838. En 1845 l'Algérie militaire et territoire civil, territoire avec, pour chacune, territoire mixte. La Révolution de 1848, qui a des principes et de la bonne volonté, « assimile » l'Algérie à la France. L'Algérie est alors divisée en trois divisés en arrondissements eux-mêmes réglementairedépartements Sous le second Empire, ment pourvus de préfets et de sous-préfets. un décret du 31 août 1858 supprime les fonctions de gouverneur génémilitaire est laissé à un général, cependant que ral, le commandement directe du minisles autorités civiles sont placées sous la dépendance est devenue tère de l'Algérie et des Colonies. Mais l'armée d'Afrique mal les colons européens, un monde à part dont les officiers supportent les considèrent avec sympathie espagnols et maltais, et au contraire chefs arabes. Si bien qu'au cours du voyage de Napoléon III en Algérie (septembre 1860), l'empereur également influencé par le mulâtre Ismaël fumeuse décide de créer le Royaume Urbain Arabe, construction mal à une autorité militaire souvent livrant en fait l'Algérie préparée. A la suite de diverses erreurs et d'une situation économique particuarabes « la campagne contre les « bureaux lièrement catastrophique, orchestrée par Mgr Lavigerie et le publiciste Prévost Paradol aboutit le le 9 mars 1870 à un ordre du jour du Corps législatif demandant rétablissement du régime civil en Algérie. La réforme est pratiquement Le troubles. faite lorsque la chute de l'empire amène de nouveaux décret Crémieux (24 octobre 1870) donne la citoyenneté française aux Israélites d'une partie de la population, algériens. Cette promotion dont le mode de vie était relativement proche de celui de la population méprisée par les musuleuropéenne mais qui était traditionnellement mans, constitua une lourde faute politique.
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La colonisation. C'est en 1840 que les possibilités de l'Algérie quant à la colonisation à Bugeaud qui met en oeuvre une formule de européenne apparaissent imitée des Romains (Ense et aratro). Sur les militaire colonisation des terres confisquées aux tribus révoltées de la Mitidja et dépendant biens habou, des villages sont installés le plus souvent sur une hauteur facile à défendre. La deuxième République, par une loi du 23 septembre des lots de deux à douze hectares aux Fran1848, offre gratuitement çais qui en font la demande. En 1851 on déporte en Algérie plusieurs milliers de Républicains victimes du coup d'état et le maréchal Randon, futur conquérant de la Kabylie, leur fournit des terres par le sys» consistant à prélever des terres sur le dotème du « cantonnement la propriété définitive du maine des tribus tout en leur accordant et vont se reste. Mais beaucoup de ces colons improvisés abandonnent réfugier dans les villes. De 1830 à 1871 l'administration avait concédé quatre cent quatrevingt-un mille hectares aux colons européens ; la période du royaume arabe a réduit l'immigration. C'est l'insurrection kabyle et les nouvelles terres mises sous séquestre Par ailleurs, un nouveau départ de la colonisation. qui permettent la loi foncière du 26 juillet 1873 ou loi Warnier, sous prétexte d'assimilation, supprime la notion de propriété collective (arch) si répandue dans la société arabo-berbère et légalise d'importantes spéculations au détriment des paysans autochtones qui se voient réduits au rôle de prolétaires agricoles. Mais le chiffre de colons européens s'accroît régulièrement : de vingtsept mille au 1er janvier 1841 il passe à cent neuf mille six ans plus du tard, dont 48 % de Français, le reste étant composé d'originaires bassin méditerranéen (Espagnols, Italiens, Maltais, etc.). En 1881 le recensement indiquait cent quatre-vingt-quinze mille Européens (parmi lesquels étaient comptés les Israélites par le indigènes naturalisés décret Crémieux). Le jeu des naturalisations avait notablement accru la proportion de Français sans pour autant donner des racines métropolitaines à cet ensemble méditerranéen original qui allait donner à l'Algérie sa physionomie surveLe crise du phylloxéra particulière. nant dans le vignoble européen à partir de 1876 fait découvrir la vocation viticole des terres algériennes et entraîne un nouveau développement de la colonisation. 3- La eôte orientale d'Afrique. A plusieurs reprises nous avons souligné la continuité des implantation arabes le long de la Mer Rouge. Les Anglais sont installés à Aden (1839) l'année même où Rochet d'Héricourt et (1) débarque àTadjoura prend la route du Choa, puis devient l'ami et le confident du roi Sahlé Sélassié qui signe en 1842 un traité de commerce avec la France. (l) Supra, p. 497.
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En 1859 l'agent consulaire français à Aden, Henri Lambert, négocie la cession d'Obock à la France, mais il est assassiné dans le boutre qui L'année suivante, le capitaine de vaisseau Fleuriot de l'y amenait. Langle fait confirmer la cession d'Obock. En 1862, Dini Ahmed Abouvient signer à Paris le traité baker, cousin du sultan de Tadjoura, 10 000 thalers, prévoit la cession à la France de la côte qui, moyennant La même année, le capitaine entre le ras Bir et le ras Doumeira. de frégate Buret hisse sur Obock un drapeau français dont la garde est confiée à un Dankali. Ce représentant et unique de la permanent puissance française n'eut, semble-t-il, jamais de difficultés à assurer son autorité. L'ouverture en 1869 du Canal de Suez faisait de la Mer Rouge — jusqu'alors impasse — un boulevard. Après une campagne menée par Denis de Rivoire, en 1881, une société commerciale fondée sur son la « Compagnie En 1882 initiative, », s'installe. franco-éthiopienne Soleillet débarque pour le compte de la « Société franl'explorateur futur créateur du Chefneux, çaise d'Obock », y amenant l'ingénieur et un petit groupe de Français. Soleillet chemin de fer franco-éthiopien, obtient la cession de Sagallo au fond du golfe de Tadjoura. Ainsi, sur la côte orientale, la France était placée, à la fois pour installer un dépôt et de Madagascar et pour de charbon pour ses lignes d'extrême-Orient agir vers l'Ethiopie. 4. La Réunion
(ci-devant
Ile Bourbon).
Privée de l'excellent mouillage de Maurice, la politique des Français à demeurés à la Réunion est axée sur les possibilités d'implantation et les problèmes de main-d'oeuvre posés par l'extension Madagascar de l'esclavage. des champs de canne à sucre et l'abolition du Restituée le 6 avril 1815, l'île est organisée par une ordonnance des autres 21 août 1825, qui servira de modèle pour l'organisation colonies. Aux côtés du Gouverneur dont les pouvoirs sont très étendus : le figurent trois chefs de service aux importantes responsabilités le directeur de l'intérieur, enfin le Procucommissaire-ordonnateur, reur général. Le gouverneur est assisté d'un contrôleur colonial chargé des services administratifs. de 1825 de la surveillance L'ordonnance d'autre un Conseil introduit, part, un élément électif en instituant général composé de 24 membres nommés par le roi pour cinq ans sur une liste double de candidats présentés par les conseils municipaux. alors La monarchie de juillet fait un pas timide vers l'autonomie, essaie de réaliser l'assimilation de la colonie que la Seconde République et de la métropole, mais le sénatus-consulte du 3 mai 1854 confie au des maires, des adjoints et des membres du la nomination gouverneur Conseil municipal. Sur le plan économique, les planteurs de Bourbon se lancent à corps une métropole qui est priperdu dans la canne à sucre pour ravitailler vée des ressources de Saint-Domingue et de Maurice (la production de betteraves en France est encore insuffisante) ; de nouvelles terres
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sont mises en culture (42 600 hectares cultivés dont 4 200 en cannes (10%) en 1823, 91 000 dont 62 000 en canne (68%) en 1860). De 211 en 1815 la production passe à 68 000 t en 1860. Cette culture se des autres et entraîne une certaine concentration fait au détriment en raison des moyens financiers exigés. L'abofut celui de la main-d'oeuvre. Le problème le plus important lition de la traite décidée par le Congrès de Vienne devait aboutir à l'abolition de l'esclavage. Cette perspective entraîna la formation d'un en 1832, les Francs-créoles, mouvement autonomiste, qui obtint, 17 sièges sur 35 au Conseil général. fut organisé le recruOn sait dans quelles conditions particulières libres » sur la côte orientale d'Afrique. Le tement de « travailleurs d'un contrat de travail ainsi recrutement comportait l'établissement que le « rachat préalable » des esclaves livrés par les autorités locales, libre était doudu travailleur mais la validité du consentement en fait d'autre choix que de partir teuse, car le recruté n'avait esclave (1). Un arrêté de 1859 interpour le Brésil comme authentique dit ce système d'esclavage déguisé. de Bourbon (2), était particulièrement L'amiral de Hell, gouverneur ses efforts soucieux du médiocre mouillage de l'île. Aussi multiplie-t-il pour s'asssurer des points de relâche mieux abrités sur la route des Indes. C'est ce qui amène l'installation à Nossi-Bé et Mayotte. 5. Nossi Bé et les Comores. Nous avons vu dans quelles conditions Jean Laborde seul s'était assuré une extraordinaire position personnelle sur les plateaux. Cependant en 1840 le ministère et l'amiral de Hell, gouverneur de Bourbon, soucieux de ne rien obtenir pour les intérêts français, envoient des navires patrouiller le long des côtes malgaches. Des groupements Antakara sous la pression des Merina s'étaient réfugiés dans les îles de Nossi Bé, Nosy Faly, Nosy Mitsio. Désespérant de recevoir l'aide du sultan de Zanzibar, à un ils s'adressent navire français qui est justement en rade et placent leur pays sous la protection de la France (1839); l'amiral de Hell ratifie la convention (1841). Le pavillon français est hissé sur les îles (3). Par ailleurs, des contacts sont pris avec de petits souverains sakalaves dont Andrian Souli, sultan de Mayotte, chassé de son royaume de Boina par les Hova et qui a établi son autorité sur l'ensemble de l'île. Se sentant menacé, il fait appel aux Français (1840). Le traité du 10 février 1843 fait de Mayotte un territoire français moyennant une rente annuelle de 5 000 francs. de Mayotte a une importance car elle L'acquisition considérable, sur une revendication marque la volonté de la France de maintenir Histoire de la Réunion, p. 70. SCHERER. (2) ANDRÉ fut appelée La Réunion à l'époque révolutionnaire, puis île Bona(2) L'île Bourbon de nouveau Bourbon entre 1814 et 1848. parte ) DESCHAMPS, Histoire de Madagascar, p. 170. (8)
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« Mayotte fut un pistolet chargé au coeur de MadagasMadagascar. car » (1). des Chirazi et des Malgaches fut Mohéli qui avait subi l'invasion et connut de nombreuses et sanglantes vassale d'Anjouan longtemps guerres. De 1828 à 1842, un beau frère de Radama Ier, Ramenataka, de Ranavalona à l'islam sous Ire, se convertit fuyant les persécutions le nom de Abd er Rhaman et rétablit la paix dans l'île. A sa mort, de Pondichéry, Mme Drouet, sa fille, conseillée par une Française officielle par la France qui lui gaobtient en 1849 sa reconnaissance de ses domaines. Mais, en 1851, la sultane épouse un rantit l'intégrité qui la relègue dans son harem et gouverne à sa prince de Zanzibar impopulaire qu'il doit fuir (1860), ce qui place... de façon tellement le pouvoir. En 1867 Lambert, à la princesse de reprendre permet met son dynamisme au service de Mohéli, écarté de Madagascar, construisant des sucreries, créant des plantations, mais, lorsque la est à son plus haut point, la reine dénonce la charte en prospérité en faveur de son fils. Lambert, ruiné, meurt peu après abdiquant du 26 avril 1886 fera un protectorat à Mohéli, dont le traité français. Ainsi l'investissement tactique de Madagascar est réalisé et facilitera, le moment venu, la conquête militaire de l'île. Il n'est pas facile de dégager une vue d'ensemble pour une période si importante et pour des champs d'activités de l'Algérie qui s'étendent à la Réunion en passant par le Sénégal, Obock et le Gabon. Ce qui frappe c'est la valeur des ministres et des marins, c'est, la période de le souci d'accroître le domaine français, d'asseoir l'in70 exceptée, fluence française. III.
LA POLITIQUE
ANGLAISE
EN AFRIQUE
AU XIXe
de la Il n'est pas nécessaire de revenir sur les facteurs industriels internationale de Londres de 1851 suprématie anglaise. L'exposition le nom du prince Albert en fut une éclatante à laquelle s'attache — o combien significatif! En 1850 c'est l'incident démonstration. — de Don Pacificio, juif de Gibraltar mais aux affaires douteuses, dont les marchandises saisies par le gouvernement sujet britannique sous menace de bombardement d'Athènes : grec furent restituées le citoyen britannique est un être sacré de par le monde. i. La Côte orientale
(2).
En s'installant au Cap et à Maurice, les Anglais ont surtout visé les escales sur la route des Indes. in Histoire des Colonies françaises, tome VI, p. 287. I1) MARTINEAU, (2) Consulter in History of East Africa, 1963, les chapitres de J. M. GRAY,Zantibarand the coastal belt 1840-1884, p. 213-251 ; JOHN FLINT, The wider background to partition and colonial occupation, p. 352-390.
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L'île Maurice. Nous avons vu à la fin du xviiie siècle l'extraordinaire prospél'île de France et à son rôle de rité due au nid de corsaires qu'était le déclin relatif de Bourbon (La Réunion). chef-lieu, entraînant résistance, à l'occupant britannique, Livrés, après une héroïque d'abord treize années les habitants subissent devenus Mauriciens, L'ère de la autorité de Sir Robert Farquhar. durant l'implacable considéré comme une course étant achevée, le xixe siècle peut-être commerciale marquée lors de l'abolition longue période de prospérité massive de coolies indiens et de l'esclavage (1837) par l'importation en 1869 lors de la mise en service du canal de Suez par la perte de son rôle d'escale sur la route des Indes. et en 1847 où L'autorité anglaise (sauf au début sous Farquhar, au l'on interdit de plaider en français) fut dans l'ensemble tolérante Sir Hamilton Gordon, déclarait en point que l'un des gouverneurs, administrée 1874 : « Maurice est une colonie française par les Anglais ». Sur le plan démographique, dès 1859 on compte 201 979 immigrants de l'Inde, 6 541 chinois pour une population créole de 96 526 habitants. Dans l'ordre économique, de canne de Maurice les plantations furent à partir de 1850 ravagées par le borer et l'île subit d'effroyables dommages lors du cyclone de 1892. A la fin du xixe, Maurice gardait sa structure foncière et le souci de ses problèmes raciaux : ceux des « créoles » francophones face aux Indiens qui ne l'étaient des « créoles » une barpas, et à l'intérieur rière de race entre blancs et population difféde couleur, totalement rente du monde fraternel de la Réunion. Zanzibar
et la Côte orientale.
au Cap et à Maurice, la Grande Bretagne Malgré son installation s'intéresse modérément En 1824, le à la Côte orientale d'Afrique. capitaine Owen occupe Mombasa, mais cet incident reste sans suite. La nomination d'un consul anglais à Zanzibar en 1843, le dynamisme de John Kirk qui restera en place de 1868 à 1886, son rôle de soutien vis-à-vis des missionnaires, son poste en cenvont transformer tre de renseignements de l'intérieur du continent. pour la connaissance En 1862 l'Angleterre intervient entre les deux fils de l'iman Seyyid Saïd et verse une rente annuelle à l'iman de Mascate pour obtenir l'« indépendance » de son frère, le sultan de Zanzibar. La même année 1862, le gouvernement nomme à Gonbritannique dar le consul Cameron ; d'abord en bons termes avec le négus Théodoros, Cameron se brouille avec le souverain éthiopien, lequel fait emprisonner durant plusieurs années à Magdala un groupe d'Anglais qui ne seront délivrés du général Sir Robert Napier que par l'expédition (1867). Cette expédition, permet de mesurer les simple aller-retour, réticences anglaises à s'engager sur le continent africain. Quelques
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années plus tard, cette colonne anglaise n'eût été que l'avant-garde d'une implantation plus durable. Johannès En 1872, les Anglais soutiennent IV, successeur de Théovassal Ménélik, ras du Choa, soutenu lui doros, contre son puissant à se battre contre incite l'Egypte En 1875, l'Angleterre par l'Italie. mais celle-ci est victorieuse. l'Ethiopie, de la mer Rouge sur la La même année, conscients de l'importance à nouvelle route des Indes ouverte par Suez, les Anglais s'installent Sokotora. nous avons affaire à une implantation Sur la Côte orientale, anglaise 1880, est marquée par le souci de la route des qui, jusqu'en Indes. a vu à partir de la Sierra Leone, après Par contre, la côte occidentale une installation de multiples tâtonnements, anglaise étoffée et dynaen excellente mique en Gold Coast, puis en Nigeria, mettant l'Angleterre position pour le scramble. 2. Les établissements
anglais
de la côte occidentale.
J. D. Fage a bien mis en valeur (1) les courants contradictoires existant soucieux entre d'une part les hommes d'état britanniques d'économies face à des postes qui coûtaient plus à gérer et défendre d'où une tendance à ne garder que le minique le trafic ne rapportait, des antiesclavagistes, des commum, d'autre part l'action conjuguée et des missionnaires merçants qui pensaient que leurs activités ne sans un soutien plus actif assurant une protecpourraient prospérer tion plus complète au commerce. de La commission de 1811, la commission d'enquête parlementaire 1816 marquent les inquiétudes des traitants contraints britanniques en 1817 de quitter le Sénégal et qui créent le nouveau comptoir de à l'embouchure de la Gambie. Par ailleurs, nous avons vu (2) Bathurst, de la menace achanti contraignant les autorités danoises, l'importance hollandaises et britanniques à reconnaître une certaine suzeraineté achanti sur les peuples côtiers. A cet égard l'ambassade de Bowdich à Koumassi (1817) crée plus de nouvelles difficultés qu'elle n'en résout, si bien que le gouvernement envoie son propre représenbritannique directement avec les Achanti. tant, Joseph Dupuis, pour négocier En 1821, la Compagnie est supprimée et le gouvernement britannique assure le contrôle de ses forts et comptoirs en Gambie aussi bien qu'en Gold Coast. La nomination d'un antiesclavagiste convaincu et dynamique, Charles Mac Carthy, à la tête de la Sierra Leone (1814) entraîne l'extension du territoire contrôlé par l'Angleterre, mais avec des dépenses constamment accrues (dépenses administratives 24 090 Livres en 1814, 95 000 en 1824) qni entraînent Autorisé des réticences métropolitaines. (M An Introduction to the History of West Africa, p. 123. (2) Supra, p. 301-304.
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à occuper les îles de Los, repaires de négriers, en 1818, Mac Carthy se des lies Sherbro et Bissagos. voit interdire l'annexion des possessions Nommé en 1821 à la tête de l'ensemble britanniques il croit possible de vaincre les forces Achanti de l'Afrique occidentale, sont attaqués (1823), il part en campagne et, lorsque les Denkyera Fanti pour tomber dans une avec 250 soldats et 2 000 auxiliaires le 21 janvier 1824, embuscade et se faire tuer à la bataille de Nsamankou le jour même de la mort d'Osei Bonsou à Koumassi. militaire opéré deux ans plus tard à la Malgré le redressement le désastre de Nsamankou bataille de Dodowah, pèse d'un poids très lourd sur la politique de Londres qui interdit, en 1827, à Sir Neil Campdes possessions bridu Sierra Leone, toute extension bell, gouverneur tanniques et lui prescrit de retirer les garnisons des forts de Gold Goast. à la création d'un Comité de traitants Cette décision aboutit chargé des forts pour lesdes affaires de Gold Goast, y compris l'entretien est versée. quels une indemnité Le comité des traitants nomme en 1830 George Mac Lean qui a paret qui, installé à Cape Coast, réussit à ticipé à la bataille de Dodowah conclure un traité de paix entre Achanti et Fanti. Par son ascendant Mac Lean arbitre les querelles africaines entraine et la paix installée l'essor du commerce et l'extension de l'autorité Mais les adbritannique. versaires de Mac Lean provoquent l'envoi d'une commission. Cette commission observe l'absence Mac Lean, de bases légales de la juridiction mais constate sa valeur dans un pays « foncièrement du respectueux droit ». Aussi le Foreign Act rétablit en 1843 l'autorité Juridiction de la Couronne sur les forts et les zones où Mac Lean avait étendu son influence. Un lieutenant le commander Hill, subordonné gouverneur, au gouverneur de Sierra Leone, entre en fonction, que cependant Me Lean est nommé chief justice. C'est l'habileté de Me Lean qui permet au commander Hill le 6 mars 1844 de signer avec huit chefs Fanti un traité dont l'importance est telle dans la prise de conshistorique cience nationale le a fixé au jour anniversaire que le Dr Nkrumah 6 mars 1957 la proclamation de l'indépendance. Les chefs reconnaissent l'autorité et s'engagent à supprimer les sacrifices britannique humains et autres pratiques vols et autres barbares ; les meurtres, délits seront jugés par les cours de Sa Majesté et des chefs de district adaptant la coutume de la loi du pays aux principes généraux Décédé en 1847 et enterré à Cape Coast, Mac Lean a britannique. la Gold Coast britannique. marqué profondément En 1850, la Gold Coast possède, à côté du gouverneur, un conseil exécutif et un conseil législatif. Les forts danois (Christianborg, Ningo, Ada et Keta) sont achetés pour 50 000 Livres et les territoires en dépendant (Akwapim, Akim Abuakwa, à leur Krobo et Krepi) entrent tour dans le Bond. soucieuses de voir se dévelopC' est à ce moment que les populations per le pays décident de payer un impôt et constituent une « assemblée législative » avant la lettre. Mais le poll-tax n'est payé qu'avec les Plus grandes difficultés.
L'IMPLANTATION POLITIQUE EUROPÉENNE
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Achanti de 1863, le parlement britannique Après l'attaque envisage de la Gold Coast. Finalement un moment l'évacuation l'Angleterre s'y maintient d'autant que le commerce de l'huile de palme est de plus en plus florissant. Par ailleurs, l'oeuvre missionnaire en pays yorouba entreprise à Lagos. En 1851, Akitoye s'enentraîne l'intervention britannique gage à supprimer le trafic des esclaves. Son neveu Kosoko qui avait en 1845 usurpé le trône régnait sur les pays voisins de Palma et Lekki. En 1861 cependant, les Britanniques décident d'annexer l'Ile de Lagos. C'est en 1865 que Gold Coast, Gambie, Sierra Leone et Lagos sont rassemblés sous l'autorité d'un gouverneur général résidant en Sierra Leone avec un lieutenant-gouverneur dans chacun des pays. En 1867, un échange a lieu entre les forts hollandais et anglais, les Hollandais se regroupent à l'ouest de la Gold Coast (Elmina, Komenda, Sekondi, Dixcove, Beyin), cependant que l'autorité anglaise s'étend sur l'ensemble du littoral à l'est de la rivière Sweet, occupant les anciens forts hollandais de Mouri, Kormantin, et Crèvecceur (Dutch Accra). Devant une nouvelle menace Achanti (1868), les Hollandais décident finalement de partir et échangent leurs installations de Gold Coast contre des positions anglaises de Sumatra (1870). On sait dans quelles conditions Sir Garnet Wolseley parvint à Koumassi le 5 février 1874 et y mit le feu, exigeant une indemnité de 50 000 onces d'or. Après la campagne de Sir Garnet Wolseley, la bande côtière de Gold Coast est séparée de la Sierra Leone et devient colonie britannique (12 septembre 1874). La région de l'intérieur devient La capitale est transférée de Cape Coast à protectorat. Accra (en 1877). Lagos, subordonnée à Accra en 1874, en est détaché douze ans plus tard. Par ses commerçants, ses missionnaires, ses explorateurs, ses marins, la Grande Bretagne s'est taillée sur la côte ouest africaine quatre bases de départ qui vont lui servir pour l'assaut final. Certes il y eut parfois à Londres des réticences, mais elles ne résistèrent pas aux événements était en cause ni surtout aux pressions lorsque l'honneur britannique économiques. Malgré un apparent décousu, cette politique montre une remarquable continuité dont l'aboutissement sera la grande polide la fin du siècle. tique impérialiste IV. LA
POLITIQUE
PORTUGAISE
EN
AFRIQUE
De 1800 à 1875, l'Angola tente une lente reconversion de son économie centrée depuis deux cents ans sur la traite. Le Mozambique voit au contraire augmenter la traite, minime jusqu'alors, pratiquée sur ses côtes.
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Tovar de Albuquerque, relance En 1819 un nouveau gouverneur, de café et de coton. Il les plantations l'économie en encourageant construit des routes, établit un service postal, mais une révolte le et où dépose en 1822, année où le Brésil proclame son indépendance de constituer une fédération incluant Anses dirigeants proposent gola et Mozambique. Loanda refuse, mais Benguela accepte (1). avait ramené, à la fin du xviiie siècle, La perte des Etats-Unis sur l'Afrique, celle de Saint-Domingue avait l'intérêt de l'Angleterre déclenché un effort français sur le Sénégal en 1817 ; de même la perte du Portugal en Afrique. du Brésil est suivie d'un effort particulier du Portugal ministre Le marquis Sa de Bandeira, premier qui avait été, durant sa captivité parisienne, gagné aux idées libérales, préconise en 1836 l'envoi de colons honnêtes au lieu des interdits de séjour, et déclare illégale l'exportation d'esclaves. Mais, comme au xvie siècle, les représentants locaux font écran et sabotent l'application des décisions de Lisbonne ; le gouverneur lui-même expédie une cargaison d'esclaves à Rio de Janeiro. Cependant le peuplement demeure de Loanda, en 1850, on compte 830 blancs dont faible. A Saint-Paul 160 femmes, 2 400 mulâtres dont plus de 120 esclaves, 9 000 nègres dont 500 esclaves. Benguela compte 600 maisons, 39 blancs dont une femme, 179 métis et 2 200 nègres dont la moitié esclave. L'installation de véritables colons commence en 1849 dans la région de Moçamédès avec 170 hommes venus de Pernambouc et 130 l'année suivante. Vers 1855 des pêcheurs de l'Algarve s'installent dans le sud. Durant cette période de stagnation certains explorateurs (Graça de 1843 à 1845, Silva Porto, Montana, Texeira de 1852 à 1856) s'efforcent d'affirmer les droits dormants du Portugal sur les régions de l'intérieur. Comme l'a souligné Duffy (2), l'exploration de Livingstone a une à l'opinion publique considérable importance pour faire connaître mondiale l'étendue et la situation réelle des possessions portugaises, montrant entre Mozambique et Angola ne que la zone inexplorée à la couronne portugaise. pouvait être attribuée automatiquement Celle-ci ne contrôle guère en Angola que 130 000 km 2 environ commandés par de petits fortins (Massangano, Muxima, Pungo Andongo, afriCambambe, Ambaca). Le reste demeure en pleine souveraineté caine. En 1875 on décide la construction d'une voie ferrée Loanda-Ambaca par la vallée de la Kwanza. Au Portugal la fusion des partis « réformiste » et « historique » (1876) coïncide avec la fondation de la Société de Géographie de Lisbonne et inaugure le départ d'une nouvelle expansion portugaise marquée par de nouvelles explorations (Serpa Pinto, Capello et Ivens) et une colonisation portugaise organisée en 1880 sur systématique le plateau Huila avec des paysans de l'Algarve, du Minho et de Madère. (1)DUFFY,op. cit., p. 74. (2)p. 174-200. H. CORNEVIN. — Histoire de l'Afrique, Tome II.
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L'IMPLANTATION POLITIQUE EUROPÉENNE
en Angola une colonne de 300 Boers, les La même année parvient Jacob us Botha. Trekkers sous la direction du patriarche Thirstland et Partis 600 de Mafeking avec leurs chariots par le Betchouanaland la Counéné et sur les conseils d'un missionEtosha Pan, ils traversent ils s'installent sur le plateau Huila. naire français, le père Duparquet, à la pacification Devenus en 1882 citoyens portugais, ils contribueront du pays Ovimboundou. le père Antonio Barroso apparEn 1881 arrive à San Salvador tenant à la mission des prêtres séculiers de Sernache de Bomjardin, éléments sont arrivés en 1875. Le père Barroso dont les premiers de l'ancien royaume du Congo en consredonne vie au catholicisme truisant des écoles tenues par des instituteurs africains, un hôpital, une ferme-école. un observatoire, On peut donc dire que l'Angola commence à s'éveiller à la veille du scramble, mais ce réveil n'affecte qu'une petite partie de ce qui sera la colonie portugaise de l'Angola. Au Mozambique l'occupation portugaise est limitée à quelques villes du littoral : Lourenço Marques, Inhambane, Bazarouto, Chiloane, Sofala (1). En Afrique du sud, la poussée des Boers vers le nord les amène à des frontières négocier en 1858 avec le Portugal pour la détermination des moyens de communications. Mais le traité ne et l'utilisation En 1861, les Anglais du Natal prensera pas ratifié par les Portugais. Il s'ensuit une importante entre nent l'île d'Inbaca. correspondance reconnaît Lisbonne et Londres. En 1869, un traité avec le Transvaal la limite méridionale du Mozambique au 26°30' de latitude Sud et du de Lourenço Marques. L'arbitrage permet aux Boers l'utilisation maréchal de Mac Mahon rendu en 1875 donne gain de cause au Porà celle de Bolama (Guinée portugaise) tugal. Cette affaire succédant dans laquelle le président Grant avait également donné gain de cause aux Portugais contre les Britanniques, contribue à détériorer les relations luso-britanniques. Les premières réactions à l'embouchure du Congo et portugaises l'affaire Stanley-Brazza du Pool vont frapper les trois coups du scramble. Au tournant de 1880, les places sont prises sur la côte pour des actions ultérieures. Avec le recul on mesure les hésitations, les aléas, les difficultés. En cloisonnant les chapitres (missions chrétiennes, des faits appaexplorations, implantation politique), l'enchaînement raît mal. A plusieurs reprises les nations européennes ont envisagé d'évacuer certains et insalubres. La France a été points coûteux retenue par ses réflexes terriens et ses commerçants, par l'Angleterre ses marins, ses missionnaires et ses traitants, les deux puissances par leurs rivalités. Mais cette rivalité a encore un vaste champ d'action. Le retour du Portugal, l'intervention de nouveaux compétiteurs vont fondamentalement transformer le problème. (1) EDOUARD FOA,DU Cap au lac Nyassa, Paris 1897, p. 170.
CHAPITRE CONQUÊTE
ET PARTAGE
XVI DE L'AFRIQUE
Des petites rivalités et anglo-portugaises, nous franco-anglaises l'avons vu, se sont déjà manifestées en divers points. La personnalité de Léopold II par ailleurs est, depuis 1876, accrochée au bassin du tacites se sont établies sur la côte Congo. Des sphères d'influence occidentale où l'Angleterre a acheté le départ des Danois et des Hollandais. Mais en 1880 l'épiderme africain n'est encore qu'égratigné sauf en ce qui concerne l'Algérie, le Sénégal et le Gabon où la profondeur de la pénétration française va lui donner une incontestable avance sur ses concurrents et justifier ses succès. De même l'importance de la pénétration anglaise en Afrique du Sud, le dynamisme de la marine dans l'océan indien expliquent les succès ultérieurs dans l'ensemble de l'Afrique Australe et Orientale. De 1880 à 1900 ou si l'on préfère de 1881 (traité du Bardo) à 1902 (fin de la guerre des Boers) l'Afrique va se trouver entièrement partagée à l'exception du Maroc (mais pour dix ans seulement), de l'Ethiopie, mais après un « protectorat » italien théorique de sept années (1889-96) et du Libéria que certains historiens ont assimilé, peut-être de façon américain. abusive, à un semi-protectorat La carte ainsi dessinée n'a pas varié jusqu'en 1918 où les quatre colonies allemandes (Togo, Sud-Ouest, Cameroun, Afrique Orientale) ont été partagées entre Anglais, Français, Belges et Sud-Africains. Ce deuxième partage ne sera plus guère modifié, que par le rattachement à la fin de la deuxième guerre mondiale, de l'Erythrée à l'Ethiopie puis à partir de 1956 par les premières indépendances du Soudan, de la Tunisie, du Maroc. Nous verrons au cours du prochain volume dans quelles conditions se sont mais nous exprimés ces mouvements avons déjà souligné dans la première partie l'importance des résistances africaines des deux dernières décennies du xixe siècle pour la prise de conscience nationale des jeunes états indépendants. I. LES CONDITIONS
DU PARTAGE
Nombreux sont les auteurs qui se sont émus des conditions d'un partage ne tenant jamais compte des affinités ethniques des peuples.
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CONQUÊTE ET PARTAGE DE L'AFRIQUE
Mais ce partage fut effectué en fonction des Européens, de leurs préocdes États, de leurs soucis asiade la situation intérieure cupations, industrielles. tiques ou de leurs possibilités i. Importance
de la position
des puissances
européennes.
A plusieurs reprises la politique africaine des états est influencée : événements par d'autres au Transvaal en 1879 se ressent-elle Ainsi la politique britannique irlandaise et du « guêpier afghan » dénoncé par Gladsde l'opposition tone. faillirent remettre en cause les De même les difficultés tonkinoises françaises au Soudan. On a pu dire par ailleurs que l'oppoentreprises à la politique de Ferry sur la question sition de la droite catholique était la rançon des décisions laïques prises par le même coloniale était ministre de l'Éducation Nationale. La droite Ferry lorsqu'il de la ligne bleue des ne voulait pas voir l'armée française s'écarter et des colonies: Vosges. Deroulède disait à propos de l'Alsace-Lorraine « Vingt domestiques ne sauraient remplacer les deux enfants qui nous furent arrachés ». souhaitait voir la France Il est certain d'autre part que Bismarck des compensations à la perte de l'Alsace-Lorraine. trouver outre-mer 2. Échanges
et compensations.
Le partage de l'Afrique s'est fait en Europe dans les salons feutrés des et suivant des règles de compensation chancelleries mondiale. Certes — ce fut le cas notamment à certains moments au Niger pour les — les explorateurs ont eu le sentiment d'avoir travaillé en Français vain, d'avoir été trahis par leurs chefs. Ceux qui ont vécu en brousse du chef-lieu comprennent l'amertume et souffert de l'incompréhension devant ce qu'ils de ces officiers, de ces explorateurs considèrent Mais ces compensations comme de la désinvolture. obéissent à l'intérêt national. Nous avons vu déjà comment avait pu l'Angleterre de Sumatra contre la partie hollanéchanger (1871) ses installations de Chypre par l'Angleterre au daise de la Gold Coast. L'acquisition de la Tunisie Congrès de Berlin (1878) entraîne l'offre anglo-allemande Pour récupérer à la France. va céder à Héligoland, l'Allemagne ses droits sur Zanzibar (15 juillet 1890) et l'Ouganda, l'Angleterre et c'est le traité des Samoa (1899) qui va déterminer la limite delà Gold Coast et du Togo. Mais c'est bien sûr pour les possessions africaines que les échange» entre puissances européennes sont les plus nombreux compensatoires Ainsi par la convention franco-allemande du 24 décembre 1885, l'Alleses droits sur les territoires situés entre le Rio magne abandonne Nuriez et la Mellacorée (Guinée), cependant que la France abandonne ses revendications sur Petit-Popo et Porto-Seguro. reconDe même c'est par le traité du 5 août 1890 que l'Angleterre naît le protectorat en échange de l'abandon français sur Madagascar
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de des prétentions françaises sur Zanzibar et surtout de l'acceptation accroissement ce qui marquait un considérable la ligne Say-Barroua l'ende la zone d'action anglaise dans le bassin du Niger, notamment semble du royaume de Sokoto. Cela laissait le coq gaulois, suivant le mot célèbre de Lord Salisbury, « user ses ergots sur le sable du Sahara». : être cités de ces marchandages D'autres exemples pourraient du Congo et le Portugal affaire du Lounda entre l'État indépendant (mai 1891), affaire de l'Oubangui (1887 et 1894) entre l'E. I. C. et la France (1). évolue. Mais bien entendu la politique des puissances européennes 3. Les traités
indigènes.
D'une politique de sphère d'influence on passe à une série de marassistés de fonctionnaires (rarement) chandages où les diplomates africain au cours coloniaux se disputent des lambeaux de territoires de maquignonages où l'Africain ne joue qu'un rôle de pittoresques figurant sur des traités dits indigènes. Les souverains noirs mettent sans difficulté une croix au bas de documents dont le moins qu'on puisse dire est qu'ils n'ont pas la même valeur pour les Européens illettré que pour la collectivité afriguidant la main du signataire caine concernée. Dans le précis historique de la colonisation française en Afrique Occidentale de l'administrateur Gaston Mary (2) figure (p. 36 à 41) une énumération conclus par la France des traités chronologique avec les souverains africains comme avec les puissances occidentales. franco-alleMais, il est évident que ce sont les traités franco-anglais, mands, franco-portugais, qui ont de la valeur, les autres ne sont que des atouts pour d'ultérieures discussions. Ces traités indigènes vont très vite apparaître comme insuffisants du fait même que les souverains africains n'hésitent pas à signer un traité identique avec deux (ou même trois) puissances. Nous l'avons vu dans le Nord Togo (3). Le lieutenant-colonel Liebrechts décrit (4) avec humour la manière dont Stanley obtenait la signature de ces traités. « La population entière entourait le chef de la tribu. Au moment de l'apposition sur le texte de la croix consacrant le pacte, l'assemblée devenait houleuse et hilarante à considérer la chose extraordinaire du chef instrumentant la plume à la main : cette main, il fallait évidemment la guider. Puis suivait le paiement, stipulé au traité, sous la forme d'une pacotille variée : étoffes, fusils à perles, coquillages, silex, etc.. » Ces cadeaux sont parfois appuyés de fusils et les traités deviennent tellement nombreux qu'ils ne sont plus pris au sérieux. On utilise (1)Histoire du Congo-Léo,p. 118-124. 1937. (2)Pans, (3)Cf. mon Histoire du Togo p. 146-153. LIEBRECHTS, Léopold II fondateur d'empire, Bruxelles, 1932 p. 92. (4)
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CONQUÊTE ET PARTAGE DE L'AFRIQUE
l'installation d'un alors la notion d'occupation effective, c'est-à-dire deux ou trois tirailleurs), (une case, un drapeau, poste permanent des droits moins contestables. lequel détermine Notons à ce sujet combien Brazza a vu clair, lui qui, le premier en Afrique, utilise cette formule avec pour chef de poste le sergent Malatricolores mine. Stanley a bien pu se gausser des multiples drapeaux Brazzaville bien ventilée sénégalais, déployés par le sous-officier devait se alors que Stanley demeura française pour Léopoldville contenter d'un site beaucoup moins favorable. II. LE SCRAMBLE le partage de l'Afrique Commencé en compétition franco-anglaise, de Léopold II, puis l'entrée de les ambitions voit le réveil portugais, de l'Europe va conduire à orgaque sa position d'arbitre l'Allemagne niser la conférence de Berlin, qui d'une part va créer l'E. I. C. et élire Léopold II, souverain de cet état et d'autre part fixer les règles d'apdu « gâteau africain ». propriation vite. En vont marcher Dès lors les événements prodigieusement africaine ne résistent pas à la vague Europe les obstacles à l'expansion nationaliste et impérialiste qui fixe en Afrique les points de friction des puissances européennes ; des partis coloniaux se créent, c'est la ruée. Mais cette conquête et la mise en valeur posent des problèmes à la fois humains et financiers. de certaines formes de servage et du trafic esclavaLa découverte de Bruxelles à la conférence anti-esclavagiste giste arabe va permettre et de européens (1890) de donner bonne conscience aux coloniaux financiers. aménagements prévoir pour Léopold II de salutaires De multiples accords bilatéraux passés entre 1880 et la fin du siècle vont achever de délimiter cette Afrique, non sans que l'épisode à deux doigts de la de Fachoda n'ait mis la France et l'Angleterre guerre alors que le rallye Tchadien soude les différentes parties du domaine colonial français de l'Ouest. i. Prélude
a Berlin : les débuts du scramble.
Les historiens discutent de la date de départ de la course, du fameux scramble. MM. Robinson et Gallagher pensent (1) que l'occua tout déclenché. D'autres situent les débuts lors pation de l'Egypte Brazza-Stanley de l'opération tunisienne ou lors de l'affrontement au Congo. En fait il est bien évident qu'il n'y a pas eu un coup de de pistolet du starter donnant le départ de la course, mais une série frottements de petits conflits locaux. Le problème est aussi écono(2) que « l'Afrique mique, et J. Stengers a montré de façon magistrale
(1) Africa and the Victorians : The officiai mind of imperialism, Londres 1961; (2) L Impérialisme colonial de la fin du XIXe siècle : mytheou réalité, Journal ofAfrican History, III, 3 (1962), p. 469-491.
CONQUÊTE ET PARTAGE DE L'AFRIQUE
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des années 1880 ou, disons mieux, le marché intérieur de l'Afrique commerciale commençait à être livré à une compétition qui eût en tout état de cause engendré le scramble ». On peut dire toutefois que Tunisie (1881) et Egypte (1882) ont que les premières friccependant marqué la phase méditerranéenne et franco-belges donnaient le branle à une tions anglo-portugaises dont nous avons déjà analysé les motifs. excitation nationaliste Anglais et Français vont profiter de leur avance, les Portugais vont tenter une action réflexe, cependant que Léopold va déclencher la série d'opérations qui vont conduire à la conférence de Berlin. un tableau d'ensemble de cette Il n'est pas facile de présenter s'entrecroisent et se chevauchent. Il se mêlée tant les événements trouve cependant que durant cette période, un homme d'état mène ses relations diplomatiques, sa riune action méthodique utilisant chesse personnelle et l'atout considérable que représente le fait d'être le souverain d'une petite nation. Cet homme c'est Léopold II roi des Belges. Avant de s'accrocher au bassin du Congo, Léopold avait envisagé des installations à Bornéo, au Mozambique (1869-1873), au Japon (1873), aux Philippines. Les conditions dans lesquelles il va s'installer au Congo constituent un chef-d'oeuvre de stratégie politique et éconoD'autant mique dont il est utile de retracer le cheminement. que accélère la poussée française et suscite les l'entreprise léopoldienne réclamations portugaises finalement chez Bismarck, qui aboutiront l'arbitre de l'Europe. 2. Léopold LT, le Comité d'Études ternationale du Congo.
du Haut-Congo
et l'Association
in-
Nous avons vu les résultats de la Conférence de Géographie de Bruxelles et l'importance de l'oeuvre accomplie par le Comité belge et par Emile Banning, ainsi que sur le terrain les premières explorations belges. Mais les visées de Léopold sont déjà, certes confidentiellement, mais clairement Dans une lettre au baron Salvyns du exprimées. 17 novembre 1877 (1) le roi des Belges écrit : « Je ne voudrais m'exposer ni à mécontenter les Anglais ni à laisser échapper une bonne occasion de nous procurer une part dans ce magnifique gâteau africain. Je pense donc confier d'abord à Stanley une tâche d'exploration qui n'offense personne, nous donnera là-bas des agences et leur étatmajor dont nous tirerons parti dès qu'on se sera habitué en Europe et en Afrique à nos prétentions sur le Congo ». En janvier 1878, alors que Sanford et Greindl, collaborateurs directs de Léopold, vont saluer à Marseille, Stanley à son débarquement est créé un « syndicat pour l'étude du Congo et pour la formation (1) PIERREJOYEet ROSINELEWIN,Les Trusts au Congo,p. 13.
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d'une société de chemin de fer en Afrique et d'une société commerciale pour le négoce dans le Haut Congo ». froid accepte Stanley qui a reçu à Londres un accueil plutôt bientôt un contrat dont les termes sonnent étrangement. En effet Stanley s'engage : « à servir en Afrique pour un terme de cinq ans en n'importe quel lieu qui pourrait à ne rien publier et ne donner lui être assigné,... la durée du contrat sans l'autorisaaucune conférence pendant tion préalable du roi ». Une assemblée générale de l'Association Internationale Africaine Pour les étudier est permet au roi de poser des questions économiques. décidée la création d'un Comité d'études du Haut Congo, au capital de 500 000 francs souscrits en partie par Léopold, en partie par des banques, celles de Léon Lambert, Brugmann, Delloye et Mathieu. Le Président se trouve être le colonel Strauch, secrétaire de l'A. I. A., l'un des plus proches collaborateurs de Léopold. Sous la bannière internationale de l'A. I. A., il ne saurait être question de prise de possession territoriale. Seul Stanley savait mais restait d'une discrétion exemplaire. Nous abordons ici le premier épisode du scramble. Léopold Il a senti la menace que fait peser Brazza sur ses projets. Le 30 décembre 1879 il écrit à Stanley : « L'intérêt de l'entreprise exige que vous ne vous attardiez pas dans votre première station. Des concurrents que nous ne pouvons mépriser menacent en effet de nous devancer sur le Haut Congo... M. de Brazza tentera de descendre l'Alima jusqu'à son confluent avec le Congo où il espère arriver avant nous. Nous n'avons pas de temps à perdre. » Il est trop tard. Le 3 octobre Brazza plante le drapeau français sur avec les bords du pool et le 7 novembre a lieu la fameuse entrevue Stanley. du Haut Stanley, travaillant pour le compte du Comité d'Études Congo, déploie le drapeau bleu à étoile d'or de l'A. I. A. Cette confuvission lui donne une extrême liberté de manoeuvre et notamment à-vis des canonnières françaises et portugaises croisant à l'embouchure du Congo. Léopold qui sent le caractère difficile de sa position juridu Congo), orgadique constitue l'A. I. C. {Association Internationale nisme ayant de souveraineté, mais cette transformation pouvoir demeure confidentielle et Stanley continue deux années durant son dissous. entreprise au nom d'un comité officiellement De 1882 à 1884, cette fois pour le compte de l'A. I. C, c'est la lutte de la liaison avec le Capitaine Storms venu de Stanley pour l'Oubangui, du Kassaï. La souveraineté sur le pays s'apZanzibar, l'exploration puie sur plus de 400 traités passés avec des chefs congolais. des moyens mis en oeuvre ne laisse aucun doute sur le L'ampleur souci d'implantation politique de Léopold II, mais ce dernier a parfaitement conscience de l'ampleur du jeu diplomatique qu'il va falloir engager. La revendication du Congo à l'embouchure portugaise va lui en fournir l'occasion.
CONQUÊTE ET PARTAGE DE L'AFRIQUE 3. Revendications portugaises nationale de l'A. I. C.
et reconnaissance
de la capacité
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Nous avons vu dans quelles conditions le Portugal avait revendiqué entre Anses droits historiques sur de vastes zones de l'arrière-pays de l'Angleterre, le Portugal Allié traditionnel gola et Mozambique. de Londres par le traité du 26 février 1884 obtient du gouvernement la reconnaissance de sa souveraineté sur les deux rives du Congo et sur entre 5° 12' et 8° de latitude Sud. le littoral de la côte atlantique de l'A. I. C. et l'enentraîne une protestation Cette reconnaissance voi sur place d'une Commission présidée par le général anglais Goldsmith qui devait reconnaître le bien-fondé des prétentions belges. Un mémoire anonyme d'Emile Banning (1) combat à l'aide de raisons hissi bien que le traité toriques les arguments tirés du droit international, dirigé contre l'A. I. C. se retourne finalement à son anglo-portugais les profit. La France et l'Allemagne en effet refusent de reconnaître En même temps Léopold II essaie de faire prétentions portugaises. la liberté commerciale en reconnaître le projet d'Etat en promettant ce domaine. libéAussi les États-Unis, également sensibles aux comparaisons riennes, reconnaissent le 22 avril 1884 le drapeau de l'A. I. C. comme le drapeau d'un état souverain et ami. Le même 22 avril, une lettre du Colonel Strauch à Jules Ferry précise que l'A. I. C. ne céderait à aucune puissance les stations et les territoires qu'elle avait fondés au Congo et dans la vallée du Kouilou Niari. Toutefois l'A. I. C. donnerait un droit de préférence à la France si par des circonstances imprévues l'association était amenée à résilier ses possessions. Comme le souligne Bruhat (2) : « Si Jules Ferry accepte abandonne à la France ses possessions congolaises que l'association » Ce droit de c'est qu'il reconnaît de facto sa capacité internationale. préférence à la France est un coup de génie car il permet à Léopold II d'exercer un véritable « chantage au départ » sur les grandes puissances rivales. Il sera un atout de poids dans les débats souvent difficiles de la conférence de Berlin. Le 26 juin 1884, l'Angleterre, isolée dans son amitié lusitanienne, dénonce alors le traité et des négociations sont entamées à Paris entre la France, le Portugal et l'A. I. C. représentée par le Colonel Strauch. Cependant l'Allemagne est entrée dans la compétition. 4- L'Allemagne
et les Colonies.
Nous avons vu l'importance du mouvement en Allemissionnaire magne et le nombre des explorateurs d'Outre-Rhin qui ont été en Afrique. Ces deux éléments s'étaient ajouté aux facteurs commerciaux pour créer un mouvement d'opinion favorable à la colonisation. Congo et le Portugal, 1883. (1) A.J WAUTERS, Le in Les Politiques d'expansion impérialiste, p. 87. (2) LéopoldII
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La victoire allemande de 1871 avait déjà déclenché un torrent de projets exotiques comme le note Charles Andler (1) : « Beaucoup d'Allemands s'il ne valait pas mieux se demandaient dépouiller la France de ses colonies que de lui enlever l'Alsace-Lorraine. ne trouvaient rien d'excessif à lui arracher l'AlsaceQuelques-uns Lorraine et ses colonies à la fois. Des projets en foule affluèrent au Reichstag ou furent discutés dans la presse. Les uns se seraient contentés de Saigon ; d'autres réclamaient toute la Cochinchine et les îles du Pacifique et de l'Océan Indien. Les plus goulus ne voulaient d'autres... à moins d'une annexion de l'Algérie... pas se contenter croyaient le moment venu de conquérir des terres sans maîtres euroen Tunisie, à Madagascar ou au pays des péens en Tripolitaine, Zoulous. » Mais Bismarck ne pensait pas que l'Allemagne eût alors les moyens de se payer un empire colonial. En 1876, un commerçant de Brème, Lùderitz, avec quelques amis était allé trouver Bismarck en vue d'un projet sur la baie de Delagoa et Sainte-Lucie qui s'appuierait sur la république boer du Transvaal si proche de l'Allemagne sur le plan ethnique. Mais Bismarck, beaucoup trop soucieux d'équilibre intérieur et ne pouvant compter sur un vote du Reichstag, refusa les crédits. Gerhard croissait. En 1877 l'explorateur Cependant l'impatience Rohlfs déclarait au retour de l'une de ses explorations africaines : « N'est-il pas à déplorer que nous soyons contraints d'assister inactifs et impuissants à l'extension de l'Angleterre en Afrique Centrale ? » L'année suivante Moldenhauer écrivait (2) : « Il s'agit de savoir si l'Allemagne va se décider à faire autre chose en Afrique que d'y envoyer des missions scientifiques et d'y semer les ossements de ses explorateurs... » Elle avait était la principale puissance de l'Europe. L'Allemagne « accordé » la Tunisie à la France. On sollicitait l'arbitrage du chancelier de fer à propos de certaines questions africaines. Par ailleurs de très nombreux allemands étaient installés sur la Côte commerçants allemands, nous d'Afrique Occidentale et de nombreux missionnaires l'avons vu, évangélisaient de vastes régions d'Afrique. C'est le motif commercial qui pousse Bismarck, au mois d'août 1883, à demander aux villes hanséatiques ce qu'elles croyaient souhaitable de faire pour assurer leur commerce sur les côtes d'Afrique. La réponse de Hambourg demandait : — l'établissement du protectorat allemand sur les territoires indéallemands ; pendants fréquentés par les commerçants — l'acquisition de la baie de Biafra ; — la neutralisation du Congo ; de l'embouchure — la nomination de Consuls ; — la création de stations navales (3). 1)Le Pangermanisme Colonial, p. V-VI. Uber Kolonien und Auswanderungwesen, Francfort, 1878. (2)J. ((3) DARCY,La conquêtede l'Afrique, p. 220.
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Bismarck accepte le plan, si bien qu'à la fin de 1883 l'Allemagne est prête à prendre le départ du scramble. Le 24 avril 1884, date à laquelle Léopold II promet un droit de préférence à la France, il télégraphie à Luderitz et au consul au Cap qu'ils aient à considérer la côte afrigénéral allemand caine depuis l'Orange jusqu'à sous l'Angola comme se trouvant le protectorat allemand. L'Angleterre n'occupe qu'un point de la côte (Walfish Bay) et quelques îles, mais revendique a sort of gênerai right (une sorte de droit général) sur la côte entière. Londres s'incline pourtant devant ce télégramme et le 24 avril 1884 est considéré comme le Geburtstag (jour de naissance) de l'ère coloniale allemande. Sur la côte occidentale d'Afrique de nombreux commerçants allemands sollicitent l'intervention de leur pays. A Petit Popo les commerles manoeuvres anglaises remettre en çants voient avec inquiétude cause l'accord commercial qu'ils ont conclu. Aussi le Capitaine Stubenrauch intervient sur la Sophia et emmène des otages en Allemagne où ils passent dix jours à visiter Berlin. Puis ils sont confiés au Capitaine de corvette Hoffmann, commandant la canonnière Môwe qui doit les ramener chez eux. A l'escale de Lisbonne, la Môwe embarque un passager de marque, Gustav Nachtigal. Homme calme, pondéré, Nachtigal connaît admirablement la mentalité africaine qu'il a pu étudier durant ses explorations du Bornou et du Tchad. Il est chargé de prendre en mains les intérêts allemands sur la côte d'Afrique. Lorsqu'il arrive à Anécho, le 2 juillet 1884, le pays est à la veille d'une annexion anglaise à la suite des manoeuvres de l'anglais Firminger qui vient d'enjoindre aux notables africains de chasser les commerçants allemands dans un délai de quatre semaines en offrant à ces mêmes commerçants la protection de ses miliciens haoussa. Le 3 juillet a lieu la grande palabre d'Anécho où des difficultés se produisent si bien que les otages sont remontés à bord. Le 4 juillet, le drapeau allemand est hissé à Bagida, le 5 à Lomé cependant qu'un traité est passé avec Mlapa, chef du village de Togo (ce qui va donner son nom à la nouvelle possession allemande). A ce moment Lawson demande à son tour le protectorat allemand. Le 6 juillet, Nachtigal nomme Henri Randad, commerçant à Anécho, comme consul provisoire. Il représentera les intérêts allemands jusqu'à l'arrivée du Commissaire impérial von Falkenthal. Nachtigal poursuit sa route vers l'est et arrive le 11 juillet dans la baie du Wouri. Le 14 juillet a lieu la prise officielle de possession. Les commerçants allemands ont mené les négociations avec le chef Bell. Nachtigal donne lecture en allemand et en anglais du traité par lequel le chef des Douala accepte de plein gré le protectorat allemand. La petite histoire a retenu que c'est par un puissant Yes que le chef Bell allemand. accepta le protectorat Des traités analogues sont passés avec les chefs Akwa et Deïdo. Nachtigal notifie aux Anglais la prise de possession du pays et nomme
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avec fonctions consulaires le Dr. Max Buchner comme son représentant et pouvoir judiciaire. Mais à la fin de l'année une révolte a lieu au village de Bell, l'agent de la compagnie Woerman est massacré, et les compagnies de débar» exercent une répression sans induldu « Bismarck quement gence. Cependant Nachtigal fait une brève exploration dans la zone montagneuse puis, fatigué, part en congé en Allemagne. Mais il meurt à la à Las hauteur des Canaries (20 avril 1885). Inhumé provisoirement Palmas, son corps est ramené deux ans plus tard au Cameroun où un monument est érigé en son honneur. L'installation allemande en Afrique Orientale débute comme un canular d'étudiants, comporte à Zanzibar l'utilisation politique d'un métis princier occasionnel et aboutit grâce à la puissance allemande à l'une des plus belles colonies africaines tout en déclenchant une contreoffensive britannique de grand style. En ce temps-là quelques jeunes Allemands « nouvelle vague » groumènent grand bruit dans le Tàpés autour du comte Behr-Bandelin gliche Rundschau pour un avenir colonial de l'Allemagne et fondent une Société allemande de colonisation. En même temps le gouvernement Rholfs comme consul général à Zanimpérial désigne l'explorateur zibar, cependant que le commerce allemand sur la côte prend une ampleur considérable. Quatre des jeunes Allemands dont nous venons de parler, le Comte à Zanzibar le 4 noPfeil, le Dr. Peters, Juhlke et M. Otto débarquent vembre 1884 sur un navire de Trieste, plus ou moins déguisés. Rholfs les équipe, frète pour eux une barque qui les amène à Saadani, de l'autre côté du détroit où une caravane organisée par le consul les attend. L'action de Peters est foudroyante. Du 8 novembre au 17 décembre, distribuant les uniformes de parade des hussards allegénéreusement mands il signe des traités avec des chefs de collectivités représentant 12 500 km 2 entre les rivières Pangani et Roufiji. Le 12 février Peters fonde la Deutsch Ostafrikanische Gesellschaft après avoir présenté le 5 ses traités à Bismarck. Le 27 février il obtient une charte impériale pour ses acquisitions cependant que l'Angleterre reçoit notification de ce nouveau protectorat allemand. Mais à cette date la conférence de Berlin est terminée depuis la veille et les règles du partage sont définies.
III.
LA CONFÉRENCE
DE BERLIN
Nous avons vu le développement de l'opposition au traité angloportugais du 26 février 1884 menée sur les instances du roi des Belges par Bismarck si bien que le 26 juin le chef du Foreign Office déclarait à soumettre à la Reine la ratification du traité. qu'il renonçait L'A. I. A. l'emporte et l'Allemagne se pose en grande puissance afri-
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caine montrant que rien ne pouvait être fait en Afrique ni en Europe sans l'accord impérial. Cette conférence dont le motif premier est le traité anglo-portugais, fondamental dans l'Histoire de l'Afrique : elle marque un tournant fixe les règles du jeu et les conditions du partage qui vont permettre une série d'accords bilatéraux sur les litiges frontaliers franco-alleenfin et surtout aboutir à la reconnaissance mands notamment, de l'État Indépendant du Congo. du chancelier Bismarck, la conférence rasConvoquée à l'initiative semble les représentants de 14 nations : Allemagne, Autriche-Hongrie, Espagne, États-Unis, France, Grande-Bretagne, Belgique, Danemark, Italie, Suède, Norvège, Pays-Bas, Portugal, Russie et Turquie. Le programme de la conférence est vaste. Il aborde aussi bien les (lutte contre la traite des esclaves, amélioraquestions humanitaires tion des niveaux de vie) que les problèmes économiques ou le droit international. Le discours d'ouverture du chancelier Bismarck souligne l'importance de la mission civilisatrice de l'homme blanc : « En organisant cette conférence, le gouvernement impérial a été invités partagent guidé par la conviction que tous les gouvernements le désir d'associer les indigènes d'Afrique à la civilisation en ouvrant l'intérieur de ce continent au commerce, en fournissant à ses habitants les moyens de s'instruire, en encourageant les missions et entreprises de nature à propager les connaissances utiles et en préparant la suppression de l'esclavage, surtout de la traite des noirs. » Sous ce chapeau humanitaire, euroles intrigues des puissances et particulièrement celles de Léopold II à péennes se développent propos du Congo. Nous avons montré par ailleurs (1) le détail d'une manoeuvre dont la délégation belge dirigée par le baron Lambermont contrôle la bonne exécution. Une semaine avant l'ouverture de la conférence, le 8 novembre 1884, le gouvernement allemand auquel Léopold a promis la liberté commerciale de au Congo, reconnaît internationale la souveraineté l'A. I. C, comme le font successivement l'Angleterre (14 décembre), l'Italie (le 19), l'Autriche-Hongrie le 24, les Pays-Bas le 27, l'Espagne le 7 janvier 1885, la Russie le 5 février, la Suède-Norvège le 10. Restent la France et le Portugal. A la première, on abandonne le Kouilou-Niari qui passe alors pour un Eldorado. A cette nouvelle, raconte Jean Stengers (2), Léopold sur le médiocre tracé de Stanley décide un peu au hasard une « ajoute » prolongeant la frontière jusqu'à la ligne de partage des eaux Congo-Zambèze, y incluant donc le Katanga dont il écrit : « Nous aurons bien du mal à nous en contenter (3). » Le 14 février 1885, le Portugal abandonne au nord ses prétentions du Congo-Léo, p. 112-115. (1)Hisioire ) Dans sa conférence à la société d'Histoire Moderne et Contemporaine Paris, le 21 (2) avril 1963. (3)La zone minière du Katanga représentant 0,5 % de la superficie du Congo fournissait avant l'indépendance 45 % des exportations.
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de l'estuaire du Congo sauf en ce qui concerne Cabinda. Le 23 février à leur tour la souveenfin, le Danemark et la Belgique reconnaissent raineté de l'A. I. C. Trois jours plus tard, le 26 février, l'acte de Berlin détermine le Statut du bassin conventionnel du Congo, lequel comprend : — sur le plan politique : occupation territoriale effective et neutralité des territoires définis par la conférence ; — sur le plan économique : liberté de commerce et de navigation sur le Congo ; — sur le plan social : interdiction de l'esclavage, répression de la d'améliorer les conditraite en Afrique et sur mer, enfin engagement tions morales et matérielles des indigènes. L'État indépendant du Congo est alors constitué sans limites bien précises et Léopold II désigné à l'unanimité par les puissances comme chef du nouvel état. du parlement belge est donnée par les La nécessaire autorisation déclarations des 28 et 30 avril 1885. Comme le note Pirenne : « Ce vote est un simple vote de courtoisie, sinon de résignation. Il congolaise «toutes charges n'engage que le souverain dans «l'aventure et toutes responsabilités étant déclinées par la Belgique. » C'est à titre exclusivement personnel que Léopold II est autorisé à devenir souverain de l'E. I. C. Le premier chef désigné de cet immense territoire est l'Anglais Sir Francis de Winton, qui a le titre d'administrateur général et proclame officiellement à Vivi, chef-lieu des premières installations à l'embouchure du Congo, la fondation de l'E. I. C. et l'avènement de Léopold. Sur une carte d'Afrique où les taches blanches des zones inexplorées occupent encore l'essentiel d'une cuvette congolaise démesurée, Léodéd'une masse territoriale pold II est le seul à sentir l'importance fendue par une effroyable réputation d'hostilité humaine et d'insalubrité. On admire le talent de cet homme qui, neuf années durant (de la conférence de géographie de Bruxelles au Congrès de Berlin), utilise pour des projets africains une couverture internationale nécessaire aussi bien sur le plan interne (l'opinion publiquebelge ne suit pas) que sur le plan extérieur. Son immense fortune lui permet de manoeuvrer aussi bien dans les chancelleries européennes que dans la brousse congolaise. Par ailleurs ses parentés européennes, son charme personnel sont en d'incomparables atouts, Europe cependant que par une suprême habileté il « endort » l'Angleterre en utilisant pour ses explorations et la première mise en oeuvre un personnel en grande partie britannique. La Conférence de Berlin marque une sorte de sommet dans la carrière congolaise de Léopol II qui sait profiter à merveille de la somnolence portugaise, de la distraction britannique et du retard allemand au départ de la course. Mais, durant la conférence, un événement d'une immense importance est survenu à Londres à la suite du désastre de Khartoum (26 janvier) où Gordon et quatre mille anglo-égyptiens ont été massacrés par les
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Gladstone est remplacé par celui de Lord Mahdistes. Le gouvernement Quelques Salisbury qui est un partisan convaincu de l'impérialisme. semaines plus tard (30 mars 1885) Jules Ferry tombe après l'affaire de Lang-Son. est lancé, Bismarck soutient Dès lors l'impérialisme britannique résolument l'action de ses nationaux, Léopold va essayer d'agrandir le domaine qui lui a été consenti. Les Français, malgré les fluctuations vont réussir à souder le bloc ouest-africain français. gouvernementales, transafriLe Portugal sera sèchement stoppé dans ses prétentions caines. Quant à l'Italie, le désastre d'Adoua va réduire à néant ses ambitions éthiopiennes. : IV. LA RÉACTION BRITANNIQUE LE DUEL ANGLO-ALLEMAND EN AFRIQUE AUSTRALE ET ORIENTALE L'intervention allemande s'est donc développée avec une extraordinaire promptitude au sud-ouest, puis au Togo et au Cameroun, enfin en Afrique Orientale. Nous avons vu dans quelles conditions la position des Boers s'était trouvée consolidée au lendemain de leur victoire de Majuba Hill. Le 27 février 1884 est signée à Londres par le Président Kruger une convention beaucoup plus favorable que celle conclue trois ans plus tôt. Il n'est pas contestable qu'à cette date les membres du gouvernement de Londres ont pris conscience de la menace germanique et sont soucieux d'une jonction possible des Allemands avec les républiques boers dont la presse d'outre-Rhin célèbre la parenté de sang. Aussi les Anglais, depuis l'Afrique du Sud, annexent le Betchouanaland jusleur marche vers qu'à Mafeking (décembre 1884) puis poursuivent le nord et envahissent le royaume de Khama (1886-87). En 1888 est annexé le pays à l'ouest du lac Ngami puis le pays Matabélé où des compagnies de commerce (Central British Company, British Bechuanaland et plusieurs sociétés missionnaires traCompany) vaillent depuis longtemps. Ainsi les possibilités de liaison avec les républiques boers sont empêchées par un large territoire désormais britannique. En Afrique de l'Est, devant l'offensive de Peters, Saïd Bargash, sultan de Zanzibar, proteste contre les annexions effectuées ; il expédie des troupes dans la région de Witou pour expulser les Allemands, et le général anglais Matthews dans la région du Kilimandjaro pour restaurer l'autorité légitime. En même temps notification est faite à Berlin de la création de la British East Africa Association dont le but est de « travailler de concert avec le gouvernement impérial à l'abolition de l'esclavage et au développement d'une contrée vide en produits naturels » (25 mai 1885). Le gouvernement de Berlin essaie alors d'éliminer Saïd Bargash par une révolution de palais. En effet vingt ans auparavant la princesse
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Salmé (1), propre soeur du sultan, a épousé un commerçant allemand, M. Ruete et plusieurs enfants sont nés de cette union. Son mari écrasé par un tramway à Hambourg, la malheureuse princesse se trouvant dans la gêne, s'est en 1875 rendue à Londres au moment de la visite de son frère, mais elle n'a pu le voir. Elle a rencontré Sir Bartle Frère britannique pour avoir un qui lui a conseillé d'écrire au gouvernement secours, qui sera ensuite sèchement refusé. Dix ans plus tard le gouvernement allemand lui offre un voyage dans son pays natal cependant que son fils reçoit un brevet d'officier. En septembre 1885 l'escadre la princesse qui est acclamée par allemande accueille solonnellement la foule lorsqu'elle descend à terre. Mais sur place, Saïd Bargash, populaire à grands appuyé par Sir John Kirk, « traite l'enthousiasme coups de fouet, si bien que la malheureuse princesse Salmé doit regade Hambourg... » gner la froidure de son appartement Gesellschaft lance en deux Cependant la Deutsche Ostafrikanische ans dix-huit expéditions. Le comte Pfeil s'avance entre la Roufiji et la Rovouma puis gagne le lac Nyassa. Jühlke s'enferme dans l'Ousambara avant de se faire tuer en pays Somali (1886), Peters va reconnaître la région des lacs. Les Anglais comprennent de l'enjeu et profitent du l'importance point qu'ils viennent de marquer dans l'affaire Salmé pour proposer à de 1862 garantissant l'Allemagne d'accéder au traité anglo-français du Sultan de Zanzibar. Les Allemands acceptent. Toul'indépendance tefois cette garantie ne s'applique qu'à la mince bande côtière où s'exerce l'autorité du sultan. Les zones d'influence de l'arrière-pays sont alors délimitées par le même traité (2 juillet 1887) entre la mer et le lac Victoria. Mais au-delà du lac Victoria, à l'ouest et au nord, trois pays restent en dehors du traité : l'Ouganda, l'Ounyoro et la province d'Equatoria coupée de l'Egypte depuis plusieurs années par l'insurrection mahdiste. Edouard Schnitzer, israélite silésien, docteur en médecine, arabisant distingué, avait été choisi par Gordon, pour lui succéder à la tête de la Sous le nom d'Emin Effendi Hakim (le fidèle province d'Equatoria. cette province, constitue une médecin) il organise admirablement lieuarmée qui lui permet de repousser en 1884 l'émir Karam-Allah, tenant du Mahdi. Cependant il replie certains de ses postes et rassemble ses forces à Ouadelaï sur le Nil. En fait Emin Pacha depuis 1884 est le souverain allemand d'un état égyptien autonome disposant de l'armée la plus forte qui ait jamais été rassemblée dans cette région. La presse allemande cependant vibre aux exploits d'Emin Pacha et une théorie prend corps affirmant que si l'Équatoria est perdue pour l'Egypte qui n'a pas su défendre son bien, elle revient de droit à l'Allemagne dont l'un des fils a si bien su la défendre. Le Gouvernement la menace et juge indisanglais sent parfaitement 1) Cf. à ce sujet l'article de MmeARVÈDE BARING,Mémoiresd'une princessearabe,in ( Revuedes Deux Mondesdu 15 février 1889et le livre d'Einay RUETE,NÉEPRINCESSE D'OMAN ETZANZIBAR : Mémoiresd'une princesse arabe, Paris 1905, 330 p., traduit de l'allemand par L. Lindsay.
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pensable le départ d'Emin. L'Allemand parti, le danger disparaîtrait. Aussi le khédive Tewfik signe un firman autorisant Emin à évacuer la province. Pour faire parvenir le firman, l'Angleterre organise l'exnationale permet à la généreuse Angleterre pédition ; une souscription de montrer « son désintéressement et son amour des nobles causes ». une tournée de conférences aux États-Unis Stanley interrompt pour aller porter le message à Ouadelaï. Arrivé à Zanzibar il ne prend pas la route directe, sans doute en raison de l'insécurité de l'arrière pays d'Afrique Orientale, mais aussi et de l'E. I. C. parce qu'il a une double mission de l'Angleterre Après avoir recruté du personnel à Zanzibar, conclu un accord avec de la station des Falls (qui le Tippou Tib pour le commandement couvre sur son flanc sud et lui garantit des porteurs), il part le 20 mars de Matadi pour être en juin 1887 à Yamboumba sur l'Arrouwimj. traversée de la forêt. Stanley et sa colonne accomplissent l'épuisante Enfin le 29 avril 1888 il retrouve Emin Pacha et Casati. comme agent du Khédive, de Léopold Stanley agit simultanément et de l'Angleterre. Il propose à Emin Pacha trois solutions : — rentrer en Egypte et rester au service du khédive ; — demeurer en Equatoria avec le concours de l'état du Congo de 57 000 francs. qui lui offre le rang de général avec un traitement Cela sous réserve que la province puisse fournir un impôt de 250 à 300 000 francs par an ; — s'installer au nord du lac Victoria avec ses troupes pour protéger les comptoirs de la Société de l'Est africain (Emin avait en 1886 offert sa province à l'Angleterre). Malheureusement Emin Pacha manifeste la plus grande mauvaise volonté à se laisser convaincre. Il ne faut pas moins de onze mois pour y parvenir et c'est seulement le 27 mars 1889 qu'ils prennent la route du retour. de Vogue analyse avec une fine ironie la position Eugène-Melchior des deux hommes (1) : « Voici un homme, sauveteur de son état, déjà breveté dans la grande affaire Livingstone. Il a fait des milliers de kilomètres et bravé les plus terribles dangers pour venir sauver un malheureux qui se noie : l'Europe, anxieuse, attend qu'on lui ramène l'objet de son intérêt. Ce personnage bizarre ne désire pas être sauvé. Stupéfaction, puis colère du sauveteur. Au moment de toucher sa prime si bien gagnée, il est bien menacé de la perdre et par qui, par la victime récalcitrante. » A vrai dire Emin ne souhaitait en muniguère qu'un ravitaillement tions. Ni lui ni ses hommes n'envisageaient de quitter la terre promise. Les difficultés de Stanley apparaissent clairement dans le livre qu'il a consacré à cette équipée (2). Mais du côté allemand l'activité est grande. Schweinfurth, depuis sa résidence du Caire, dès le printemps 1886, avait écrit à Peters pour M. DEVOGUE,Les Indes boires. Revue des Deux Mondes, 1er novembre 1890. (1) E t ) Vans les ténèbresde l'Afrique. Recherche,délivrance et retraite d'Emin Pacha. R. CORNEVIN. — Histoire de l'Afrique, Tome II. 35
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de porter secours à Emin Pacha, mais c'est seulelui suggérer 1888 qu'un appel est lancé en Allemagne ment le 17 septembre et le 25 février que Peters (1) quitte Berlin pour l'Afrique. Mais il joue de malchance. Ne pouvant passer par le territoire alleil débarque clandestinement sur la côte mand en pleine insurrection, contrôlée par les Anglais et s'enfonce dans l'intérieur malgré la croisière de l'amiral Freemantle qui ne peut qu'envoyer les émissaires pour tenter de faire retarder Peters par le mauvais accueil des populations africaines. en route le départ d'Emin Pacha, continue sur Peters, apprenant au roi l'Ouganda où il réussit à faire signer un traité de protectorat Mwanga. travail accompli par Peters est réduit à Mais tout l'extraordinaire du 14 juin 1890. Par ce traité l'Allenéant par le traité anglo-allemand magne abandonne le sultanat de Vitou, s'engage à ne pas dépasser au reconnaît le protectorat nord le massif du Kilimandjaro, anglais sur Zanzibar et Pemba. En échange, l'Allemagne acquiert enplusd'Héligoland, moyennant 4 millions de marks, la portion méridionale de la réservée au sultan. Quinze jours après avoir recôte précédemment noncé à Zanzibar et au Nil, l'Allemagne (traité du 1er juillet) abandonne ses prétentions sur l'hinterland du Sud-Ouest africain au-delà du 20° de longitude est, ce qui laisse cinq cents kilomètres de pays britannique entre le Sud-Ouest et les États boers. Cet ensemble de décisions est pris à Berlin au moment où la situation militaire d'Afrique Orientale semble rétablie. En effet Boujiri traqué par Wissmann est, après huit mois de dures campagnes, fait prisonnier et pendu le 15 décembre. Quant à Bana Héri qui tient le Sud, il est « le lion d'Afrique du Sud » poursuivi par le baron von Gravenreuth, et se rend le 5 avril 1890. Au Sud-Ouest Africain, le Dr Goering (2), Commissaire impérial, réussit à conclure des traités de protectorat avec les principaux chefs si bien que le Namaqualand, le Damaraland et le pays des Herero sont bientôt rattachés à la colonie. A l'indignation des milieux coloniaux allemands, l'empereur volontairement va, trois années durant, marquer le pas. Lorsque la marche en avant sera reprise au Togo, les Français du Dahomey voisins ayant vaincu Béhanzin marchent sur le nord. Au Cameroun, la progression allemande sera également limitée. cédé à l'I. B. E. A., est conquis par le Capitaine Lugard L'Ouganda, qui met fin aux disputes entre mulsulmans, catholiques et protestants en dispersant d'abord les musulmans, puis en faisant canonner les Franza catholiques par les Ingleza protestants. Après la proclamation du protectorat anglais en 1894, le kabaka Mwanga déclenche, en liaison avec Kabarega, roi du Bounyoro, une grave insurrection qui n'est (1) Dr. PETERS,Au secours d'Emin Pacha (1889-1890), trad. J. Gourdault, Paris, Hachette 1895. (2) Père du Maréchal Goering, collaborateur direct d'Adolf Hitler.
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vaincue que lors de l'occupation définitivement de la vallée du Nil jusqu'à Gondokoro. Au Kenya, le sultan de Mombassa, les Kikouyou et les Somalis résistent plusieurs années. Mais la fin du siècle voit l'administration coloniale se mettre en place, les premiers colons blancs arriver et les des voies premiers coolies indiens débarquer pour la construction ferrées. V. CECIL RHODES, LES PORTUGAIS, ET L'ANGLETERRE KRÙGER La personnalité de Cecil Rhodes domine l'expansion britannique en Afrique Australe et Orientale. On connaît l'histoire de ce fils de famille, faible des bronches, qui va chercher en Afrique du Sud un climat plus favorable que la brume londonienne. Arrivant dans la fièvre du diamant il achète pour six mille livres, le 1er avril 1880, les terrains des frères de Beers. Il dispose dès lors d'une immense fortune. En 1881 il passe des examens de Bachelier es arts de l'Université d'Oxford et devient président de la De Beers Mining qui absorde un grand nombre d'autres sociétés. En mai 1881, six mois après la cuisante défaite de Majuba Hill, il dessine sur la vieille carte des explorations de Livingstone une tache C'est finalement cet objectif qui rouge qui atteint le lac Tanganyika. sera atteint par la Grande-Bretagne. Rhodes augmente sa prodigieuse fortune. En 1887 il fonde la Goldfield of South Africa Limited et l'année suivante la De Beers Consolidated Mines. Enfin il fonde la British South Africa Company qui, le 19 octobre 1889, reçoit une charte royale, ce qui lui donne son nom de Chartered. Ses compétences sont vastes. Elle est habilitée à conclure des traités, construire des routes et des chemins de fer, approprier des terrains, etc.... Le pouvoir de Rhodes est immense. En plaçant quelques actions dans les coffres des gouverneurs et hommes d'état il peut les mettre à sa dévotion. i. Fin des rêves transafricains du Portugal. Nous avons déjà vu l'importance des explorations : portugaises Capello et Ivens au Katanga et au Zambèze (1884-85), Serpa Pinto et Auguste Cardoso au pays des Makoua, Antoine Marie Cardoso au Nyassa, Païva d'Andrade au Chiré. Après son action auprès de Lobenguela, roi des Matabélé, Rhodes envoie une colonne de deux cents hommes dans le Mashonaland (nordest de l'actuelle Rhodésie), territoire tributaire de Lobenguela et situé dans la mouvance portugaise. Douze jours après la constitution de la Chartered conférant des droits souverains sur le Matabélé et le Mashonaland, la Gazette officielle de Lisbonne publie un décret royal réorganisant l'administration du Mo-
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des districts côtiers et conszambique. Ce texte détache l'arrière-pays titue une nouvelle province dite de Zumba comprenant Mashonaland et Nyassa. Le 21 novembre le cabinet anglais fait savoir à Lisbonne qu'il ne tiendrait aucun compte de ces mesures. En même temps la presse se répand en injures sur les prétentions britannique portugaises. Durant ce même mois de novembre Serpa Pinto, qui est dans la du consul anglais du Mozambique, vallée du Chiré, reçoit notification étend son protectorat sur le Nyassa Johnston, que la Grande-Bretagne et le bassin du Chiré. Mais alors se produit l'incident une dramatique qui va provoquer tension entre le Portugal et l'Angleterre. Les Makololo molestent des sujets britanniques, Serpa Pinto va défendre ces derniers et met en déroute les Makololo qu'il trouve fort bien approvisionnés d'armes anglaises, voire de drapeaux anglais. Comme le souligne Darcy (1) : « Tout dans cette aventure, de la part des Anglais d'une témoignait duplicité sans exemple. Voici un consul anglais agréé officiellement et muni par leurs soins d'un passeport par les autorités portugaises qui lui permet de résider et d'exercer ses fonctions dans le pays. Un beau jour il vient déclarer au gouvernement auprès duquel il est accrédité qu'il n'a jamais eu aucun droit sur ce pays, dont seule l'Angleterre est légitime souveraine. Ceci déjà est un procédé international d'un goût au moins douteux et certainement unique en son genre. « Mais ce qui suit est mieux encore. Les Anglais prétendant avoir été attaqués par les Makololo, Serpa Pinto s'avance pour les protéger ; il se heurte aux bandes dont les Anglais s'étaient plaint et les trouve armés de fusils anglais approvisionnés de poudre anglaise et couvertes du drapeau anglais. Il est bien permis à l'esprit le moins prévenu de ne voir en cette affaire qu'une machination ingénieuse, ourdie par l'imagination fertile d'un agent dénué de scrupule en vue de provoquer un éclat et de mettre le feu aux poudres. » éclate en effet... à Londres et lorsque le Cabinet de L'indignation Lisbonne demande de soumettre le différend à l'arbitrage des puisdu 12 janvier enjoignant sances, lord Salisbury répond par l'ultimatum au Gouvernement de retirer des forces du Chiré, du terriportugais toire Makololo et du Mashonaland. Le Portugal ne peut que s'incliner. Mais déjà les Anglais vont audelà des avantages consentis, l'expédition Colquhoun de la Chartered pénètre au coeur du pays shona et va fonder le fort Salisbury (15 septembre 1890) tout près du Manicaland où l'on vient de découvrir de nouveaux gisements aurifères... A la fin de novembre 1890 le Colonel de Païva d'Andrade reçoit une note de M. Colqhoun l'invitant à évacuer le pays. Quelques jours plus tard un détachement portugais est surpris au kraal d'Oumtasa et fait prisonnier. A la protestation portugaise, l'Angleterre répond en faisant forcer (1) La conquêtede l'Afrique, p. 146.
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par ses canonnières les passes du Zambèze... Lisbonne ne peut que s'incliner à nouveau et, le 11 juin 1891, est signé un traité qui règle définitivement les questions en litige. En échange du Manica, détaché du de 80 000 km 2 entre le Mozambique, le Portugal reçoit un territoire Chiré et Zumbo et la Chartered le droit de construire une voie ferrée de Salisbury vers Beira. Ce traité sépare définitivement et ruine l'Angola du Mozambique le vieux rêve portugais d'un océan à l'autre. Deux ans plus tard, le protectorat du Nyassaland est proclamé. La chartered rachète la « Compagnie africaine des lacs » fondée par des missionnaires et qui devient VAfrican Lakes Corporation. Mais si la puissance de l'Angleterre faire plier le peut facilement Portugal (Quia nominor Léo), nous avons vu que les réflexes africains sont moins faciles à conditionner, comme les insurrections Matabélé de 1893 et 1896 le montrent. Lewanika, chef des Barosté, se soumet à la Chartered (1897) là même année que les Ngoni après la répression de leur révolte. Ainsi au cours des années 1890-91, l'Allemagne puis le Portugal ont renoncé à une politique d'expansion transafricaine. Les Chefs africains se sont inclinés (1). 2. La lutte contre les Boers. Il semble que Rhodes ne connaisse plus aucune limite à sa puissance. Pourtant un simple paysan, barbu et retors, Kriiger, va lui tenir tête grâce à la richesse apportée par l'or du Rand et à la valeur militaire du peuple boer. Nous avons déjà vu l'importance des Uitlanders à Johannesburg et la manoeuvre de Rhodes par le raid Jameson pour tenter d'éliminer Kriiger. Les huit cents hommes et les dix canons de Jameson sont arrêtés à Krugersdorp le Ier Janvier 1896 et doivent se rendre au Commandant Cronjé à Doornkop deux jours plus tard. Nous avons vu dans quelles conditions la guerre fut engagée en 1899 et au prix de quelles peines la victoire anglaise fut acquise en 1902. L'Afrique du Sud était désormais anglaise du Cap au lac Tanganyika et le voeu de Cecil Rhodes, décédé le 26 Mars 1902, réalisé. VI. ÉVOLUTION
DE L'ALGÉRIE
ET DE LA TUNISIE
En Algérie, la tradition jacobine de la gauche française entraîne une politique centralisatrice qui réduit aux territoires du Sud, à partir de 1880, le domaine confié aux militaires. Les décrets du 26 août 1881 ouvrent l'expérience des « rattachements » qui laisse aux ministres les questions français compétents algériennes de leur ressort, faisant du gouverneur général de l'Algérie ( ) Voir : P. R. WARHURST, Anglo-portuguéie relations in South-Central Africa 1890. 1900,Londres 1962 ,169 p.
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suivant la définition de Jules Ferry « un inspecteur de la colonisation dans le palais d'un roi fainéant ». Par ailleurs, la loi municipale du 5 avril 1884 aboutit à faire gérer de vastes régions par quelques dizaines de colons européens qui font supporter l'essentiel des dépenses de la collectivité par quelques milliers de contribuables indigènes. A la fin du système des rattachements, l'Algérie se trouve soumise durant les suites de l'affaire Dreyfus à la violence des campagnes antijuives de 1897. Elles prennent parfois une allure séparatiste d'autant plus sensible que les agitateurs d'origine italienne ou espagnole sont des Français de fraîche date. Pour la première fois apparaît, sous l'impulsion des Européens, la notion d'une « personnalité algérienne » qui marque sa différence d'avec une métropole jugée incompréhensive. entraîne pour le Gouverneur Général Laferrière la Cette situation création en 1898 de la première assemblée algérienne des Délégations financières qui vont jouer un grand rôle dans la mise en oeuvre économique de l'Algérie. de 1896 montre avec trois millions sept cent soiLe recensement sur 1891 de deux cent mille xante mille indigènes un accroissement personnes, ce qui pose dès la fin du siècle le problème de l'avenir des communautés en présence. L'essor du vignoble algérien consécutif à la crise du phylloxéra donne à l'Algérie une richesse économique qui aggrave le déséquilibre alimentaire des masses musulmanes. En Tunisie le décret du 10 novembre 1884 délègue le Résident géné« la promulgation ral pour approuver de la mise à exécution des décrets rendus par le bey ». Très vite après l'institution d'un secrétariat général (1883) le de droit s'achemine vers l'administration directe (créaprotectorat tion des services de l'Enseignement (1883), des Finances et des Travaux publics (1884), de l'Agriculture, du Commerce, des Ports, de la Colonisation (1890). civils dont le corps est institué en 1884 viennent Les contrôleurs pour la plupart d'Algérie et imposent une formule d'administration Les colons français obtiennent en 1890 directe dont ils ont l'habitude. une « Conférence Consultative » qui est une véritable assemblée parlementaire et leur permet de défendre leurs intérêts exclusifs. La mise en valeur économique est favorisée par la loi immobilière de 1885 inspirée par l'Act Torrens qui instaure une procédure d'immatriculation foncière prononcée sans appel par un tribunal mixte immobilier. Cette loi est complétée par un décret de 1886 autorisant cession et immatriculation des biens habous. La première colonisation est essentiellement privée et spéculative deux cent (en 1892 : cent quatorze propriétés françaises se partagent quarante six mille hectares sur les quatre cent deux mille, alors attribués à des Français). Les exploitants tunisiens restent fréquemment comme locataires sur les lieux. En 1890, pour contrebalancer l'influence italienne et à la suite de la découverte de l'olivier sfaxien, le protectorat se lance dans une poli-
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officielle, offrant des lots payables en quatre, tique de colonisation qui touche les meilleures puis dix, puis vingt ans. Cette colonisation sociales fâcheuses pour les Fellah souvent terres a des conséquences l'ensemble à la sédentarisation, refoulés, pour les nomades contraints à une prolétarisation aboutissant déplorable. VII.
LA PÉNÉTRATION FRANÇAISE AU COEUR DE L'AFRIQUE
la France a mis en Nous avons vu dans quelles conditions ouest place les bases de départ de ses colonies sur les pourtours africains et depuis l'Algérie et la Tunisie. est reprise. La mission géologique i. L'occupation du Sahara et, au cours de la pourFlamand, en décembre 1899, est attaquée en juillet suite, occupe In Salah ; en mai 1900 c'est le Tidikelt, la route caravanière de la Saoura, la France l'Adrar. En prenant entre le Maroc et le s'empare de la voie commerciale traditionnelle Soudan par Figuig. La désignation de Laperrine au commandement des oasis le 6 juillet 1901 ouvre une nouvelle phase. Mais déjà la mission Foureau-Lamy a rallié le Tchad. C'est que les Français en Afrique de l'ouest ont progressé de prodigieuse manière. 2. La marche vers le Soudan. du Sénégal, Depuis 1875 le général Brière de l'Isle, gouverneur relance une action politique et économique. Le chemin de fer DakarSaint-Louis est construit. De Freyssinet lance l'idée du Transsaharien. Paul Soleillet est chargé de l'étude du tracé par le Soudan (1880), cependant que la mission Flatters partant du nord pour le même motif est massacrée (1881). En 1879 une mission est partie sous les ordres du capitaine Gallieni pour essayer de convaincre Ahmadou, fils d'el Hadj Omar, de la nécessité d'une liaison vers le Niger. Gallieni, attaqué le 11 mai 1880 à Dio, perd ses bagages et doit demeurer une année en « résidence surveillée » à Nango. Comme Borgnis Desbordes occupe Kita et Goubanko, Ahmadou laisse partir Gallieni qui rejoint Borgnis Desbordes, lequel se heurte pour la première fois à Samory. En 1882, c'est la marche vers Bamako où un fort est construit le 1er février 1883. Un commandement du haut fleuve est créé, mais sur les arrières en 1884 c'est l'explosion mahdiste de Mamadou Lamine qui est repoussée devant Bakel. 3. L'encerclement des enclaves étrangères. La nomination de Gallieni comme commandant supérieur du Haut fleuve (1886) marque une nouvelle étape de la pénétration. Mamadou
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Lamine est tué (1887). 1888 est une année capitale : un fort est conssuccède à Gallieni, plusieurs truit à Siguiri, Archinard mission» la Sénégambie encerclent les possessions le étrangères (depuis Plat à Timbo, le capitaine Levavasseur parvient à Labé, le lieutenant capitaine Audéoud traverse le Fouta). Binger venant de Saint-Louis arrive à Kong, puis explore le Mossi et par Salaga et Bondoukou regagne à nouveau Kong où il rencontre Tous deux descendent à Grand Bassam où ils Treich-Laplène. arrivent en mars 1889. L'ensemble des enclaves ouest africaines (sauf le Dahomey) sont reliées, si bien que le décret du Ier août 1889 réunit sous l'autorité d'un lieutenant résidant à Conakry les posimmédiate gouverneur sessions de la Guinée, de la Côte d'Or et du Bénin désignées sous le nom de « Rivières du Sud ». Nous avons vu comment la déclaration du franco-anglaise 5 août 1890 a tenté une délimitation provisoire des possessions entre le Niger et le Tchad, la même année le commandant Monteil entreà Tripoli par le Tchad. prend sa fameuse expédition de Saint-Louis Pour marcher vers le nord il faut faire sauter le verrou danhoméen, ce sera la tâche du colonel Dodds (1892). 4. Le rallye tchadien. En Afrique équatoriale Brazza obtient d'importants cependant, de multiplier les postes le long de la côte moyens qui lui permettent du Loango. Brazza, malgré l'opposition des commerçants européens, est nommé commissaire général du Congo français, cependant que Noël Ballay est lieutenant gouverneur du Gabon. Les possessions françaises prennent officiellement le nom de Congo Français le 30 avril 1891. Brazza lance alors de nombreuses expéditions vers le nord-ouest le long de la Sangha (1890), puis dans l'Adamaoua (1892), où ce trade vail est rendu pratiquement inutile par l'accord franco-allemand 1894. Cependant la course vers le nord est déjà commencée. En 1890, Crampel, ancien secrétaire particulier de Brazza, a entrepris de gagner mais il a trouvé la mort à l'embuscade Kouti d'El l'Algérie, (avril 1891). L'année suivante la mission Maistre obtient d'intéressants résultats sur le cours supérieur du Chari, du Logone et de la Benoué mais se heurte à Rabah. Nous avons vu (1) la montée de la puissance de ce chef de guerre. Pour s'en protéger, Gaourang, sultan du Baguirmi, sollicite l'aide de la France. Emile Gentil vient en effet de parvenir au Tchad sur un petit vapeur. Mais Rabah massacre la mission Bretonnet au piton de Togbao (17 juillet 1899). L'idée de réunir au Tchad les trois groupes de possessions françaises est probablement née en 1890 dans les deux cénacles du comité de (1)Supra, p. 268.
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Terrier l'Afrique française animé par là courtoise présence d'Auguste et de la Société de géographie de Paris que préside le baron Hulot. Qui eut le premier cette idée ? Est-ce Crampel ? Est-ce Eugène Etienne? Les deux sans doute et quelques autres de ces hommes rêvant sur la carte d'Afrique aux taches roses qui agrandiraient lé pré-carré de la France. Mais la mort de Crampel, martyr du grand dessein, légitime parfaitement qu'il porte son nom. Etienne en 1890 avait eu l'idée de trois missions à partir de l'Afrique tropicale. Mais Mizon sur le Niger et la Benoué se voyait désavoué, Crampel était tué, cependant que Monteil réalisait sa fameuse à Tripoli par le Tchad, dont le retentisseexploration de Saint-Louis ment fut grand mais l'effet politique modeste. La nouvelle tentative, beaucoup plus importante puisqu'elle intéresse l'Algérie, est rendue possible par un legs fait à l'explorateur Foureau par un généreux donateur, M. Renoult des Orgeries. En novembre 1898 partent de Ouargla l'explorateur Fernand Foureau et le commandant et Lamy. Les tribus du Hoggar, de Ghadamès du Ghat s'effacent ou s'inclinent devant l'importance de la mission qui éprouve de grandes difficultés à obtenir ravitaillement, guides et animaux de bât. Enfin, le 10 août 1899, la colonne algérienne entre à Agadès. Du Soudan est partie la mission Voulet-Chanoine dont les exactions ont fait l'objet d'une importante littérature (1) et qui, après le drame de Donkori et la mort des deux officiers dévoyés, se transformé en mission Joalland-Meynier et poursuit sa route vers le Tchad. La liaison est effectuée avec là mission Foureau-Lamy le Ier janvier 1900 Le 21 avril les trois colonnes opèrent leur près de Fort Archambauît. jonction sur la rive gauche du Chari. Le lendemain Rabah est vaincu et tué à la bataille de Kousseri où le commandant Lamy est lui-même mortellement frappé. Le « plan Crampel » est alors réalisé : les décrets des 5 et 8 septembre 1900 créent « le territoire militaire des pays et protectorats du Tchad. » Désormais les trois groupes de possessions sont soudées. Les virtualités offertes par les traités internationaux sont remplies. Les délimitations ne sont plus guère que des opérations de détail. 5. Les limites de la future
Afrique équatoriale
française
et Fachoda.
Les bases côtières installées dès 1890, les explorateurs tentent d'accrocher le maximum de terres à leur domaine.
français La plus
(1)Général Meynier, Les conquérants du Tchad, Paris 1923. Mission Jolland-Meynier, Paris 1947. Mme KLOBB,Un drame colonial : à la recherche de Voulet, Paris 1931. cependant un ouvrage anonyme sans doute inspiré par le général Chanoine Citons et qui prend la défense des deux explorateurs mais surtout de Chanoine. L'ouvrage est intitulé Documents pour servir à l'Histoire de l'Afrique occidentale française de 1896 à 1899 — Correspondance du capitaine Chanoine pendant l'expédition du Mossi et du Gourounsi — Correspondance de la mission Afrique centrale. 302 p. + 74 p. d'annexés. Cet ouvrage dont l'édition n'est pas datée comporte une conclusion de janvier 1905.
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de ces tentatives concernent Fachoda importante qui est l'un des du contentieux En réalité, l'expégrands moments franco-anglais. dition vers le Nil, compte tenu de l'état mahdiste, est destinée à « rouvrir la question d'Egypte ». C'est ce qu'explique le président Sadi Monteil dont la misCarnot en présence de Delcassé au commandant sion serait d'une part de régler sur place le différend franco-belge des frontières septentrionales de l'E. I.C; d'autre pour la délimitation part de pénétrer du bassin du Congo dans celui du Nil pour atteindre ce dernier fleuve aux environs de son confluent avec le Sobat. Monteil arrive le 7 août à Loango... Après un an de préparatifs, et le 22 se voit rappeler en Côte d'Ivoire où il va commander la fameuse « Colonne de Kong » destinée à contrecarrer l'action de Samory... Que s'est-il passé ? — Le 12 mai 1894 un accord anglo-congolais donne à bail à Léopold pour la durée de son règne la rive gauche du Nil depuis Mahagi sur le lac Albert jusqu'à Fachoda, ainsi que la partie du Bahr el Ghazal limitée à l'ouest par le 25e méridien et au nord par le 10e parallèle. Cet accord institue en quelque sorte l'E. I. C. en qualité de mandataire et tenancier de la Grande Bretagne dans le bassin du Nil. Une suit cet accord et, le 7 juin, Eugène franco-allemande protestation Etienne développe une éloquente interpellation : « ...L'état indépendant traitait sans nous et contre nous avec l'Angleterre ; il obtenait de cette puissance, qui n'avait aucun droit sur eux, certains des territoires qui étaient en litige diplomatique entre lui et nous. Bien plus il violait le droit de préférence reconnu à la France en cédant en échange une bande de son propre terrain à une tierce puissance, l'Angleterre. » Sur l'insistance de G. Hanotaux, le parlement vote un crédit de 1 800 000 francs « pour renforcer les postes français sur le Haut Oubangui et les relier à la côte par des communications téléphoniques et fluviales ». Mais l'Angleterre, dont les ambitions dans cette région sont satisfaites, laisse alors tomber son partenaire belge, si bien que Léopold est obligé d'en passer par les conditions françaises. Van Zuylen juge sévèrement (1) l'action des négociateurs français dans ce traité : « Les Français triomphèrent avec éclat et sans générosité... La France avait voulu s'installer sur le Haut Nil et rouvrir la question d'Egypte. Elle s'était heurtée au veto de l'Angleterre et avait dû démobiliser l'expédition Monteil sous la menace de la guerre : c'était un Fachoda secret, mais un Fachoda quand même. Elle avait forcé le faible Congo à renoncer au Bahr-el-Ghazal, mais il lui était interdit de l'occuper elle-même. Qu'y avait-elle gagné ? Elle avait réglé la question de l'Oubangui, mais ce règlement qu'elle eût pu obtenir plus tôt et de façon amicale, elle l'avait arraché par des procédés hautains et brutaux qui laissaient dans nos coeurs un sentiment d'amertume et de révolte... » (1)Pierre Van Zuylen, L'échiquier congolais, p. 180.
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Hanotaux, cependant, envisage à nouveau de rouvrir la question et le 14 juin 1895 il reçoit le capitaine Marchand qui lui d'Egypte de Fachoda. Un an plus tard l'expédisoumet un plan d'occupation à Brazzation est partie. Le 10 janvier 1897 les bagages parviennent des 150 tirailleurs traversent ville et les 12 Européens accompagnés un pays sans piste à peine pacifié. Cependant Victor Liotard, délégué général dans le Haut Oubangui, a été chargé « d'occuper progressivement les territoires et d'en faire une région française ayant une porte ouverte sur le Nil »... et il a déjà fondé un poste à Tamboura dans la bassin du Nil. Enfin, après de longs mois, le 10 juillet 1898 Marchand parvient au Nil ; le 23 août, il repousse une attaque madhiste et le 25 le grand Mek des Chillouk demande la protection de la France. remonte le Nil et, le 19 septembre, Cependant la flotille britannique Marchand reçoit une lettre du sirdar Kitchener adressée à « Monsieur le Commandant de l'expédition européenne ». On connaît les détails de l'entrevue demeurée célèbre : l'accueil courtois de l'ancien volon« Major taire de l'armée de la Loire, mais aussi le peu diplomatique » de Kitchener, constatez ma prépondérance suivi de la réponse de Marchand : « Dans le domaine militaire la prépondérance se démontre les armes à la main ». La disproportion des forces était considérable, mais il semble exact que certains éléments soudanais de l'armée Kitchener étaient prêts à déserter, ce qui réduisait la supériorité britannique. Mais l'affrontement n'a pas lieu et l'accès de fièvre nationaliste qui monte en France et en Angleterre aboutit à une négociation qui cordiale. préfigure l'Entente Gabriel Hanotaux, consacrant en juin 1909 (1) un livre au Partage de l'Afrique, l'intitule Fachoda et marque bien les étapes des négociations auxquelles il eut l'occasion de participer comme chef du service des protectorats au ministère des Affaires étrangères, puis comme directeur, enfin comme ministre. Hanotaux montre bien que, pour la diplomatie française en 1894, c'est la question du Nil qui est la plus importante et celle qui peut devenir le noeud d'un arrangement général (2), mais cet arrangement doit contourner les aléas diplomatiques et politiques de l'Europe, utiliser la plus grande compréhension italienne après Adoua et la chute de Crispi et jouer la classique figure à trois, c'est-à-dire à négocier avec l'Allemagne boude (ce furent les traités quand l'Angleterre de 1893-94 réglant les frontières dans l'Hinterland du Cameroun et du 9 juillet 1897 sur l'Hinterland du Togo) et avec l'Angleterre lorsque l'Allemagne prend ses distances. Hanotaux qui parle d'expérience fait une psychanalyse féroce — mais finalement assez juste — de la diplomatie anglaise et justifie sa politique. Laissons-le conclure (3) : (1)Le partage del'Afrique : Fachoda, Paris, Flammarion 1909, 357 p. (2)HANOTAUX, Fachoda, p. 155-156.
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« Là mission Marchand n'avait nullement pour objet, comme on l'a répété, de couper la Ligne du Cap au Caire... Compter sur cette mission avec son faible effectif et ses ressources nécessairement restreintes pour entraver, dans ces régions, les projets de l'Angleterre, du moment où celle-ci se décidait à les soutenir par une armée eût été une absurdité dont la polémique a triomphé trop facilement : les instructions données par M. Lebon à M. Liotard signalent et écartent une telle pensée. Il ne s'agissait pas de cela, mais bien d'obtenir par une exploration française, pareille à tant d'autres qui se sont produites eh Afrique, les éléments d'une négociation et d'assurer finalement, par une entente semblable à celles qui étaient intervenues à la suite de concurrences analogues sur le Niger et au lac Tchad, l'exploitation commune des deux grands réservoirs de richesse africaine, les bassins du Congo et du Nil. Quant à la question d'Egypte... lorsque l'Angleterre, quelques années plus tard, voulut la régler, elle dut, pour obtenir le désistement de la France, le payer par les engagements qu'elle prit, elle-même, au sujet du Maroc. Ainsi cette question resta, tout au moins, comme un élément de compensation, une monnaie d'échange. Seulement, elle fut reportée sur d'autres comptes que ceux qui étaient en cause lors de la mission Marchand. On ne l'eût pas retrouvée plus tard si, en 1894 et en 1898, elle n'avait été si soigneusement préservée. » Le 4 novembre 1898, Marchand évacue Fachoda et revient par et Djibouti en 1899. En novembre 1899 les troupes anl'Ethiopie le Calife Abdoullah réfugié au sud de Khartoùm glaises surprennent près de l'île Aba où était né dix-huit ans plus tôt le mouvement mahdiste. Osman Dinga est tué en 1900. L'état mahdiste devient le Souen dan anglo-égyptien. Cette admirable formule permet d'étendre grosse lettre le mot égyptien alors que la réalité du pouvoir, bien entendu, est totalement anglaise.
VIII.
LES ANGLAIS
EN AFRIQUE
OCCIDENTALE
Nous avons vu au chapitre précédent les conditions dans lesquelles s'était installée eh Gold Goast et au Nigeria. l'autorité britannique î. En Nigeria. Nous avons longuement insisté dans notre Histoire du Dahomey (1) sur la rivalité qui s'est développée entre l'entreprise du comte de Semelle et la Royal Niger Company, rivalité que la mort du comte de Semelle devait résoudre au bénéfice anglais. C'est en effet grâce aux marchandises britanniques plus appréciées des Africains que Sir Taubman-Goldie réussit à évincer ses concurrents français. Des traités passés avec les sultans de Sokoto et Gando lui (1) P. 307-308.
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permettent de devancer et les Français (le capitaine Monteil) et le russe En quelques années Flegel venant pour le compte de l'Allemagne. la compagnie conclut plus de 400 traités avec les chefs africains, jouant avec un égal bonheur de la factorerie et de la canonnière. Nous avons vu (1) comment la convention du 5 août 1890 très en Nigeria (ligne Say-Baroua) favorable aux Britanniques laisse aux Nous avons d'autre Français les mains libres à Madagascar. part étudié en détail la rivalité franco-anglaise au Borgou (2), la course de Lugard, Decoeur et Victor Ballot à Nikki. On sait dans quelles conditions Lugard s'assure les émirats du nord en 1901-1902 et lance sa fameuse politique de ï indirect rule. 2. En Gold Coast, la Confédération achanti, comme nous l'avons vu, avec les Northern Territories empêche les Anglais de communiquer dont la possession leur a été reconnue par le traité francoranglais de 1893.1894 voit le voyage de George Ferguson à Bouna, Oua, Gambaga, Sansanné Mango. Ferguson, né en 1864 à Anomabou, Ouagadougou, avait fait ses études à Cape Coast et à Free Town avant de devenir secrétaire du gouverneur qui l'envoie dans le nord passer des traités au nom de l'Angleterre. En 1896 les Anglais marchent sur Koumassi, aux Seychelles ainsi déposent l'Asantihene Prempeh qu'ils déportent que la reine-mère et les principaux dignitaires. En mars 1900 le gouverneur déclenche une nouvelle Hogdson des guerre en demandant que lui soit livré le trône d'or, symbole de tous les peuples Achanti depuis Oseï Toutou esprits rassemblés La lutte dure sept mois. (1697-1731), le fondateur de la confédération. En 1901 l'Achanti devient colonie britannique incluse dans la Gold Coast. En 1879 s'est produit un événement d'une importance incalculable. Un certain Tetteh Quashie, forgeron de la mission de Bâle, est revenu de Fernando Po après neuf ans de séjour là-bas et rapporte dans ses bagages des plants de cacao qu'il met en terre à Mampong. Cette culture est vivement de Bâle et par par les missionnaires encouragée Sir William Brandford de Gold Coast entre Griffiths, gouverneur 1885 et 1895. L'ouverture d'un jardin botanique à Abouri entraîne une meilleure culture du cacao qui va devenir la richesse du pays. 3- Au Sierra Leone la délimitation de la frontière est accomplie dans l'intérieur face aux explorateurs français. Les traités du 10 août 1889 et la convention du 26 juillet 1891 ont délimité la frontière avec la Guinée. Ces territoires de l'intérieur deviennent en 1896 le protectorat de Sierra Leone distinct de la bande côtière et qui sera administrée séparément jusqu'en 1924. 4. Enfin la Gambie est réduite à sa plus simple expression, un mince doigt de gant le long du fleuve. Il participe à la culture de l'arachide p. 552. (1) Supra, (2) Histoire du Dahomey, p. 376-381.
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Il fut à plusieurs dont le développement au Sénégal est considérable. reprises question d'échange (1) en 1866 avec les comptoirs français de Côte d'Ivoire, avec le Gabon après 1870, avec les comptoirs de l'Inde par la suite, mais aucune suite ne fut jamais donnée à ces projets. IX L'EXPANSION ALLEMANDE ET AU CAMEROUN
AU TOGO
Nous avons vu dans quelles conditions Nachtigal avait implanté le pavillon allemand au Togo et au Cameroun. Par ailleurs, nous avons indiqué dans notre Histoire du Togo (2) les explorations du Dr Wolf et de von François à partir de 1888-89 et l'inexplicable pause qui permet aux Français du Dahomey, Béhanzin vaincu, de coiffer au poteau les explorateurs allemands en 1894-97 sur le Niger et au Gourma, ce que sanctionne le traité de Paris de 1897. Au Cameroun le capitaine Kund et le lieutenant Tappenbeck s'avancent vers l'est et fondent Yaoundé (1888). L'année suivante le lieutenant série d'exploraMorgen commence une impressionnante tions vers Yoko (royaume de Tibati), Mbam Banyo où il retrouve l'itinéraire de Flegel et regagne Douala le 11 mars 1891 par la Benoué et le Niger après une exploration de 9 mois. Il faut signaler également du Dr Zintgraff dans l'Adamaoua, du Dr Uchtritz et de l'exploration de 1893 assure les Passarge à Maroua. La convention anglo-allemande frontières occidentales du Cameroun, cependant que le traité francoallemand de décembre 1893 auquel participe Monteil fixe les limites avec les territoires français. Des expéditions et tournées de police sont effectuées en 1897 et 1898 au Togo, cependant que plusieurs rébellions doivent être réprimées au Cameroun : en 1896 celle des Yaoundé, en 1898-1901 contre les Boulou et le Bassa. Nous verrons au volume suivant dans quelles conditions l'administration allemande s'est implantée dans ces divers pays. X. LA COLONISATION ITALIENNE ET LE COUP D'ARRÊT D'ADOUA coloniale italienne se confond avec la personnalité L'expansion de Crispi. On sait comment l'Italie sans argent, sans armée n'a pu que jouer à l'extérieur les rôles de figurants tant au Congrès de Berlin que les années suivantes en Tunisie et en Egypte. De dépit devant l'affaire tunisienne, le gouvernement italien contre la France en 1882 a adhéré à la Triplice. (1) Cf. à ce sujet le chapitre V (The lure of exchange) du livre de Harry A. GAILEY, A History of the Gambia. (2) Réédition 1962, p. 138-141.
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Cependant depuis Assab sur la Mer Rouge où ils se sont installés nous en 1862, et Massaouah occupé vingt ans plus tard, les Italiens, l'avons vu (1), profitent des luttes intestines éthiopiennes pour pénétrer dans le pays. Mais en janvier 1887 une colonne italienne est De même massacrée à Dogali. L'émotion en Italie est considérable. de Londres au que la mort de Gordon a conduit les impérialistes Crispi (juillet pouvoir, le désastre de Dogali amène au gouvernement 1887) qui décide l'envoi de 20 000 hommes en Mer Rouge. Mais les Italiens ne sortent pas des retranchements que les Éthiopiens d'ail leurs ne menacent pas. La mort du négus Johannes lors de la bataille livrée aux Mahdistes à Metemneh (10 mars 1889) permet un accord entre Ménélik et le comte Antonelli. Le traité d'Ucciali (2 mai 1889) est considéré par les Italiens comme un traité de protectorat, que Ménélik cependant ne le considère que comme un pacte d'alliance et d'assistance technique. Le 11 janvier 1890, un décret fonde la colonie d'Erythrée. En 1889 des traités signés avec des chefs somalis entre la rivière Djouba et la Somalie anglaise sont l'amorce de la Somalie italienne et l'idée vient tout naturellement à Crispi de réunir les deux possessions à travers le massif éthiopien. C'est ce qu'il entreprend après son retour au pouvoir (1893). En 1894 le général Baratieri envahit le Tigré et s'empare d'Adoua. De Rome Crispi sous-estime l'adversaire, ce qui conduira au désastre d'Adoua (sur 10 000 hommes engagés on relève 4 500 morts et 1300 prisonniers) et à la paix d'Addis Abeba (26 octobre 1896) qui abolit le traité d'Ucciali et pour quarante ans va limiter l'expansion italienne à deux minces bandes littorales, l'Erythrée et la Somalie. XI. LES POSITIONS A DJIBOUTI, EN ETHIOPIE
FRANÇAISES ET A MADAGASCAR
Les Français qui se sont installés à Ambado et Djibouti bénéficient du dynamisme de Lagarde, gouverneur d'Obock (1887) qui a le coula capitale à peine construite pour Djibouti (1892). rage d'abandonner Quatre ans plus tard ce petit territoire prend le nom de Côte française des Somalis et dépendances. Lagarde, en 1897, signe un traité avec l'empereur d'Ethiopie qui fixe les frontières de l'enclave. La même année, par un deuxième traité, Ménélik considère « le port de Djibouti comme le débouché officiel du commerce éthiopien ». En 1899, Lagarde quitte définitivement la Côte française des Somalis. Son oeuvre est extraordinaire : il a obtenu par persuasion tout oo qui pouvait l'être et la France occupe dans cette partie du continent africain une place prépondérante qu'elle gardera jusqu'en 1935. Supra, p. 205-206. (1) (2)A ce sujet, cf. Hubert DESCHAMPS, La Côte Française des Somalis, p. 44-47.
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Nous avons vu (1) dans quelles conditions s'est effectuée la conquête de Le Myre de Villers (octobre 1894). de Madagascar après l'ultimatum Sur les vingt mille soldats débarqués à Majunga et employés sans disdes routes pour les fameuseB cernement aux travaux de terrassement voitures Lefèvre, la fièvre (le général Tazo) fait environ 6 000 morts contre cinquante tués au combat. On fait payer ces ravages à l'île en d'une insurrection entraîne la nomiLe déclenchement l'annexant. nation du général Gallieni, lequel pratique la fameuse méthode de «la tache d'huile » utilisée avec succès au Tonkin. En 1899 il crée up territorial du sud qu'il confie au colonel Lyautey. commandement que Enfin, au début du siècle, Gallieni conscient de l'importance du pays crée l'Académie revêt l'étude et la connaissance Malgache. XII.
LE
DIFFICILE
DÉPART
DE
L'E.
I. C.
Nous avons montré par ailleurs (2) comment Léopold lia payé sur sa fortune personnelle les quelque dix millions de francs (or bien enles dépenses des premières expéditions. tendu) représentant 74 261 francs, l'année En 1886 les recettes de l'E. I. C. atteignent suivante est créée la C. C. C. I (Compagnie du Congo pour le Commerce et l'Industrie) que va diriger Albert Thys et qui doit s'occuper de la mise en valeur du nouveau domaine, mais le million de capital initial est difficilement réuni. Les grandes banques (Société Générale, Banque de Bruxelles) boudent les opérations congolaises. La construction d'une voie ferrée, reliant le vaste réseau navigable de l'estuaire du Congo à l'emplacement où remontent les navires de haute mer, est la condition de développement du pays. du major CamAprès les travaux de reconnaissance topographique bier (1888), la Compagnie du chemin de fer du Congo est créée (1889), au capital initial de 25 millions dont 15 souscrits par des constituée groupes privés — belges (7, 8 millions), anglais (5 millions) et allemands (2 millions) — et 10 millions par l'État belge. Par la suite le à 15 millions et donne son aval gouvernement porte sa participation à un emprunt obligatoire de 10 millions. du chemin de fer fut une véritable perC'est que la construction formance dans un climat particulièrement insalubre. Après neuf ans de travail acharné le 1er juillet 1898, les 390 kilomètres de Matadi à sont mis en exploitation. 1 800 travailleurs de couleur Léopoldville et 132 Européens dont 8 ingénieurs, avaient succombé. Devant les énormes difficultés financières, Léopold II rend public son testament, ce qui permet le prêt par l'État belge de 25 millions et le reste à raison de 2 millions par an). (5 millions comptant C'est à cause de ses difficultés financières que Léopold II provoque la Conférence de Bruxelles (18 novembre 1889 — 2 juillet 1890) qui 9 un triple objectif économique et financier, politique et social. Sur le (1) Supra, p. 142-145. (2) Histoire du Congo-Léo, p. 157-158.
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plan financier : Léopold obtient que soient perçus pendant dix ans les droits de 10 % ad valorem sur les marchandises dans importées le bassin conventionnel du Congo. Cette réforme de l'article IV de l'acte de Berlin ajouté au prêt consenti par le gouvernement belge sur publication du testament royal permet de poursuivre la mise en oeuvre du Congo. Par ailleurs, la conférence recommande le développement économique par la création de routes et de voies ferrées, ce qui doit permettre de supprimer le fléau du portage. Sur le plan politique : l'objectif de la conférence est précisé par le souverain « africain » Léopold qui demande aux puissances d'enen vue de délibérer sur les moyens de « mettre voyer des représentants un terme aux crimes et aux dévastations la traite des qu'engendre esclaves africains, de protéger efficacement les populations aboriles bienfaits de gènes de l'Afrique et d'assurer à ce vaste continent la paix et de la civilisation ». Ainsi est précisé la mission civilisatrice de l'Europe. Sur le plan social enfin, le trafic des spiritueux est sévèrement restreint. Ainsi les nations européennes justifient leur installation en Afrique humanitaires. par des considérations Léopold doit vivre encore trois années difficiles, mais, dès 1894, les exportations et les importations à 11 millions de francs-or. Dans les années suivantes s'équilibrent la valeur des produits exportés ne cesse de croître si bien qu'en 1900 les exportations s'établissent à 47 millions et les importations à 20 millions. Ce succès finanoier est obtenu grâce à un concours de circonstances assez extraordinaire. Le Congo offre sur son territoire les trois grandes ressources des pays neufs : d'abord celle de la cueillette (ivoire et caoutchouc) immédiatement une cerdisponible mais nécessitant taine contrainte quant à la collecte du caoutchouc et au portage de du chemin de fer. Les plantal'ivoire, du moins jusqu'à l'achèvement tions plus lentes à mettre en oeuvre supposent un aménagement foncier générateur d'abus. Enfin les formidables ressources minières au très lent démarrage vienet dont les revenus sont considérables dront au début du xxe siècle compléter ce dispositif économique. Mais le commerce de l'ivoire entraîne la lutte contre les concurrents arabes de l'Est sont des marchands (qui fort opportunément arabe », cependant d'esclaves), d'où la difficile « campagne que les plantations entraînent une véritable spoliation des collectivités africaines. XIII.
LES
EXPLORATIONS
Le déclenchement de la « course au clocher » ne doit pas faire perdre de vue l'importance réalisées dans les des explorations scientifique doux dernières décennies du siècle presque toujours par des officiers. R. CORNEVIN. — Histoire de l'Afrique, Tome II.
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i. Dans l'Est de l'Afrique. Le consul Elton explore la partie nord du lac Nyassa et les monts Livingstone, mais il meurt en regagnant Zanzibar par voie de terre. O'Neill effectue plusieurs voyages entre la côte et le lac Nyassa dont l'ingénieur Stewart (de la Compagnie des Lacs africains) améliore la carte (1882). Le nord de ce lac est exploré par Joseph Thomson qui découvre le lac Roukwa, puis remonte la rive ouest du Tanganyika jusqu'à la Loukouga, montrant qu'il s'agit d'un affluent du lac. En mars 1883, le lac Naïvacha, Thomson part de Zanzibar vers le Kilimandjaro, la région du mont Kenya. Il découvre le lac Baringo puis atteint la rive nord du Victoria et revient par le mont Elgon. Partant de Dar es Salam, le lieutenant Giraud passe au nord du lac Nyassa et visite le lac Bangouéolo. Abandonné par ses porteurs, il regagne la côte par le Nyassa et le Zambèze (1883). Le comte Teleki, deux ans plus tard, depuis Pangani passe par le et découvre les lacs Rodolphe et Stéphanie. Kilimandjaro En Afrique orientale allemande (actuel Tanganyika), Baumann établit la carte de la zone située entre le lac Victoria, Tabora et le lac Il détermine le bassin de la Kagera, affluent du lac Tanganyika. Victoria. Meyer fait l'ascension du Kilimandjaro. Von Behr (1891) du pays situé entre la Rovouma et la Rouentreprend l'exploration fidji, qui sera complétée par Von Scheele en 1893. J. W. Gregory reconnaît la Rift Valley, entre le lac Naïvacha et le lac Baringo. En 1894 le comte Von Gôtzen va du Tanganyika au Congo, découvre le Kivou et reconnaît les régions situées entre le lac Edouard et le lac Tanganyika. Prince, en 1895, explore le nord du lac Roukwa. En 1891, Macdonald reconnaît le tracé du chemin de fer de Mombassa vers l'Ouganda. Le nord de l'Ouganda et l'ouest du Kenya sont activement explorés par Williams, Portai et Seymour Vandeleur. Par ailleurs Macdonald relève le contour du lac Kioga et explore les régions situées au nord du Victoria, cependant que le sud-ouest de l'Ouganda est visité par Hobart (1897-1898). Dans la Corne de l'Afrique, l'expédition anglaise des frères James et d'Aylmer part de Mogadisque (1884) en direction de Berbera mais doit, à Bari, rebrousser chemin. En 1885 Dundas remonte le Djouba sur 600 kilomètres. et visite les pays Somali Bottego (1892-1893) explore l'Erythrée et Galla. En 1895, il reconnaît le cours moyen du Djouba, gagne le lac Rodolphe et rejoint la côte à Mombasa. Cavendish, en 1897, après des renseiavoir, par le Djouba, gagné le lac Rodolphe, rassemble gnements sur la région comprise entre ce lac et le Nil Blanc avant de de Cavendish et Bottego regagner Mombasa. Les renseignements confirment ceux rassemblés sur le Kenya septentional par Chauler et Von Hôhnel. Darragon (1897) atteint le pays Galla au sud du Choa déjà visité par Donaldson Smith en 1894-1895. Le comte von Wickemburg
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explore le nord du Somaliland. Bonchamps (1897-1898) visite le pays Nouer et atteint les sources de la Sobat dont il reconnaît une partie du cours. importante 2. En Afrique
Centrale.
(1)
de Von Wissmann Nous avons vu (p. 504) les explorations qui, la Tshikapa, Nyangwé sur le Congo, depuis Loanda par Kimbandou, le Tanganyika parvient à Bagamoyo sur la côte orientale. En 1884-1885 puis en 1886 avec le missionnaire Grenfell, il explore le Kassaï, se retrouve au confluent de la Louloua où le médecin hors cadre Ludwig Wolf vient d'explorer la rivière Sankourou. Von Wissmann prend à travers la brousse jusqu'à Nyangwé puis, parle Tanganyika et le Nyassa, atteint le Zambèze par le Chiré pour aboutir à Quelimane. Grenfell et von Wissmann ont joué un rôle immense dans la reconnaissance du bassin du Congo et de ses affluents. La région des sources des affluents du Kassaï reconnue par des expéditions parties de Loanda, une vaste zone jusqu'au fleuve Congo, reste complètement inconnue. Le capitaine Vandevelde (1889-1890) va de Matadi à Popokabaka sur le Kwango. Puis il traverse la rivière qu'il remonte jusqu'à Kasongo-Lounda avant d'aller plus à l'Est à travers la Wamba, le Kouilou et la Louanga pour atteindre Louebo. Exploration de VOubangui et de VOuellé. En 1885 le géographe Wauters pose le problème de l'identité de en 1870 avait suivi le cours l'Oubangui et de l'Ouellé. Schweinfurth inférieur de l'Ouellé qu'il croyait tributaire du Tchad. Stanley, en 1882, avait remonté l'Arouwimi pour retrouver l'Ouellé. Grenfell avait remonté l'Oubangui en 1884 jusqu'aux rapides de Zongo. Pour résoudre ce problème et aussi fixer les frontières avec les territoires français, Léopold II confie une mission à van Gèle qui remonte l'Itimbiri, mais rebrousse chemin après de multiples difficultés. En janvier 1888, lorsque van Gèle est contraint au retour devant des milliers de guerriers Yakoma, il a résolu le problème de l'Oubangui, constatant l'identité de l'Ouellé de Schweinfurth et de l'Oubangui de Hanssens au méridien 22°30' au confluent du Bomou et de l'Ouellé. En 1891, le lieutenant Lemarinel remonte le Bomou, reconnaît le Bali et installe des résidents auprès des sultans qui demandaient protection contre les incursions mahdistes. L'accord de 1887 entre la France et l'E. I. C. limite la zone d'action belge à l'Oubangui, ce qui permet aux explorateurs belges de pousser librement au nord de Yakoma puisqu'à partir de ce point le fleuve ne s'appelle plus mais le Bomou et l'Ouellé. Le commanl'Oubangui, dant Hanolet, puis le capitaine Nilis et le lieutenant de la Kéthule [l! Pour plus de détails se reporter à mon Histoire du Congo-Léo, p. 135-148.
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dans le Dar Fertit, mais les postes font de larges reconnaissances installés au-delà du Bomou doivent être repliés lors de la Convention du 14 août 1894 entre la France et l'E. I. C. Au Katanga, Paul Lemarinel fait une première reconnaissance auprès de M'Siri, roi du Garenganzé (début 1891). Quelques semaines après part la première expédition, organisée par la toute nouvelle Compagnie du Katanga, celle de Delcommune, qui sera suivie de l'expédition Stairs, avant que Bia et Francqui auxquels il faut joindre en 1891-1892 l'exploration le nom du géologue Cornet n'effectuent décisive du Katanga. Partant du Nyassaland, Sharpe, en 1892, se rend du Tanganyika au lac Moëro et remonte la Louapoula jusqu'aux chutes de Johnston. Le baron Dhanis, la même année, s'approche de cette région par le Sankourou. Wertheley fait le relevé du lac Bangoueolo et Langheld, l'année suivante, visite le Roukwa. En 1895-1896, Gibbons explore les affluents orientaux du Zambèze. Brasseur et Cerckel complètent la reconnaissance des régions situées à l'ouest du Louapoula, améliorent la carte du bassin du lac Moëro dressée par Sharpe. Foa parcourt le pays entre le lac Tanganyika et le cours supérieur du Congo en amont de Nyangwé (1894-1897). En 1898, Lemaire visite la ligne de partage des eaux entre le Zambèze et le Congo. La même année le major Gibbons poursuit ses explorations sur les affluents du Zambèze et effectue un remarquable voyage transafricain Kivou, Edouard, par les lacs Moëro, Tanganyika, Albert, par l'Ouganda et l'Egypte. De multiples explorations sont entreprises par l'État indépendant du Congo dans l'Arouwimi et l'Ouellé (Becker, 1890), la Lomami (Delporte et Hodister), le Kassaï et la Sankourou (Stache, 1896), la région du Kivou (Glorie, 1898). La somme de ces travaux est rassemblée par Wauters en 1899 dans une carte du Congo au 1/2 000 000. 3. Afrique du Sud-Ouest. A partir de l'implantation allemande de 1884, le Sud-Ouest africain est le théâtre d'une intense activité. Sching, partant de la baie de la Baleine (1884), marche vers le Nord jusqu'à la Counene et vers l'Est jusqu'au lac Ngami. Par la suite il passe deux ans de recherches chez les Ovambo de la frange du Kalabotaniques et ethnographiques hari. Stapf (1885-1886) fait au Namaqualand un remarquable travail géologique complété par celui de Schenck entre le fleuve Orange et la baie de la Baleine. Deux ans plus tard, le baron von Steinacker explore une partie du Damaraland dont il établit la carte. Curt von François, à l'occasion des campagnes de pacification, fait à son tour une reconnaissance du Damaraland et du Namaqualand. Il fonde Windhoek et regagne Walfisch Bay (1891). L'année suivante, le comte Pfeil va de Port Nolloth à travers le Namaqualand central et oriental jusqu'à Windhoek et Walfisch Bay. Après les reconnais-
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sances de Dove, c'est Passarge qui, en 1896-1898, parcourt les environs du lac Ngami et les pays situés au Nord-Ouest. Baum parti de Moçaétablit le tracé de la médès explore le sud de l'Angola, Hartmann voie ferrée entre les mines de cuivre d'Otavi et la côte (1900-1901). 4. L'Afrique occidentale et le Sahara. La pénétration politique permet, en Afrique de l'Ouest, de nomBamako créé en 1883, l'enseigne de vaisseau breuses reconnaissances. du Sénégal au Niger une canonnière Froger réussit à faire transporter démontable qui va défendre le fleuve en aval de Bamako et prendre, année après année, possession des escales du fleuve. Caron atteint Mopti en 1887 puis Kabara. Boiteux entre à Tombouctou en 1894 et le colonel Bonnier, en lui portant secours, est tué à Takoubao. Joffre assure finalement la conquête de Tombouctou. Binger, qui s'est signalé à Faidherbe par ses travaux sur la langue et peut préparer à loisir bambara, devient son officier d'ordonnance son expédition en utilisant sa remarquable africaniste. bibliothèque Parlant couramment le mandingue, langue des colporteurs dioula, il part en septembre 1887 par Sikasso (où il rencontre Samory en train d'assiéger Tiéba), puis Kong (février 1888) avant de remonter vers le Nord chez les Bobo et les Mossi. Il traverse les pays Gourounsi, Dagomba, Dagari et parvient le 5 janvier 1889 à Kong où il trouve Treich-Laplène envoyé par M. Verdier à sa rencontre. Les deux explorateurs reviennent par Djimini, l'Anno et l'Indénié. L'oeuvre de Binger est considérable. Il établit une carte comportant 4 000 kilomètres d'itinéraires rattachés à 18 positions astronomiques et accomplit un travail ethnographique et linguistique de premier ordre. A partir d'Accra (mai 86), le Dr Gottlob Adolf Krause projette de Il parvient par Ouagadougou et gagner Tripoli par Tombouctou. Hombori lorsqu'il reçoit l'ordre de battre en Ouahigouya jusqu'à retraite. Il revient par Ouagadougou (janvier 1887), Salaga (avril), Sokodé (juin), Atakpamé (19 août), Grand Popo, Ada et Accra (23 septembre). Cette très importante exploration n'a pas de conséquences de Wissmann au politiques. Ce sont deux anciens collaborateurs Kassaï, von François vers la Volta et le Dr Ludwig Wolf vers Bismarckburg et le pays bariba, qui feront le travail d'implantation politique. allemands (Gruner, Dr Doering, von Cependant, les explorateurs se feront coiffer au poteau par le commandant Carnap-Quernheimb) Decoeur et l'administrateur Alby (1895), arrivés les premiers auprès du chef authentique du Gourma. La même année, le commandant Toutée partant de Carnotville crée le poste d'Aremberg sur le Niger qu'il descend, cependant que Baud et Vermeersch par Mango, Bouna rejoignent Bassam en Côte d'Ivoire (1). (1) Pour toutes ces explorations cf. mon Histoire du Togo,p. 137-158et mon Histoire au Dahomey,p. 365-393.
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En 1893, Fowler fait une reconnaissance de la région géographique située entre Lagos et le Niger. En 1896, Hourst descend le Niger depuis Kabara (port de Tombouctou) jusqu'à la mer et complète le travail de Toutée. En 1903, le capitaine Lenfant, l'enseigne de vaisseau Delevoye et le maréchal de la liaison de Logis Lahure s'attaquent au problème Partis le 4 août 1903, ils remontent le Niger puis la Niger-Tchad. Benoué jusqu'à Garoua et entrent dans le Mayo Kebbi avec une embarcation en acier à faible tirant d'eau. Un peu avant d'arriver au lac Toubouri les explorateurs une chute très importante. aperçoivent est portée en amont. Le 28 octobre 1904, L'embarcation, démontée, après avoir franchi une zone marécageuse, l'expédition pénètre dans une rivière qui communique ainsi la avec le Logone, effectuant démonstration que, durant plusieurs semaines de l'année, les eaux du bassin du Tchad se déversent par la Benoué dans le bassin du Niger. Au Cameroun, le pays des Douala jusqu'à la Zintgraff traverse Benoué. En 1890, Kund et Tappenbeck arrivent à Yaoundé. Le capitaine Morgen visite Ngila, Yoko, Tibati et Banyo, atteignant la Benoué à Ibi. En 1898, Uchtritz et Passarge explorent le nord-est du Cameroun. von Carnap-Quernheimb reconnaît le Sud-Est confluent jusqu'au de la Ngoko et de la Sangha. Le Sahara est la dernière région d'Afrique à être explorée. Depuis arrive (1892) et B. d'Attanoux l'Algérie G. Méry atteint Temassinine au bord de la zone des oasis (1894). Foureau, depuis In Salah (1890) atteint le Tademaït fait plusieurs puis, depuis Temassinine explorations de détail qui préparent efficacement la future marche au Tchad. du Sahara sera poursuivie durant toute la période L'exploration coloniale. 5. Madagascar. Les reconnaissances de Grandidier les travaux des (1865-1870), RR. PP. Rollet et Colin, à partir de 1873, donnent une bonne carte des diverses régions de l'île. Entre le traité de protectorat et l'annexion, il faut signaler l'oeuvre de L. Catat et C. Maistre qui vont de Tamatave à Majunga Fort Dauphin à puis, par les plateaux, gagnent l'extrême A partir de la conquête le commandant Sud-Est. Verrier et ses adjoints de l'armée, du service géographique le géographe Emile Félix Gautier, Grandidier (1898-1902) compuis Guillaume de l'île. plètent la connaissance géographique A la fin du siècle, les explorations fondamentales du continent africain sont effectuées. Elles Certes des reconnaissances de détail seront nécessaires. seront l'oeuvre des administrateurs de brousse avant que la photographie aérienne lors de la deuxième guerre mondiale ne vienne permettre une cartographie du continent. quasi-parfaite
CONCLUSION
Le tournant du xxe siècle auquel aboutit ce deuxième volume de notre histoire de l'Afrique peut être considéré de deux façons. Du point le début de l'ère de vue européen c'est surtout un commencement, — maître bienveillant ou tyran odieux coloniale où le colonisateur Du point suivant les opinions — a imprimé sa marque à l'Afrique. une fin, la fin d'un monde où de vue africain c'est essentiellement exclusif d'Afrile pouvoir, les honneurs et la gloire étaient l'apanage venus cains (princes, marabouts, chefs de guerre) et non d'étrangers d'au-delà des mers. de l'Afrique a une importance L'Histoire capitale précoloniale aux yeux des Africains pour l'idée qu'ils se font de leur propre valeur et pour la formation dont ils sentent le d'une conscience nationale besoin lorsque l'indépendance et l'accès aux grands premiers rôles effacent plusieurs décennies de figuration ou de rôles secondaires. Mais l'Histoire revêt aussi un intérêt particulier pour précoloniale tous ceux qui ont le souci de comprendre l'évolution de l'Afrique aient tendance En effet, bien que les non-Africains contemporaine. à l'oublier, l'Afrique précoloniale pèse d'un poids très lourd sur les destinées de l'Afrique indépendante. d'Addis-Abeba de mai 1963, le panafricaDepuis la conférence nisme représente pour la plupart des chefs d'état africains la solution idéale de l'avenir. L'un de ses fondements réside dans le fait que coloniale qui faila contrainte l'Afrique a subi dans sa quasi-totalité sait d'elle un objet passif et non un sujet actif. Un autre non moins certain, mais plus difficile à percevoir est que l'Afrique forme un tout consacré aux autres continents. Cet ouvrage, original par rapport à l'Afrique précoloniale de 1500 à 1900, répond donc à un besoin évident. nous ont de la documentation L'ampleur du sujet et l'abondance obligé à un choix difficile. Depuis 1962, année durant laquelle nous avons commencé la rédaction de ce tome II, les études de détail concernant la période envisagée se sont multipliées. Notre centre de documentation tout ce qui paraît concernant reçoit quotidiennement l'Afrique au sud du Sahara, dans le domaine politique, économique, social et culturel, de périodiques et soit environ 500 abonnements en moyenne 1500 ouvrages par an. Beaucoup de ces études présentent un intérêt historique et apportent un éclairage original sur des questions précédemment de constituent un travail traitées ; certaines véritable création en fournissant des documents historiques nouveaux :
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CONCLUSION
restés inédits, et traduction de manuscrits ou d'archives publication de la tradition fouilles archéologiques datées, exploitation scientifique plus à orale, etc. Nous avons pris le parti de traiter systématiquement fond les questions qui viennent d'être renouvelées par ces études récentes ou celles que le lecteur ne trouvera développées nulle part ailleurs. Il en de l'ouvrage résulte un déséquilibre apparent qui se trouve justifié Ainsi dans la quatrième partie — par le souci d'un service maximum. les rapports de l'Europe et de l'Afrique au xixe siècle — les nombreuses études de synthèse auxquelles nous nous référons dans la bibliograles chapitres consacrés à phie, nous ont permis de ne pas détailler commerciale et politique, au partage et à la conquête l'implantation de l'Afrique (chap. XV et XVI). Par contre nous avons plus longueet les missions chrétiennes ment traité les explorations (chap. XIII et XIV) car il n'existe aucune synthèse récente sur ces deux questions. — est basée sur des La troisième partie — L'Afrique septentrionale et Françoisécrits par des spécialistes (Henri Dehérain ouvrages Charles André Julien, R. Letourneau, Charles Roux pour l'Egypte, J. Ganiage, A. Prenant, Henri Terrasse, X. Yacono, etc.) dont l'autorité est telle que nous nous sommes borné à exposer leurs opinions. dans une En ce qui concerne l'Afrique noire, nous nous trouvions situation très différente, car les rares ouvrages de synthèse qui auraient se pu nous servir de canevas pour y placer des éléments nouveaux C'est trouvent dépassés par les progrès de la recherche historique. du « corset» seulement qu'il devient possible de s'abstraire aujourd'hui dans les oeuvres ou linguistique qui étouffait l'histoire ethnologique En 1960, nous-même écrivions classiques de Baumann et Westermann. de notre Histoire des peuples de l'Afrique noire dans la conclusion (p. 669) que nous avions « dû tenir compte des divers cycles de civilisation de Baumann dont certains éléments paraissent aujourd'hui de l'Afrique noire de dépassés ». Rappelons par ailleurs que l'Histoire l'historien marxiste hongrois Endre Sik, parue en 1962, aboutit à nier en voulant y retrouver toute réalité historique à l'Afrique précoloniale ou de des thèses de Marx, de Lénine (p. 19) «la confirmation Staline ». des études historiques africaines nous Le profond renouvellement de façon différente les « provinces a incité à regrouper historiques » dans notre thèse de doctorat. Nous avons que nous avions déterminées ainsi pu mettre en évidence l'individualité de ce que nous historique individualité basée sur l'exiBavons appelé l'Afrique centre-australe, tence d'une voie commerciale transcontinentale utilisée par des Noirs avant la pénétration européenne. Dans chacune des études régionales de détail nous avons eu le souci de situer géographiquement les royaumes sur l'étendue historiques Nous avons d'autre desquels régnent les idée les plus fantaisistes. — où l'histoire permet de part indiqué tous les cas — fort nombreux les certaines réactions Les journalistes, comprendre contemporaines. de l'Afritous ceux qui s'occupent à un titre quelconque économistes, seront surpris de constater combien la connaisque d'aujourd'hui
CONCLUSION
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sance du passé, celle des anciennes structures sociales et religieuses, permet d'éclairer le présent. Dans cette histoire « africaine » de l'Afrique noire précoloniale, plusieurs sujets Bont traités ici pour la première fois dans un esprit de des Bantou d'Afrisynthèse. Nous citerons : l'histoire préeuropéenne sur le plateau que du Sud (chapitre IV), la période pré-Monomotapa sud-rhodésien (p. 75-80), le passé des Maravi ou Malawi qui ont donné leur nom à l'ancien Nyassaland (p. 92-94), le passé lointain du plateau et ses relations interlacustre avec les habitants de préhistoriques de la bande guinéenne l'Afrique de l'Est (p. 156-166), le peuplement (p. 276-279). Chemin faisant, nous avons été amené à démolir certaines théories » (p. 150-156) qui durant plusieurs comme « l'hypothèse hamitique décennies a fondamentalement obscurci les problèmes humains en Afrique de l'Est. Nous avons d'autre part émis certaines hypothèses de travail. Ainsi nous avons assimilé le Bitou des Tarikh avec l'actuel pays Lobi et ses ruines mystérieuses (p. 226-229) ; nous avons souligné le rôle joué par la navigabilité du Niger et de la Benoué (p. 270-76) dans l'échange de la kola guinéenne contre le sel, le coton et le cuivre du nord et par conséquent dans la formation et le développement du et poliroyaume forestier de Bénin lié aux relations commerciales tiques avec le très ancien empire du Kanem-Bornou. Bien des points restent cependant obscurs dans l'histoire de l'Afrique noire précoloniale. Nous en avons signalé certains comme le « trou » existant entre la richesse et la puissance du royaume chrétien nubien d'Aloa et l'installation des sultans noirs du royaume Foung (p. 212215) ; les mystérieux Ayeaux signalés par le corsaire français Landolphe dans son rapport sur le royaume de Warri (Nigeria) (p. 292) ; le problème du royaume Boutwa lié à la datation et la signification des ruines rhodésiennes (p. 86-88) ; l'origine inconnue des pasteurs du plateau et beaucoup interlacustre... éthiopides Hima-Toutsi d'autres encore. Nous pouvons donc conclure que ce travail représente une mise au point des plus récentes connaissances historiques sur l'Afrique noire, mais que le nombre des problèmes reste considéà résoudre rable. Nous espérons que ce livre encouragera les chercheurs de toute origine et particulièrement les Africains à rechercher leur solution. Certains lecteurs pourront s'étonner de la brièveté du dernier chapitre. C'est qu'avec la période coloniale au début du 3e volume nous serons obligé fréquemment de revenir en arrière. Pour éviter les redites nous avons préféré glisser rapidement sur tous les phénomènes d'implantation coloniale puisque dès les deux dernières décennies du XIXe, l'Histoire des Africains s'efface au profit de celle des Européens en Afrique. En dehors de l'Ethiopie et du Maroc, il n'y a plus que les efforts décrits des gouverneurs européens : lord Cromer en complaisamment Egypte, Lugard en Ouganda, Rhodes dans ce qui sera pour trois quarts
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CONCLUSION
Victor Ballot au de siècle la Rhodésie, Binger en Côte d'Ivoire, Dahomey, Archinard au Soudan français, Brazza au Congo, Ballay en etc. Guinée, Koehler au Togo, Gallieni à Madagascar, La politique coloniale va dépendre de ces hommes et du génie de chacune des nations. Ils vont imprimer leur marque à ce continent africain qui, durant plus d'un demi-siècle, sera leur domaine.
TABLEAUX
CHRONOLOGIQUES
RESTE DU MONDE L'EST AFRIQUE DE AFRIQUE CENTRE AUSTRALE AFRIQUE AUSTRALE EUROPE SAHÊLO-SOUDANAISE BANDE xvie SEPTENTRIONALE MADAGASCAR ET OUINÉENNE B ANDE ET AFRIQUE 1485 Début des Tudor. de 1488 Dias double leCapBonne Espérance. 1492 Prise deGrenade. 1492 Colomb décou Christophe l'Amérique. en Covilham Pedro de 1493 Ethiopie, Mohamdel'Aakla durègne Début 1493 1494 Traité deTordesillas. 1494 Colomb àlaJamaïque. med. Début des d'Italie. guerres 1495 Début durègne deManoël. 8juillet. Vasoo de Gama Lisbonne. quitte 1497 John Cabot leLabrado longe de Q ama. Vasco 1497 18mai, Vasco deQama attein 1498, Calicut. 1499 deLouis XII etd'Anne Mariage deBretagne. 1500 Naissance deCharles Alvarez leBrés Cabrai découvre Quint.1500 Diaz découvre Madaguat 1600 Diego 1501 Première denègr importation à Eispanola. africains 1602 Colomb àlaMartinique alAjiiibn Abdollah Bakr 1503 Abou delaQadiriyah introducteur rus, chez àAden. meurt les Somali, aZanzibar. 1504 Les Portugais Décès d'Isabelle laCatholique. roi des Foong. Amara 1504 Dounqas, restaurateur d'Ali Mort 1504 Dounama, d'Aloa. chrétien duroyaume duKanem-Bornou.Fin Bon Mombasa, Sac de 1505 Kilwa, les Kébir el par Prise deMers 1505 1506 Début durègne d'Alfonso. 1506 delacanne àsucr Introduction Espagnols. àSt-Domingue (Hispanola) 11 dam fort d'un Construction 1607 1508 BULLE deMoçarnbique. UNIVERSAU EOCLESIAE 1508-1509 àPorto QUI Colonie espagnole L ebna DengeL de Avènement SANCTIONNE LEPATRONAT 1608 HISPANORico. Safl. 1508 Les prennent Portugais PORTUGAIS. 1509 Henri 1609 Flotte anéantie d'Angleterre. VIII égyptienne àDiu Premier au établissement portugai les Prise d'Oran Espagnols. 1609 par Brésil. Ordre du de Sao gouverneur Thoraé 1510 Fondation delaColombie 1510 de recruter 200 esclaves dans leroyaume an l'Africain deLéon et1510-1613 Voyage Bougie taCongo. 1610 Les prennent Espagnols Soudan nigérien. àDjerba. Échec espagnol Tripoli. 1511 deCuba. Conquête àAmboine. Albuquerque Mohammed Abdallah :Abou 1511 Maroc Début delacampagne deCortès contr delaguerre lecommandement prend les PRINCEEST Aztèques. lesPortugais. sainte contre 1513 Découverte duPacifiqu 1513 HENRIQUE ECONGOLAIS par Fermai» A Domingo Lepilote 1513 ENVOYÉ ROME Balboa. Maurice. l'île découvre 1614 Arrivée des enChine Portugais Fenw* d'Antonio 1614-1616 Voyage deMazagan Prise 1614 parlesEspaauMonomoUpa. gnols. à 1616 Bataille deMarignan.1515 Juan Dias deSolis découvre l'Uru s'installe Djidjelli. s ultan Aroudj Din ed II, 1616 Saad guay. àAlger. 1515 Aroudj d'Ifat est Yetshak. le 1617 tué LUTHER :AFFADIE DES INDUL1617 dufrère Pères à parnégus Arrivée d'Andra GENOES. Canton. del'Egypte parles 1617 Conquête 1518 Turcs deSelim Ier. HENRIQUE NOMMÉ ÉVÊQUe 1518 Fort àColombo TITU. portugais les de Tlemcen Espagnols. Prise par tué de LAIRE D'UTIQOT. 19 d'un Barberousse 1518 près Aroudj échantillon 1519 CONDAMNATION DELUTHER A1619 deMagellan. d'argent par Envoi Voyage Tlemcen. au r oi du Congo. COLOGNE. Arrivée deOortès auMexique. «NGOLa Début durègne deCharles Quint. 1620 des 1620 Début durègne deSolima le Organisation postes impériales Charles les abandonnent par Quint. 1620 Portugais Magnifique. Nigeria, 1521 Fin d u de M anoel de PorG wato. de règne lecomptoir tugal. 1622 Premier tour dumonde deMasud Galla dos invasions Début 1523 au gellan. del'Ethiopie. 1623 Découverte del'ordes Molvq Mohammed deSidi 1523 Décès ben AIssa 1524 Fizarre contre lesIncas (Péro (Meknès). Youssef ben Ahmed deSidi 1524 Décès 1625 Bataille deFavie. 1525 souverain timourid du Baber, (Miliana). àlaconquête del'Inde 586 Rnb,T, deCastro Turkestan, part du 1626 de Bataille de Mohacs. Annexion de 1526 Retour Baltazar de Ngola. Donnas», d'Amara 1526 Mort rol des laHongrie les Turcs. Pays par 1527 Alliance contre franco-anglaise Mohammed de 1627 Attaque Granre Charles Quint.
DE L'EST AFRIQUE AFRIQUE SAHELO-SOUDANAISB BANDE CENTRE AUSTRALE EUROPE XVIe ET M ADAGASCAR ET BANDE GUINÉENNE SEPTENTRIONALE AFRIQUE
RESTE DU MONDE
2esao deMombasa. 1628 Mohamdel'Askia Fin durègne 1628 med. lepeñon 1529 Barberousse reprend aux Espagnols.de àSan et d'Alger 1630 Installation portugaise aux chevaliers remise 1530 Tripoli Tête. deJérusalem. Saint-Jean
1529 Les Turcs arrivent devant Vienne. 1630 FONDATION DUCOLLEGE DE 1530 Mort deBaber. Anarchi dan FRANCE. l'Inde. 1531 Henri VIII seproclame chef de l'Église anglaise. 1633 CALVIN ADHÈRE ALA RÉFORME. 1634 CRÉATION D'UN ÉVÊOHÉ ASAO TROMÉ.
mFIXANT PAUL DU PAPE BULLE Tunis. 1534 Barberousse 1534 prend SANTIAGO DE DIOCESES DES LA LUTTE ALA DSAN E THOME VERT ET DU CAP SASSANDRA. RIVIÈRE ses conduit 1536 troupes jus1535 Traité decommerce ou1535-36 Granye franco-turc Cartier remont le Jacques chrétiens. les de T unis 1535 Prise par Kassala. Capitulation. Saint-Laurent. qu'à 1636 INSTITUTION CHRÉTIENNE DE CALdelaflotte amiral Barberousse 1536 VIN. à Constantinople. avec résidence turque 1539 ORGANISATION DE LA COMPAGNIE DE JÉSUS. 1640 Alfonso Mort deLcbna interdit les 1540 1540 Denguel. deHenri d'exporter Excommunication VIII. 1540 Valdivia fonde leChili, esclaves deson royaume. de 1541 Débarquement 1541 DÉPART POUR LES INDE DE devant Alger. Échec 1541 espagnol Christophe de àMassaoua. Gaina ST-FRANCOIS XAVIER. 1643 Mort do M ohammed Granye. d'Alfouso. 1543 Mort Wattales Saadiens éliminent 1544 Les sides. 1545 DÉBUT DU CONCILE DE TRENTE. 1545 Ouverture des mines dePotosi AMALACC XAVIER FRANÇOIS 1547 Début durègne d'Ivan leTerrible. Début durègne IIdeFrance. d'Henri Daoud. del'Askia 1549 XAVIER AU JAPON Début durègne FRANÇOIS ech 1549 Mohammed deFès 1549 Prise par Cheik. delaforte»» Construction 1550 DE LA 1550 Les arrivent àPékin PUBLICATION Description 1560 de Mongols Sebastien San L'AFRICAIN. (Moçambique). LÉON DE JEAN del'Afrique d'AdaL émir Nour devient 1661 Turcs de parles 1551 Tripoli Conquête deDragut. 1662 PARUTION ALISBONNE DE LA PREMIERE DÉCADE De Asia DE BARROS. de lepotion Beis enlève Salah 1564 Vêlez. 1656 LES JÉSUITES ÉVINCÉS DU CONGO VOST EN ANGOLA. 1666 Début durègne dePhilippe II. 1556 Prise d'Astrakhan. Début durègne d'Akbar Grand Mog del'Inde. DES ARRIVÉE 1657. JÉSUITES EN ETHIOPIE. 1668 Avènement d'Elisabeth. àMostades 1558 Défaite Espagnols ganem. Mort del'empereur 1569 Claudius . . à à de Victoire 1560 Dragut Djerba. de dupère 1561 Assassinat silveir de lacourMonomotapa. 1562 Début dos doreligion. HawdeJohn guerres des 1562 Début voyages enAfrique kins etdelatraite anglaise occidentale. deSarea Dengel. 1663 1563 FIN DU CONCILE DE TRENTE. Règne 1563 Des Corsaires japonais ravag les côtes duFou-Kien. Installation delacapitale laotien à Tiane. Vien 1564 GALILÉE NAIT AFISE. 1665 Résistance deMalte les contre deMalte. ausiège 1565 Mort deDragut Turcs. 1507 dos îles Découverte HawaT. duBoylerbeylicat 1668 :Début Alger Invasion de des d'Euljd Ali. auCongo. Jaga 1560 deLisbonne 1609-70 Révolte 1569 doGreuado. Départ lacrolade duMonomotapa. 600 Portugais rétablissent Al1570: 1670 ALIMA. INQUISITION sur son trône. Rébellion deNovgorod. sou varo Ier Barroto 1571 1671 Francisco Bataille de Offensive d'Idross Alaoma. dos Tatare deCrim durègne Lépante. 1571 1571 Début parvientà ARRET DU PARLEMENT DE SUR BORDEAUX contre MOSCOU. L'ESCLAVAGE. 1572 Saint Barthélemy.
DE L'EST AFRIQUE AUSTRALE EUROPE CENTRE AFRIQUE SAHELO-SOUDANATSE BANDE xvie MADAGASCAR AUSTRALE AFRIQUE BANDE GUINÉENNEET ET SEPTENTRIONALE AFRIQUE aux Tunis Pacha Sinan 1574 prend
Mort deBarreto. 1573
RESTE DU MONDE
1674 Prise les Bir deVien Tiane par mans.
roi Sébastien accorde àPaulo 1676 Le laDonatoria de36lieues de Novals Espagnols 1575-80 Cervantès esclave du Dd'Alger, ey 1575 LesPorgais ranoncant àlaconquête du MDias omotapa. céte ausud delarivière Couanza. de 1576 Construction des bâtipremiers en face l'Ile deLoanda. ments 1677-80 deFrancis Drake auHarar. Voyage 1577 Les Galla assiègent tour dumonde. 1676-83 deDuarte àla Séjour Lopez elKebir. deKsar Bataille 1578 du roi deSan Salvador. cour dePortugal. deSébastien Mort d'El Avènement Mançour. 1679 Fondation des Provinces Unies. 1680 IIroid'Espagne etdu Philippe Portugal 1681 Trêve hispano-turque. 1582 ARRIVÉE DU JÉSUITE RICC EN Daoud. del'Askia Fin durègne 1582 CHINE. 1683 :Construotion dufort de Angola Hanangano. 1584 Mort d'Ivan leterrible. Premier établissement enVir anglais ginie. à lacour Ambassade siamoise de Louis XIV. Ali turc 1585 Alliance Bey. ducorsaire 1585 anglo-hollandaise. Passage Momta. duCambodg 1587 Exécution deMarie Stuart.1687 Zimba Conquête parle Les attaquent Ali. :Mort 1587 d'Euljd 1587 Alger Siam. JAPON :PERSECUTIO CONTRE LES CHR TIENS. 1588 Défaite del'Armada. b 1889 III. exterminés pat1589 Assassinat deHenri Les Zimba Mort 1589 dePaulo Dias deNovals. àArques Victoire deHenri deNavarre deMalindi. Scgedjou etIvry. des Bonlouk: Massacre Tunis 1690 bachi. d'Othman Dey. durègne Début HENRI SHAKESPEARE. 1591 PUBLICATION AROME DU 1591 IV DE de LIVRE DE Lepacha triomphe 1591 Djouder . RELATIONB PIGAFETTA DEL deTondibi. àlabataille JUPPO l'armée Bonrhay DI CONGO E DELLE BRAME CIRCONVICINE CONTRADE ». attaquent Zimba cannibales Les 1692-93 ,à etTête. Sena 1693 Les évacuent laCoré deFort 1693 Guerre Jesus Japonais 1693 Construction austro-turque. Mombasa. 1694 Sacre deHenri IVàChartres. dans l'Insul 1595-97 Van Houtman desBranès. Maroc :Insurrection 1695-96 DU AUTEUR DU D'ES DIOCÈSE DE 1696 NAISSANCE SADI, CONGO 1596 INSTITUTION ANGOLA. ES SOUDAN. TARTKH 1697 Défaite navale aux anglaise Açores. des 1598 duNouv 1598 ÉDIT DE NANTES. espagnole Occupation 1598 Les Hollandais prennent posser Mexique. del'île appellent Maurice en qu'ils N assau. de deMaurice 1699 l'honneur Godo 1599 durègne deBoris Construction d'un fort àMuxima. Début nov. XVIIe
1600 de marchands Installation de Compagnie 1600 hollandes c ommerçants àMpinda. Londres vers lesIndes dois commerçant orientales. enAnnam. 1601 Hollandais Doria devant d'Andréa 1601 Échec Alger. : Fondation dela Coutonbo l'ordre reçoit de fournir 1602 Amsiedam 1602 Indes orientales. colonies espagnoles 4250 aux Compagnie des esclaves d'El 1603 Mort Mançour. 1603 Arrivée deChamplain auCana 1603 Stuart roi Ier Jacques d'Angleterre. en 1604 Premier établissemen frança Guyane. deWarri Itoeklri 1606 Lesouverain 1605 Prise d'Amboine les Hollan . par une Portugaise.1607 Éthiopie.Sucneyos empereur. épouse LeMonomotapa 1607 Fondation de laVirginie. Susneyos 1607 Ethiopie. ; 1607 chrétiens. Gat,i les Rusoro 1607 Prise deBône empereur. par appel aux fait Portugais. 1608 Fondation doQuébec. JÉSUITES AU PARAGUAY R—Histoire COIVNEVIN. del'Afrique, Tome II.
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DE AFRIQUE SAHtoO-flOUDANAISE XVIIe BANDE L'EST AFRIQUE CENTRE AUSTRALE AFRIQUE AUSTRALE EUROPE AUSTRALE E M T ADAGASCAR AFRIQUE B ANDE GUTNÉENNE ET SEPTENTRIONALE AFRIQUE
DU RESTE MONDE
1609 desMorisques d'EsExpulsion pagne. 1610 Assassinat deHenri IV. 1612 Paix franco-espagnole.
1609 desMorisques pu Expulsion Philippe III.
du Ï.P, 1618-1617 Madagascar. Voyage Muiano. Luis 1616 deGaspar Boccaro de Voyage Tété àKilwa. 1617 Fondation deSPhilippe t deBengnela. 1618 Les 1618 Défenestration dePrague. lacapitale Portugais prennent da Débat delaguerre deTrente Ans. tfgola. 1619 Fondation deBatavia.
une 1619 Lerasalgérois prend Regeb marseillaise. polacre delacourse. Relance duroyaume 1620 Fondation Denxyera. des hollandaise delaCie Création 1621 occidentales. 1621 Indes SUSNEYOS DE CONVERSION AU CATHOLIOISME.
NadeSanson Arrivée àAlger 1628 pollon.
23-VI-1622 Balle 1622 Ormui incrusUbili instituant lesFer reconquise par laSacrée de l a sor les Congrégation Portugais. Propagation delaFoi (Propagande). 1633 Début delaguerre delareine Jinga. 1624 CRÉATION D'UN 1624 Richelieu COLLÈGE auConseil. 1624 Hollandais auBrésil. DE JÉSUITES ALOANDA. Les Hollandais fondent Nouvel Am terdam 1625 1626 Monsieur fonde Les àlaBarbade. Vincent laCongreAnglais des Prêtres delaMission. Les àSaint-Chri galion Français 1630 Début du deOhamba règne Bolongongo.
1630 Les àPemamb Hollandais
delaCompany 1631 ofLondon Création into Africa. trading 1632 de :avènement 1633 deSouza Vincent dePaul fonde lesLaïa1632 Campagne de .de Diego Ethiopie 6a: Pacha 1632 Mehemmed Tripoli Fasilldes Meneces DIS contre ristes. EXPULSION Capranzine. CATROkizli. MISSIONNAIRES LIQUES. nouvelle d'une Fondation capitale Gondar. 1634 Fondation deSurinam. 1636 Guerre 1635 Installation desFrançai àla franco-espagnole. Guadeloupe. Fondation deOayenne. IM6 La reine fait lapaix. Jinga laCote dal'Or. sur 1636 Anglais ElMina. Hollandais Les 1637 prennent DECTNQ AASSINTE DÉBARQUEMENT CAPUCINS FRANÇAIS. 1638 Flotte barbaresqus pu surprise 1639 :Expulsion 1639 L'Alsace devient des Japon française. Portu vénitien l'amiral Capello. 1639 1640 Installation hollandais àOey aBieurt. Premier français comptoir . etMalacca. Prise de L oanda les 1641 Allianco par Hollandais. 1641 franco-portugaise. Indu des 1643 Tasman Création delaCie orienaux 1642 enNouvelle Zéland 1643 HollanPrise du Roussillon les forces 1642 La reineJinga s'allie par Fondation deMontréal. tales oudM e adagascar.dais. françaises. , aMadagascar. Pronis Mort deRichelieu. de 1643 Fondation Fort-Dauphln. Alliance anglo-portogalse. 1643 Rocroy. : Fin 1644 Chine des Dyna C hair Baba. de Mlng. 1644 Début delaguerre Mandchoue des Ta'ing. .... Début delacanne àsucre aux Anti CARAVANE DB CATCOINS 1645 PREMIÈRE achète 1646 LaDuchesse d'Aiguillon les oonsulau d'Alger. 1648 ...edt eTunis.
àMadagascar. Correa deFlaoourt 1648 Arrivée 1648 deWestphalie. y Benavides 1648 SAlvador Traité leroi duCongo 1649 Exécution deCharles 1649 Traité par laquel Ier. sur l'île ranonce àtoute souveraineté
DE L'EST AFRIQUE AFRIQUE CENTRE AUSTRALE SAHÉLO-SOUDANAISE EUROPE BANDE xviie, M ADAGASCAR ET GUINÉENNE AUSTRALE ET BANDE ET AFRIQUE SEPTENTRIONALE AFRIQUE eddine. :mort deNacer Mauritanie 1660 achanti. Confédération Raid delacavalerie 1663 Djoukouu Kano. sur
Riebeck auCap. 1659 Jan Van
MONDE RESTES DU
1651 Acte de navigation.
1663 Les Hollandais duBré expulsés Les Russes livrent labataille deKo mara les contre Chinois. Les Hollandais Java. occupent 1665 Les laJama Anglais prennent
àdescolons Attribution delots 1667 libres. d'esclaves. Adiali « SON PUBLIE FLACOURT HISTOIRE 1658 1658 :Grand 1668 Révolte des Aurengzeb Mogo Cosaques. DE ILEMADAGASCAR. LG ARANDE DE deLaval duSénégal. 1659 Traité desPyrénées.1859 deQué deSt-Louis Mgr évêque 1659 Fondation des delapériode :Début 1669 Alger Rome :INSTRUCTIONS DE LA PROPAAgha. GANDE. duven:Laprière Tombouctou 1660 aunom du d'être dredi cesse prononcée duMaroc. roi 1661 deCatherine dePortugal Mariage avec Charles IId'Angleterre. auConseil. Mort deMozarin. Colbert de l a colonisation français. Début 1663 Canada delaCour possession depeste. 1664 1663 Épidémie Alger. Bourbon. à 1664 1664 Colbert crée laCompagnie des d Occupation parlesAngl sur deBeaufort duduc 1664 l'île Expédition 25-X-1665 Amsterdam New Bataille d'Ambuila : VieIndes occidentales. Nouvelle (futur Yo Djidjelli. toire 1665 Installation des 1665 CREATION DU JOURNAL aux île sur Antonio I"AlDES espagnole Portugais fonso. Mariannes. SAVANTS. Installation &St-Dom française aux enlèvent Les Arguin 1666 Français fondateur Rachid 1666 Maroc. Moulay Hollandais. Taza alaouite puis prend dynastie de2000 de la 1667 : Madascar: arrivée co' deDite. delazaouia 1667 Destruction au Martin François lons français. lac Alaotra. Ier. deJobaunès :Règne Ethiopie 1668 Paix d'Aix laChapelle. 1670 Paulo Dias deNovals PARUTION DE LD AESCRIPTION DE achève la1670 deMarrakech. 1669 Prise France. 1670 De laH prend possession de au nom du roi de aye duroyaume conquête DE DAPPER. Dongo.L'AFRIQUE sur Raid delacavalerie 1671 Djoukoun duDey. delapériodo :Début 1671 Alger etKatsena. Kano Premier deFro 1672 Guerre deHollande. 1672 gouvernem deMoulay accidentelle 1672 Mort tenac auCanada. Rachid. DE MOLIERE.1673 Installation àPon 1673 MORT française Ismaïl. frère deson Avènement Moulay ohéry. Indes des 1674 LaCompagnie sont : Les orientales 1074 Mauritanie Zouaya évacue Yefdad. Madagascar. doTen àlabataille écrasés DE PARIS. 1677 OBSERVATOIRE ... 1678 Loanda est dévastée les par troupes da roi de Boula. gouverneur Simon van der Stel 1679 Paix deNimègue. 1679 fonde Stellenbosch. de avènement : 1680 sur Ethiopie Jésus Raid delacavalerie 1680 Djoukoun Grand. leBornou. roiduDaDébut durègne d'Akaba, nhomé. auOuadai. d'Aarus à1681 laguerre Règne LeDey déclare 1681 Alger. Bokor :Ahmed 1082 delaSalle le Darfour Cavelier 1682 Début durègne de Pierre leGrand. explo la France 1682 deCherchell 1682 monte sur Bombardement par le Mississipi. trôn Duquesne. mort 1083 Défaite nu du Kahlenberg. turque 1683 Bombardement d'Alger, Sennar. au Grande famine 1084 1684 Le maréchal vient bomd'Estrées P.Le Vacher. lazades barder pères Alger. Supplice etFrancillou. ristes Montmasson deAndriandahifotal, fon1685 Mort Fondation duposte de1685 Code noir. portugais 1685 desroyaumes dateur sakalaves. RÉVOCATION DrL'ÉDIT DE NANTES. Simon Van der Stel fonde 1687 Dratein fonde 1687 Défaite àMohnes. Draturque kenstein SteI massive D deHuguenots 1688 PROTESTATI DES 1688 Guerre delaligue QUAK d'Augsbourg. 1688 Arrivée L'ESC CONTRE GERMANSTOW deFro 1689 Nouveau 1689 Pierre leGrand lepouvoir. la élus gouvernem Les sont prend par Alger. Dey du roid'Angleterre, tenac. 1689 Ile Bourbon :arrivée premier Gulllaume d'Orange 1689 del'Irlande. Révolte
CENTRE AUSTRALE EUROPE DE BANDE SAHÉLO-SOUDANAISE XVII AFRIQUE L'EST AFRIQUE ET AUSTRALE AFRIQUE EUROPE MADAGASCAR GUINEENNB ET BANDE SEPTENTRIONALE ATHIQUE ET
RESTE DU MONDU MONDE
1690 Les fondent Cabot Anglais lors del'atta1699 Défaite delaflotte ala1692 DE Mort deOhangamire 1896 ÉDIT CHINOIS TOLÉR VIS V française S ens. VIS OU de Hougue. de sena. CHollandais HRISTIANS que 1693 Les Pon Naissance d'El prennen 1693 fondi qui Madjoub lathéocratie d'El Damer. chéry. 1696 Mort deJean Sobleaakl. comme roi de : Board 1690 Pedro IVIntronisé 1696 Lonirn ont ofTrode Plantations. Salvador. San 1697 Traité deByswlck. 1697 Beetttotlon dePondlch 697Égypte findugouvernement du1697 OseI Tonton monte sur letrône Pacha. achanti. des Puissances ». Début duSiècle 1698 Les évacuen Saig 1698 LeDPoncet r passe anSennu, Cambodgiens 1698 d'André Exploration Brue JusdeMombasa etSokotora confinent delaFalémé.Prise parla qu'au Arabes d'Oman. Délaite duDenkyera àlabataille 1699 deFeyasi. XVIIIe 1700 Lonira :Fondation delaS.P.G. bataille deNarva. 1701 Traité deL'Atiento. delaConfé1701 Osel Toutou fondateur Guerre delasuccession d'Espagne. des Dendération Achanti, vainqueur kira. LA «SAINT 1706 DONA 1702 Pierre LeGrand enFinlande. 1702 BEATRICE, 1702 dufort en Abandon Saint-Joseph ANTOINE » CONGOLAISE. Galam. 1703 Traité delord Metouen entre traite avec :Hadj 1705 Alger Mustapha etlePortugal. l'Angleterre l'amiral Blng. anglais leGrand Pierre fonde Saint-Pétersbourg. 1704 de G ibraltar. deJésus leOrul Occupation :Mort 1704 Ethiopie 1706 deneutralité entre Traité 1706 Tmii ben Ali seproclame :Hussein Français duSénégal etAnglaiB deGambie. bey. 1707 Acte del'Angleterre 1707 deLuang d'Union avec rot Kitaarath, Prab l'Ecosse. durègne Oran.1708 :débnt évacuent 1708 Lee Dahomey d'AgaEspagnols dja. 1709 Pedro IVreprend S.Salvador. 1709 Bataille dePoltava. l'Ile abandonnent 1710 Les Hollandais Maurice. andey 1711 :leSultan accorde Alger depacha. letitre d'Alger ren:Ahmed Karamanll Tripoli Bey verse lepacha. 1712 Bataille deDenain. 1712 Mort d'Osé! Toutou. Débnt durègne deBiton Conllbaly. finàla1713 Laos 1713 Traité d'Utreoht met divise en3royaum Terre-N et desuccession guerre d'Espagne (1701L'Angleterre reçoit l'Aeadle. 1713). deBastatt avec qui 1714 Traité al'île l'empereur. André Brile revient auSénéLes 1714-1723. 1714 Français Maurice Pierre leGrand laFinlande. occupe îledF e rance. devient gal. DBS RIT Chine :CONDAMN 1716 Mort deLouis XIV. 1716 Karamanll 1716 :Ahmed Tripoli Bey Révolte del'Ecosse. PAR ROUX. avec laTurquie. rompt CHRIS 1717 INTERDICTIO DU ducafé 1717 Introduction àlîle . EN OHINE.. Maurice. 1718 Mort dePedro Orlé IV. 1718 Fondation delaNouvell 1718 Mort XII deSuède. deCharles Les Turcs cèd Traité dePassarowitz. laHongrie. toute l'Impitoyable 1719 : Bacaffa Ethiopie deLaw. 1720 Faillite des Evhé de Traité v.1720 apartir 720 Dispersion franco-tripolitaln. Fin des duNord. guerres Nuatja. Les Russes annexent laLivonie. 1721 Fokou Fuite delaReine vers 1721 l'Ouest. Achanti :avènement Ware. d'Opokon aux Arguln Français. Bokor an 1722 Fin durègne d'Ahmed Darfour. d'Al1724 :Agadjn Dahomey s'empare lada. 1726 tsarine. Catherine Ire LecdeLouis XV etdeMarie Mariage sinska. DE 1726 deMontevid 1726 YOTAQK GULUVBR. Fondation Anti latredwtion ducaff oui 1726 1727 deSavl. :mort deMoulay Ismoll. . u.m Maroc 17)7 Agadla s'empare 1738 Les reprennent Portugais Mom de des 1 780 de Arabes basa ; apartir lacôte sur Mascate s'Installent orientale
DE L'EST AFRIQUE AFRIQUE BANDE SABBLO-SOUDANAISE xviii EUROPE CENTRE ET AUSTRALE AAUSTRALE FRIQUE MADAGASCAR GUINEENNEET ET BANDE SEPTENTRIONALE AFRIQUE dutraité francoRenouvellement 1729 tripotitain.
du 1730 ; Fondation Madagascar delacôte Kat. Betsimisaraka nume
DU RESTE MONDE
1730 deChan Duplelx gouverneur nagor. 1731 dans l'Ouest Canad LaVerendrye Mort Les Oran. 1732 1732 d'Agadja. Espagnols reprennent 1733 Election deStanislas LeczinskL auQaiam. dePelays Assassinat 1736 Guerre La 1736-40 Bourdonnais gouvernant russo-turque. deFrance. l'Ile LS FRERE MORAVE 1117 GEORO SOHMIDT JACOB PROTTEN FRERE 1737 LE MORAVE rasT ÉVANGÉLISER LES HOTTENTOTS. DE ALA COTE L'OR. David auSénégal. 1739 Pierre 1740 Marie-Thérèse d'Auempereur triche. il :Legouvernent 1741 Côte orientale sedéclare Mombasa, Mairui, Indépend'Oman. dant 1743 del'Inde Duplelx gouverneur 1743 Trudaine telPonts et organise Chaussées. Badi 17 Victoire dusultan 1744 Foung II. sur lenégus Jésus àlaFrance. 1746 Les Seychelles LES FRÈRES MORAVES SONT EXPUL!SA DE COLONIE LA DU CAP. 1747 Les leKordeBataille deFontenoy. du1747 :Djoda libère son Foung conquièrent OuadaA 1747 pays fan. tribut duDarfour. deKilwa orientale :Révolte Côte deOui:Tegbessou s'empare Dahomey contre 1748 L'ESPRIT Oman. DES LOIS. dah. 1748 Paix d'Aix-la-Chapelle. r. 1780 : Fondation de B ihé Bahat» Angola 1760-77 v. 1 760 des Ministère Fombal Ware. par auPortugal, mort royaumes 1760 Achanti : d'Opokou Apogée n chasseur Lounda. 1760 DIDEROT l'ouest deMadagascar. dans ENTREPREND L'ENCYCLOPÉDIE. deKaramoko 1761 Fouta-D :mort jalon . Alfa. vu1762 :les laKrae Motambique Accord définissant possessions SÉNÉ1762 porLE 1763 MICHEL ADANSON d'Albanais. QUITTE 1762 :révolte Tripoli orientale la tone Angalses d'Afrique sont détaaunord duCap port» Delgado, GAL. ehées deGoa. ansud. gaise delaBonIleBourbon :Mahé 1763 1764 août ta:Naissance d'Ousmane Inde. deDuplelx. 1764 11 Rappel comme Dumasgoudonnais Fodio. remplace Canada :Assassinat deJumonv dan 1768 Kouliverneur. Tremblement deterre deLisbonne. 1765 deBiton 1766 Bambara :mort des Acadiens les Déportation par Anglais. baly. 1766 Montcalm auCanada. Tunisie les 1756 par Algériens. conquise 1757 Bataille de Rossbach. 1757 Clive aCalcutta. : Ali serend indé1767 Egypte Bey deConstantinople. pendant Maroc : règne deMoulay Mo1767-90 hammed. etGorée 1758 Défaite àCarillon 1768 Saint Louis anglaise pris parles Anglais. 1769 DES EXPULSION DU JESUITES POR1769 Bataille des d'Abra plaines ET TUQAL D SES E COLONIES PAR TOMBAL. Mort de et Montcalm Wolfe. àlaConfait retour L'Ile Bourbon 1764 ronne. 1762-96 Catherine IIdeRussie. 1763 Traité aux deParis met fin àlaguerre Saint-Louis duSénégal cédé 1763 Traité deParis. Inde, 1763 Canada, de ans. sept Anglais. Gorée redevient français. 1764 fronce :DISSOLUTION DES JÊSUI1764 LaLouisiane estcédée 1764-77 Osel aTES Kodjo. TES, pagne. Victoire des sur leGrand Anglais Mog 1766 II IuCongo d'Autriche. Joseph empereur ; DÉBUT DE L A M ISSION 1766 Rattachement delaLorraine de àla1766-69 deBougalnv 1766-87 Bambara: règne NgoloDlara. Voyages FRANÇAISE DE KAKONGO. France. 1767 EXPULSION DES JESUITES DE DE NAPLES ET FRANCE, D'ESPAGNE, DU PARAQUAT. Fondation 1768 LaCorse 1768 devient DES FRERES 1788-79 2eet3evoyages deCook 1768 NOUVELLE TENTATIVE deMahé aux Seychelles. française. 1er, :Sennar, Londres : Création EN 1768-73 d'un GOLD-COAST. secrétariat MORAVES Ethiopie voyage ,de James d'état aux écossais colonies. l'explorateur Bruce de fusJesus 1769 :lyoas, 1769 Les Turcs sont vaincus Cath 1769 Maroc :Les sont chassés Ethiopie par Portugais II est rine IIà Khotin. étranglé. deMazagan. avec LaPorte. :Ruptnre .MI, 4 Ni. Egypte du «** Sud :Arrivée à des introduit Pierre Poivre Trekboers 1770 «Massacre »deBoston. Gao. 1770 1770 REGENCE FONDATION DE 1 770 Lee prennent D'ALGER, Touareg Great Relnet. de et n oix clou» de Francegirofle LA A. RAMANIY 1771 L'armée Damas. occupe égyptienne 1772 Russie 1772 Bruce auSennar. :Écrasement des d'Ali avènemont 1772 mort Cosaques. Bey, Egypte: SENTENCE DE LORD MANSFIELD. deMohammed Abou Dahab.
DE L'MT AFRIQUE AUSTRALE AFRIQUE CENTRE EUROPE SAHÉLO-SOUDANAISE BANDE EUROPE XVIII M ADAGASCAR AUSTRALE ET ET GUINÉENNE A FRIQUE ET B ANDE SEPTENTRIONALE AFRIQUE :tentative 1773-76 Madagascar de la :Mort deTegbessou. yowskl. 1774 Dahomey
„RESTE DU MONDE
1773 Rome :SUPPRESSION DES JESUITES. 1774 PENSEES SUR L'ESCLAVAGE DE 1774 Acte deQuébec ». WESLET 1774 Mort deLouis XV. 1776 À. duSud :Premières rencontres Parmentier lapomme de 116 diffuse etKhosa. terre. être Boere :le sultan orientait de Congo 4Juillet 1776 Côte : L'ABBÉ PROVART PUBLTE 1776 Toro. Déclaration des Torodo auFoute 1778 Abdelka d'indép l a detraite lemonopole accorde ouLOANOO. dance ouHISTOIRE des Etats-Unis d'Amériq Morice. çais deMayas Premier 1777-78 voyage 1777 Saratoga. l'Imerins. :CONVERSION DU CHEF DE 1778 Traité d'alliance franco-américain. IJ8 Angola BUPFON :LES DE LA NATURE. ÉPOQUES du Sud :1re cafre. 179 Â. Saint-Louis. guerre Lauznn 1779 reprend Gorée. Les réoccupent Anglais 1780 Mort deMarie-Thérèse. leKanem annexe Ouadal :Djoda 1780 irlandaise l'autonomie. Agitation pour oriental. de L e 111-88 Vaillant. 1781 Yorktown. Voyages LT AIJANITA. Versailles. DE FONDATION 1781 1783 Les Gilbraltar. 1788 Traité deVersailles. et St-Louia Anglais gardent de 1783 Traité INVENTION DES MONTGOLFIERES. àlaFrance. Gorée rendus PREMIER BATEAU AVAPEUR DE JOUFFROT D'ABBANS. 1784 Pitt's Indla Bill. d'Ibrahima : Mort Foula et1784 depeste Djalon :épidémie 1784-86 Tripoli. Sortfamine. 1786 leBOUT deLaPéronse, avec Voyage 1786 Traité Repentigny GAZETTE DE MONTRÉAL Saloum. Mort de : 1788 Madagascar Bàeuyon Avènement du Sud :Naissance deTchaka. 1787 PAUL ET 1787 VIRGINIE.1787 Traité entre laFrance etl'Anna dupremier Madagascar A. :Arrivée Sierra Leone 1787 :Tentative pour turque 1787-88 Egypte Installation enAustralie libérée, anglaise ottomane. Égypte: établir DE 1788 FONDATION L'AFRIOAN ASSOcontingent d'esclave. Niamwui. CIATION. SOCIÉTÉ DBS AMIS DES NOTAS. 1789 Révolution du des B.TJ. nommé française.1789 Washington président Blanchot 1789 gouverneur Extraction dusucre delabetterave. Sénégal. 1789-90 Révolte delaBelgique etreconautrichienne. quête Tunis :Bey 1790 indépendant. de Mohammed. MortHdi FONDATION DE LA CM. s.(CHURCH 1791 1791 Révolte des esclaves enHaïti. Oran. abandonnent Lee 1791 Espagnols DETOUR DES FRÈRES MORAVES AU MTSSIONART Navires russes refoulés auJaSOCIETY) 1791-92 31-6-1792 FRÉDICATION DU SAVETIER AP. pon. OARET. DE PRES 1792 NAISSANCE DES SENOUSSI 1792 Valmy. MOSTAGANEM. 1793 deLouis Exécution XVI. elMlrghanl. d'Othman 1793 Naissance Ail 1793 L'aventurier Borghoul prend Tripoli. 1794 Décret surl'abolition del'esclavage. deKosclusko. Révolta obtient lacolonie du1795 L'Angleterre FONDATION DE LL AM. . s. 1796 delacote ouest deSumat leNiger a Cession découvre Pars 1795 Mungo XaramanlL :Youtoui 1796 TripoH Les annexent laLituanie. les Hollandais aux Russes par Anglais. Ségou* du S ud : Proclamation do son donne l'indépenDIal IndépenLeLébou Dlop de G raaf Roinet. Vert. delaRépublique duCap àlacommunauté dance 1796 FONDATION DE LA holMISSION ECOS1796 dugouverne Capitulation Leone 1796 Sierra MISSIONAIRES SAISE. landais deOeylan. METHODISTES. enItalie. Bonaparte Paul I"tsar. Omar. 1797 Lee dela d'El s'emparent 1797 Naissance Anglais Had] Trinité Espagnole. Formio. Paix deOampo L.M. S.ATAHITI. M : LA Motambique Expédition Lacerda. 1798 Prise deRome. deBonaparte. :Expédition 1798 Egypte 1798 Accord entrel'Anglesterre etsultend'Oman. DES HOTTBNTOTS 1799 consul. 1799 ViaNam :Ngnyen Anh aidé des Bonaparte seprononce 99 1er EVANGÉLISATION : Yousouf 1799 Tripoli Nhon. HOLLANDAIS Qui Français prend contre laFrance. DER MISSIONNAIRES
L'EST DE AFRIQUE MISSIONS SAHÉLO-SOUDANAISE BANDE AFRIQUE AUSTRALE AFRIQUE CENTRE AUSTRALE xixe MADAGASCAR MASCABHOSE BANDE GUTNÉENNE ET SEPTENTRIONALE AFRIQUE
DU MOND EUROPE RESTE
1800 ABERLIN DU 1800 FONDATION Louisiane restitué àla Marengo. 1800 PREMIER INSTITUT MISSIONFrance. deKléber. :Assassinat 1800 14Juin NATRB. 1800 Protectorat sur anglai Haiderabad. Toussaint Louvertu prés dent d'Haïti. letraité :Menou 31août signe 1801 1801 Révolte deSaintd'évacuation. mingue. àlaTurquie. rendue 1802. Egypte transcon1802 105-1811 d'Amiens. Traité Voyage tentai des deux pombeiros. 1)3 LES MISSIONNAIRES DE 1803 Les Ouahablte occup Decaa du 1803 Arrivée général S'INSTALLENT AU t. V s. . les villes saintes d'Arabi S.A. Début duconflit Tripoli-U. 1803 1803 vend laLou Napoléon siane. d'Oussainte delaguerre 1804 Débnt 1805 Austerlite. Fodio. dan man sur monte Sald 1806 1805 Seyyid Trafalgar. Ail d'Egypte. Méhémet 1805 pacha , d'Oman. Les au Anglais Cap. la Un 1808 ratage établit l'auc yclone Dendo Mallam 1806-1810 Bourbon. del'Ile auNoupé. decafé torité peule CM. . S. LA DE MISSIONNAIRES 1806 LES 1807 MARTE LEONE. JAVOUHEY FONDE 1807 Exil duBrésil delafaEN SIERRA ARRIVENT deSierra LA CONGRÉGATION DES SOEURS mille delacolonie Fondation royale lesAnglais. 1807 portugais refoule Ali Méhémet 1807 DE S AINT-JOSEPH. Leone. alafrontière des hostilités 1807 Reprise 119 Proclamation dela M Algérie-Tunisio. 1809 1809 Les iode prennent Charte deSokoto. Anglais des Hottentots. Bello sultan Mohammed L'île 1810 BOARD OF 1810 Traité drigues. Bourbon AMERICAN 1810 Insurrection des colon anti-esclavagiste del'Ile par fait 1810 Prise duOuadal, COMMISSIONERS FOR FOREION sultan 1810 anglo-portugais, espagnoles. Saboun, les de Radama Avènement MISSIONS. lapiste deKoufra.glais. reconnaître Ier. Les EN 1811 s'emparent Anglais WESLEYENS le1811 MISSIONNAIRES Karamanli conquiert 1811 Yousouf et IleMdel'île aurice) France (rebaptisée LEONE. SIERRA Fezzan. Seychelles. lesvilles Ali Méhémet conquiert 1812 1813 PREMIERE SOCIÉTÉ MISd'Arabie. saintes SIONNAIRE WESLEYENNE. 1813 DEDAVID NAISSANCE LmNG8TONB. «Cession a l'Angleterre 1814 MISSIONN DELA la C olonie du deSierra CM. S.EN NOUVEL ZÉLA Cap. Mac 1814 gouverneur deMahCarthy Début durègne Tunisie: 1814 Affaire deSlagtersnok 1815 DES 1815 Traité de RÉTABLISSEMENT Waterloo. J moud Bey. àFès. Leone. Une B ourbon de l a de (U«| Boucherie). Restitution 1815 MISSIONS ETRANGERES DE FAVienne. Mort deTidjani 1816 alaFrance. 16 RIS. nion) S.A. duconflit 1815 Fin Tripoli-U. Echec del'expédition 1816 OBLATS DE MARIE IMMA1816 del'Ar Indépendan » l'embouchure du C ULÉE M. gentine. (o. I.). iJackey 1816 DE MISSION BALE. 1817 DE LA RÉORGANISATION aBathurst. PROPAGANDE. s'installent Les 1817 Anglais Les possession 1817 reprennent Français duSénégal. à KoudeBowdich Ambassade 1817 massi. l'autoMallam Alimi 1817-1823 établit ATchaka succède àDinsur Horln. rité peule de clou wayo. du auDaho1818 Introduction1819 Ghéso duroi Avènement 1818 5e cafro. guerre deMolllen.Zantibar. 10gouverneur Exploration mey. Tovar de1819 delaCo MISSION RHÉNANE. 1819 Indépendan 19 Lelance I une ue lebrak duOualo lombie. polUiq avec 1819 Traité développement économique (Sénégal). Angola. :3000 colons britanarrivent àPort-EllsoÉCOLE PREMTÈRE 1820 duSoudan par ia. 1820-1824 Conquête MISSINAIRES TANANARIVE. l'Egypte. duMe .11821 Indépendan dernier du roi 1821 Soumission Venezue quo, Pérou, entre denon-agression 1821 Traité „Ml Sennar. atut 1822 1833 duBrés PAULINE JARIOOT FONDE delaCrète. 1822 Soulèvement Indépendan etlaTunisie. l'Algérie signé 1832 Traité Moresby L'OEUVRE DE Américano-Libériens LP AROPAGATION 1822 Les LES RUINES premiers DÉCOUVRE OATLLAUD 1822 Farquhar. S ir Robert et DE LF AOI. àMonrovia. Sald débarquent MEROE. DE SOCIÉTÉ DES ÊVANMISSIONS APARIS. GÉLIQUES est 1823 L'acide sléarique deDenham, del'huile depalme extrait 1823-1826 delaCrête. Exploration Ail Méhémet 1823 s'empare (Chevreut). Olapperton. Oudney,
DE L'EST AFRIQUE SAHÉLO-SOUDANAISE BANDE MISSIONS EUROPE RESTE xrxe DU AFRIQUE CENTRE AUSTRALE AFRIQE AUSTRALE MONDE MADAGASCAR ET BANDE SEPTENTRIONALE AFRIQUE GUINTNÉENNEMASCAREIGNES
CHEZ MISSION RHENANE 1824 SOCIETE DM LeCommandant 124 MISSIONS A 1824-26 Owen deKhartoum. 1824 Fondation enPetite 1824-1835 Révolte Eabylie. 1HOTTENTOTS AU N ORDBERLIN. àMombasa. l'Union Jack DU CAP. 1896 BAPTEME DESAMUEL 1825-1827. L'armée deMéhéCROWTHER.met Ali l'insurrection réprime grecque. 1826 Les Peuls duMacina prennent Tombouctou. | entre Sokoto hostilités 1826 Arrêt des etleBornou. 1)7 deMoselekatsé Départ COAST BALE EN GOLD 1827 DE MISSION Assassinat deTchaka ses 1828 Avènement deRanavalona àTombouctou. 1828 René Caillé demi-frère 1itton Dingaan. 1829 Laquinine estpréparée Pelletier par etCoeentou. Lean enGold 1830 deMao Monarchie deJuillet. 1830 Arrivée franco-tunisien. :Traité 1830 8août delaBelgique. Indépendance Ooast. Prise d'Alger. établissent le 1830 frères Lander Les tracé ducours duNiger. Expédition deMonteiro 1831 Révolte desesclave avec 1831 a 1831 Fezzan rompt Tripoli. au X azembé. LaJamaïque. Gamitto Dingaan les 1831 attaque deMoshesh. à transférée d'Oman 1839 Capitale :Fin du de Y ousouf. 1882 r ègne Tripoli àZanzibar. IX Mascate MISSION DE BERLIN CHEI 1834 estaboli L'esclavage Deemichela. 1834 Convention ET A U Q RIQUAdans lescolonies KORANA anglaises» OCCIDENTAL duGrand 1834 premier départ trak Piet Retlaf). (1er déc.) Émmoipation de 35000 esclaves. 1834-1835 guerre cafre. explora 1835-1836 Combes etTauuder 1835 Mort d'EI Kanemi (Bornou). deTripoli. 1835 Les Turcs s'emparent AAGOUÉ larégion d'Ankober. 1836 CHAPELLE CATHOLIQUE (DAHOMEY). DE 1836 L'ALLEMAGNE 1816 : SadeBanLisbonne MIISION DU NORD deira déclare (BRÊME). illégale l'exportation d'esclaves. à unagent 1837 installe Avènement delareine Lamaison 1837 Révolte desCanadie Régis 1887 Traité delaTafna. 1837 „ i Victoria. Ouidah. français. Clanv.) Assassinat de Ali 1 838 ÉVÊCHÉ Bouet sur l a 1888 de M éhémet D'AMER. de 1 838-1839. 1838 Voyage M8wJ